Cosmic Ray Energetics and Mass
Cosmic Ray Energetics and Mass ou CREAM est une expĂ©rience de physique dont l'objectif est de mesurer le spectre Ă©nergĂ©tique du rayonnement cosmique dont le spectre va de 1012 Ă 1015 eV. L'objectif scientifique est de dĂ©terminer l'origine et la nature du rayonnement cosmique en analysant plus particuliĂšrement le changement d'indice spectral (ÎN/ÎE) qui se produit dans cette gamme d'Ă©nergie. L'expĂ©rience financĂ©e par la NASA est placĂ©e sous la responsabilitĂ© scientifique de l'UniversitĂ© du Maryland associĂ©e Ă plusieurs instituts de recherche et universitĂ©s amĂ©ricaines et internationales. L'instrument de plus d'une tonne est constituĂ© de plusieurs dĂ©tecteurs de particules qui dĂ©terminent l'Ă©nergie et la charge Ă©lectrique des particules incidentes. L'expĂ©rience a volĂ© durant 161 jours sous un ballon stratosphĂ©rique dans le cadre de 6 campagnes distinctes qui se sont dĂ©roulĂ©es au-dessus de l'Antarctique entre 2004 et 2010. Une version lĂ©gĂšrement modifiĂ©e est placĂ©e en orbite en aout 2017 et amarrĂ©e Ă l'extĂ©rieur de la Station spatiale internationale pour une mission de 3 ans.
Contexte
L'Ă©tude du rayonnement cosmique consiste Ă dĂ©terminer lâĂ©nergie, la valeur de la charge Ă©lectrique et la masse des particules qui le composent. Ă cet effet on utilise des dĂ©tecteurs similaires Ă ceux employĂ©s en physique des particules. Ces observations doivent se faire au-dessus de lâatmosphĂšre puisque celle-ci dĂ©truit les particules incidentes. On utilise donc des ballons stratosphĂ©riques volant Ă trĂšs haute altitude auxquels on suspend les instruments de mesure (expĂ©riences ATIC, BESS, TRACER, ...) ou on embarque le dĂ©tecteur Ă bord de la Station spatiale internationale (AMS) ou dâun satellite (Ariel VI, Fermi, PAMELA, MikhaĂŻl Lomonossov, DAMPE). Les dĂ©tecteurs sont, de par leur nature, des instruments massifs. Mais ils doivent ĂȘtre dimensionnĂ©s afin de pouvoir ĂȘtre suspendus Ă un ballon ou lancĂ©s dans l'espace ce qui impose de limiter leur champ de vue (quelques stĂ©radians). Cette limitation est toutefois suffisante pour les rayons cosmiques de faible et moyenne Ă©nergie car ceux-ci sont suffisamment abondants. Le recours au ballon stratosphĂ©rique est lâapproche la plus simple et la moins coĂ»teuse. Elle permet d'effectuer des observations sur une pĂ©riode de quelques dizaines de jours (jusquâĂ 40 jours).
