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Campagne scythe de Darius Ier

La campagne scythe de Darius Ier est une expĂ©dition militaire dans certaines rĂ©gions de la Scythie europĂ©enne menĂ©e par Darius Ier, le roi de l'empire achĂ©mĂ©nide, en [1] Les Scythes sont un peuple de langue iranienne orientale qui avaient envahi la MĂ©die, une rĂ©gion du nord-ouest de l’Iran actuel. Ils se rĂ©voltent contre Darius et menacent de perturber le commerce entre l'Asie centrale et les rives de la mer Noire. À cette Ă©poque, ils vivent entre le Danube, le Don et la mer Noire[2] - [3]. La campagne se dĂ©roule dans ce qui est maintenant les Balkans, l'Ukraine et le sud de la Russie.

Itinéraire de Darius Ier.

Les Scythes réussissent à éviter une confrontation directe avec l'armée perse grùce à leur mode de vie mobile et à l'absence de toute colonie (à l'exception de Gélonos), tandis que les Perses subissent des pertes à cause de la tactique de la terre brûlée des Scythes. Malgré tout, les Perses conquiÚrent une grande partie de leurs terres cultivées et affaiblissent leurs alliés, obligeant les Scythes à respecter leurs forces. Mais Darius stoppe son avance pour éviter de nouvelles pertes et construit une ligne de défense.

DĂ©roulement de la campagne

Jonction de la flotte ionienne et de l'armée perse au Bosphore, en préparation de la campagne scythe. Illustration du XIXe siÚcle.

DĂ©buts de la campagne

Darius traverse le dĂ©troit du Bosphore en utilisant un pont de bateaux. Il conquiert de grandes parties de l'Europe de l'Est, traversant mĂȘme le Danube Ă  la poursuite des Scythes. Avec son gĂ©nĂ©ral Megabazus, Darius envahit la Scythie oĂč les Scythes se rĂ©fugient pour Ă©chapper Ă  son l'armĂ©e. Ces derniers utilisent des feintes pour s'Ă©chapper et se retirent vers l'est tout en ravageant le territoire, en bouchant des puits, en interceptant des convois, en dĂ©truisant des pĂąturages. Durant cette retraite ils poursuivent leurs escarmouches continuelles contre l'armĂ©e de Darius[4]. Cherchant la confrontation avec les Scythes, l'armĂ©e de Darius les chasse assez profondĂ©ment dans leurs terres, principalement dans l'actuelle Ukraine. LĂ , il n'y a aucune ville Ă  conquĂ©rir et aucun approvisionnement en fourrage. ExaspĂ©rĂ©, Darius envoie une lettre au dirigeant scythe Idanthyrse le sommant de se battre ou de se rendre. Celui-ci lui a rĂ©pondu qu'il ne se lĂšverait pas et ne se battrait pas avec Darius, sauf si les Perses trouvent et profanent les tombes des ancĂȘtres des Scythes. Ils poursuivent donc leur stratĂ©gie car ils n'ont ni villes, ni terres cultivĂ©es Ă  perdre[5]. MalgrĂ© les tactiques de dĂ©robades des Scythes, la campagne de Darius est jusqu'ici relativement rĂ©ussie[6]. Telle qu'elle est prĂ©sentĂ©e par HĂ©rodote, la tactique des Scythes entraine la perte de leurs meilleures terres et des dommages Ă  leurs fidĂšles alliĂ©s[6]. Le fait est donc que Darius prend l'initiative[7]. Pendant qu'il se dĂ©place vers l'est dans les terres cultivĂ©es des Scythes, il reste approvisionnĂ© par sa flotte et peut dans une certaine mesure se ravitailler sur le terrain conquis[6]. En se dĂ©plaçant vers l'est dans les terres scythes europĂ©ennes, il prend GĂ©lonos, la grande ville fortifiĂ©e des Budins, alliĂ©s des Scythes, et l'incendie[6].

Fin de la campagne

Darius traversant le Bosphore.
L'Empire achéménide à son apogée sous Darius Ier.
Carte du monde basée sur les Histoires d'Hérodote.

