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Discret 11

Discret 11 (acronyme de « DISpositif de CRyptage Électronique de TĂ©lĂ©vision ») dĂ©signe un systĂšme d'embrouillage / cryptage vidĂ©o analogique français ou accĂšs conditionnel, destinĂ© Ă  la tĂ©lĂ©vision Ă  pĂ©age. Cette dĂ©nomination dĂ©signe Ă©galement le dĂ©codeur qui exploite ce mĂȘme type de contrĂŽle d'accĂšs.

Simulation informatique (CGI) du cryptage discret 11

ExploitĂ© par la chaĂźne Canal+ Ă  compter de son lancement, le et jusqu'Ă  l'arrivĂ©e de la tĂ©lĂ©diffusion numĂ©rique en 1995. Le responsable technique du projet est l’ingĂ©nieur français Sylvain Anichini Ă  partir de 1983. L'objectif qui lui est imposĂ© par Canal+ consiste Ă  mettre en Ɠuvre un dispositif au coĂ»t de revient Ă©conomique et rapidement industrialisable.

Cette stratégie rend plus simple le développement de d'équipements ou « décodeurs pirates » dont la chaßne payante fait les frais entre 1984 et jusqu'à l'abandon du systÚme pour son successeur, le décodeur « Syster » utilisant le cryptage Nagravision et rétrocompatible Discret 11 pour la phase de transition.

Le Discret 11 est exploité pour la norme française à 625 lignes noir et blanc et couleur SECAM par plusieurs chaines à péage, notamment Canal+, Canal J, Canal Jimmy et Santé TV lors de leur télédiffusion par voie terrestre, satellite ou cùble. La déclinaison Discret 12 est notamment exploitée par les chaßnes publiques italiennes de la Rai (audiovisuel) sur les satellite Hot Bird pour embrouiller certaines émissions car mieux adapté au format 625 lignes exploitant le codage couleur PAL. Au Royaume-Uni, la télévision publique BBC l'exploite d' à pour la diffusion de certains programmes médicaux[1].

Le décodeur est équipé d'une prise péritélévision à relier au téléviseur ou au magnétoscope et d'une seconde sortie vidéo / audio de type DIN. Il n'exploite qu'un signal audio monophonique du fait des restrictions de la norme de télédiffusion terrestre française « L » en 1984. La norme L de cette époque exploite uniquement la modulation d'amplitude monophonique. Il faudra attendre 1993 pour que les émetteurs terrestres français exploitent en complément, la norme numérique audio Nicam permettant la stéréophonie ou l'audio bi-canal. Par satellite, le groupe Canal+ et les chaßnes cryptées qu'il diffuse en Discret 11 ou Nagravision exploitent en complément, des pistes audio en clair et non embrouillées. Cette diffusion nécessite un paramétrage du récepteur satellite et un raccordement direct sur le téléviseur ou les périphériques audio associés.

Historique

Conçu et élaboré dÚs 1983 par le technicien de Canal+ Sylvain Annichini et ses équipes, le Discret 11 vise à relever le défi d'une formule industrielle à coût de revient compétitif et à s'adapter aux contraintes de la télédiffusion analogique terrestre et la norme française L à 625 lignes et au standard couleur SECAM.

DĂ©veloppement et lancement commercial

AprĂšs l'Ă©tude puis l'abandon de divers dispositifs de chaĂźnes Ă  pĂ©age amĂ©ricaine ou Ă©trangĂšres pour des motifs de coĂ»t de revient et de brevets / licences, la direction du dĂ©velopppement de Canal+ impose un dĂ©lai de dix mois Ă  ses ingĂ©nieurs pour concevoir et lancer la fabrication en prĂ©-sĂ©rie, d'un systĂšme opĂ©rationnel et compĂ©titif[2]. La technologie utilisĂ©e est le produit d'un appel d'offres remportĂ© par Philips qui propose de livrer un dĂ©codeur pour 100 Francs[3] soit environ 15 â‚Ź. Pour accĂ©lĂ©rer la sortie des dĂ©codeurs en masse, au lieu d'un design spĂ©cifique, le fabricant RTIC (Radio Technique Industrielle et Commerciale) exploite le boitier plastique d'un rĂ©pondeur tĂ©lĂ©phonique de la mĂȘme marque.

