Accueil🇫🇷Chercher

Avocats de Saint-Pierre

La société des Avocats de Saint-Pierre (Avvocati di San Pietro en italien), fondée à Rome en 1877 et supprimée en 1909, était une œuvre catholique internationale formée pour défendre les intérêts de la papauté.

Avocats de Saint-Pierre
Histoire
Fondation
Dissolution
Cadre
Pays

Histoire

Pierre Lautier de Baudouin (d), commandeur de l'ordre
« Ordre des Avocats de Saint-Pierre Â» (gravure de 1899)

Formation et organisation

Dans les années 1870, les débats liés à la question romaine et à la laïcisation de plusieurs États poussent les partisans du pape à organiser des groupes de juristes et d'orateurs capables de défendre les intérêts de la papauté et de l’Église catholique. C'est notamment l'objet de la société privée des Avocats de Saint-Pierre, fondée en 1877 et présidée par le comte Gaetano Agnelli dei Malherbi, commandeur de l'Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Accueillie favorablement par le pape Pie IX, elle est officiellement reconnue par Léon XIII dans un bref daté du [1]. Le cardinal Parocchi, vicaire général du souverain pontife, est bientôt nommé protecteur de l’œuvre. À sa mort, en 1903, il est remplacé par le cardinal Respighi[2].

BasĂ©e Ă  Rome, la sociĂ©tĂ© publie ses annales et essaime dans plusieurs pays, oĂą elle est reprĂ©sentĂ©e par diffĂ©rents « collèges Â» puis « conseils centraux Â». Initialement rĂ©servĂ©e aux avocats, avouĂ©s et docteurs en droit, elle s'ouvre progressivement Ă  des notables catholiques en dehors des seules professions juridiques[3] et compte environ 3 000 membres actifs dès les annĂ©es 1880.

En , après la mort d'Agnelli dei Malherbi, la présidence générale est confiée à un voyageur de commerce français, Marius-Pierre Lautier[4], dit « Lautier de Baudouin »[2].

Organisation en France

En 1884, le prĂ©sident gĂ©nĂ©ral Agnelli dei Malherbi adresse une lettre aux Ă©vĂŞques de France pour leur demander d'instaurer des comitĂ©s locaux de l’œuvre[5]. Dès l'annĂ©e suivante, diffĂ©rents congrès et rĂ©unions sont organisĂ©s Ă  travers le pays (Ă  Rennes et Lyon en 1885, Ă  Bourges en 1886...). Ce dĂ©veloppement est notamment dĂ» Ă  Pierre Lautier. Admis dans l'association en 1880, il en a Ă©tĂ© nommĂ© « promoteur gĂ©nĂ©ral Â» pour la France deux ans plus tard[2] avant de devenir prĂ©sident gĂ©nĂ©ral en 1892. Ces services lui valent d'ĂŞtre nommĂ© camĂ©rier de cape et d'Ă©pĂ©e par un billet de la secrĂ©tairerie d’État du pape en 1893[6].

EstimĂ©s Ă  environ 10 000 membres en 1898[3], les « avocats Â» français sont placĂ©s sous la direction d'un conseil central. Celui-ci est prĂ©sidĂ© Ă  partir de 1895 par FĂ©ry d'Esclands, avec l'homme politique Georges Berry pour vice-prĂ©sident dès 1893[7]. Les sociĂ©taires français organisent des Ĺ“uvres de bienfaisance et patronnent notamment le clinique de Saint-Sulpice, Ă©tablie au no 46 de la rue Madame[8], oĂą les pauvres bĂ©nĂ©ficient gratuitement des soins prodiguĂ©s par le docteur Hacks[9]. Au dĂ©but du mois de juillet, les « avocats Â» cĂ©lèbrent religieusement leur fĂŞte patronale sous la prĂ©sidence de Monseigneur de l'Escaille, la messe Ă©tant souvent suivie d'un banquet prĂ©sidĂ© par Monseigneur Biet[10]. Le Rosier de Marie, remplacĂ© plus tard par L’Écho de Rome, est leur organe officiel.

En 1900, la présidence d'honneur est décernée à Pierre IV Geraigiry, patriarche melkite d'Antioche, lors de sa visite à Paris[11].