Darius ordonne une halte sur les rives de l'Oarus, oĂč il construit « huit grands forts, distants de huit milles environ », sans doute pour dĂ©fendre la frontiĂšre[6]. Comme le Cambridge Ancient History: la Perse, la GrĂšce et la MĂ©diterranĂ©e occidentale C. 525 Ă  479 BC le dĂ©clare, il est Ă©vident que Darius n'a pas l'intention d'aller plus loin vers l'est, tout au moins Ă  ce moment. AprĂšs avoir pourchassĂ© les Scythes durant un mois, l'armĂ©e de Darius subit des pertes dues Ă  la fatigue, aux privations et aux maladies[6]. Dans ses Histoires, HĂ©rodote dĂ©clare que les ruines des forts sont toujours debout Ă  son Ă©poque. Inquiet de perdre davantage de troupes, Darius arrĂȘte la marche sur les rives de la Volga et se dirige vers la Thrace[8]. Il ne rĂ©ussi pas Ă  contraindre les Scythes Ă  une bataille directe et, jusqu'Ă  ce qu'il y arrive, il n'a pas beaucoup de raisons de sĂ©curiser les territoires conquis. L’initiative lui appartient toujours[6]. La tactique de fuite et de politique de la terre brĂ»lĂ©e pratiquĂ©e par les Scythes s'avĂšre donc ĂȘtre un Ă©chec, mĂȘme si Darius, dans une certaine mesure, Ă©choue Ă©galement car il n'est toujours pas capable d'amener ses ennemis Ă  une confrontation directe[6]. Mais il conquiert suffisamment de territoire scythe pour les obliger Ă  respecter les forces perses[9].

Autres raisons de l'invasion au-delĂ  du Danube

Soldats perses combattant contre des Scythes ou des Sogdiens, Empreinte de joint de cylindre (dessin)[10].
Les Grecs d'Histiée gardent le pont de Darius I sur le Danube. Illustration du 19e siÚcle.

Toute le territoire, du centre de la Thrace Ă  la GĂ©orgie et de l'Ukraine au nord-est de la MĂ©diterranĂ©e, forme une zone compacte avec des intĂ©rĂȘts Ă©conomiques mutuels entre les Scythes, les Thraces ou les Ioniens et les Iraniens[6]. En termes stratĂ©giques, Darius constate que certains peuples de type scythe s'Ă©tendent de l'Ukraine jusqu'Ă  ce qui est l'OuzbĂ©kistan moderne, formant un continuum d'aventuriers nomades dangereux[6]. En outre, le contrĂŽle de la mer Noire ne reconnait aucune division internationale. Les Perses et les Grecs (dont beaucoup vivent dans l'Empire perse, tandis que d'autres vivent dans les colonies grecques de ce qui est aujourd'hui le sud de l'Ukraine) ont un intĂ©rĂȘt commun Ă  chercher Ă  contrĂŽler la source des exportations d'or scythes, de cĂ©rĂ©ales, de peaux, et de fourrures. Comme le dit l'histoire ancienne de Cambridge, CtĂ©sias, un mĂ©decin grec Ă  la cour perse en 400 av. J.-C., a Ă©crit qu'avant l'invasion de Darius dans les terres scythes europĂ©ennes, un satrape de Cappadoce nommĂ© Ariaramnes avait traversĂ© la mer Noire au nord, attaquant les rĂ©gions scythes europĂ©ennes avec une flotte de trente pentĂ©contĂšres, revenant avec des hommes et des femmes scythes, y compris le frĂšre d'un roi scythe[6].

Alors que certains ont supposé que le but des invasions de Darius était simplement de détruire les terres scythes, l'érection d'un pont sur l'Hellespont contredit cette thÚse car cette flotte importante aurait pu facilement expédier les troupes alors que les Scythes n'avaient pas du tout de marine[6].

Bien qu'HĂ©rodote ne mentionne pas la saison de l'annĂ©e, comme le dit l'Histoire ancienne de Cambridge, il est possible de le dĂ©duire, sachant que si Darius a marchĂ© depuis Suse au printemps 513, il aurait atteint ChalcĂ©doine en mai et rassemblĂ© ses forces sur la cote europĂ©enne en juin. Ainsi, il a peut-ĂȘtre franchi le Danube Ă  la fin du mois d'aoĂ»t[6].

