Conférence islamique internationale
Le CongrĂšs islamique mondial, ou CongrĂšs musulman mondial (CMM), ou parfois dĂ©nommĂ© CongrĂšs arabe de Palestine[1] ou encore « Motamar al-Alam al-Islami » [ Ù Ű€ŰȘÙ Ű± ۧÙŰčۧÙÙ Ű§ÙŰ„ŰłÙŰ§Ù Ù ] ou WMC pour World Muslim Congress est une organisation politico-religieuse islamique lancĂ©e par le roi Abdelaziz ben Abderrahmane Al Saoud d'Arabie Saoudite Ă la suite d'un appel qu'il avait fait Ă la Mecque en 1926. Ce congrĂšs religieux vise Ă promouvoir et soutenir les communautĂ©s musulmanes dans le monde.
Ă ne pas confondre avec lâOrganisation de la confĂ©rence islamique (crĂ©Ă©e en 1969 et renommĂ©e en 2011 Organisation de la coopĂ©ration islamique ou OCI).
Objet, enjeux
Câest le premier effort fait pour rĂ©unir, via des « confĂ©rences interislamiques »[2] toutes les communautĂ©s musulmanes du monde autour dâune table de confĂ©rence. Ce « congrĂšs » est devenu une entitĂ© pĂ©renne, basĂ©e au Pakistan, Ă Karachi (et a ensuite ouvert des bureaux Ă GenĂšve, Djeddah et Vienne).
Cet organisme, qui se veut notamment reprĂ©sentant des cultures musulmanes[3] fait partie depuis 1967[4] de la Liste des organisations dotĂ©es du statut consultatif auprĂšs du Conseil Ă©conomique et social des Nations-Unies via lâECOSOC et lâUNICEF et jouit du statut dâobservateur au sein de la ConfĂ©rence islamique (OCI)[5].
Son actuel prĂ©sident est Abdullah bin Omer Naseef (professeur Ă lâUniversitĂ© du roi Abdulaziz de Jeddah)[6].
Histoire
- 1926 : entre les deux guerres mondiales, dans un contexte gĂ©opolitique mondial tendu, le congrĂšs est fondĂ© par un groupe de reprĂ©sentants (dirigeants) du monde islamique venus de nombreux pays Ă la premiĂšre « confĂ©rence islamique internationale » qui se tient Ă La Mecque en 1926. Câest le roi Abdul Aziz, d'Arabie saoudite qui initie cette confĂ©rence et y accueille les participants, mais le Grand Mufti de JĂ©rusalem, Mohammed Amin al-Husseini y joue aussi un rĂŽle important[5]. Le congrĂšs dĂ©cide quâune organisation permanente islamique et internationale devait soutenir la communautĂ© islamique dans le monde (Oumma) [5]. Il travaille aussi Ă une forme organisationnelle de mise en rĂ©seau des communautĂ©s dans le monde et dĂ©cide de prĂ©parer une seconde confĂ©rence. La confĂ©rence est rĂ©unie peu de temps aprĂšs le dĂ©but de lâoccupation par lâArabie saoudite de la Mecque et de la Medina (prise en 1924 Ă Hussein ben Ali (chĂ©rif de La Mecque) ; le roi Abdul Aziz « espĂ©rait alors obtenir une reconnaissance des autoritĂ©s de lâIslam Ă son administration des villes sainte, mais au lieu de cela [il] a soulevĂ© de nombreuses critiques, qu'il nâa pas intĂ©grĂ© »[7] ;
- 1931 Une 2de « confĂ©rence islamique internationale » se dĂ©roule Ă JĂ©rusalem[5]. Une « constitution » et les rĂšglements du CongrĂšs (Motamar Al-Alam Al-Islami) y sont adoptĂ©s et approuvĂ©s, sous la prĂ©sidence de Mohammed Amin al-Husseini, le Grand Mufti de JĂ©rusalem, qui selon P Mattar disposait alors d'un nouveau moyen de dĂ©velopper sa politique palestinienne, de lutter contre le sionisme et de contrer les intĂ©rĂȘts anglais[8]. Ce dernier est Ă©lu prĂ©sident du Motamar (congrĂšs), assistĂ© par deux vice-prĂ©sidents : M. Iqbal et Syed Alouba Pacha[5]. 145 activistes et leaders de l'islam et/ou du panarabisme rĂ©pondent Ă l'invitation[9] ; sont notamment prĂ©sents Mohammad Iqbal (poĂšte et philosophe Indien) ; Sayed Shukri Quwatli (futur prĂ©sident de Syrie), Sayed Rivad Solh (futur premier ministre du Liban), Sayed Ziauddin Tabatabai (ex-premier ministre iranien, Mohammad Ali Al-Abid (ex-prĂ©sident de Syrie), l'ayatollah iraquien Muhammad Al-Kashiful Ghita, et Saeed Shamil venu du Caucase. Certains auteurs questionnent les enjeux qui se croisent derriĂšre ce congrĂšs (entre panarabisme, panislamisme et identitĂ©s rĂ©gionales ou nationales)[10] - [1] - [9].