Scandale et abolition (1905-1909)

La section française de la société est qualifiée d'« Ordre des Avocats de Saint-Pierre », ce qui a entraîné des malentendus quant à l'existence d'un ordre honorifique institué sous ce nom par le Saint-Siège, d'autant plus qu'un insigne ressemblant à une médaille a été créé par le « commandeur »[12] Lautier. Ce dernier est donc suspecté, dès 1894, de se livrer à un véritable trafic de décorations[13] - [14]. Informé de ces bruits[15], le cardinal Parocchi suspend l’expédition des diplômes d'admission entre et [16] - [17], avant de faire ajourner sine die le congrès que la société devait tenir à Rome en [18].

Le scandale Ă©clate finalement en 1905, Ă  la suite de plaintes contre l'abbĂ© Raynaud-Wolda, aumĂ´nier de la prison militaire de Marseille, qui avouera avoir vendu de nombreuses mĂ©dailles de l'« ordre Â» et mĂŞme des titres de noblesse fantaisistes[2]. Les enquĂŞteurs marseillais suspectant une complicitĂ© avec Lautier, les deux hommes sont arrĂŞtĂ©s en fĂ©vrier[19]. Également reconnu coupable d'un autre dĂ©tournement, Raynaud-Wolda est condamnĂ© le Ă  six mois de prison pour escroquerie et abus de confiance. Lautier, auquel on reproche surtout la diffusion d'un ordre Ă©tranger considĂ©rĂ© comme illĂ©gal (car non dĂ©cernĂ© par une puissance souveraine), est seulement condamnĂ© Ă  quatre mois avec sursis[20], la procĂ©dure ayant rĂ©vĂ©lĂ© que l'abbĂ© avait en partie agi Ă  son insu[21]. Il conserve ainsi ses fonctions l'annĂ©e suivante[22].

Le scandale français entraîne l'abolition de l'œuvre en 1909 : contenue dans un motu proprio de Pie X daté du , la décision est publiée dans les Acta Apostolicæ Sedis, journal officiel du Vatican, puis reprise par L'Osservatore romano et plusieurs autres titres italiens[23] - [24] - [25].

Références

  1. Revue catholique des institutions et du droit, février 1880, p. 152.
  2. Le Petit Parisien, 18 février 1905, p. 4-5.
  3. Le Figaro, 4 juillet 1898, p. 1.
  4. Le Matin, 8 septembre 1892, p. 2.
  5. La Croix, 20 mai 1884, p. 3.
  6. La Croix, 2 août 1893, p. 3.
  7. Le Matin, 29 janvier 1893, p. 3.
  8. Le Matin, 5 décembre 1894, p. 3.
  9. La Croix, 23 juillet 1895, p. 2.
  10. La Croix, 4 juillet 1899, p. 2, et 5 juillet 1900, p. 3.
  11. Le Figaro, 28 juillet 1900, p. 1.
  12. Lautier est commandeur de l'ordre fantaisiste des chevaliers de Saint-Léon inventé par Léon Laforge de Vitanval (Le Figaro, 3 mai 1901, p. 3).
  13. Jean de Bonnefon, « Les Avocats de St-Pierre », Le Journal, 6 octobre 1894, p. 1-2.
  14. Le Matin, 19 mai 1895, p. 2.
  15. Annales catholiques, 1er février 1896, p. 260.
  16. La Croix, supplément du 25 janvier 1896, p. 1.
  17. La Croix, 16 février 1896, p. 1
  18. Le Matin, 13 décembre 1897, p. 1.
  19. Le Radical, 19 février 1905, p. 2.
  20. Le Radical, 30 juin 1905, p. 3.
  21. Le Temps, 21 juin 1905, p. 4.
  22. Paroles françaises et romaines, janvier 1907, p. 18.
  23. Semaine religieuse du diocèse de Lyon, 28 mai 1909, p. 333.
  24. La Croix, 4 juin 1909, p. 2.
  25. Le Temps, 5 juin 1909, p. 2.

Bibliographie

  • Paul GuĂ©rin (dir.), Dictionnaire des dictionnaires, t. VI, Paris, 1895, p. 1240-1241.
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.