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Bataille de VĂĄgen

La bataille de Vågen ou de Bergen est une bataille navale entre une flotte hollandaise marchande et du trésor et une flottille anglaise de vaisseaux de guerre en , prenant part à la Deuxième guerre anglo-néerlandaise. La bataille eut lieu dans la baie de Vågen, domaine principal de la ville neutre de Bergen. En raison d'un retard de transmission d'ordres, les commandants norvégiens prirent le parti des Hollandais, contrairement aux intentions secrètes du roi du Danemark. La bataille se termina par la défaite de la flotte anglaise, qui battit en retraite, très endommagée, mais sans avoir perdu aucun bateau. La flotte du trésor fut secourue par la flotte hollandaise dix-sept jours plus tard.

Bataille de VĂĄgen
Description de cette image, également commentée ci-après
La bataille de VĂĄgen peinte par Arnold Bloem en 1670
Informations générales
Date (calendrier julien - calendrier grégorien)
Lieu Bergen (Norvège)
Issue DĂ©route anglaise
Commandants
Pieter de Bitter
Claus von Ahlefeldt (en)
Sir Thomas Teddiman
Forces en présence
7 navires13 navires
Pertes
100 Hollandais
8 Norvégiens
10 civils
500 hommes

Deuxième guerre anglo-néerlandaise

Batailles

CoordonnĂ©es 60° 23′ 52″ nord, 5° 19′ 02″ est
Géolocalisation sur la carte : Norvège
(Voir situation sur carte : Norvège)
Bataille de VĂĄgen

Arrivée à Bergen

La flotte marchande hollandaise était composée d'environ soixante navires. Environ sept d'entre eux étaient de grands vaisseaux hautement armés de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC).

Les navires sous le commandement du contre-amiral Pieter de Bitter revenaient des Indes. Deux fois par an, la compagnie VOC renvoyait une flotte aux Pays-Bas. Celle-ci Ă©tait partie le 25 dĂ©cembre 1664 et dĂ©tenait une des cargaisons les plus prĂ©cieuses jamais transportĂ©es. Elle Ă©tait chargĂ©e avec beaucoup de marchandises de luxe, typiques pour les « riches commerces » : Ă©pices, parmi lesquelles 24 millions d'onces de poivre, 440 000 livres de clou de girofle, 314 000 livres de noix de muscade, 121 600 livres de muscadier et près de d'un demi-million de livres de cannelle ; 18 000 livres de bois d'Ă©bène ; 51 540 onces de soie et environ 200 000 autres morceaux de tissu ; 22 000 livres de teinture indigo ; 18 151 perles ; 2 933 rubis, 3 084 diamants bruts et 16 580 pièces de porcelaine, pour une valeur totale d'environ onze millions de florins ou trois millions de rigsdaler danois, plus que tous les revenus annuels de la couronne danoise. Les NĂ©erlandais avaient payĂ© 36 tonnes d'or pour acheter cette cargaison. Afin d'Ă©viter le contrĂ´le anglais sur la Manche après leur victoire Ă  la suite de la bataille de Lowestoft, la flotte avait naviguĂ© au nord de l'Écosse afin d'atteindre les Provinces-Unies par la Mer du Nord. Les navires se sont rassemblĂ©s dans le port de Bergen, ville de Norvège alors neutre, pour rester Ă  l'abri durant le mois de juillet et attendre la rĂ©paration de la flotte intĂ©rieure nationale hollandaise après sa dĂ©faite Ă  Lowestoft.

RenseignĂ©e sur l'expĂ©dition hollandaise, la marine anglaise a rapidement envoyĂ© une petite escadre pour se saisir du convoi, ou au moins pour le bloquer. La flotte nationale a essayĂ©, dans le mĂŞme temps, d'arrĂŞter l'escadron du vice-amiral Michiel de Ruyter dont on avait appris qu'il arrivait d'AmĂ©rique, mais a Ă©chouĂ© et a dĂ» retourner vers les ports du pays pour approvisionnement. Quand la flottille dirigĂ©e par le contre-amiral Thomas Teddiman, composĂ©e d'abord de 22 vaisseaux de guerre mais rĂ©duite Ă  quatorze (et plus loin les brĂ»lots Bryar, Greyhound, et Martin Gally), a atteint Bergen Ă  16h00 le 1er aoĂ»t, les navires ont bloquĂ© l'entrĂ©e de la baie. Le dĂ©but de l'action anglaise est peu efficace : le navire de l'amiral Teddiman, le Revenge, s'est Ă©chouĂ© le mĂŞme soir sur le cap Nord et est parvenu au prix de beaucoup d'efforts, Ă  se dĂ©sĂ©chouer par lui-mĂŞme. L'entrĂ©e de la baie Ă©tant de seulement 400 mètres de large environ, les Anglais peuvent placer sept navires, du nord au sud : Prudent Mary, Breda, Foresight, Bendish, Happy Return, Saphire et Pembroke. Les autres pointent leurs canons sur les batteries d'artillerie cĂ´tières.