Historique du projet
CREAM est Ă l'origine une expĂ©rience dĂ©veloppĂ©e par la NASA ayant recours Ă un ballon gonflĂ© Ă l'hĂ©lium mis au point par les techniciens de l'agence spatiale amĂ©ricaine. Le vol s'effectue Ă environ 40 km d'altitude. Pour se maintenir Ă cette altitude, il faut compenser les variations de tempĂ©rature liĂ©es au cycle jour-nuit qui modifient la pression Ă l'intĂ©rieur du ballon et donc son volume et sa capacitĂ© Ă porter une charge. La nuit le ballon doit larguer du lest tandis que le jour de l'hĂ©lium est libĂ©rĂ©. L'Ă©puisement du lest limite la durĂ©e de l'observation. Pour CREAM, la campagne s'effectue en Ă©tĂ© au-dessus de l'Antarctique qui bĂ©nĂ©ficie de jours sans nuit en cette saison. CREAM mesure les abondances des Ă©lĂ©ments aux Ă©nergies maximales permises par ce type de dĂ©tection (100 GeVâ100 TeV) grĂące Ă une acceptance importante 0,45 mÂČ stĂ©radian). 6 campagnes sont effectuĂ©es entre 2004 et 2010 qui permettent dâaccumuler 162 jours de donnĂ©es. CREAM est dĂ©veloppĂ©e sous la supervision du centre de vol spatial Goddard de la NASA et placĂ©e sous la responsabilitĂ© scientifique de l'UniversitĂ© du Maryland. Celle-ci est associĂ©e Ă plusieurs instituts de recherche et universitĂ©s amĂ©ricaines et internationales : l'UniversitĂ© d'Ătat de Pennsylvanie, l'UniversitĂ© Sungkyunkwan et l'UniversitĂ© nationale Kyungpook (CorĂ©e du sud), l'UniversitĂ© nationale autonome du Mexique et le Laboratoire de physique subatomique et de cosmologie de Grenoble (LPSC, France).
Installation à bord de la Station spatiale internationale : l'expérience ISS-CREAM
Six campagnes d'observation avec l'instrument CREAM ont Ă©tĂ© menĂ©es entre 2004 et 2010 sous ballon stratosphĂ©rique. La NASA a dĂ©cidĂ© d'installer l'expĂ©rience CREAM Ă bord de la Station spatiale internationale car cette mise en Ćuvre prĂ©sente deux avantage majeurs. La durĂ©e de recueil des donnĂ©es fixĂ©e Ă 3 ans est beaucoup plus longue que les 161 jours cumulĂ©s sous ballons. L'exposition dans l'espace permet d'Ă©liminer les particules secondaires gĂ©nĂ©rĂ©es par l'interaction entre le rayonnement et les couches supĂ©rieures de l'atmosphĂšre situĂ©es au-dessus de l'altitude atteinte par le ballon. Pour cette mission CREAM a Ă©tĂ© modifiĂ© avant de rĂ©sister aux accĂ©lĂ©rations et vibrations de la phase de lancement puis une fois dans l'espace au bombardement par les particules Ă©nergĂ©tiques susceptibles de perturber son Ă©lectronique[1].
CREAM est embarquĂ© dans la soute externe du vaisseau SpaceX Dragon placĂ© en orbite le 14 aout 2017 par une fusĂ©e Falcon 9 (mission CRS-12)[2]. Une fois le vaisseau amarrĂ© Ă la Station spatiale internationale, l'instrument qui a Ă©tĂ© transportĂ© dans une configuration de stockage doit ĂȘtre amarrĂ© sur un des points de fixation de la palette EF du module japonais KibĆ. Cette opĂ©ration est rĂ©alisĂ©e par un membre d'Ă©quipage de la station spatiale Ă l'aide du bras robotisĂ© Canadarm 2. L'instrument doit fonctionner 3 ans.
Objectifs scientifiques
L'expérience CREAM a pour objectif de répondre aux questions suivantes relatives à l'origine et la nature du rayonnement cosmique :
- Les supernovĂŠ constituent elles la source principale du rayonnement cosmique
- Quel est l'histoire du rayonnement cosmique dans la galaxie ?
- Est ce que le spectre énergétique du rayonnement cosmique peut s'expliquer par un processus simple ?
- Quelle est l'origine du changement d'indice spectral (ÎN/ÎE) constatĂ© autour de 3 x 1015 eV ?