L'abonnement Ă  Canal+ en 1984 nĂ©cessite outre l'abonnement du mois en cours et du suivant, des frais de dossier et surtout une caution de 500 Francs pour le dĂ©codeur Discret 11, soit environ 76 â‚Ź, ce qui est une forte somme pour l'Ă©poque, le salaire minimum (SMIC) Ă©tant voisin de 660 â‚Ź Ă  cette pĂ©riode. LĂ©o Scheer, l'un des fondateurs de Canal+, dĂ©clare en novembre 2014[3], qu'au dĂ©marrage de la chaine, la direction place la manne des cautions de 500 F en titres boursiers, ce qui contribue au financement du lancement de la chaĂźne, bien que cette pratique soit strictement interdite.

Le piratage survient dĂšs le lancement

Le dĂ©codeur est piratĂ© dĂšs son lancement. Ainsi, le magazine d'Ă©lectronique français Radio Plans souhaitant informer ses lecteurs belges, suisses et monĂ©gasques qui ne peuvent pas s'abonner Ă  la chaĂźne française, publie dans son numĂ©ro de dĂ©cembre 1984, les plans d'un dĂ©codeur pirate basĂ© sur la dĂ©tection des dĂ©buts de ligne, avec en couverture la mention « Joyeux NoĂ«l ». Le magazine est saisi sur dĂ©cision du TGI de Paris mais il reste disponible hors de France ainsi que pour des abonnĂ©s français l'ayant dĂ©jĂ  reçu et quelques points de vente franciliens[4]. Du fait du trĂšs large impact de cet Ă©vĂ©nement dans la presse et dans les mĂ©dias nationaux, des fac simile du numĂ©ro non censurĂ© sont alors diffusĂ©s (exemplaires distribuĂ©s avant la saisie du magazine) et les plans sont largement diffusĂ©s, sous forme de photocopie. Le nouveau tirage du numĂ©ro 445 de Radio Plans diffusĂ© en France, un article « censurĂ© » dĂ©voile en page 43, que le dĂ©codeur Radio Plans est une « rĂ©alisation originale » et qu'ils ont effectuĂ© leur « travail de journalistes techniques ». En France, le journal le quotidien de Paris republie le mĂȘme schĂ©ma du dĂ©codeur quelques semaines plus tard.

En 1985, une contre-mesure censée rendre inopérants les décodeurs pirates basés sur le principe du décodeur publié dans Radio Plans n'impacte pas longtemps ses utilisateurs, car plusieurs adaptations ou nouvelles versions apparaissent rapidement sous le manteau.

On estime que le taux de piratage du Discret 11 serait Ă©valuĂ© entre 4 et 5 % des abonnements, voire infĂ©rieur. Toutefois, aucune Ă©tude fiable basĂ©e sur un vĂ©ritable sondage n'a jamais Ă©tĂ© officiellement rendue publique[5]. Bien au contraire, dĂšs 1985, Canal+ se plaint publiquement de ce flĂ©au qui freine son succĂšs commercial, engage une lutte fĂ©roce contre le piratage, multiplie les plaintes et obtient mĂȘme une loi « anti piratage » inĂ©dite en Europe, visant Ă  consolider ses droits et Ă  appliquer des sanctions judiciaires trĂšs significatives pour les contrer.

En France, Canal+ exploite Discret 11 comme premier systÚme de chiffrement avant de le remplacer progressivement à partir de 1995 par le décodeur Syster, lequel reste en fonction jusqu'au début des années 2000.

À la fin des annĂ©es 1980, la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision nationale publique FR3 diffuse des Ă©missions destinĂ©es Ă  un public travaillant dans le secteur de la SantĂ© (STV ou SantĂ© TĂ©lĂ©vision) d'une durĂ©e d'une heure (les samedis matin de 7 h Ă  8 h et rediffusĂ©es la nuit du jeudi Ă  vendredi entre 4 h Ă  5 h) en codĂ© et en Discret 11 comme Canal+ car ces Ă©missions diffusent un contenu qui n'est destinĂ© qu'aux professionnels de santĂ©[6].

Saisie manuelle du code mensuel

décodeur discret11 de Canal+
Le décodeur discret 11

Le nom « Discret 11 » est choisi car le systÚme de chiffrement utilise un palmarÚs de 211 combinaisons, soit 2048 codes possibles. En réalité, il en existe 2047 car la télédiffusion en « clair » fait partie de ces combinaisons.

Discret 11 exploite un systÚme de chiffrement de l'image par décalage de ligne vers la droite. Les lignes de l'écran sont affectées d'un retard pseudo-aléatoire de 0, 902 ou 1804 nanosecondes, grùce à deux composants électroniques de type lignes à retard.

Le décodeur est pourvu d'un clavier numérique permettant à l'abonné, de saisir un code chaque mois, qu'il reçoit par courrier postal dÚs lors qu'il est bien à jour de son paiement. Ce code valable une trentaine de jours est directement lié au numéro de série unique de chaque décodeur.

