Conspiration de Cinadon
La conspiration de Cinadon est une tentative de coup d'État survenue à Sparte au IVe siècle av. J.-C., dans les premières années du règne d'Agésilas II (-398–358 av. J.-C.).
Protagonistes
Cinadon n'est pas un spartiate d'origine, mais il a eu la même formation militaire que les spartiates. Il est officier de police et a déjà conduit d'importantes missions pour les éphores : il a eu en sa possession la scytale et a déjà dirigé des Hippeis, membres de la garde d'élite spartiate. Il sait écrire et a donc reçu une certaine éducation. Son métier comme sa valeur personnelle le rendraient digne, estime-t-il (et Xénophon et Aristote à sa suite), d'être l'un des Pairs (Homoioi). Or il fait partie des Inférieurs (hypomeiones)[1], plus précisément des Spartiates déchus de leurs droits civiques, soit par lâcheté (tresantes), soit par pauvreté (impossibilité de verser son écot aux syssities). Il aspire, comme il le revendique au cours de son procès, « n'être à Lacédémone inférieur à personne ».
Il rassemble autour de lui d'autres inférieurs (les Lacédémoniens), dont les plus dangereux, selon Xénophon, est le devin Tisamène, descendant de l'Éléen du même nom qui avait reçu la citoyenneté spartiate après les guerres médiques. Lui aussi a perdu ses droits civiques, probablement par pauvreté. Les deux meneurs ne sont donc pas des membres des catégories opprimées à proprement parler, mais des déclassés.
DĂ©couverte du complot
Lors d'un sacrifice présidé par le roi Agésilas II, les présages s'avèrent très mauvais. Xénophon indique que le devin assistant le roi prévoit « une conspiration des plus terribles ». Quelques jours plus tard, un homme vient dénoncer la conspiration de Cinadon aux éphores : Cinadon, dit-il, l'a amené sur l'agora et lui a demandé de compter les Spartiates dans la foule, qui compte près de 4 000 hommes. Il s'avère que seuls 40 d'entre eux sont des Pairs : un roi, des éphores, des gérontes et de simples citoyens. Cinadon indique alors que les 40 Spartiates sont les ennemis, et les 4 000 autres des alliés. Le délateur ajoute que Cinadon a rassemblé autour de lui nombre d'Inférieurs haïssant les Spartiates : « chaque fois que chez ces gens on parlait des Spartiates, personne ne pouvait dissimuler qu'il aurait eu plaisir à en manger, même tout crus » (Helléniques, III, 3, 6). Le délateur termine en précisant que les conjurés sont armés et pour certains d'entre eux, fortunés.
Affolés, les éphores n'osent pas faire directement arrêter Cinadon. Au moyen d'une ruse élaborée, ils l'envoient sur la frontière éléenne, à Aulon en Messénie. Son escorte est composée de jeunes Hippeis, soigneusement sélectionnés par le doyen des hippagrètes, leurs officiers. Un détachement de cavalerie est même envoyé en renfort. Pendant que Cinadon est appréhendé sur la frontière, ses complices sont arrêtés à Sparte même et éliminés. Sur le champ, Cinadon est torturé. Il révèle le nom des principaux conspirateurs. Tous sont enchaînés, flagellés à l'aide de verges et finalement mis à mort.
Sources
Bibliographie
- (en) E. David, “The Conspiracy of Cinadon”, Athenæeum 57 (1979), p. 239–259 ;
- J. Ducat, "La conspiration de Cinadon (Xénophon, Helléniques, III, 3, 4-11)", Ktèma 41, 2016, p. 343-391 ;
- (en) J.F. Lazenby, “The Conspiracy of Cinadon reconsidered”, Athenæum 55 (1977), p. 437–443 ;
- Edmond Lévy, Sparte : histoire politique et sociale jusqu’à la conquête romaine, Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 2-02-032453-9) ;
- N. Richer, Le monde grec, collection Grand Amphi, Bréal, Paris, 1995, p.105-110.
- (it) R. Vattuone, « Problemi spartani. La congiura di Cinadone », RSA 12 (1982), p. 19–52.
Notes et références
- Catherine Grandjean (dir.), Gerbert S. Bouyssou, Véronique Chankowsky, Anne Jacquemin et William Pillot, La Grèce classique : D'Hérodote à Aristote, 510-336 avant notre ère, Paris, Belin, coll. « Mondes anciens », , chap. 10 (« Continuités et ruptures dans la vie politique des cités grecques au IVe siècle »), p. 375.