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Christine l'Admirable

Christine l'Admirable (Christina Mirabilis), nĂ©e selon la tradition Ă  Brustem (prĂšs de Saint-Trond) en Belgique vers 1150 et morte le Ă  l'abbaye bĂ©nĂ©dictine Sainte-Catherine Ă  Saint-Trond, est une sainte localement commĂ©morĂ©e le , bien que son culte n'ait jamais Ă©tĂ© confirmĂ© par l'Église. Elle est connue pour d'Ă©tranges descriptions de visions impressionnantes et pour avoir vĂ©cu des phĂ©nomĂšnes paranormaux.

Christine l'Admirable
Image illustrative de l’article Christine l'Admirable
Vierge, mystique, sainte (?)
Naissance v. 1150
Brustem, comté de Looz, Saint-Empire romain germanique
DĂ©cĂšs 24 juillet 1224 (v. 74 ans)
Saint-Trond, comté de Looz
Nationalité Belge
FĂȘte 24 juillet
Sainte patronne personnes atteintes de trouble psychique, psychiatres, infirmiers psychiatrique, pécheurs, maladies infectieuses, animaux agressifs ou malades, mort douce et sainte

Biographie et légendes

Le rĂ©cit de sa vie[1] est principalement connu par la narration qu'en fit Thomas de CantimprĂ©. Fille de paysans, Ă  la mort de ses parents, Christine mĂšne une vie religieuse avec ses deux sƓurs. La plus jeune des trois, elle est chargĂ©e de mener les animaux aux champs. Le Christ lui apparaĂźt frĂ©quemment. Au bout de quelque temps elle perd la vie. Elle se rĂ©veille au cours de ses funĂ©railles, stupĂ©fiant l'assistance ; son corps s'Ă©lĂšve jusqu'aux combles de l'Ă©glise. Elle expliqua par la suite qu'elle n’arrivait pas Ă  supporter l'odeur des pĂ©cheurs qui se trouvaient Ă  cĂŽtĂ© d’elle[2], puis « l’étonnement s’accrut quand on apprit de sa propre bouche ce qui lui Ă©tait arrivĂ© aprĂšs sa mort ».

Elle rapporta qu'elle avait vu ce qu’étaient le ciel, l'enfer et le purgatoire. Elle raconta, est-il Ă©crit, « dĂšs que mon Ăąme eut Ă©tĂ© sĂ©parĂ©e de mon corps, elle fut reçue par les anges qui la conduisirent dans un endroit trĂšs sombre, entiĂšrement rempli d'Ăąmes » et les supplices qu'ils y enduraient « semblaient si dĂ©mesurĂ©s » qu'il Ă©tait « impossible de donner une idĂ©e de leur rigueur ».

Elle poursuivit :

« J'ai vu parmi eux beaucoup de mes connaissances et, profondĂ©ment touchĂ©e de leur triste condition, j‘ai demandĂ© si c'Ă©tait l'enfer, mais on m'a dit que c'Ă©tait le purgatoire ». Ses anges gardiens la conduisirent jusqu'Ă  l'enfer oĂč de nouveau elle identifia ceux qu'elle avait autrefois connus. Ensuite elle fut transportĂ©e au ciel, « et mĂȘme jusqu’au trĂŽne de la MajestĂ© divine », oĂč elle fut « regardĂ©e d'un Ɠil favorable », elle Ă©prouva une joie extrĂȘme et ces paroles lui furent dites : « En vĂ©ritĂ©, ma chĂšre fille, tu seras un jour avec moi. Maintenant, cependant, je te permets de choisir, soit de rester avec moi dĂšs maintenant, soit de revenir sur Terre pour accomplir une mission de charitĂ© et de souffrance. Afin de libĂ©rer des flammes du purgatoire les Ăąmes qui t’ont inspirĂ© tant de compassion, tu vas souffrir pour elles sur la terre : tu vas supporter de grands tourments, sans pour autant mourir de leurs effets. Et non seulement tu soulageras les dĂ©funts, mais l'exemple que tu donneras aux vivants et ta souffrance continuelle amĂšneront les pĂ©cheurs Ă  se convertir et Ă  expier leurs crimes. AprĂšs avoir terminĂ© cette nouvelle vie, tu retourneras ici chargĂ©e de mĂ©rites. »

Christine, en entendant cela, voyant quels grands avantages en retireraient les Ăąmes, dĂ©cida sans hĂ©sitation de revenir Ă  la vie et ressuscita immĂ©diatement. Elle dit Ă  son entourage que son seul dessein en revenant sera le soulagement des morts et la conversion des pĂ©cheurs et que personne ne devrait s’étonner des pĂ©nitences qu'elle pratiquera, ni de la vie qu'elle mĂšnera par la suite. On rapporte qu’elle a dit : « ce sera tellement extraordinaire que rien de semblable ne se sera jamais vu ». Faire pĂ©nitence pour les Ăąmes du purgatoire et de l'enfer devait dĂ©sormais devenir la plus grande prĂ©occupation de sa vie.