- 1947 : Le partage de la Palestine (1947) bloque provisoirement la dĂ©marche[2]. Mais aprĂšs la naissance de l'Ătat majoritaire musulman du Pakistan le (sous la direction de Muhammad Ali Jinnah, son premier gouverneur gĂ©nĂ©ral) une partie du groupe de la confĂ©rence rĂ©unie en 1931 (16 ans aprĂšs la confĂ©rence de 1931) commence Ă travailler au renouveau du CongrĂšs islamique mondial[5] ;
- 1949 : Le CongrĂšs musulman international est vĂ©ritablement et formellement fondĂ© lors de la 3e confĂ©rence islamique mondiale, qui se tient Ă Karachi, Ă la suite de la crĂ©ation du Pakistan deux ans plus tĂŽt (en 1947)[5] et alors que le monde vient de subir une Seconde Guerre mondiale. Cette 3e confĂ©rence est prĂ©parĂ©e par le group des frĂšres musulmans du Pakistan et elle est prĂ©sidĂ©e par Mohammed Amin al-Husseini, ancien Grand mufti de JĂ©rusalem. Ce dernier est Ă cette occasion Ă©lu « prĂ©sident du CongrĂšs »[11], alors que Inamullah Khan, lâun de ses cofondateurs du CongrĂšs en sera Ă©lu secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral (et il le restera durant plus de quatre dĂ©cennies) [11]. Elle sâest tenue Ă Karachi (alors encore capitale du Pakistan), avec un discours introductif fait par Liaquat Ali Khan (alors premier ministre du Pakistan) et a actĂ© un projet de renouveau[5]. Câest Ă ce moment quâon dĂ©cide que la confĂ©rence devient permanente et quâelle est baptisĂ©e Motamar al-Alam al-Islami. Selon Husain Haqqani, ancien ambassadeur du Pakistan aux Ătats-Unis ce CongrĂšs « a ... jouĂ© un rĂŽle crucial dans la construction du sentiment de victimisation musulmane qui a ensuite alimentĂ© le mouvement islamiste mondial »[11] ;
- 1951 : Une 4e confĂ©rence se tient en fĂ©vrier, Ă©galement Ă Karachi (deux ans aprĂšs la prĂ©cĂ©dente). Elle est notamment prĂ©parĂ©e par SaĂŻd Ramadan, fondateur de la branche palestinienne des FrĂšres musulmans (alors en exil Ă la suite de l'assassinat de son pĂšre Hassan el-Banna le ) et le grand mufti de JĂ©rusalem Mohammed Amin al-Husseini. Plus importante que les prĂ©cĂ©dentes en termes de moyens mobilisĂ©s, elle est prĂ©sidĂ©e par le grand mufti, assistĂ© de Insamullah Khan en tant que secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral. Cette confĂ©rence acte que Karachi sera jusquâĂ nouvel ordre le siĂšge permanent du CongrĂšs, et elle met en place un comitĂ© de rĂ©daction dâune Constitution. Selon son site internet, de nombreuses idĂ©es de coopĂ©ration entre pays et peuples musulmans y sont Ă©mises (ex : crĂ©ation dâune Agence de presse musulmane mondiale et dâune banque de dĂ©veloppement, Ă©galement « musulmane »), qui prendront forme dans les annĂ©es qui suivront. Et deux sessions parallĂšles Ă la confĂ©rence (respectivement consacrĂ©e lâune aux "femmes de lâislam" et lâautre aux "jeunes de lâIslam") ont soulevĂ© un grand intĂ©rĂȘt dans le monde de lâislam[5]. Lors de la 3e et 4e confĂ©rences Ă©taient notamment prĂ©sents quelques personnalitĂ©s de l'aprĂšs-guerre comme Shahide-Millat Liaqat Ali Khan (premier 1er ministre du Pakistan), Habib Bourguiba (qui deviendra prĂ©sident de Tunisie), Abdullah Osman (qui prĂ©sidera la Somalie), Musjumi (leader indonĂ©sien), Sukiman et Muhammad Natsir (tous deux anciens premiers ministres), Omer Reza Doghrol (de Turquie), Burhanuddin Jaya (de Ceylan) ; Shaikhul Islam Allama Shabbir Ahmad Usmani (Pakistan), Allama Cheikh Mohamed Bachir El Ibrahimi (AlgĂ©rie), Chadli Mekki (AlgĂ©rie), Shaikh Mustafa Al-Dabai (Syrie) Hazrat Ayatullah Kashani (Iran)[12].