Ordres manqués

À Vågen se trouvaient les forteresses de Bergenhus et de Sverresborg. Les représentants des deux flottes tinrent conseil avec le commandant norvégien de la forteresse, Johan Caspar von Cicignon et le commandant norvégien des forces Claus von Ahlefeldt (en), qui pour lors était décidé à rester hors du conflit. Il avait entendu des rumeurs à propos d'une affaire secrète entre le roi Charles II d'Angleterre et le roi Frederick III du Danemark (la Norvège était alors en union avec le Danemark), mais aucun ordre concret n'était arrivé. Par traité, une force de cinq vaisseaux de guerre de n'importe quelle nation pouvait entrer dans le port ; Von Ahlefeldt a indiqué qu'il ne permettrait pas autre chose.

En fait, un accord secret avait été conclu une semaine plus tôt entre le délégué anglais Talbot et le roi du Danemark, disant que le Danemark-Norvège permettrait à la flotte anglaise d'assaillir le convoi hollandais et que le butin serait partagé. Ceci malgré le fait que le roi danois était officiellement l'allié des Néerlandais. Le roi envoya un ordre à von Ahlefeldt de protester contre l'attaque anglaise, mais de ne prendre aucune mesure contre elle. Cet ordre n'atteignit pas Bergen à temps. Les Anglais envoyèrent un ordre à leur flotte leur disant de remettre leur attaque jusqu'à ce qu'Ahlefeldt ait reçu ses ordres, mais le messager fut arrêté en cours de route par les Néerlandais. On avait cependant dit à Teddiman qu'une affaire était en cours. Les deux rois, aussi bien anglais que danois, ont espéré obtenir une part personnelle du trésor, sans laisser d'argent rentrer dans leurs trésors nationaux officiels respectifs. Charles avait par ailleurs rencontré Lord Sandwich au cours d'une réunion secrète pour s'assurer de cette prise. Lord Sandwich envoya donc son neveu et homonyme le courtisan et aventurier Edouard Montagu (1635-1665) avec Teddiman, pour s'assurer que tout se déroulerait selon les prévisions. Teddiman avait été commandé d'agir rapidement et avec le plus de force possible afin d'éviter une participation de la flotte anglaise principale, ce qui aurait compromis alors le secret.

La veille de la bataille

Quand Teddiman envoya Montagu Ă  Bergen pour coordonner l'attaque, les commandants danois refusèrent Ă  sa grande dĂ©ception de coopĂ©rer. Vers 4h du matin, Montagu revint, mais il fut immĂ©diatement renvoyĂ© par Teddiman pour qu'il menace cette fois les forteresses par la force si celles-ci restaient obstinĂ©es dans leur refus. Montagu clama que la flotte anglaise dĂ©tenait 2 000 canons et 6 000 hommes, ce qui fit peu d'impression, car il Ă©tait Ă©vident qu'il exagĂ©rait les vĂ©ritables chiffres d'un facteur trois. Il fut pris mĂŞme encore moins au sĂ©rieux lorsqu'il offrit aux commandants danois l'Ordre de la Jarretière en Ă©change de leur soutien. Quand celui-ci fut de nouveau refusĂ©, Montagu fit un petit dĂ©tour et laissa son bateau ramer Ă  cĂ´tĂ© de la flotte hollandaise pour inspecter leurs prĂ©paratifs. Les NĂ©erlandais respectaient la neutralitĂ© du port, jouèrent le Wilhelmus (hymne national) et saluèrent Montagu par trois fois avec de la fumĂ©e blanche.

