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Bataille de Sellasie

La bataille de Sellasie ou bataille de Sellasia oppose en 222 av. J.-C. les armées d'Antigone III Doson, roi de Macédoine, à celles de Cléomène III, roi de Sparte, dans le contexte de la guerre cléoménique. Cléomène III ambitionne en effet de rétablir l'hégémonie spartiate dans le Péloponnèse et doit faire face à la Ligue achéenne qui obtient le soutien de la Macédoine. Les forces spartiates sont écrasées et Cléomène doit s'enfuir en Égypte. Cette bataille marque la fin de l'indépendance de Sparte.

Bataille de Sellasia
Informations générales
Date 222 av. J.-C.
Lieu Sellasie en Laconie
Issue Écrasante victoire macédonienne
Forces en présence
30 000 hommes (dont environ 20 000 phalangites macĂ©doniens et au moins 2 000 cavaliers)20 000 Spartiates et alliĂ©s, dont 650 cavaliers
Pertes
1 200 MacĂ©doniensAu moins 5 000 Spartiates

Guerre de Cléomène (229/228-222 av. J.-C.)

CoordonnĂ©es 37° 10′ nord, 22° 25′ est

Antigone III Doson et la ligue hellénique contre Cléomène III

Principales batailles de la guerre de Cléomène.

Parvenu au pouvoir en 235, à la mort de son père Léonidas II, Cléomène III entreprend une ambitieuse politique de restauration de la puissance spartiate par un retour à la tradition politique légendaire de Lycurgue[1]. Il diminue ainsi le pouvoir des éphores pour augmenter celui des deux rois traditionnels : comme collègue à la royauté, il se donne son frère Eucleidas. De façon plus significative, dans le souci d'élargir le réservoir démographique de l'armée spartiate, il étend la citoyenneté, procède pour ce faire à des distributions de terre (la possession du kleros, le lopin de terre civique, étant une condition nécessaire de la citoyenneté), décide l'annulation des dettes et, enfin, restaure dans toute sa rigueur l'éducation d'État destinée aux jeunes garçons[2].

Ces mesures inquiètent les partis oligarchiques de cités voisines de Sparte, qui ne sont pas loin de les considérer comme révolutionnaires. Cette inquiétude se fait rapidement d'autant plus grande que Cléomène mène une politique d'expansion agressive dans le Péloponnèse : entre 227 et 226, Cléomène remporte plusieurs victoires décisives contre la Ligue achéenne, et prend en particulier le contrôle de la place stratégique de Corinthe, mais aussi d'Argos et de Phlionte. Le chef achéen Aratos, dont la cité natale Sicyone se trouve elle-même menacée par l'armée spartiate, n'a bientôt d'autre choix que d'entrer en contact avec l'ennemi héréditaire macédonien pour solliciter son concours.

Le roi de Macédoine Antigone III Doson répond d'autant plus favorablement à l'invitation qu'elle lui fournit l'occasion de regagner une influence perdue dans le Péloponnèse depuis près de deux décennies. Il constitue en 224 avec les Achéens, les Béotiens, les Thessaliens et les Acarnaniens une nouvelle Ligue hellénique, dont il se fait nommer le chef (hégémon) à vie, et entre en campagne contre Sparte. Cette dernière est soutenue par l'Égypte lagide de Ptolémée III, alliée traditionnelle des puissances péloponnésiennes opposées à la Macédoine : il a ainsi soutenu la Ligue achéenne tant que celle-ci a constitué un obstacle aux ambitions macédoniennes, et transfère donc son soutien financier à Sparte lorsque les Achéens rejoignent les rangs de l'alliance voulue par Antigone[3].

En 224, Sparte tient toujours l'isthme de Corinthe et parvient ainsi à prévenir l'invasion du Péloponnèse par l'armée alliée supérieure en nombre. Mais la révolte d'Argos sur ses arrières contraint Cléomène à abandonner ses positions pour aller réprimer la sédition. L'armée macédonienne peut ainsi prendre pied dans le Péloponnèse : Antigone chasse les Spartiates d'Argos, prend Orchomène et Mantinée, avant d'hiverner à Sicyone. Pendant les deux années suivantes, les belligérants mènent des actions de faible envergure en évitant la confrontation directe. En 223, toutefois, Cléomène prend et rase Mégalopolis, revenant ainsi à des pratiques militaires qui ont disparu de Grèce depuis le début du IIIe siècle av. J.-C.

En 222, Ptolémée III cesse de soutenir financièrement Cléomène et celui-ci doit se résoudre à affronter les Macédoniens et leurs alliés qui s'apprêtent à envahir la Laconie[4]. Il cherche à compenser son infériorité numérique en choisissant le champ de bataille : il dispose son armée en travers d'une passe étroite, flanquée de deux collines, près de la cité de Sellasie sur les bords de l'Oinous. Voyant la supériorité des positions spartiates, Antigone hésite d'abord à livrer bataille et préfère faire camper son armée derrière le ruisseau Gorgylos. Après plusieurs jours de tergiversation, il se décide néanmoins à combattre.

Forces en présence

ClĂ©omène III dispose de 20 000 fantassins, composĂ©s d'hoplites spartiates et de pĂ©rièques, et d'environ 650 cavaliers[5]. La phalange spartiate, sous le commandement personnel de ClĂ©omène, est rangĂ©e sur la colline de droite, surnommĂ©e Olympe, soutenue par un corps d'infanterie lĂ©gère mercenaire. Les troupes alliĂ©es de Sparte et la phalange pĂ©rièque occupent sous le commandement d'Eucleidas l'autre colline, l'Évas, sur l'aile gauche. Le centre est composĂ© de la cavalerie spartiate, soutenue par d'autres fantassins lĂ©gers mercenaires. ClĂ©omène espère probablement que sa position tactique supĂ©rieure compensera son infĂ©rioritĂ© numĂ©rique : il a fait creuser un fossĂ© et Ă©lever une palissade sur tout le long de sa ligne de front.