Un « code universel » est spécifiquement programmé lors de la diffusion entre le dernier jour du mois à minuit et le premier lundi du mois suivant à 9 heures du matin. Ce code particulier ne nécessite pas d'entrer un code dans le mois en cours et évite les plaintes d'abonnés en cas de retard postal pour recevoir leur code personnel.

Principes techniques

Lorsque le signal diffusé par la chaßne Canal+ est crypté, le décodeur détecte lors de l'analyse du signal vidéocomposite véhiculé par la prise Péritélévision du téléviseur, la présence de signaux « forcés » au niveau du noir et du blanc, sur les derniÚres lignes (310 et 622). La ligne 310 est mise au blanc toutes les 6 trames et permet au décodeur de se synchroniser et d'enclencher le déchiffrement. La ligne 622 sert au décodeur à calculer le polynÎme à exploiter (6 possibles) pour initialiser le générateur pseudo-aléatoire.

Le mode de désembrouillage est alors déverouillé et l'image s'affiche en clair, avec les artefacts caractéristiques du cryptage sur les bordures de l'image. DÚs lors qu'un code erroné est saisi, les retards ne sont pas annulés et les lignes sont redécalées en superposition au signal crypté envoyé à l'émission, entrainant un « surcodage ». Seul le son reste décodé dans tous les cas.

Le code mensuel est remplacĂ© le premier lundi de chaque mois, Ă  9 heures du matin. À l'Ă©mission le codeur retarde les lignes de 0, 902 et 1804 nanosecondes. Lors de la rĂ©ception, le dĂ©codeur annule ces retards en harmonisant les lignes sur la valeur de 1804 nanosecondes de retard. Les 6 polynĂŽmes correspondent aux 6 niveaux d'audience, ce qui permet de segmenter les abonnements en diffĂ©rentes formules ou options, comme, « CinĂ©ma + Sport » ou bien « Sport + Documentaires ». Cette fonctionnalitĂ© n'est cependant pas exploitĂ©e par la chaĂźne.

Non codĂ©, le signal audio est Ă©lectroniquement transposĂ© en frĂ©quences et sa phase inversĂ©e (12,8 kHz). Pour activer la restitution du son, le dĂ©codeur dĂ©tecte le niveau de blanc et de noir des lignes 310 et 622, en procĂ©dant au traitement du signal vidĂ©o.

Le traitement du signal audio est entiÚrement analogique, mono canal et ne procure donc pas de stéréophonie. Spécifique à la télédiffusion par satellite, un signal stéréophonique est disponible sur une sous-fréquence audio (sous-porteuse) car retransmis en clair en permanence. Un paramétrage / mémorisation à effectuer sur le récepteur satellite est nécessaire afin de bénéficier d'un signal audio conforme.

EnvisagĂ©, le systĂšme le plus sophistiquĂ© du dĂ©codeur comprend l’envoi par la poste de tickets magnĂ©tiques, pour mettre Ă  jour les droits et la dĂ©coupage/inversion de la ligne vidĂ©o Ă  un point choisi pseudo alĂ©atoirement. Ce principe est employĂ© ultĂ©rieurement pour les contrĂŽles d'accĂšs videocrypt et eurocrypt, notamment.

Avant sa mise en location, chaque dĂ©codeur Discret 11, est prĂ©alablement paramĂ©trĂ© manuellement pour mĂ©moriser le numĂ©ro d’abonnĂ©, dans sa mĂ©moire. L'opĂ©ration consiste Ă  shunter et rĂ©aliser une liaison directe ou court-circuit de la broche 1 de la prise DIN situĂ© Ă  l’arriĂšre du coĂźtier, avec la masse de la mĂȘme fiche[7]. Ainsi, Ă  chaque numĂ©ro d'abonnĂ© unique correspond une table de codes pour activer chaque mois, le processus de dĂ©sembrouillage Ă  condition de disposer des chiffres corrects envoyĂ©s par courrier, par la chaĂźne payante. Le code mensuel saisi manuellement sur le clavier du dĂ©codeur est diffĂ©rent et spĂ©cifique Ă  chaque dĂ©codeur.

Chiffrement et niveaux d'audience

Le traitement du signal permet au dĂ©codeur d’extraire un code sur 16 bits, 6 niveaux d’audience sur 6 bits ainsi qu'une clĂ© de contrĂŽle sur les 2 derniers chiffres, pour s’assurer que le code tapĂ© ne contient pas d’erreur de saisie. Dans le signal vidĂ©ocomposite, le dĂ©part de cycle est confirmĂ© par le passage au blanc de la ligne 310 en trame n et l'un des voyants du dĂ©codeur reste alors vert en permanence.

