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Cheval androcéphale

Le cheval androcéphale est un motif de cheval à tête humaine et attributs masculins, présent sur de nombreuses pièces de monnaies celtiques de l'Antiquité frappées par des peuples celtes établis sur la façade atlantique, surtout en Armorique. Ce motif est présent sur les monnaies des Vénètes, des Aulerques Cénomans et des Trévires. Il orne également un couvercle de cruche retrouvé à Reinheim dans l'ouest de l'Allemagne.

Cheval androcéphale ailé (à droite) sur un statère en or des Cénomans.

L'origine et le sens de ce motif, en particulier son lien éventuel avec la mythologie celtique, restent cependant obscurs. Les possibilités vont d'une inspiration du mythe du centaure à une représentation du Dieu Sucellos, en passant par un pendant masculin de la déesse Épona, et un symbole de la puissance vitale guerrière.

Des pièces de monnaies celtiques au cheval androcéphale sont notamment conservées au musée de Bretagne, à Rennes.

Description

Cheval androcéphale sur un statère frappé par les Andécaves.

Un cheval androcéphale est un motif de cheval doté d'une tête humaine masculine, sans buste ni bras, au contraire d'un centaure[1]. Son pénis est généralement représenté de façon évidente, peut-être pour symboliser sa virilité[1]. Plus rarement, il est figuré ailé ; c'est le cas chez les Aulerques Cénomans[1]. De manière générale, sa représentation évoque davantage l'animalité que celle du centaure[1].

Ce motif est fréquemment figuré courant à droite, sur le revers des pièces de monnaie[2]. Il peut aussi tirer un char ou bien une roue[3].

Il peut être accompagné de représentations de personnages terrassés sous ses sabots, souvent ailés[4]. Enfin, le cheval androcéphale peut être guidé par un aurige fantastique[4].

Fréquence et localisation des représentations

Statère de billon frappé par les Coriosolites, vers 80-50 AC. Cheval androcéphale bridé, galopant à droite ; au-dessus, restes de la tête de l'aurige et hampe pointée ; entre les jambes, un sanglier enseigne ; devant le cheval, une barrière.

D’après l'archĂ©ologue Venceslas Kruta, le cheval est l’un des thèmes les plus frĂ©quents dans l'art celte, sur cinq siècles[5]. Cette frĂ©quence est plus particulièrement constatĂ©e sur le revers des pièces de monnaie, le cheval Ă©tant de très loin le motif prĂ©dominant[5] - [6]. Les plus anciennes pièces de monnaies celtes retrouvĂ©es datent d'environ 300 av. J.-C., et copient initialement des monnaies grecques, notamment celles de Philippe II[7]. D'après les archĂ©ologues Katherine Gruel et Eneko Hiriart, l'iconographie des premières pièces « vĂ©hicule des valeurs aristocratiques reconnues dans le monde celtique : l’hĂ©roĂŻsation du chef, l’exploit militaire, l’importance du char, etc »[8]. Ces premières copies reprennent au revers le char qui figurait sur les pièces copiĂ©es, puis s'en Ă©mancipent peu Ă  peu Ă  partir de la fin du IIIe siècle av. J.-C., en adoptant leur propre iconographie, caractĂ©risĂ©e par une grande diversitĂ©[6]. Une vaste mythologie se dĂ©veloppe autour du cheval, chaque atelier monĂ©taire celte dĂ©veloppant sa propre figuration de cet Ă©quidĂ©[9]. Parmi cette diversitĂ© de reprĂ©sentations, l'une des plus singulières est le motif du cheval androcĂ©phale, caractĂ©ristique des peuples celtes Ă©tablis sur la façade atlantique depuis l'estuaire de la Gironde jusqu'Ă  la cĂ´te normande[9].

Selon le rĂ©pertoire dressĂ© par Henri de La Tour en 1892 sur la base du cabinet des mĂ©dailles de la BnF, sur 1 570 revers de pièces conservĂ©es, 1 169 ont pour motif un cheval, dont 139 un cheval androcĂ©phale, soit 9 % du total[5].