Antigone III Doson, de son cĂ´tĂ©, peut compter sur une force supĂ©rieure, dont le total avoisine 30 000 hommes[4]. Pour la première fois depuis le dĂ©but du IIIe siècle av. J.-C., la MacĂ©doine aligne dans cette campagne une armĂ©e nationale qui n'est pas seulement formĂ©e de mercenaires, les MacĂ©doniens reprĂ©sentant Ă  eux seuls environ 20 000 hommes. Les alliĂ©s de la Ligue hellĂ©nique lui fournissent d'importants contingents, notamment de cavalerie, soit 3 000 AchĂ©ens et 1 000 MĂ©galopolitains ; on compte Ă©galement des contingents d'Agrianes, de Celtes et 1 600 Illyriens commandĂ©s par DĂ©mĂ©trios de Pharos.

Antigone place la phalange macĂ©donienne face Ă  la phalange spartiate sur l'Olympe, en doublant les rangs (soit 32 rangs). Il dispose un Ă©cran d'infanterie mercenaire lĂ©gère en avant de la phalange. Sa cavalerie, un mĂ©lange de MacĂ©doniens, d'AchĂ©ens (commandĂ©s par Philopoimen), de BĂ©otiens et de mercenaires sous le commandement d'Alexandre, est placĂ©e face Ă  la cavalerie spartiate au centre, soutenu par un corps d'infanterie de rĂ©serve de 2 000 AchĂ©ens et MĂ©galopolitains. L'aile droite macĂ©donienne, qui fait face Ă  l'Évas dont les pentes sont fortes, n'est pas formĂ©e en phalange, mais de façon plus souple pour faciliter leur progression sur ce terrain difficile. C'est lĂ  que se tiennent aussi les troupes illyriennes.

DĂ©roulement de la bataille

Dispositif initial des armées.

La bataille commence avec l'attaque de l'aile droite macédonienne sur l'Évas, avec l'infanterie légère suivie de l'infanterie lourde[6]. Elle est alors attaquée sur ses arrières par la cavalerie mercenaire des Spartiates, sans que la cavalerie macédonienne réagisse. Après avoir vainement exhorté Alexandre à attaquer, Philopoimen prend l'initiative et mène une charge des Achéens contre la cavalerie spartiate. Cette contre-attaque force les mercenaires spartiates à revenir défendre le reste de la cavalerie et permet la continuation de l'attaque macédonienne sur le flanc droit. Eucleidas, frère de Cléomène III, laisse se développer cette attaque sans essayer de l'arrêter avant qu'elle n'atteigne le sommet, si bien qu'il s'en trouve délogé et doit battre en retraite en perdant l'avantage du terrain : ses forces sont alors massacrées tandis qu'Eucleidas trouve la mort.

Sur l'Olympe, l'engagement débute par les unités d'infanterie légère qui ne parviennent pas à faire la décision. Voyant que, parallèlement, son frère est mis en déroute, et que sa cavalerie n'est pas en meilleure posture, Cléomène tente alors de trouver le salut dans l'attaque et quitte ses retranchements pour se porter au-devant de la phalange macédonienne. Il parvient seulement à la faire pivoter sans briser son unité, et l'avantage du nombre finit par permettre aux Macédoniens de l'emporter. Constatant sa défaite, Cléomène s'enfuit avec quelques cavaliers. Il parvient à gagner le port de Gytheion d'où il embarque pour trouver refuge auprès de son protecteur Ptolémée III à Alexandrie.

Les Spartiates subissent une grave dĂ©faite[4] : ils ont perdu 5 000 hommes alors que les MacĂ©doniens et leurs alliĂ©s ont perdu 1 200 hommes.

Conséquences

Antigone III Doson s'empare de Sparte qui pour la première de son histoire tombe aux mains de l'ennemi[4]. Il fait restaurer l'ordre antérieur aux réformes de Cléomène III. Il contraint Sparte à entrer dans la Ligue achéenne et dans la Ligue hellénique. Il ne se montre pas toutefois aussi dur que Cléomène l'a été vis-à-vis de Mégalopolis. Il doit également rentrer précipitamment en Macédoine en raison d'une invasion dardanienne[7].

La victoire de Sellasie consacre le rétablissement de l'influence macédonienne dans le Péloponnèse et le succès de la politique militaire et diplomatique d'Antigone III Doson qui, avec la Ligue hellénique, a su constituer une coalition au service des intérêts macédoniens[7].

Notes et références

  1. Will 2003, tome 1, p. 374-375.
  2. Will 2003, tome 1, p. 374.
  3. Will 2003, tome 1, p. 378.
  4. Will 2003, tome 1, p. 397.
  5. Will 2003, tome 1, p. 397. Sur les forces en présence voir : Polybe, II, 13.
  6. Sur le déroulement de la bataille voir : Polybe, II, 14.
  7. Will 2003, tome 1, p. 398.

Sources antiques

Bibliographie

  • Édouard Will, Histoire politique du monde hellĂ©nistique 323-, Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 2-02-060387-X).
  • (en) N. G. L. Hammond et F. Walbank, A History of Macedonia, vol. 3 : 336-167 B.C., Oxford, Clarendon Press, (ISBN 0198148151).
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