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Bataille de la Brossinière

En 1423, la bataille dite la « besoigne » de la Brossinière (commune de Bourgon, Mayenne), dite parfois la bataille de la Gravelle, oppose les armées anglaise et française, alors que la guerre de Cent Ans a repris depuis peu. Le , John de la Pole, commandant les troupes anglaises qui avaient envahi la France, voyait son offensive brisée par les hobereaux faméliques du comte d'Aumale[1]. Il s'agit de la bataille de la Brossinière.

Bataille de la Brossinière
Description de cette image, également commentée ci-après
La bataille de la Brossinière représentée dans une enluminure du manuscrit de Martial d'Auvergne, Les Vigiles de Charles VII, vers 1484, BnF, département des manuscrits, ms. Français 5054, fo 30 vo.
Informations générales
Date
Lieu La Brossinière (proche de Bourgon)
Issue Victoire française
Forces en présence
2 400 soldats
1 300 archers
2 000 soldats
800 archers
Pertes
1 chevalier + quelques blessés1 400 à 1500 morts pendant les combats
2 à 300 tués dans la poursuite
Les chefs anglais John de la Pole, Thomas Aubourg et Thomas Cliffeton sont capturés

Guerre de Cent Ans

Batailles

Coordonnées 48° 10′ 02″ nord, 1° 04′ 00″ ouest
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Bataille de la Brossinière
Géolocalisation sur la carte : Mayenne
(Voir situation sur carte : Mayenne)
Bataille de la Brossinière
Géolocalisation sur la carte : Pays de la Loire
(Voir situation sur carte : Pays de la Loire)
Bataille de la Brossinière

Situation

Jadis, le « chemin gravelais » ou « chemin du Roy » (mentionné en 1454), était une voie ancienne renommée, permettant d'aller « d'Anjou en Normandie »[2]. Aujourd'hui le nom de ce lieu-dit est La Brécinière. Situé au sud de Bourgon et à l'ouest de Le Bourgneuf-la-Forêt (à l'intersection de la route D123 et de la D106) il n'existe malheureusement aucune trace visible, ni aucune pierre marquant l'endroit exact ou furent enterrés tous les hommes tombés lors de cette bataille.

Circonstances

La bataille d'Azincourt (1415) avait été « particulièrement meurtrière » pour la noblesse de la région. Après cette bataille, le régent anglais Jean de Lancastre, nanti des titres de duc d'Anjou et comte du Maine, ordonne une conquête systématique effectuée non sans résistance.

Lors de ce combat, en septembre 1423, la troupe anglaise commandée par John de la Pole, regagnant la Normandie après une expédition de pillage en Anjou et Maine, subit une écrasante défaite[3].

John de la Pole

Au mois de septembre 1423, lord John de la Pole, frère du comte de Suffolk, était parti de Normandie avec 2 000 soldats et 800 archers pour faire une course au Maine et en Anjou. Il s'était emparé de Segré, y avait rassemblé un butin immense et un troupeau de 1 200 bœufs ou vaches ; puis il était reparti pour regagner le pays normand, emmenant des otages.

Venger l'affront

La reine Yolande d'Aragon, belle-mère de Charles VII de France, qui était en sa ville d'Angers, eut, la première, la pensée de venger l'affront et le dommage causés à son comté, et elle fit prévenir le plus vaillant des partisans du malheureux roi de France, Ambroise de Loré, commandant depuis 1422 de la place forte de Sainte-Suzanne.

Celui-ci, sachant que le comte d'Aumale, Jean VIII d'Harcourt, gouverneur de la Touraine, de l'Anjou et du Maine, était alors à Tours et préparait une expédition en Normandie, lui dépêcha un messager avec une lettre. Le gouverneur vint en toute hâte à Laval, amenant les troupes qu'il avait déjà réunies, « et manda gens de toutes parts à ce qu'ils se rendissent vers lui ». La reine Yolande d'Aragon, ordonna de même à son chambellan Pierre Ier de Beauvau fort de 900 hommes (400 piétons et brigandiers accompagnés de 500 archers) de rejoindre la troupe du gouverneur.

