Bernard Vaugon
Bernard Modeste Jules Vaugon (né le à Pré-en-Pail et mort le à Paris[2] - [3]) est un haut fonctionnaire français. Il fut préfet dans plusieurs départements.
Préfet de l'Hérault Hérault | |
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Préfet du Doubs | |
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Préfet du Gard | |
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Michel Grollemund (d) | |
Préfet de Corse Corse | |
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Préfet de la Nièvre Nièvre | |
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Naissance | |
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Décès |
(Ă 102 ans) 16e arrondissement de Paris |
SĂ©pulture | |
Nationalité | |
Formation |
École des hautes études commerciales de Paris Faculté de droit et des sciences économiques de Paris (d) |
Activité |
Distinctions | |
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Archives conservées par |
Archives nationales (AJ/40/542)[1] |
Accusé d'avoir servi le Régime de Vichy, il fut l'un des principaux acteurs du procès[4] de Maurice Papon[5] en 1997, qu'il défendit pendant son témoignage sur la préfecture régionale de Bordeaux pendant la seconde guerre mondiale, son organisation, les attributions de Maurice Papon et le service des questions juives.
Parcours
Son parcours dans la préfectorale commence durant le régime de Vichy[note 1]. Il est successivement :
- Chef de cabinet adjoint du préfet de police de Paris (1941)[note 2].
- Sous-préfet de l’arrondissement de Dax (1943). Bernard Vaugon, à la sous préfecture de Dax, est dénoncé par Je suis partout, et envoyé en Dordogne pour être soustrait à la méfiance allemande[6].
- Secrétaire général de la préfecture de la Dordogne[7].
- Sous-préfet de l'arrondissement de Soissons[8] depuis le 8 février 1944.
À la Libération de Soissons, fin août 1944, il est le seul sous-préfet de l’Aisne à conserver son poste, pour aide à la Résistance[9], et ce jusqu'en 1950. Il travaille avec les Américains pour faire face aux dégâts de la guerre, sous l'autorité du nouveau préfet de l'Aisne (et ancien résistant francilien) Pierre Pène, nommé par De Gaulle, puis de ses successeurs.
Il reprend ensuite un parcours au sein de la préfectorale dans différents départements :
- Sous-préfet de Mulhouse (1950) ;
- Secrétaire général de la préfecture de Seine-et-Oise[10] (1950-1954) ;
- Préfet de la Nièvre (1954-1958)[11] ;
- Préfet de la Corse (1959-1962).
En juin 1959, il fait partie de vingt personnalités conviées au vol inaugural Caravelle de la première ligne internationale à l'Aéroport de Nice-Côte d'Azur et apparaît à ce titre dans un reportage diffusé au journal télévisé de l'ORTF[12].
En 1960, en Corse, à la suite d'une annonce en avril par le gouvernement de projet d'essais nucléaires dans les mines désaffectées de l'Argentella, au sud de Calvi, il réagit aux premières protestations, le 2 mai 1960, et précise que rien n'est définitivement décidé. Le projet sera abandonné le 14 juin 1960, avant même qu'une manifestation annoncée puisse avoir lieu[13].
Il traite avec modération les réfugiés politiques expédiés en Corse, « prison dorée », pour la durée de la visite du président de l'URSS Nikita Khrouchtchev, en voyage officiel en France, en 1960. Il s'agit des exilés russes en France, de toutes tendances, des trotskistes à l'extrême-droite, relégués dans l'île de Beauté, le temps de la visite du no 1 russe, importante dans le cadre de la politique d'indépendance voulue par le général de Gaulle vis-à -vis des États-Unis. Ils sont hébergés dans des hôtels de luxe, et surveillés par des forces de l'ordre débonnaires et gênés, qui n'hésitent pas à jouer aux cartes et aux boules avec eux. Pour autant, ces relégués garderont une appréciation amère de cette belle entorse à l'hospitalité que leur fait la France[14] - [15] - [16].
Devenu préfet du Gard (1962-1964)[17], il doit faire face à l'affluence des rapatriés d'Algérie dans le département du Gard, 25 000 personnes le 30 août 1962. Le préfet déclare en septembre le département saturé et assure que les prestations de rapatriement ne pourront plus être versées pour les arrivées après le 31 août[18]. Il devient ensuite le premier préfet de la Région Franche-Comté (1964-1968)[19]. Et enfin, préfet de la région Languedoc-Roussillon et préfet de l'Hérault[20] (1968-1972), son dernier poste. Il devra faire face aux graves conflits de la crise viticole[21].
Procès Maurice Papon
En novembre 1997, il est appelé, comme témoin de la défense, au vingtième jour du procès de Maurice Papon, pour crimes contre l'humanité, à Bordeaux sur la question de la préfecture de Bordeaux pendant le régime de Vichy, son organisation, les attributions de Maurice Papon et le service des questions juives. L'homme, son argumentation, et ses réponses au procureur général et aux avocats des parties civiles, notamment Arno Klarsfeld, représentant l'association des Fils et filles de déportés juifs de France, sont cités et commentés par la presse française régionale[22], nationale[23] - [24], et internationale[25], ainsi que dans les ouvrages consacrés à cette affaire judiciaire[26] - [4]. Bernard Vaugon met en avant la nécessité selon lui d'une prescription, réclame de l'indulgence, et affirme le caractère impensable du génocide pour les fonctionnaires se prêtant aux opérations de rafle. « Les Français ne savaient pas les Juifs étaient déportés vers leur mort » déclare-t-il[25].