Christine se disposa Ă  la mission qu'elle avait acceptĂ©e auprĂšs de Dieu, renonçant Ă  tous les conforts de la vie, se rĂ©duisant Ă  un strict dĂ©nuement. Elle vĂ©cut sans domicile un peu Ă  l'Ă©cart, mais soupçonnĂ©e d'ĂȘtre possĂ©dĂ©e, elle a Ă©tĂ© emprisonnĂ©e. À sa libĂ©ration, elle a commencĂ© Ă  pratiquer des pĂ©nitences, et non contente de ces privations, elle chercha avidement tout ce qui pourrait la faire souffrir.

Christina Mirabilis, fĂȘte le 24 juillet, calendrier des saints Fasti Mariani (1630).

Selon les chroniques de ses contemporains, en particulier Thomas de CantimprĂ© — alors chanoine rĂ©gulier et professeur de thĂ©ologie remarquable — et le cardinal Jacques de Vitry qui la rencontra, elle se jetait dans des fours brĂ»lants et y subissait de grandes tortures pendant des pĂ©riodes prolongĂ©es, poussant des cris terrifiants, mais sortant sans aucun signe de brĂ»lures. En hiver, elle plongeait dans la Meuse gelĂ©e pendant des heures, voire Ă  chaque fois pendant des jours et des semaines, tout en priant Dieu et en implorant sa misĂ©ricorde. Elle se laissait parfois emporter par les courants en aval jusqu’à un moulin oĂč la roue « la faisait tourbillonner d'une maniĂšre terrible Ă  voir », mais jamais elle ne souffrit de voir ses os disloquĂ©s ou brisĂ©s. Elle fut pourchassĂ©e par des chiens qui mordaient sa chair et la dĂ©chiraient. Elle courut pour leur Ă©chapper dans des fourrĂ©s d'Ă©pines, et, bien que couverte de sang, elle revint sans blessure ni cicatrice.

AprĂšs avoir Ă©tĂ© incarcĂ©rĂ©e une seconde fois, elle modĂ©ra quelque peu ses dispositions. Christine mourut de mort naturelle Ă  l'abbaye bĂ©nĂ©dictine Sainte-Catherine Ă  Saint-Trond oĂč elle serait venue pour bĂ©nĂ©ficier d'un soin ou pour prendre un peu de repos.

Il est dit qu'il s'était passé 42 ans aprÚs son retour à la vie, ce qui conduit à placer cet événement en 1182. L'éditeur de sa vie dans les Acta Sanctorum, Jan Pinius, propose sans fournir de justifications qu'elle aurait eu à cette date 32 ans. Dans une publication récente, Sylvain Piron suggÚre qu'elle n'aurait eu que 12 ans et serait donc née vers 1170[3]. Pour la tradition, elle est morte à l'ùge de 74 ans en 1224.

Vénération

Recto d'une carte de priĂšre de 1892 confirmant par l'Ă©vĂȘque Victor-Joseph Doutreloux que ses reliques sont gardĂ©es par les rĂ©demptoristes et que sa fĂȘte est le 24 juillet.

AprÚs avoir été témoignée et relatée par Thomas de Cantimpré et le cardinal Jacques de Vitry, saint Robert Bellarmin soutiendra à la fois l'auteur et la sainte en précisant que sans doute « Dieu a voulu faire taire ces libertins qui font ouvertement profession de ne croire à rien, et qui ont l'audace de demander avec mépris : "Qui est revenu de l'autre monde ? Qui a déjà vu les tourments de l'enfer ou du purgatoire ?". Voici deux témoins qui nous assurent qu'ils les ont vus et qu'ils sont affreux. Que s'ensuit-il donc, sinon que les incrédules sont inexcusables, et que ceux qui croient et pourtant négligent de faire pénitence sont encore plus à condamner ? »[4].