Ce cheval androcéphale est présent sur tous les monnayages retrouvés en Armorique celtique, depuis les plus anciens existants jusqu'à l'époque d'Auguste[1]. Ce type de représentation a été retrouvé chez les Vénètes, les Aulerques Cénomans et les Trévires[4]. Des pièces similaires ont été retrouvées chez les Éduens, et sporadiquement en Gaule belgique[1]. Ces pièces de monnaies sont décrites au XIXe siècle[10].

Le motif du cheval androcéphale est présent sur d'autres supports de représentations du bestiaire celtique. Un couvercle de cruche portant ce motif a été retrouvé à Reinheim[1].

Origine et signification

Statère d'électrum vénète, vers 80-50 AC. Cheval androcéphale à gauche ; un petit personnage recroquevillé et ailé entre les jambes du cheval ; au-dessus de la croupe, une tête coupée terminée par une croix en guise de stimulus devant le poitrail du cheval.

Le cheval androcéphale est un motif purement celtique[11].

Si une inspiration du mythe grec du centaure a été évoquée, elle est réfutée par la plupart des spécialistes récents, notamment à cause des différences morphologiques[4] - [12] - [11]. Kruta estime que le seul point commun entre les deux motifs est d’associer un homme à un cheval, aucun élément ne permettant d’établir une filiation[11].

Il est possible que le cheval androcéphale corresponde au pendant masculin de la déesse Épona, au dieu Apollon Maponos, ou au dieu gallois Mabon[4]. Il est également suggéré que sa représentation fantastique symbolise la puissance vitale des guerriers[4]. En effet, le cavalier militaire apparaît au sommet de la hiérarchie sociale guerrière des Celtes[12].

Gruel et Hiriart soulignent que la fusion du corps de l'homme et du cheval se retrouve dans la légende bretonne du roi Marc'h, doté d'oreilles de cheval[12].

Conservation

Un grand nombre de pièces à motif de cheval androcéphale sont conservées au musée de Bretagne, à Rennes[13].

Notes et références

  1. Gruel et Morin 1999, p. 38.
  2. Ed Lambert, Essai sur la numismatique Gauloise du Nord-Ouest de la France, E. Derache, (lire en ligne).
  3. Ephrem Houël, Histoire du cheval chez tous les peuples de la terre : depuis les temps les plus anciens jusqu'à nos jours, Bureau du Journal des Haras, (lire en ligne), p. 113.
  4. Gruel et Morin 1999, p. 39.
  5. Kruta 2012, p. 43.
  6. Gruel et Hiriart 2018, p. 62.
  7. Gruel et Hiriart 2018, p. 59.
  8. Gruel et Hiriart 2018, p. 61.
  9. Gruel et Hiriart 2018, p. 63.
  10. France Commission de la topographie des Gaules, Dictionnaire archéologique de la Gaule : époque celtique, Imprimerie nationale, (lire en ligne), p. 94.
  11. Kruta 2012, p. 44.
  12. Gruel et Hiriart 2018, p. 64.
  13. Gruel et Morin 1999.

Annexes

Bibliographie

  • [Gruel 1993] Katherine Gruel, « Le Cheval androcĂ©phale sur les monnaies celtiques », dans Actes du 11e congrès international de numismatique, II, Louvain-la-Neuve, SĂ©minaire de Numismatique Marcel Hoc, , 27-35 p.
  • [Gruel et Hiriart 2018] Katherine Gruel et Eneko Hiriart, « Les Ă©lites celtiques. Le tĂ©moignage des monnaies », L'ArchĂ©ologue / ArchĂ©ologie Nouvelle, no 146,‎ , p. 58-71 (lire en ligne)
  • [Gruel et Morin 1999] Katherine Gruel et Éric Morin, Les monnaies celtes du MusĂ©e de Bretagne, Paris, Maison Florange, , 206 p. (ISBN 2-911440-37-4, OCLC 468406045, BNF 37077686), « Le cheval androcĂ©phale »
  • [Kruta 2012] Venceslas Kruta, « La place et la signification du cheval dans l’imagerie celtique », Études celtiques, vol. 38, no 1,‎ , p. 43–59 (DOI 10.3406/ecelt.2012.2346, lire en ligne, consultĂ© le )
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