La préparation

Le plus prompt et le mieux accompagné fut Jean de la Haye, baron de Coulonces, dont on accepta les services malgré la disgrâce dans laquelle il était auprès du gouverneur, en lui enjoignant seulement de ne pas se présenter à lui. Toute cette concentration se fit très rapidement. Jean VIII d'Harcourt n'était arrivé à Laval que le vendredi 24 septembre. Il en repartit dès le samedi de grand matin, pour aller prendre position sur le chemin que devaient suivre les Anglais, envoyant des coureurs pour surveiller leur marche et le renseigner exactement[4].

Jean VIII d'Harcourt tint alors conseil avec Pierre d'Alençon[5], Guy de Laval-Loué, sire de Montjean[6], Louis de Trémigon, Ambroise de Loré, alors capitaine de Sainte-Suzanne, et Pierre Ier de Beauvau. Il leur apprit que les Anglais étaient à trois lieues de là et qu'ils passeraient, suivant le grand chemin qui longe la Bretagne, au lieu de la Brossinière, le lendemain matin dimanche. Chacun émit son opinion ; il fut conclu que le gouverneur, Pierre d'Alençon et Guy, se mettraient à pied et posteraient leurs hommes en bataille au lieu de la Brossinière ; pendant que Loré, Trémigon, auxquels on permettait de s'adjoindre Jean de la Haye[7], avec leurs deux cents lances, iraient à cheval « besongner sur iceux Anglois ainsi qu'ils verroient à faire ».

Le combat

Bataille de la Brossinière : « Du moys tout le derrain dimanche Que vendangeurs sont en grant peine Tu sauras le moys et le jour Qu'André de Lohéac, mon seignour, Fut fait chevalier en bataille Et maints Angloys tua sans faille Es parties de la Broussinière Et là déploya sa bannière , Vers anciens, cités par Charles Maucourt de Bourjolly, premier volume, page 295. . ».

Il y avait deux heures que les troupes étaient rangées en bataille quand on vit les éclaireurs anglais qui donnaient la chasse aux batteurs d'estrade. Les cavaliers leur coururent sus et les forcèrent à se replier sur leurs corps de bataille, où ils mirent pied à terre[8].

Les Anglais marchaient bon train, piquant en terre de gros pieux, derrière lesquels ils pouvaient se retrancher au moment de l'attaque de la cavalerie[9]. Les gens de pied les atteignaient de front ; le convoi de chariots et de troupeaux leur fermait l'issue par derrière ; malgré leur courage, ils ne purent résister longtemps.

Ce fut une boucherie où périrent 1 200 à 1 400 hommes. Les autres, parmi lesquels John de la Pole, Thomas Aubourg et Thomas Cliffeton se rendirent. Il n'en échappa pas 120. De l'autre côté, on ne perdit qu'un seul chevalier, Jean Le Roux, et « peu d'autres ».

André de Lohéac, futur maréchal de France, fut fait chevalier[10] avec plusieurs de ses compagnons. Anne de Laval, sur les possessions de laquelle s'était donnée la bataille, fit enterrer les morts.

La victoire

Cette victoire fut d'heureux augure pour le commencement du règne de Charles VII de France. Dans le pays, « la besoigne de la Brossinière » resta un souvenir glorieux[11].