- 1959 : le CongrĂšs soumet Ă lâONU une pĂ©tition de soutien aux droits des musulmans du Cachemire Ă lâautodĂ©termination, qui a rĂ©uni un million de signatures[13] ;
- De 1951 à 1999, plusieurs conférences du CongrÚs (Motamar) se sont tiennent dans plusieurs pays, dont à Bagdad en 1962. Ces conférences ont promu la coopération dans divers champs (dont politique, économique, religieux, éducationnnel et culturel)[5].
En mars 1984 le congrĂšs organise Ă Karachi un sĂ©minaire sur la course aux armements nuclĂ©aires et sur le dĂ©sarmement, afin de produire un point de vue commun des « nations » musulmanes sur la question. Depuis 1926, les confĂ©rences ont dĂ©fendu les musulmans palestiniens, Kashmiris et philippins, la libertĂ© des populations musulmanes dans les pays europĂ©ens qui Ă©taient encore coloniaux, et plus rĂ©cemment les musulmans de Bosnie[14] et du Kosovo, et de maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale lâĂ©mancipation Ă©conomique de la communautĂ© musulmane (Ummah) [5] - [15] ;
Le secrĂ©tariat du CongrĂšs compile aussi des avis ou documents sur divers sujets comme lâusure[16].
Dans toute lâhistoire du CongrĂšs mondial musulman (Motamar al-Alam al-Islami) le Pakistan joue un rĂŽle pivot ; et il en va de mĂȘme pour lâorganisation de la confĂ©rence islamique (OIC pour Organization of the Islamic Conference), la ligue mondiale musulmane (Rabita al-Alam al- Islami (World Muslim League), and (World Muslim Congress) et il a mis Ă disposition des moyens humains pour soutenir les projets pan-islamistes crĂ©Ă©s ou promus par lâArabie Saoudite[17] - [18] - [19].
Personnalités
- Inamullah Khan a reçu le prix Niwano de la paix en 1987[20], puis le il a reçu le Templeton Prize[21].
Références
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- Merad A (2007). La diffusion de l'Islam dans le monde. Que sais-je?, (2195), 105-122.
- (en) F. Rahman (1964). âWhat is Islamic Culture. Motamar Al-Alam Al-Islamiâs Islamic Culture, 30.
- (en) Kayaoglu T (2014). Giving an inch only to lose a mile : Muslim states, liberalism, and human rights in the United Nations. Human Rights Quarterly, 36(1), 61-89.
- (en) histoire du CongrÚs islamique mondial (Motamar al-Alam al-Islami) présentée (en anglais) par son site internet ; consulté le 03-09-2017.
- (en) Dr. Abdullah Bin Omar Nasseef, Muslim, SAUDI ARABIA President, World Muslim Congress (fiche de présentation, en anglais).
- (en) Martin Kramer, Muslim Congresses", The Oxford Encyclopedia of the Modern Islamic World.
- (en) Mattar P (1988) The Mufti of Jerusalem and the politics of Palestine. Middle East Journal, 42(2), 227-240.
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- Husain Haqqani (2005)Les idéologies des groupes jihadistes de l'Asie du Sud, «Tendances actuelles de l'idéologie islamiste», vol. 1 19 mai 2005.
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- EvÚnements, listés par le CongrÚs.
- (en) Haque, M. (1993). « Bosnian Tragedy, Role of the Muslim Ummah and the World Communityâ. Pakistan Horizon, 46(1), 47-59.
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- (en) Niwano Peace Foundation, The World Muslim Congress.
- (en) New York Times, 19 April 1988, Anti-Semitism Charges Lead To Delay on Religion Prize.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Bibliographie
- Hayat S.U.(2006) World Muslim Unity Efforts and the Creation of the Organization of the Islamic Conference : An Overview. Journal of the Research Society of Pakistan, 43(1), 177.
- Ihsanoglu E (2010) The Islamic World in the New Century: The Organisation of the Islamic Conference. Hurst Publishers.
- Khan I (1967) Islam in the contemporary world. Umma Pub. House.
- Pirzada S.S (1987) Pakistan and the OIC. Pakistan Horizon, 40(2), 14-38.
- Qureshi M.I (1993) World Muslim Minorities. Motamar Al-Alam Al-Islami (World Muslim Congress).
- Mattar P (1988) The Mufti of Jerusalem and the politics of Palestine. Middle East Journal, 42(2), 227-240.