Des niveaux d'audience sont exploitĂ©, notamment pour anticiper par exemple l'utilisation du dĂ©codeur pour plusieurs chaĂźnes diffĂ©rentes exploitant le cryptage Discret 11. Ainsi, Ă  la fin des annĂ©es 1980, une diffusion hertzienne de la chaĂźne jeunesse Canal J est envisagĂ©e sur un septiĂšme rĂ©seau hetzien puis abandonnĂ©e fin 1990[8]. Ainsi, en novembre 1990, la chaĂźne Canal J exploite le Discret 11 et partage son antenne avec la chaĂźne Canal Jimmy, plutĂŽt rĂ©servĂ©e aux jeunes adultes et aux sĂ©ries[9]. De mĂȘme, en 1990, la chaĂźne SantĂ© TĂ©lĂ©vision (STV) exploite le Discret 11 avec une classe spĂ©cifique associĂ©e Ă  cette chaĂźne.

Le « niveau d’audience » exploitĂ© par une chaĂźne codĂ©e peut ĂȘtre dĂ©terminĂ© en visualisant le signal vidĂ©ocoposite cryptĂ© Ă  l'oscilloscope ; la ligne 622 des trames n+1,n+3,n+5 et son passage ou pas au niveau du blanc (0/1).

Le systĂšme Discret 11 exploite jusqu'Ă  8 niveaux d’audience diffĂ©rents de 0 Ă  7 (valeur en n+1)x1+(valeur en n+3)x2+(valeur en n+5)x4, pour permettre des abonnements distincts en fonction des chaĂźnes, des dĂ©crochages Ă©ventuels ou certaines options.

Le niveau d’audience 0 (non clignotement de la ligne 622) correspond Ă  une image tĂ©lĂ©diffusĂ©e en clair.

Le niveau d’audience 1 correspond aux premiers 11 bits du code de 16 bits.

Pour le niveau d’audience 2, on saute les trois premiers bits et on lit les 11 bits suivants.

Pour le troisiĂšme, on saute de nouveau 3 bits et on lit 11 bits, en complĂ©tant par les bits prĂ©sents au dĂ©but du mot de 16 bits et ainsi de suite jusqu’au niveau d’audience 6.

Le niveau d’audience 7 est un code prĂ©dĂ©fini dans le dĂ©codeur en fonction de son numĂ©ro de sĂ©rie, il correspond au codage du mois de novembre 1984 ainsi que celui utilisĂ© entre le premier jour du mois et le premier lundi du mois, Ă  9 heures du matin (heure française), pĂ©riode pendant laquelle l’abonnĂ© doit saisir le code du mois suivant. Durant cette pĂ©riode d'audience « libre » ou « ouverte », l'utilisation d'un dĂ©codeur permet d'afficher la chaine et ce, quel que soit le code saisi au clavier. Techniquement, n'importe quel code choisi au hasard aurait pu convenir pour ce mode audience libre 7. Mais il n'a pas Ă©tĂ© choisi au hasard : le code du mode audience libre est une rĂ©fĂ©rence Ă  l'univers geek au langage leet speak : il s'agit littĂ©ralement du mot « leet » signifiant Ă©lite en anglais, codĂ© en « leet speak » soit 1337.

Discret 12

Une version destinée au marché international « Discret 12 » qui exploite 212 combinaisons, soit 4096 codes possibles est commercialisée par Canal+ à d'autres chaßnes en Europe, notamment pour des transmissions ou liaisons spécialisées. Ce systÚme, visuellement similaire, exploite un codage à lignes à retard numérique rendant le décodeur mieux compatible avec le standard PAL, sans nécessiter de clavier. Le son n'est pas codé. Durant les années 1980 et 1990, il est exploité en télédiffusion analogique par les chaßnes de la RAI, sur le satellite Hot Bird 13°E pour protéger ses droits de diffusion.

Le discret 12 a également été exploité par la chaine suisse TCR (Télécinéromandie), en Belgique sur le cùble par Canal+ Belgique, au Maroc sur la chaine 2M pendant sa période payante[10] (1989-1996) ou encore Stöð 2[11] en Islande.

Le discret 12 contient un mode de codage rétrocompatible discret 11, le mode discret 12 est plus difficile à pirater.

Secrets du Codage

DĂšs janvier 1985, le principe du codage de Canal+ est entiĂšrement dĂ©voilĂ© par le magazine Science et Vie qui titre en couverture de son numĂ©ro 808, « Canal plus : le code est trop facile ! ». Le systĂšme code les images par bloc de 6 trames : pour coder 6 trames qui se suivent, on charge un registre Ă  dĂ©calage avec le mot de 11 bits qui correspond au niveau d’audience :

Registre à décalage, utilisant la fonction XOR, permettant de déterminer les valeurs de retard à appliquer.