Caractéristiques techniques
CREAM mesure la charge et lâĂ©nergie des particules du rayonnement cosmique. La technique utilisĂ©e pour mesurer de lâĂ©nergie des noyaux est propre Ă cet instrument car elle est effectuĂ©e Ă lâaide dâun calorimĂštre hadronique en tungstĂšne dans lequel se dĂ©sintĂšgrent les particules. Ce type de calorimĂštre permet la mesure de lâĂ©nergie de particules trĂšs Ă©nergĂ©tiques (jusquâĂ 1 PeV) dans un volume rĂ©duit. En contre- partie,
L'instrument dans sa version installée à bord de la Station spatiale internationale a une masse de 1 258 kg et occupe un volume de 1,85 m x 0,95 m x 1 m. Sa consommation électrique est de 580 watts auxquels s'ajoutent 120 watts pour les résistances chauffantes. Un circuit de régulation thermique fait circuler 200 kg de liquide caloporteur par heure pour maintenir la température entre 16 et 24 °C. Les caractéristiques des particules incidentes sont mesurées à l'aide des détecteurs suivants présenté dans l'ordre d leur franchissement[3] :
- Le TCD (Timing Charge Detector) est un scintillateur constitué de 8 sous-ensembles de scintillateurs répartis sur 2 plans qui mesurent la charge électrique des particules. Son seuil de déclenchement en énergie est beaucoup plus bas que celui du calorimÚtre (1 GeV contre 100 GeV). Ce détecteur permet de mesurer la charge des atomes d'hydrogÚne au fer.
- Le détecteur Cherenkov (CD) utilise l'effet Cherenkov (émission de photons lorsqu'une particule se déplace dans un milieu à une vitesse supérieure à celle de la lumiÚre pour le milieu) pour mesurer la charge. Il est utilisé pour inhiber le fonctionnement du TCD lorsque l'énergie de la particule est trop basse.
- La caméra Cherenkov (CherCam) détermine également la charge électrique
- Deux plans de dĂ©tection SCD situĂ©s l'un au-dessus l'autre au-dessous de l'instrument et d'une superficie de 79,7 x 79,7 cmÂČ mesurent la charge Ă©lectrique de la particule incidente. Le SCD est constituĂ© de pixels de silicium de 1,46 x 1,46 cmÂČ. Le deuxiĂšme plan permet d'Ă©liminer les particules albĂ©does (secondaires). La rĂ©solution en charge est ÎE < 0,3
- Le calorimĂštre hadronique CAL absorbe l'Ă©nergie de la particule incidente et mesure sa valeur lorsqu'elle est comprise entre 1012 Ă 1014 eV. La particule traverse d'abord un cible constituĂ©e par une couche de carbone. La particule interagit en partie avec ce matĂ©riau en gĂ©nĂ©rant une gerbe de particules. Le nombre et l'Ă©nergie des particules sont mesurĂ©es dans le corps du calorimĂštre. Celui-ci est constituĂ© par 20 couches de tungstĂšne d'une superficie de 50 x 50 cmÂČ sĂ©parĂ©es chacune par 50 rubans de fibre scintillante. Chaque ruban comprend 19 fibres de 0,5 mm de diamĂštre qui lorsqu'elles sont traversĂ©es par les particules produisent des photons qui sont collectĂ©s. Les fibres ont des propriĂ©tĂ©s de transparence diffĂ©rentes qui contribuent Ă prĂ©ciser l'Ă©nergie totale produite.
Références et notes
- (en) « ISS Utilization: CREAM », sur eoPortal, Agence spatiale européenne (consulté le ).
- (en) Patric Blau, « Successful Monday Commute to Orbit for Dragon Cargo Craft, Falcon 9 aces another Landing », sur spaceflight101.com, .
- (en) Patric Blau, « CREAM â Cosmic Ray Energetics and Mass », sur spaceflight101.com (consultĂ© le )
Bibliographie
- (en) H.S. Ahn et al., « The Cosmic Ray Energetics And Mass (CREAM) Instrument », Nuclear Instruments and Methods in Physics Research;, vol. 579, no 3,â , p. 1034-1053 (DOI 10.1016/j.nima.2007.05.203, lire en ligne)
- Benoıt Coste, Mesure et phĂ©nomĂ©nologie du rayonnement cosmique avec lâexpĂ©rience CREAM (thĂšse), HAL, , 192 p. (lire en ligne)