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Crise des missiles nord-coréens de juillet 2006

La crise des missiles nord-coréens de juillet 2006 est une crise diplomatique provoquée par le lancement de plusieurs missiles balistiques par la Corée du Nord le (heure locale) en contradiction avec ses engagements pris antérieurement.

Carte montrant les zones de départ et d'arrivée des missiles

Les tirs de missiles

Le , la CorĂ©e du Nord procède Ă  7 tirs de missiles balistiques (selon les AmĂ©ricains, alors que les Russes en ont dĂ©nombrĂ© « une dizaine »), dont 1 missile balistique intercontinental de type « Taepodong-2 » d'une portĂ©e thĂ©orique de 3 500 Ă  6 700 km susceptible d'atteindre les territoires amĂ©ricains d'Hawaii et de l'Alaska en contradiction avec ses engagements antĂ©rieurs (moratoire unilatĂ©ral sur les tests de missiles dĂ©crĂ©tĂ© par la CorĂ©e du Nord en 1999) et sans avertissement prĂ©alable Ă  l'Organisation de l'aviation civile internationale.

Cependant, le missile de longue portée « Taepodong-2 » est retombé à seulement quelques centaines de kilomètres de sa rampe de lancement, « probablement détruit sur ordre du centre de contrôle » par les Nord-Coréens, selon Dimitri Kossyrev, commentateur politique de RIA-Novosti[1], ou victime d'une défaillance technique selon d'autres sources.

Toujours selon le commentateur politique russe, les tirs nord-coréens n'auraient qu'une valeur limitée sur le plan militaire, sans représenter une surprise ni une menace militaire accrue pour les experts américains :

« La veille de cet événement des experts américains avaient déclaré qu’ils doutaient que le missile nord-coréen à portée accrue puisse transporter une charge de même importance. Enfin, le Washington post rappelle que la Corée du Nord « aura encore besoin de plusieurs années avant de créer une charge nucléaire suffisamment petite pour pouvoir la placer dans le missile. [...] Sans parler que malgré les affirmations réitérées de Pyongyang, les experts ne croient pas que la Corée du Nord soit une « puissance nucléaire ». Ainsi, du point de vue purement militaire, il n’y a pas lieu de trop s’inquiéter, abstraction faite de la chute éventuelle d’un missile nord-coréen sur une route aérienne ou un bateau de pêche. »

Il faut rappeler que ce texte fut écrit avant l'essai nucléaire nord-coréen du 9 octobre 2006.

Les réactions diplomatiques ont cependant été très vives, la Corée du Nord ayant procédé à des tirs le jour de la fête nationale américaine, dans un contexte de renouvellement de l'accord de défense nippo-américain.

La justification nord-coréenne : forcer les États-Unis à la négociation

La Corée du Nord a justifié ses tirs de missile en observant qu'ils relevaient, selon elle, de son droit souverain à se défendre en cas d'attaque américaine. Ainsi, selon des spécialistes sud-coréens cités par Philippe Pons[2].

« En s'armant, Pyongyang cherche rĂ©ellement Ă  prĂ©venir une attaque amĂ©ricaine, Ă©chaudĂ© par l'invasion de l'Irak, affirment des analystes sud-corĂ©ens. Et, frustrĂ©e par les nĂ©gociations multipartites, la CorĂ©e du Nord cherche surtout Ă  forcer les États-Unis Ă  engager des nĂ©gociations bilatĂ©rales, imitant ainsi TĂ©hĂ©ran. Le but : monnayer l'abandon de son programme nuclĂ©aire contre des concessions Ă©conomiques. « A court terme, les États-Unis vont rĂ©agir avec colère au lancement [de missiles], mais ils vont se rendre compte que la seule solution Ă  long terme est d'engager des pourparlers directs avec la CorĂ©e du Nord", estime Paik Hak-soon, de l'Institut Sejong Ă  SĂ©oul Â».

L'agence de presse officielle nord-corĂ©enne KCNA a de surcroĂ®t estimĂ© que, selon elle, « il s’agit d’exercices de routine destinĂ©s Ă  renforcer la dĂ©fense du pays Â» [3].

La dĂ©monstration de force nord-corĂ©enne le jour oĂą les États-Unis cĂ©lĂ©brĂ© leur fĂŞte nationale du 4 juillet (situĂ© de l'autre cĂ´tĂ© de la ligne de changement de date) intervient dans un contexte oĂą la CorĂ©e du Nord souhaite lever les sanctions financières contre Pyongyang, et oĂą les blocages des nĂ©gociations sur le dossier nuclĂ©aire nord-corĂ©en est Ă©galement imputĂ© Ă  l'intransigeance de Washington : ainsi, selon le quotidien canadien « La Presse Â», « La CorĂ©e du Nord et les États-Unis devront changer d’attitude. Washington en particulier devra cesser de tout demander tout de suite, et accepter des concessions graduelles », estime l’amĂ©ricain David Albright, ancien inspecteur pour les armes nuclĂ©aires en Irak[3] - [4]

Ă€ plus long terme, selon l'agence de presse sud-corĂ©enne « Yonhap Â», la CorĂ©e du Nord voudrait conduire les AmĂ©ricains Ă  nĂ©gocier un traitĂ© de paix : « Le Nord garde la porte ouverte au dialogue avec les États-Unis, rappelle l’agence de presse sud-corĂ©enne. La CorĂ©e du Nord serait d’accord d’abandonner son programme nuclĂ©aire en Ă©change de garanties de sĂ©curitĂ© et d’une aide Ă©conomique. » (source : agence sud-corĂ©enne Yonhap, 6 juillet 2006).