Pour ajouter un effet de tremblement visant à rendre moins visualisable l'image embrouillée, une valeur Z qui vaut 0 pour les trames 1,2 et 3 et 1 pour le trames 4,5 et 6 est exploitée.

La table de vérité suivante permet de déterminer les valeurs de retard à appliquer :

Table de vérité du systÚme Discret 11
X Y Z Retard Ă  appliquer Ă  la ligne pour coder
0 0 0 (trames 1 Ă  3) 0 ns
1 0 0 (trames 1 Ă  3) 902 ns
0 1 0 (trames 1 Ă  3) 1804 ns
1 1 0 (trames 1 Ă  3) 1804 ns
0 0 1 (trames 4 Ă  6) 1804 ns
1 0 1 (trames 4 Ă  6) 0 ns
0 1 1 (trames 4 Ă  6) 0 ns
1 1 1 (trames 4 Ă  6) 902 ns

on incrĂ©mente le dĂ©calage 1 715 fois :

Les itérations 0 à 285 affectent les retards des lignes 337 à 622 de la trame 1 (trame paire).

Les itérations 286 à 571 affectent les retards des lignes 24 à 309 de la trame 2 (trame impaire).

Les itérations 572 à 857 affectent les retards des lignes 337 à 622 de la trame 3.

Les itérations 858 à 1143 affectent les retards des lignes 24 à 309 de la trame 4.

Les itérations 1144 à 1429 affectent les retards des lignes 337 à 622 de la trame 5.

Les itérations 1430 à 1715 affectent les retards des lignes 24 à 309 de la trame 6.

En trame 6 réinitialisation du cycle avec le top reçu en ligne 310 (ligne à blanc)

DĂ©sembrouillage

Le décodage consiste à compléter le retard présent dans le signal télédiffusé afin que toutes les lignes soient affectées par un retard de 1804 ns. Elles sont dÚs lors, toutes alignées.

Les attaques contre le Discret 11

Une course entre les pirates et Canal+ s'engage dÚs 1984 et se poursuit jusqu'à l'abandon du codage Discret 11. La chaßne payante exploite différentes contre-mesures pour rendre son codage plus résistant mais avec l'arrivée de composants électroniques évolués comme les calculateurs ou certains micro-ordinateurs, les pirates trouvent réguliÚrement les moyens de contourner ces mesures.

MĂ©thode Radio Plans d'origine

Le top de dĂ©but de ligne est Ă©valuĂ© : si aucun dĂ©calage temporel, le circuit ajoute deux retards de 902 ns. Si un dĂ©calage de 902 ns est prĂ©sent, le calculateur ajoute un second dĂ©calage de 902 ns. Si un dĂ©calage de 1 804 ns est prĂ©sent, rien n'est modifiĂ©. Ainsi, toutes les lignes sont calĂ©es sur 1 804 ns de dĂ©calage et l’image s'affiche en clair.

Méthode Radios Plans améliorée

À la suite d'une contre-mesure de Canal+, les dĂ©buts de lignes ne sont plus mesurables dans le signal cryptĂ©. La solution consiste Ă  mettre en mĂ©moire les retards de six trames vidĂ©o, par l'appui sur un bouton poussoir du dĂ©codeur pirate. Il est conseillĂ© d'attendre une image suffisamment contrastĂ©e. Avec ces donnĂ©es mĂ©morisĂ©es, le dĂ©codeur pirate applique des valeurs de retard pour obtenir toujours 1804ns sur toutes les lignes.

MĂ©thode manuelle/automatique avec un ordinateur (rare crĂ©ation d’une interface vidĂ©o indispensable)

Les retards des 6 trames sont recalés manuellement (pas de corrélation possible dans les années 1980 avec les ordinateurs personnels) et une fois en mémoire, on trouve un compromis visant à obtenir à chaque fois, 2 retards sur toutes les lignes, ce qui est une méthode trÚs longue et fastidieuse.

Des versions plus perfectionnées permettent de programmer le traitement directement sur le micro-ordinateur comme sur le micro-ordinateur EXL 100[12] de chez Exelvision.

MĂ©thode manuelle

Ce type de dĂ©codeur permet de faire dĂ©filer les 2047 solutions Ă  l’aide de boutons (touches +, - et mĂ©morisation). On fait dĂ©filer les solutions jusqu’à l’obtention d’une image en clair. Cette mĂ©thode peut nĂ©cessiter jusqu’à 30 minutes de recherche, chaque mois.