Et la journaliste Pascale Nivelle de conclure, après le compte rendu de son témoignage : « L'ancien préfet était, vendredi, le dernier d'une longue liste de témoins de moralité, dont on se demande s'ils ont vraiment servi la défense de Maurice Papon. Tout au plus, avec leur assurance, leurs certitudes, leurs certificats de bonne conduite et leurs carrières verticales de hauts fonctionnaires, auront-ils prouvé que l'accusé n'est pas le seul à s'être sali les mains sous l'Occupation. Et que les contradictions d'alors sont difficiles à appréhender par « les générations qui n'ont pas connu la guerre ». Les jurés auront découvert aussi le monde immuable de l'administration française, encore soudée, cinquante ans après, autour de la seule idée supportable à l'époque des déportations : « On pensait que les israélites partaient dans des camps de travail à l'Est. » Qu'ils aient 2 mois ou 80 ans »[23]. À l'issue du procès, Maurice Papon est condamné par la cour d'assises de Gironde.
Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise (36e division).
Divers
Il fut aussi membre honoraire de la société philanthropique La Gigouillette.
Notes
- Qui sont les préfets de Vichy ?, de Marc Olivier Baruch, est une étude approfondie sur les préfets de Vichy (accessible ici)
- En 1997, durant le procès Papon où il est un des témoins appelés par la défense, Arno Klarsfeld lui fera remarqué qu'il était chef de cabinet adjoint du préfet de police de Paris en 1942 au moment où 2 000 enfants juifs ont été déportés, en particulier durant la rafle du Vel d'Hiv, point qu'il n'avait pas cité en se présentant. « C'est exact, j'ai occupé ces fonctions » répondra-il de façon sèche, « Mais je ne me suis nullement mêlé à la triste opération qui vient d'être évoquée. » jugera-t-il nécessaire de compléter
Références
- « http://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/UD/FRAN_IR_001514/d_1910 »
- « matchID - Moteur de recherche des décès », sur deces.matchid.io (consulté le )
- « Carnet », Le Figaro, .
- Erhel, Aucher et de La Baume 1998, p. 467-471
- Sorj Chalandon, Pascale Nivelle, Crimes contre l'humanité: Barbie, Touvier, Bousquet, Papon, ed. Plon, 1998, (ISBN 2259188699)
- René de Chambrun, La Vie de la France sous l'occupation (1940-1944), p. 398, ed. Plon, 1957
- J.O, vol.3, 1943
- Marie-Agnès Pitois-Dehu, L'Aisne dans la guerre, 1939-1945, p. 136, ed. Horvath, 1986, (ISBN 2717104623)
- Grégory Longatte, La libération de l’Aisne : pouvoirs, résistance et population 1944-1945 , p. 72-77, ed. Fédération des Sociétés d'Histoire et d'Archéologie de l'Aisne, 2005, (ISBN 2906543098),
- J.O, 1950, p. 6048
- Archives départementales de la Nièvre, no 5
- ORTF, « Vol inaugural de la Caravelle entre Nice et Rome », sur INA,
- « corsematin.com/article/corse/e… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
- Thomas Schreiber, Les actions de la France à l'Est : ou Les absences de Marianne, Éditions L'Harmattan, , 254 p., p. 82
- Leurs dossiers RG » par Julien Caumet, Flammarion 2000, fragment: Les réfugiés politiques, cité dans http://reellerealite.perso.sfr.fr/index.html
- Antoine Marès et Pierre Milza, Le Paris des étrangers depuis 1945, , 470 p. (ISBN 978-2-85944-256-9, lire en ligne), p. 147.
- Préfecture du Gard : Les Préfets du Gard depuis 1800 par date de nomination
- François Pugnière, Les cultures politiques à Nîmes et dans le Bas-Languedoc oriental du XVIIe siècle aux années 1970: affrontements et dialogues, ed. L'Harmattan, 2008, (ISBN 2296058558),
- La Pensée', no 301 à 304 , p. 79, s.n., 1995
- Site de la Préfecture du Languedoc-Roussillon et de l'Hérault, liste des préfets.
- Bernard Revel, Montredon: les vendanges du désespoir, p. 84-88, ed. Loubatières, 1996 , (ISBN 2862662364)
- Dubourg 1997
- Nivelle 1997
- Bois 1997
- Marmie 1997
- Conan 1998
Sources
- Pierre Henry, Histoire des Préfets, p. 33-346, ed. Nouvelles Éditions Latines, 1950
- René Bargeton, Dictionnaire biographique des préfets: septembre 1870-mai 1982, ed. Archives Nationales, 1994, (ISBN 2860002324).
- (en) Nicolas Marmie, « Papon Calls Accuser 'Counterfeiter' », Associated Press,‎ (lire en ligne).
- Bernadette Dubourg, « L'accusation est incisive sur la question juive - 07/11/1997 », le journal français Sud Ouest,‎ (lire en ligne)
- Pascale Nivelle, « Maurice Papon devant ses juges: La grande cécité des serviteurs de Vichy. Cité par la défense, un ancien préfet a justifié l'attitude du fonctionnaire Papon. », le journal français Libération,‎ (lire en ligne).
- Pierre Bois, « Le poids très discuté d'une signature. », le journal français Le Figaro,‎ .
- Éric Conan, Le procès Papon – Un journal d'audience, Paris, Éditions Gallimard, , 324 p. (ISBN 2-07-075280-1).
- Catherine Erhel, Mathieu Aucher et Renaud de La Baume, Le procès de Maurice Papon : 8 octobre 1997- 8 janvier 1998, Éditions Albin Michel, .