En attendant, la ville connaissait un grand tumulte du fait que les marins anglais avaient osé pénétrer dans le port pour intimider la population, et beaucoup de citoyens se sauvèrent. De Bitter appela très vite ses équipiers néerlandais en arrière, la plupart d'entre eux prenant congé sur les rivages Bergenois, sonnant les cloches d'église. Comme peu d'entre eux n'avaient de réelle expérience en matière de combat - et que beaucoup d'entre eux n'étaient même pas vraiment Hollandais - il les convainquit de se soulever en promettant trois mois de salaire supplémentaires en cas de victoire. De telles conditions étaient légalement obligatoires en vertu de la loi hollandaise et elles furent accueillies avec grand enthousiasme. Quand il finit son discours en demandant : « Avez-vous le courage de tenir face à l'ennemi ou pas ? », les hommes, selon les rapports hollandais clamèrent : « Oui, monsieur ! Nous resterons fermes jusqu'à ce que nous ayons défait l'ennemi et plutôt mourir que de rendre un tel trésor ou nous-mêmes aux Anglais! »

La plupart des navires hollandais Ă©taient très enfoncĂ©s dans la baie ; Ă  environ 300 mètres de la ligne anglaise, De Bitter plaça du nord au sud les navires Slot Hooningen, Catharina, Walcheren (le sien), Gulden Phenix et Rijzende Zon. Des milliers de marins voyageant sur les bateaux plus lĂ©gers furent eux envoyĂ©s dans les forteresses pour les renforcer.

La bataille

Site de la bataille

Tôt le matin, les Anglais firent battre leurs tambours et retentir leurs trompettes. Les Néerlandais surent alors que les hostilités commenceraient bientôt. Les troupes découvrirent leurs têtes pour une prière courte et puis équipèrent à la hâte leurs canons.

Quand les premiers combats Ă©clatèrent, le 2 aoĂ»t dès 6h00 du matin (Passage au calendrier grĂ©gorien), les deux flottes s'engagèrent dans la bataille Ă  seulement quelques centaines de mètres de distance l'une de l'autre. Teddiman dĂ©cida de ne pas employer des brulots pour ne pas mettre en danger la prĂ©cieuse cargaison Ă  piller. Il n'avait par ailleurs pas ce que les Anglais appellent le Weather gage, c'est-Ă -dire des conditions de vent favorables, et donc ne pouvait tout bonnement pas exĂ©cuter une attaque directe. Les NĂ©erlandais avaient placĂ© leurs huit bateaux les plus lourds de telle sorte qu'ils puissent envoyer des bordĂ©es aux Anglais ; la plupart des plus petits canons avaient Ă©tĂ© dĂ©placĂ©s vers l'ennemi car la manĹ“uvre aurait Ă©tĂ© de toute façon impossible. La flotte anglaise Ă©tait Ă  l'abri du vent et dĂ©tenait ainsi une meilleure portĂ©e. Mais les canonniers anglais surcompensèrent leurs tirs et leurs projectiles firent donc dĂ©faut la plupart du temps, car les vents mĂ©ridionaux fĂ©roces et la pluie renvoyaient la fumĂ©e des canons anglais vers les bateaux, les aveuglant, et leur laissant ignorer que les bateaux hollandais n'Ă©taient que très rarement touchĂ©s. Comme Bergen dĂ©passe lĂ©gèrement dans le VĂĄgen au nord, les navires anglais placĂ©s le plus au nord durent tirer tout au long du port pour atteindre les NĂ©erlandais. Un de leurs projectiles se fracassa dans la forteresse et tua quatre personnes. Le commandant rĂ©pondit Ă  cette attaque en ouvrant le feu Ă  son tour sur la flotte anglaise. Celle-ci, qui possĂ©dait environ 600 canons et 2 000 hommes, Ă©tait en soi bien supĂ©rieure Ă  l'arsenal norvĂ©gien qui ne dĂ©tenait seulement que 125 canons et 200–300 hommes. Mais les bateaux faisant face aux NĂ©erlandais Ă©taient trop mal placĂ©s pour rĂ©pondre au feu norvĂ©gien. Sans compter que la plupart des navires anglais n'Ă©taient que des frĂ©gates et donc incapables de rĂ©sister aussi bien que les grands navires marchands hollandais. Il s'avĂ©ra bientĂ´t que les NĂ©erlandais avaient rĂ©ellement acquis la supĂ©rioritĂ© dans la puissance de feu. Teddiman avait espĂ©rĂ© que le moral des Hollandais baisserait rapidement, et commit l'erreur de ne pas interrompre son action lorsqu'il vit que ceux-ci tenaient bon. Après trois heures impitoyables de martèlement, les navires bloquant l'entrĂ©e du port furent mis en dĂ©route. Les troupes, paniquĂ©es, coupèrent les cordes d'ancrage, mais quelques bateaux restèrent empĂŞtrĂ©s et menacĂ©s de chavirer en raison du poids des mâts brisĂ©s. Ils durent ancrer encore une fois sous le feu pour les couper. Les Anglais furent forcĂ©s de se retirer Ă  Herdla Ă  environ 10h00 du matin.