Articles connexes

Notes et références

Notes

  1. La guerre de Cent Ans par Jean Favier, p. 484, Édition Fayard, 1980.
  2. Elle traversait Bourgon au pré du Pavement. C'était en fait une portion du Chemin de Cocaigne, voie gallo-romaine ancienne qui reliait « le Cotentin à la Gascogne ».
  3. Cousinot rapporte qu'« il y eut de grandes vaillances d'armes faites » et que les Anglais « furent desconfits au champ et y en eut de quatorze à quinze cent de tuez... »
  4. Il était de bonne heure au Bourgneuf-la-Forêt, d'où il envoya à Vitré, vers Anne de Laval, « luy prier qu'elle luy voulust envoyer l'aisné de ses fils, nommé André de Lohéac, lors estant jeune d'âge de douze ans ; laquelle le fist très volontiers et luy bailla pour l'accompagner, mestre Guy de Laval, seigneur de Montjean, et tous les gens de la seigneurie de Laval, avec plusieurs autres ses vassaux qu'elle peut recouvrer et avoir promptement d'autre part. »
  5. Fils bâtard de Jean Ier d'Alençon, tué à la bataille d'Azincourt.
  6. Oncle à la mode de Bretagne, que les dames de Laval baillèrent comme gouverneur d'André de Lohéac.
  7. Baron de Coulonces, capitaine de Mayenne. Couanier de Launay dans Étienne-Louis Couanier de Launay, Histoire de Laval 818-1855, Godbert, [détail des éditions], p. 141 indique sur ce personnage : En ce mesme temps, les Anglois dressèrent et construisirent une bastille à une lieue près du Mont-Saint-Michel, en un lieu nommé Ardevon; et ceux de la garnison dudit Mont sailloienl souvent, et presque tous les jours, pour escarmoucher avec les Anglois, et y faisait-on de belles armes. Messire Jean de la Haye, baron de Coulonces, estoit lors en un chastcau du bas Mayne, nommé Mayenne-la-Juhais; et alloient souvent ses gens audit Mont-Saint-Michel, et pareillement ceux du Mont à Mayenne. Ledit baron secut la manière et restât des Anglois, et fit sçavoir à ceux du Mont qu'ils saillissent un certain jour, et livrassent grosse escarmouche un jour de vendredi, et qu'il y seroit sans faute; et ainsi fut fait : car ledit de Coulonces partit de sa place avant jour, accompagné de ceux de sa garnison, qui chevauchèrent neuf à dix lieues, puis eux et leurs chevaux repeurent assez légèrement ; et après ils remontèrent à cheval en venant tout droit vers la place des Anglois ; et tous jours François sailloieot de leur place, et aussi l'aisoient Anglois de leur part; tellement que de deux à trois cents repoussèrent les François jusques près du Mont: et lors, environ deux heures après midy, arrivèrent ledit baron de Coulonces et sa compagnée, et se mit entre Ardevon et les Anglois; tellement qu'ils n'eussent pu entrer en leur place, sans passer parmy les François que avoil ledit de Coulonces. Finalement ceux du Mont et les autres François chargèrent à coup sur lesdits Anglois, lesquels se deffendirent vaillamment; mais ils ne peurent résister, et furent deffaits, il y en eut de deux cent à douze vingt de morts et de pris et entre les autres y fut pris messire Nicolas Bordel, Anglois. Puis ledit baron de Coulonces et sa compagnée s'en retournèrent joyeux en sa place de Mayenne-la-Juhais. Mémoires concernant la Pucelle, 09. Pf.titot.
  8. Les Anglais ne pouvaient plus s'éclairer, ayant toujours devant eux les cavaliers qui se tenaient tous ensemble, se retirant vers le comte d'Aumale ; ils n'étaient qu'à un trait d'arc quand les troupes se démasquèrent.
  9. Trémigon, Loré et Coulonges voulurent en tâter, mais la barrière était trop redoutable ; ils la tournèrent et frappèrent vaillamment sur les Anglais, qui, pris en flanc, se rompirent et furent acculés à un grand fossé.
  10. André de Lohéac devait être âgé alors de 16 ans, âge que la tradition lui assigne et auquel la chevalerie n'était concédée que dans des cas absolument exceptionnels. Bertrand du Guesclin reçoit les honneurs de la chevalerie en 1354 à l'âge de 34 ans environ.
  11. Ceux qui y avaient pris part s'en vantaient à toute occasion et, cinquante ans après, leurs enfants s'en réclamaient comme d'un titre de gloire.

Bibliographie

  • Abbey de la Roque, Académie de Caen, 1829, p. 252.
  • Jean Cousinot, Chroniques de la pucelle, Paris, 1859.
  • Le Fizelier, Mamers, 1874, in-8°.
  • Revue Historique et Archéologique du Maine, tome I, 1876.
  • « Bataille de la Brossinière », dans Alphonse-Victor Angot et Ferdinand Gaugain, Dictionnaire historique, topographique et biographique de la Mayenne, Laval, Goupil, 1900-1910 [détail des éditions] (lire en ligne).
  • Jacques Salbert (dir.), La Mayenne des origines à nos jours, Éditions Bordessoules. 1984.

Voir aussi

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