MĂ©thode automatique

La mĂ©thode de recherche automatique du code n’est pas dĂ©crite dans les articles publiĂ©s par la revue Sciences et Vie. Cependant, l’article datant de 1987 laisse entendre que cette mĂ©thode est possible et dĂšs 1985, le magazine dĂ©livre suffisamment d’informations pour concevoir un dispositif de recherche sĂ©quentielle du code, notamment au travers de la publication de la « table de vĂ©ritĂ© » du codage.

GrĂące Ă  un ordinateur avec interface vidĂ©o ou avec un circuit dotĂ© d'un microcontrĂŽleur, la recherche du code s'effectue automatiquement. En revanche, nul besoin de se lancer dans une analyse frĂ©quentielle, la recherche du code est finalement trĂšs simple car la lecture de la table de vĂ©ritĂ© accuse une particularitĂ© : sur les trames 1 Ă  3, le retard de 1804ns n’est obtenu que si Y=1. En examinant une de ces trames, on lit 11 retards consĂ©cutifs pour dĂ©terminer le contenu du registre. Par exemple, la ligne 436 trame 1 et a itĂ©rĂ© 99 fois le registre. Sur cette ligne B10 vaut 1 si la ligne 436 est retardĂ©e, 1804ns 0 sinon de mĂȘme B9 (registre de la ligne 436) vaut 1 si la ligne 435 est retardĂ©e 1804ns 0 sinon, etc.

Une fois le registre de la ligne 436 renseigné avec ce procédé, on applique la transformation inverse 99 fois et on obtient le registre initial avec le code de 11 bits correspondant.

Il est mĂȘme possible de dessiner une fenĂȘtre de recherche de ce chiffrement, sur une partie de l’image particuliĂšre : encadrement de porte, poteau de but, principe Ă©voquĂ© dans l’article de 1985.

D'un point de vue opĂ©rationnel, il convient de se placer Ă  gauche de l'image et de dĂ©caler de colonne en colonne vers la droite jusqu’à ce que sur 12 lignes consĂ©cutives de la trame, la relation entre les retards soit conforme (ie on est placĂ© sur une colonne situĂ©e entre 902ns et 1804ns du dĂ©but de la ligne). AprĂšs plusieurs tests conclusifs, on peut considĂ©rer que le registre chargĂ© est conforme et donc, appliquer la transformation inverse afin de retrouver l'Ă©tat 0.

Recherche automatique du code :

Registre à décalage permettant de trouver le code utilisé

La contre-mesure de septembre 1986

En septembre 1986, Canal+ met en place le multi-code : le niveau d’audience est modifiĂ© de maniĂšre alternĂ©e par l’utilisation de 4 registres d’initialisation.

Le niveau d’audience annoncĂ© sur la ligne 310 n’est utilisĂ© qu’aprĂšs 8 cycles complets et non 9 comme parfois Ă©voquĂ©. Cela reprĂ©sente une modification possible toutes les secondes ou 48 trames. Le dĂ©codeur pirate de base n'est capable de dĂ©coder qu’une seconde puis les 3 secondes suivantes sont codĂ©es, etc. Le principe de fonctionnement est entiĂšrement dĂ©crit dans le numĂ©ro de Science et Vie de janvier 1987. L’article reprend un grand nombre d’explications de son article de janvier 1985 mais complĂšte la description du systĂšme de gestion de l’audience, alors qu’en 1985, le magazine a considĂ©rĂ© que ce signal d’audience n’était destinĂ© « qu’à « embrouiller le pirate » et ne concerne en rien les paramĂštres utiles ». En janvier 1987, le journaliste de Science et Vie estime nĂ©anmoins que l’évolution technique de septembre 1986 est lĂ©gĂšre et que la nouvelle bombe de canal+ ne serait « qu’un simple pĂ©tard mouillĂ© ».

Nouvelles contre-mesures

L’intĂ©gration des audiences 0 et 7 par cycle en sus du multi-code est utilisĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1990 pour essayer de faire « dĂ©crocher » les dĂ©codeurs pirates.

RÚglementation française spécifique

La revente voire la location clandestine de dĂ©codeurs pirates constitue bien souvent une activitĂ© lucrative non dĂ©clarĂ©e donc illĂ©gale. Elle est passible en France, de pĂ©nalitĂ©s au titre de l’article 1728 du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts, sanction qui ne prĂ©juge pas de poursuites pĂ©nales Ă©ventuelles.