Provinces Unies

Navire (Commandant) Canons Notes
Slot Hooningen 60
Catharina 40 Échoué
Walcheren (De Bitter) 60 - 70
Jonge Prins 60 - 66
Gulden Phenix 60
Rijzende Zon ?
Wapen van Hoorn 60 - 66
Angleterre

Navires (Commandant) Canons Notes
Prudent Mary 28
Breda 40 - 48
Foresight 34 - 48
Bendish ?
Happy Return 52
Sapphire 36 - 40
Pembroke 22 - 34
Guernsey 22 - 30
Revenge (Teddiman) 60
Golden Lyon ?
Society 44
Norwich 24 - 30
Guinea 34 - 40

Conséquences

Les Anglais recensèrent près de 500 morts ou blessés. Andrew Marvell écrivit dans sa longue poésie ironique au sujet « de la guerre hollandaise » :

  • "Six capitaines furent bravement touchĂ©s"
  • "Ă€ bord, l'amiral, fut atteint, et mourut"

« Atteint » ("reached" dans la version originale) n'était ici qu'un ricanement typique de Marvell, faisant référence au fait que Teddiman n'avait pas placé son navire amiral dans la ligne de blocage, bien qu'il fût de loin le bateau le plus puissant dont il pouvait se servir sans la bataille.

Dans la biographie de John Wilmot, 2e comte de Rochester il est dit que Rochester, Montagu et George Windham, trois jeunes nobles, avaient eu une prémonition forte de leur mort. Ils firent un pacte comme quoi celui qui devrait périr d'abord apparaîtrait à l'autre sous la forme d'esprit. Tard dans la bataille, George a soudainement commencé à trembler avec crainte. Édouard l'étreignit pour le consoler et tous deux furent massacrés par le même boulet de canon.

Le convoi hollandais subit lui aussi quelques dommages. Parmi les bateaux, plus particulièrement Catharina et un navire méditerranéen, et les pertes humaines se chiffrèrent à environ 25 morts et soixante-dix blessés. Huit hommes sont morts dans la forteresse, et dix autres dans la ville.

Suites de la bataille

Le boulet de canon encastré dans le mur de la cathédrale de Bergen.

Les ordres du Danemark atteignirent Ahlefeldt quatre jours plus tard, le 6 août. Avec les navires marchands hollandais toujours à Bergen, Ahlefeldt s'en alla à l'encontre de la flotte anglaise à Herdla le jour suivant pour essayer de réparer les dégâts occasionnés par ses canons, leur offrant une chance d'attaquer les Hollandais une seconde fois, et cette fois sans interférence de la part de la forteresse. L'offre a cependant été rejetée, étant donné que Teddiman savait qu'il ne pourrait pas être prêt à temps avant que les actions des flottes principales aient décidé de l'issue du combat. Les jours suivants, les Néerlandais enrichirent fortement leur position : une chaîne de navire fut placée à l'entrée du compartiment et leurs marins améliorèrent les fortifications. Car comme le vent avait tourné vers le nord, ils s'attendirent à une attaque frontale de Teddiman, mais le contre-amiral britannique s'est contenté d'observer le port. Le 19 août, une flotte hollandaise de soutien de quatre-vingt-dix navires sous le commandement du Lieutenant-Amiral (terme hollandais) Michiel de Ruyter arriva à Bergen, et après avoir étudié la flotte britannique principale, la flotte marchande hollandaise quitta le port le 23 août et revint par la suite Provinces-Unies sans risque, bien que quelques bateaux aient été dispersés par un assaut et capturés par les Anglais, parmi eux le Slot Hooningen et le Gulden Phenix, et qui seront encore perdus à nouveau pendant le raid sur la Medway.

Pour les Anglais, l'évasion de cette précieuse flotte hollandaise revenant des Indes était un énorme choc. Mais ce coup fut légèrement amorti par la capture des deux navires marchands de la VOC. Lord Sandwich fut blâmé pour son échec et tomba dans le déshonneur. En février 1666, le roi danois déclarait la guerre contre l'Angleterre, après réception de grandes subventions hollandaises. Pieter de Bitter reçut une chaîne d'or honorifique des États généraux des Provinces-Unies.

Aujourd'hui, la cathédrale de Bergen (Domkirken) a un boulet de canon de la bataille encastrée dans le mur de sa tour. Deux figures de proue en bois, désignant la tête d'un lion et la tête d'une licorne, qui faisaient partie de la décoration des navires anglais sont maintenues dans le musée maritime de Bergen.

Voir aussi

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