Bao Zheng
Bao Zheng (chinois : ć æŻ) est un fonctionnaire (ou mandarin, combinant les fonctions d'administrateur et de juge) de la dynastie Song. Ăgalement connu sous le nom de Bao Gong (chinois ć ć Ź, « Seigneur Bao »), il est cĂ©lĂšbre pour son intĂ©gritĂ© et son respect des lois, d'oĂč son autre surnom de Bao Qingtian (chinois ć é怩, « Bao Ciel-Bleu » au sens de « Bao l'IntĂšgre » sans nuage, c'est-Ă -dire sans corruption[1]). En français il est plus connu sous lâappellation de juge Bao.
Naissance | |
---|---|
DĂ©cĂšs |
(Ă 63 ans) KaĂŻfeng |
Nom dans la langue maternelle |
ć
æŻ |
Surnom |
Bao Gong |
Prénom social |
ćžä» |
Nom posthume |
ćè
|
Nationalité |
chinoise |
Activités | |
PĂšre |
Bao Lingyi (d) |
Conjoint |
Dong Shi (d) |
Enfants |
A travaillé pour |
Dynastie Song du Nord (en) |
---|
Biographie
Selon Song Shi, Bao Zheng est né dans une famille de savant à Hefei, province de l'Anhui. à l'ùge de 29 ans, il a passé l'examen impérial et est devenu Jinshi, le plus haut grade.
AprÚs avoir passé l'examen impérial en 1027, Bao décida de différer sa carriÚre officielle pendant 10 ans afin de prendre soin de ses parents ùgés et d'observer fidÚlement les rites de deuil aprÚs leur mort. De 1037 jusqu'à sa mort en 1062, Bao a successivement occupé plusieurs bureaux à la cour impériale et dans des lieux de province.
De son vivant, Bao Ă©tait rĂ©putĂ© pour sa piĂ©tĂ© filiale, son attitude sĂ©vĂšre et son intolĂ©rance Ă l'injustice et la corruption. En raison de sa renommĂ©e et de la force de sa rĂ©putation, le nom de Bao est devenu synonyme de « fonctionnaire honnĂȘte et droit » idĂ©alisĂ© (qing guan æž ćź) en Chine, et est rapidement devenu un sujet populaire des drames vernaculaires et des Ćuvres littĂ©raires. Bao a Ă©galement Ă©tĂ© associĂ© au dieu Yanluo (Yama) et Ă la bureaucratie cĂ©leste du Taishan, en raison de sa prĂ©tendue capacitĂ© Ă juger des affaires dans l'au-delĂ aussi bien qu'il les jugeait dans le domaine de la vie.
Bao avait trois femmes, Lady Zheng, Lady Dong et Lady Sun. Il avait un fils, Bao Ye (ć çč¶), et un fils adoptif, Bao Suo (ć 绶). Bao aurait dit Ă sa famille :
« Si un de mes descendants succombe Ă la corruption en tant que fonctionnaire, il ne doit pas ĂȘtre autorisĂ© Ă revenir Ă la maison, ni enterrĂ© dans le lieu de sĂ©pulture de la famille. Celui qui ne partage pas mes valeurs n'est pas mon descendant. »
â Bao Zheng
Son lieu de sépulture à Hefei contient sa tombe avec les tombes des membres de la famille et un temple commémoratif. Il a été construit en 1066.
Dans la religion populaire
La religion populaire en fait parfois un juge des enfers.
Dans la littérature et le théùtre chinois
Ă l'opĂ©ra, Bao Gong porte un maquillage noir, avec un croissant de lune sur le front. Le noir est la couleur du fer, symbole d'incorruptibilitĂ©, et l'un des surnoms du juge est « visage de fer ». La lune est yin, tout comme les Enfers, et rappelle que Bao Gong a le pouvoir de descendre dans les Enfers en rĂȘve et d'y mener des interrogatoires de victimes ou de tĂ©moins. L'inflexibilitĂ© dans son application de la justice, mĂȘme envers les puissants, est l'une des caractĂ©ristiques du juge Bao. Une autre est sa puissance de raisonnement et son intuition hors du commun. Ainsi, comme il ne fait jamais d'erreur, il est donc un dieu. Une derniĂšre caractĂ©ristique est sa relation avec le surnaturel. Plusieurs casšd'affaires criminelles sont rĂ©solus par le juge Bao grĂące Ă un rĂȘve[2].
Les histoires mettant en scÚne le juge Bao les plus illustres sont celles de Chen Shimei (en) et celle du Chat échangé contre le dauphin. L'histoire de Chen Chimei, connue aussi sous le nom de son épouse Qin Xianglian, existait déjà sous forme d'opéra au XIIe siÚcle (version aujourd'hui perdue). Elle a par la suite été reprise dans de nombreux styles d'opéra, du zaju à l'opéra de Pékin. Histoire populaire, elle n'a été mise par écrit qu'au XXe siÚcle. La trame est celle d'une infidélité amoureuse. Un lettré, Chen Chimei, devient le gendre de l'empereur alors qu'il a déjà une épouse, Qin Xianglian. Quand Qin Xianglian veut faire reconnaßtre ses droits, il tente de la chasser et d'étouffer le scandale. Le juge Bao finit par le faire exécuter[3] - [2].