L'AFP rapporte que le numĂ©ro un nord-corĂ©en Kim Jong-Il refuse de faire « la moindre concession Â» aux États-Unis et a averti que son pays Ă©tait prĂŞt Ă  une « guerre totale Â» (...) en cas de « vengeance Â» des États-Unis[5].

La Corée du Nord a annoncé mercredi l'annulation de réunions inter-coréennes de familles séparées par la guerre de 1950-53, accusant sa voisine du Sud de se faire la complice de l'Occident dans sa condamnation des tirs de missiles nord-coréens et a placé son armée en état d'alerte.

Les réactions internationales

L'opposition de la plupart des grandes puissances

Ces tirs ont ainsi suscitĂ© de fortes rĂ©actions dans la communautĂ© internationale, notamment de la part des États-Unis, du Japon, de Russie et la CorĂ©e du Sud. Le Japon et les États-Unis ont dĂ©noncĂ© une « provocation Â» de la CorĂ©e du Nord, tandis que la CorĂ©e du Sud exprimait sa « condamnation Â».

Selon les agences AFP et Reuters citĂ©es par Le Monde[6], « l'ambassadeur amĂ©ricain Ă  l'ONU, John Bolton, a annoncĂ© vendredi 7 juillet qu'un projet de rĂ©solution appelant Ă  des sanctions financières contre la CorĂ©e du Nord, après les tirs de missiles de Pyongyang, serait officiellement prĂ©sentĂ© au Conseil de sĂ©curitĂ© de l'ONU dans la journĂ©e. Â»

George W. Bush a, lui aussi, estimĂ© Ă  Chicago que le Conseil de sĂ©curitĂ© devait voter une rĂ©solution qui « condamne Â» la CorĂ©e du Nord. Sans prononcer le mot de « sanctions Â», le prĂ©sident amĂ©ricain a soulignĂ© la nĂ©cessitĂ© de parvenir Ă  un consensus international Ă  l'ONU. Ainsi, les États-Unis soutiennent un projet de rĂ©solution dĂ©posĂ© par le Japon, qui appelle la CorĂ©e du Nord Ă  reprendre les nĂ©gociations sur ses programmes nuclĂ©aires et la menace de mesures punitives.

Le projet de résolution, initié par le Japon avec le soutien des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France, fait suite aux mesures de rétorsion immédiatement adoptées par le Japon : les liaisons par ferry entre le Japon et la Corée du Nord ont été suspendues.

La CorĂ©e du Sud a annoncĂ© la suspension de ses livraisons de cĂ©rĂ©ales Ă  la CorĂ©e du Nord, tandis que le dialogue intercorĂ©en en vue de la rĂ©unification de la CorĂ©e s'est poursuivi : selon l'agence sud-corĂ©enne Yonhap, « la CorĂ©e du Sud et la CorĂ©e du Nord se sont accordĂ©es sur la tenue conjointe d’un festival en faveur de la rĂ©unification en CorĂ©e du Nord Ă  la mi-aoĂ»t. C’est ce qu’ont annoncĂ© ses promoteurs du Sud dimanche Â» [7]).

Le ministre des affaires étrangères thaïlandais Kantathee Supamongkol a exprimé son inquiétude concernant ce test, et a pressé la Corée du Nord à retourner aux discussions six-partites. Le Thaïlande a en effet joué un rôle informel dans les négociations entre les principaux protagoniqteses – les deux Corées, le Japon, la Chine, la Russie et les Etats-Unis[8].

Un appel de la Chine et de la Russie à la négociation diplomatique

La République populaire de Chine, pour sa part, a refusé de dénoncer les tirs nord-coréens, appelant la communauté internationale au dialogue et à la retenue.

Des responsables chinois se sont alors rendus à Pyongyang pour conduire des négociations diplomatiques.

La résolution votée par le Conseil de sécurité des Nations unies

Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté le samedi 15 juillet 2006, à l’unanimité, une résolution de compromis, immédiatement rejetée par Pyongyang, exigeant que la Corée du Nord suspende toutes les activités liées à son programme de missiles balistiques.

Ce texte, résultat de onze jours de difficiles négociations entre les grandes puissances, ne comporte pas, contrairement à ce que souhaitaient le Japon et les États-Unis, de référence à l’article VII de la Charte des Nations Unies qui permet, en cas de non-respect, le recours à la force (...).

M. Pak Gil Yon, ambassadeur nord-coréen aux Nations unies, a également condamné ce qu’il a décrit comme des tentatives « d’utiliser le Conseil de sécurité à mauvais escient pour leurs buts politiques méprisables », afin d’isoler la Corée du Nord et de la soumettre à des pressions. Il a averti que la Corée du Nord n’aurait pas d’autre solution que de prendre des « actions physiques plus fortes » si un pays « osait critiquer » les manœuvres[9].

Notes et références

  1. source : l'agence de presse russe RIA-Novosti « cité sur le site « Korea is one » »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?)
  2. « Missiles nord-coréens : la communauté internationale choisit la voie diplomatique », Le Monde,
  3. Cecile Chams, « Missiles nord-coréens : une arme diplomatique ? »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), Korea is one,
  4. Agnès Gruda, « Les États-Unis doivent changer d’attitude »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), Korea is one,
  5. « Kim Jong Il refuse la moindre concession »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), Yahoo News,
  6. « Le Monde »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?)
  7. , Korea is one
  8. « Thailand concerned at North Korea missile tests », Bangkok Post,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. , Korea is one

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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