Conséquences

Roi achéménide combattant les hoplites, sceau et porte-sceau, Bosphore cimmérien.
"Scythe de l'autre cÎté de la mer", représenté comme un soldat de l'armée achéménide vers 480 avant notre Úre sur la tombe de XerxÚs I à Naqsh-e Rustam.

Comme le dit l'histoire de Cambridge, Darius inflige des dommages importants aux Scythes et Ă  leurs alliĂ©s. En particulier il affaiblit le prestige des Scythes royaux et bouleverse l'Ă©quilibre des pouvoirs entre les diffĂ©rents peuples de la rĂ©gion[6]. Mais parce qu'il ne rĂ©ussit pas Ă  se confronter directement avec les Scythes dans une bataille, il est incapable d'obtenir des gains territoriaux et ne peut mĂȘme pas terminer la construction des forts pour dĂ©limiter ce qui aurait pu ĂȘtre une frontiĂšre[6]. La campagne n'est guĂšre plus qu'une impasse coĂ»teuse[6]. L'hiver Ă©tant maintenant arrivĂ©, Darius ne repart pas Ă  l'attaque et marche vers la Thrace, vers ses territoires bien sĂ©curisĂ©s[6].

Une certaine forme de pouvoir perse s'est peut-ĂȘtre maintenue aprĂšs le retrait de Darius, car les « Scythes de l'autre cĂŽtĂ© de la mer » (ancien cunĂ©iforme persan : đŽżđŽŁđŽ đđŽ«đŽč𐎡đŽčđđŽ±đŽŒđŽ­đŽŒđŽč, Sakā tayaiya paradraya)[11] sont mentionnĂ©s Ă  Naqsh-e Rostam comme l'un des peuples que le roi a conquis en dehors de la Perse[12]. La domination perse n'aurait jamais pu s'Ă©tendre au-delĂ  du Danube, quelle que soit sa force[12].

Analyse

La campagne de Scythie a Ă©tĂ© dĂ©cisive dans la mesure oĂč les Perses ont abandonnĂ© la tentative d'assujettir les Scythes europĂ©ens[6]. HĂ©rodote avait raison de dire que les Scythes devaient leur fuite Ă  leur mobilitĂ©, Ă  leur manque de centres habitĂ©s, et l'habiletĂ© de leurs archers Ă  cheval[6]. Il dĂ©clare en outre que leur refus de se soumettre Ă  la Perse Ă©tait dĂ» Ă  des facteurs tels que le pouvoir autoritaire des rois, la haine gĂ©nĂ©ralisĂ©e des Ă©trangers (IV.76.1)[6], et la croyance de l'homme ordinaire que ce qui lui apporte l'honneur, Ă  lui et Ă  sa tribu, c'est de tuer ses ennemis[6]. Les diverses tribus scythes ont coopĂ©rĂ© les unes avec les autres, gagnant Ă©galement le soutien d'autres peuples voisins[6]. À cet Ă©gard, comme le dĂ©clare l'histoire antique de Cambridge, ils ont fait preuve d'un plus grand sens de la communautĂ© que les citĂ©s-États grecques pendant la majeure partie des guerres mĂ©diques suivantes[6].

Notes et références

  1. Miroslav Ivanov Vasilev. "The Policy of Darius and Xerxes towards Thrace and Macedonia" (ISBN 9004282157) p 70
  2. Shahbazi 1996, p. 41.
  3. Woolf 2004, p. 686.
  4. Ross 2004, p. 291.
  5. Beckwith 2009, p. 68-69.
  6. Boardman 1982.
  7. Boardman 2012.
  8. Chaliand 2004, p. 16.
  9. Shahbazi 1996, p. 45.
  10. (en) Charles W. Hartley, G. Bike Yazicioğlu et Adam T. Smith, The Archaeology of Power and Politics in Eurasia : Regimes and Revolutions, Cambridge/New York, Cambridge University Press, , 470 p. (ISBN 978-1-107-01652-1, lire en ligne), p. 83
  11. (en) DNa - Livius (lire en ligne)
  12. Boardman 1982, p. 67.

Sources antiques

Bibliographie

  • (en) The Cambridge Ancient History, vol. 10: Persia, Greece, and the Western Mediterranean, Cambridge, Royaume-Uni, Cambridge University Press, , 239–243 p. (ISBN 978-0-521-22804-6)

Articles connexes

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