L’orientaliste Louis Massignon fut trĂšs impressionnĂ© par elle, et il lui consacra un texte publiĂ© dans La citĂ© chrĂ©tienne suivi d'un volume en 1950, ainsi que des confĂ©rences.

Sainte Christine l'Admirable est reconnue comme sainte depuis le XIIe siĂšcle. Elle a Ă©tĂ© confirmĂ©e dans le calendrier des saints par l'Ă©vĂȘque Victor-Joseph Doutreloux et le pape Pie IX qui ont reconnu sa vie comme pleinement religieuse autorisant sa vĂ©nĂ©ration. L'Église catholique la fĂȘte le 24 juillet, avec une dĂ©votion plus marquĂ©e dans sa rĂ©gion natale du Limbourg.

Représentation

Alors qu'elle n'a jamais appartenu à un ordre, dans l'art religieux, Christine est principalement représentée comme une nonne ailée. Malgré sa vie atypique s'apparentant à un ange et à une pénitente, ayant vécu des expériences extatiques, elle est reconnue sainte et montrée comme une religieuse à part entiÚre, capable d'intercéder pour les fidÚles.

Postérité

Le chanteur Nick Cave a Ă©crit un morceau sur Christine l'Admirable, Christina the Astonishing, sur l'album Henry's Dream sorti en 1992.

Notes et références

  1. Anne-Françoise Leurquin, « “Voy doncques o liseur a quans mault nous sommes obligiez”. La traduction de la ‘Vie de Christine l'Admirable’ de Thomas de CantimprĂ©" », dans StĂ©phanie Le Briz et GĂ©raldine Veysseyre, Approches du bilinguisme latin-français au Moyen Âge : linguistique, codicologie, esthĂ©tique, Turnhout, Brepols, coll. « Collection d'Ă©tudes mĂ©diĂ©vales de Nice » (no 11), , 99-163 p. (lire en ligne)
    Texte français médiéval édité en parallÚle avec sa source latine
  2. (en) Feast Day Of St. Christina The Astonishing
  3. Sylvain Piron, Christine l'Admirable. Vie, chants et merveilles, Bruxelles, Vues de l'esprit, , 208 p. (ISBN 978-2-931146-00-2)
  4. Propos de Robert Bellarmin, partie 1, fin du chapitre XII Les douleurs du purgatoire : Robert Bellarmin et sainte Christine l'Admirable, Purgatory, frÚre François Xavier Schouppe s.j., Tan books.

Voir aussi

Bibliographie

  • Sylvain Piron, Christine l'Admirable. Vie, chants et merveilles, Bruxelles, Vues de l'esprit, 2021, 208 p. (ISBN 978-2-931146-00-2)
  • Anne-Françoise Leurquin-Labie, « Voy doncques o liseur a quans mault nous sommes obligiez : La traduction de la Vie de Christine l'Admirable de Thomas de CantimprĂ© », in Approches du bilinguisme latin-français au Moyen Âge : linguistique, codicologie, esthĂ©tique de StĂ©phanie Le Briz et GĂ©raldine Veysseyre, Éd. brepols, 2010, pp. 99-163 voir en ligne
  • (en) Jennifer M. Brown, Three Women of LiĂšge : A Critical Edition and Commentary on the Middle English Lives of Elizabeth of Spalbeek, Christina Mirabilis, and Marie d'Oignies, Turnhout : Brepols, 2009 (ISBN 978-2-503-52471-9)
  • Simons Walter, Cities of Ladies : Beguine communities in the Medieval Low Countries (1200-1565), University of Pennsylvania Press, 2001
  • Ekkart Sauser, « Christina die Wunderbare (Mirabilis) », in Biographisch-Bibliographisches Kirchenlexikon, Herzberg, vol. 17, 2000 (ISBN 3-88309-080-8)
  • (en) Thomas de CantimprĂ©, The Life of Christina the Astonishing, Toronto : Margot H. King, 1999 (ISBN 0-920669-44-1)
  • (en) Medieval Saints : A Reader, Toronto : Mary-Ann Stouck, 1999 (ISBN 1-55111-101-2).
  • (la) Thomas de CantimprĂ©, « De S. Christina Mirabili Virgine Vita Â» in Acta Sanctorum, vol. 24 () 5, p. 650-656

Liens externes

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