Dans Le Chat Ă©changĂ© contre le dauphin, la premiĂšre de deux concubines qui donnera un hĂ©ritier Ă l'empereur deviendra impĂ©ratrice. Quand l'une donne naissance Ă un fils, la seconde remplace l'enfant par le cadavre d'un chat. La mĂšre est chassĂ©e de la cour pour avoir donnĂ© naissance Ă un monstre. De son cĂŽtĂ©, l'enfant Ă©chappe Ă la mort et est Ă©levĂ© par un oncle de l'empereur au courant de la vĂ©ritĂ©. Les circonstances font que l'enfant finit par devenir lui-mĂȘme empereur. Le juge Bao intervient pour rĂ©vĂ©ler la vĂ©ritĂ© sur sa vĂ©ritable origine et rendre la justice. L'empereur est Ă la fois coupable d'avoir manquĂ© aux devoirs envers sa mĂšre, et innocent, puisqu'il n'Ă©tait au courant de rien. Il est puni symboliquement : ce sont ses vĂȘtements qui sont bastonnĂ©s[2].
Dans le thĂ©Ăątre de style zaju de la dynastie des Yuan (1279-1367), les piĂšces judiciaires constituent une partie importante du rĂ©pertoire. Parmi celle-ci, les piĂšces du genre des « fonctionnaires intĂšgres » (qingguan ji) mettent parfois en scĂšne le juge Bao. C'est le cas de deux piĂšces de Guan Hanqing, Lu Zhailang et Le RĂȘve aux papillons. Le juge Bao est aussi mis en scĂšne dans Le Cercle de craie, piĂšce de Li Qianfu, qui a inspirĂ© Le Cercle de craie caucasien Ă Bertolt Brecht, dans un cas similaire Ă celui du Jugement de Salomon. La piĂšce anonyme Le Spectre de l'Ă©cuelle (Pen'r gui) est aussi remarquable : le cas soumis au juge Bao est celui d'une Ă©cuelle, servant de pot de chambre, et qui parle, le corps de la victime ayant Ă©tĂ© jetĂ© par ses assassins dans un four Ă poterie[4] - [2].
Télévision
Plusieurs séries télévisées racontent les aventures de Bao ; c'est notamment le cas de Bao Qing Tian, une série chinoise réalisée en 1993 et 1994.
Le drama taĂŻwanaise Justice Pao se base sur son histoire.
Traductions
DĂšs 1839, ThĂ©odore Pavie, sinologue français, reprenait une des enquĂȘtes du juge Bao dans un « Choix de contes et nouvelles » traditionnels chinois.
- Traductions tirĂ©es du Longtu gongâan (Voir æ°è©çčĄćéŸćç„æ·ć
ŹæĄ [lire en ligne], sur Gallica)
- L'Ăpouse dâoutre-tombe. Conte chinois, trad. LĂ©on de Rosny, Paris, Jules Gay, 1864 â Repris dans Annuaire de la sociĂ©tĂ© des Ă©tudes japonaise, chinoise, tartares et indo-chinoises, 1873, pp. 93â105 [lire en ligne]
- Un mari sous cloche. Conte chinois, trad. Léon de Rosny, dans Bulletin de l'Athénée oriental, tome I, 1868, p. 162-167 ([lire en ligne]) et tome III, 1973, réédition Paris, Maisonneuve, 1874 [lire en ligne]
- Le BĂąton du muet, trad. Giuseppe Barone, Paris, Maisonneuve, 1883 [lire en ligne]
- Pierre Kaser, « « Le Bouddha entremetteur », premier cas judiciaire du Longtu gongâan », Impressions d'ExtrĂȘme-Orient, no 4, 2014 [lire en ligne]
- (en) Anonyme, Ghost of the Pot, trad. George A. Hayden, Renditions, numéro 3, 1974 [lire en ligne]
En 1997, les Ăditions en langues Ă©trangĂšres de PĂ©kin ont publiĂ© la traduction de huit histoires du juge Bao par un nommĂ© Hu Ben ; le recueil est intitulĂ© « Un Chat pour Prince ».
En 2004, Rebecca Peyrelon-Wang a commencĂ© Ă traduire, aux Ăditions You Feng, Sept hĂ©ros et cinq galants (XIXe siĂšcle), qui est plutĂŽt un roman de cape et dâĂ©pĂ©e quâune enquĂȘte policiĂšre, avec le juge Bao Ă la tĂȘte dâune troupe de redresseurs de torts. Pour l'instant, seuls trois Ă©pisodes ont Ă©tĂ© traduits.
Ćuvres inspirĂ©es des aventures du juge Bao, adaptations
Le roman Sept hĂ©ros et cinq galants et le juge Bao ont inspirĂ© les auteurs de bande dessinĂ©e Patrick Marty et Chongrui Nie qui lui ont consacrĂ© une hexalogie (sĂ©rie de six volumes), parue aux Ăditions Fei.
En , l'Ă©crivain français FrĂ©dĂ©ric Lenormand, dĂ©jĂ l'auteur des Nouvelles EnquĂȘtes du juge Ti (Ă©ditions Fayard, 18 tomes parus, 2004-2011), a publiĂ© aux Ă©ditions Philippe Picquier Un thĂ© chez Confucius, premier tome d'une nouvelle sĂ©rie intitulĂ©e Les EnquĂȘtes du juge Bao.
Notes et références
- Selon la traduction des expressions ć Ź et é怩 par le dictionnaire Grand Ricci
- Pimpaneau 1999, p. 73-77
- Jacques Pimpaneau, Chine. Histoire de la littérature, Philippe Picquier, 1989, rééd. 2004, p. 391-395.
- Roger Darrobers, Le Théùtre chinois, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », 1995, p. 17-18 et 22
Sources audio
- (en) Wilt L. Idema, Guest Lecturer, CollĂšge de France, 24 et : Judge Bao and the Nature of Crime [Ă©couter en ligne] et Judge Bao and the authority of the court [Ă©couter en ligne]
Bibliographie
- Jacques Pimpaneau, Chine. Mythes et dieux, Philippe Picquier, (1re Ă©d. 1995)