La fabrication d’un dĂ©codeur par un Ă©lectronicien ou un amateur Ă©clairĂ© ne constituerait pas une contrefaçon dĂšs lors que le procĂ©dĂ© employĂ© est diffĂ©rent de celui utilisĂ© dans le dĂ©codeur officiel. Toutefois, ce point de litige est contradictoire avec les licences et brevets du procĂ©dĂ© de codage Ă©laborĂ© par la sociĂ©tĂ© Canal+ et ses concepteurs.

Dans le numĂ©ro de janvier 1985 de Science et Vie[13], un avocat s’étonne de la saisie du magazine Radio Plans, alors que le dĂ©codeur Radio Plans est une crĂ©ation originale et qu’aucun contrat (abonnement) n’a Ă©tĂ© conclu entre la chaĂźne codĂ©e et le magazine.

Fin 1987, la loi relative Ă  la protection des services de tĂ©lĂ©vision ou de radiodiffusion destinĂ©s Ă  un public dĂ©terminĂ© (no 87-520) du 10 juillet 1987 dite « loi Canal+ » met en Ă©vidence que l’utilisation d’un dispositif autre que le dĂ©codeur officiel avec abonnement associĂ© est prohibĂ© en France. L’utilisation de tels dispositifs reste « non interdite » dans d’autres pays de l’union europĂ©enne avant l’harmonisation de fin 1998, soit prĂšs de 3 ans aprĂšs l’arrĂȘt de l’exploitation du dĂ©codeur Discret 11.

Du principe à la réalité

La protection des lignes 310 et 622 ne figure dans aucun standard vidéo. Sur une chaine gratuite le discret peut reconnaitre par erreur une salve d'initialisation, le voyant vert s'illumine et l'image se code pendant une seconde. Pour éviter ce phénoméne Canal plus incruste la partie utile de la vidéo à partir d'une régie ce qui présente plusieurs avantages :

  • les lignes 310 et 622 sont protĂ©gĂ©es
  • les salves d'identification du signal couleur (burst) de la ligne dĂ©calĂ©e sont enlevĂ©es rendant inopĂ©rant le dĂ©codeur radio plan
  • simultanĂ©ment avec l'application du codage, un dĂ©calage de deux retards vers la gauche est appliquĂ© de sorte que l'image ne saute pas de 2 retards vers la droite lors du passage du clair au codĂ© ( - 2 retards + [retard pseudo alĂ©atoire complĂ©tĂ© Ă  +2] = image globalement non dĂ©calĂ©)

OpĂ©ration Chadec

D’aprĂšs l’émission capital de fĂ©vrier 1996, 500 000 dĂ©codeurs pirates discret 11 auraient Ă©tĂ© mis en circulation ; un nombre qui est probablement sous-estimĂ©e selon la presse spĂ©cialisĂ©e[14]

Pour lutter contre ce manque Ă  gagner, Canal+ lance l’opĂ©ration « CHADEC » pour CHAngement de DECodeur. Il convient de remplacer la totalitĂ© du parc des dĂ©codeurs Discret 11 par des dĂ©codeurs de nouvelle gĂ©nĂ©ration de type Syster, compatibles Ă  la fois avec le codage Discret et le codage Nagravision. DĂšs lors qu'un territoire d’abonnĂ©s est complĂštement mis Ă  jour avec le nouveau systĂšme, les Ă©metteurs exploitent le signal cryptĂ© en Nagravision. Ce basculement pose des problĂšmes logistiques et techniques, notamment concernant les Ă©metteurs modulant en VHF bande I pour lesquels la rĂ©ception est trĂšs sensible aux conditions mĂ©tĂ©o. Elles impactent la lecture des informations de l’intervalle de rafraĂźchissement vertical (VBI) parfois impossible rendant le Syster inopĂ©rant. Ce phĂ©nomĂšne oblige certains abonnĂ©s de ces zones Ă  basculer vers une rĂ©ception de la chaĂźne par satellite, ce qui est le cas des abonnĂ©s recevant la chaĂźne depuis l’émetteur du pic de nore. En ce qui le concerne, le dĂ©codeur historique Discret 11 peut s’accommoder d’une rĂ©ception relativement perturbĂ©e.

DĂšs 1991, les nouveaux abonnĂ©s sont Ă©quipĂ©s avec un dĂ©codeur syster. L’opĂ©ration chadec commence en 1992 jusqu'Ă  fin 1995, les premiers abonnĂ©s Ă  basculer en syster sont les abonnĂ©s recevant la chaĂźne sur le satellite TĂ©lĂ©com-1 puis les rĂ©gions au Sud de la France, la Bretagne et l’Alsace-Loraine suivent. L’Île-de-France bascule concomitamment avec la mise en place du nouvel habillage de Canal+ Ă  la rentrĂ©e 1995 et en fin d'annĂ©e 1995, les derniers Ă©metteurs de la rĂ©gion Nord Pas de calais passent au Nagravision.

Aspects commerciaaux

Dans l’article « Canal Plus, le dĂ©clin des pirates ? »[15], l’auteur s’interroge sur les motifs qui ont entrainĂ©e le retard d'exploitation d'un codage sophistiquĂ© dĂšs le lancement de la chaĂźne. Il Ă©voque un procĂ©dĂ© d'astuce commerciale : les pirates goĂ»tent Ă  la chaĂźne puis lassĂ©s des coupures incessantes d’image Ă  la suite des Ă©volutions techniques, finiraient par renoncer au dĂ©codeur pirate pour s’abonner. L'article prĂ©cise toutefois que Canal+ dĂ©ment l’utilisation d’un tel procĂ©dĂ© commercial. En 1996, dans un reportage de l’émission Capital[16], la voix off prĂ©cise que lors du passage du Discret 11 au Syster, les pirates ont Ă©tĂ© contraints de « rentrer dans le rang » et que les abonnements ont aussitĂŽt augmentĂ© de 10 %.

Pirate célÚbre : Xavier Niel

Guy Lagache affirme, dans une interview de Xavier Niel, dans l’émission « les grands entretiens[17] » diffusĂ©e le 17 mai 2020 sur LCP, que ce dernier, Ă  peine majeur, dĂ©marre ses activitĂ©s en 1986 en « piratant les dĂ©codeurs de Canal+, ce qui Ă©tait Ă©videmment illĂ©gal ». Xavier Niel explique que c'est alors grisant de rĂ©ussir Ă  hacker quelque chose qui est impossible Ă  hacker : un « dĂ©fi intellectuel » et qu’il n'a pas vu Ă  l’époque ce qu’il y avait d’illĂ©gal, hormis l’aspect « marchĂ© noir ». Toutefois, les faits sont antĂ©rieurs d’au moins un an Ă  la loi No 87-520[18] qui rĂ©prime l’utilisation de dĂ©codeurs non officiels et l’activitĂ© de revente n’est Ă©voquĂ©e que plus tard dans l’interview.

Notes et références

    Logiciel de simulation du codage vidéo discret 11 (codage et décodage) compatible avec le décodeur officiel : CryptImage

    1. (en-US) Barry Fox, « Technology: BBC scrambles to run subscription TV », sur New Scientist (consulté le )
    2. « IL INVENTE LA TELE DE DEMAIN », L'Usine Nouvelle,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
    3. « La lĂ©gende du dĂ©codeur - interview de Leo Scheer dans l’émission Europe 1 social club » (consultĂ© le )
    4. « Google Groupes », sur groups.google.com (consulté le )
    5. « La légende du décodeur » (consulté le )
    6. « Générique de fin STV (Santé Télé Vision) chiffré et annonce FR 3 » (consulté le )
    7. « Documentation du logiciel Cryptimage », sur cryptimage
    8. « Laissant libre le septiĂšme rĂ©seau hertzien Le probable repli de Canal J sur le cĂąble », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
    9. Emmanuelle Walter, « Canal J, la chaßne des Castors juniors », sur Libération.fr, (consulté le )
    10. « 2M en cryptĂ© Ű§Ù„Ù‚Ù†Ű§Ű© Ű§Ù„Ű«Ű§Ù†ÙŠŰ© في ŰČÙ…Ű§Ù† Ű§Ù„Ù…Ű±Ù…ÙˆŰČ Â» (consultĂ© le )
    11. Stöð 2 ( Chaine 2), « apparition du codage à 28 secondes du début » (consulté le )
    12. « Discret 11 » (consulté le )
    13. « Canal Plus va-t-il interdire les micro-ordinateurs ? », Science et Vie n° 808,‎ , page 113
    14. « Bertelsmann souhaite que Canal+ prenne 10 % de Media Service », sur Les Echos, (consulté le )
    15. «  Canal Plus, le dĂ©clin des pirates ? », Sciences et Vie n°832,‎ , page 116
    16. « l-argent-des-pirates », sur inatheque.ina.fr (consulté le )
    17. « Les grands entretiens de Guy Lagache - Xavier NIEL », sur La Chaßne Parlementaire - Assemblée Nationale (consulté le )
    18. « Loi n°87-520 du 10 juillet 1987 RELATIVE A LA PROTECTION DES SERVICES DE TELEVISION OU DE RADIODIFFUSION DESTINES A UN PUBLIC DETERMINE - Légifrance », sur www.legifrance.gouv.fr (consulté le )
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