Attentat de Begoña
L’attentat de Begoña est un attentat survenu devant la Basilique de Notre Dame de Begoña (es) du quartier Begoña de Bilbao au dĂ©but de la dictature franquiste, le 16 aoĂ»t 1942, au cours duquel une grenade Ă main fut lancĂ©e, selon plusieurs tĂ©moins, par le phalangiste Juan JosĂ© DomĂnguez Muñoz, faisant 70 blessĂ©s lĂ©gers. Il fut interprĂ©tĂ© comme une attaque ratĂ©e contre le gĂ©nĂ©ral carliste JosĂ© Enrique Varela, alors ministre de l'ArmĂ©e[1].
Histoire
Au dĂ©but d’aoĂ»t 1942, Ă la sortie des funĂ©railles solennelles pour les soldats carlistes tombĂ©s durant la guerre civile espagnole cĂ©lĂ©brĂ©e Ă l'Ă©glise San Vicente de Abando de Bilbao, il y eut des cris contre les phalangistes. Un militant phalangiste local de longue date considĂ©ra qu'il s’agissait d’une provocation et demanda au vice-secrĂ©taire de FET y de las JONS (parti unique du franquisme), JosĂ© Luna MelĂ©ndez (en) — un phalangiste proche du « cuñadĂsimo », le beau-frère du gĂ©nĂ©ral Franco, RamĂłn Serrano Súñer — de prĂ©parer une rĂ©ponse, Ă©tant donnĂ© qu’était prĂ©vue le 15 aoĂ»t un nouvel acte de commĂ©moration similaire Ă Begoña, qui serait cette fois prĂ©sidĂ© par le ministe de l’ArmĂ©e, le gĂ©nĂ©ral Varela[2] .
La veille de la cĂ©lĂ©bration, le commandant des milices phalangistes de Bilbao informa son chef rĂ©gional, en poste Ă Burgos, que parmi ceux qui assisteraient Ă l'Ă©vènement de Begoña seraient prĂ©sents des nationalistes basques dĂ©guisĂ©s en uniforme carliste, qui porteraient des armes et souhaitaient provoquer des incidents. Ce mĂŞme jour, le 14 aoĂ»t, le chef du SEU de Biscaye, Vizcaya Eduardo Berástegui et un militant phalangiste de la première heure nommĂ© Calleja sortirent de Valladolid « après avoir reçu des instructions ». Ă€ Saint-SĂ©bastien, ils furent rejoints par Juan JosĂ© DomĂnguez Muñoz, qui, comme Calleja, venait de rentrer du front russe, oĂą il avait combattu dans les rangs de la Division Bleue. Ils arrivèrent Ă Bilbao tĂ´t dans la matinĂ©e du 15 aoĂ»t[2].
La messe en honneur des carlistes morts au combat commença Ă 11 h 30 dans la basilique de Begoña. Ă€ la sortie de la cĂ©rĂ©monie, des groupes de phalangistes prirent Ă parti les assistants — qui rĂ©pondirent aux cris de « Vive le roi ! », « Ă€ bas la socialisme d'État ! » et « Mort Ă Franco ! » —[1] et Juan JosĂ© DomĂnguez lança soudainement deux bombes qui causèrent plusieurs blessĂ©s et atteignirent presque le gĂ©nĂ©ral Varela[2]. DomĂnguez et ses complices furent interpelĂ©s et le gĂ©nĂ©ral Varela informa immĂ©diatement le gĂ©nĂ©ral Franco des Ă©vènements. Il appela Ă©galement le ministre du Gouvernement (es), ValentĂn Galarza Morante, pour exiger que les dĂ©tenus soient livrĂ©s Ă la juridiction militaire pour ĂŞtre soumis Ă un conseil de guerre. Il envoya aussi une note au huit capitaine gĂ©nĂ©raux, dans laquelle il affirmait que l'attentat Ă©tait dirigiĂ© contre l’ArmĂ©e[2].
Les ministres phalangistes Ramón Serrano Suñer et José Luis Arrese, qui étaient alors en vacances, rentrèrent immédiatement à Madrid où, avec José Antonio Girón de Velasco, autre ministre phalangiste, ils tentèrent d’empêcher la condamnation et l’exécution des détenus en minimisant l’importance de l’incident. Ils envoyèrent pour ce faire un représentant à Bilbao[2].
Pendant ce temps, le gĂ©nĂ©ral Franco poursuivait ses vacances en Galice, comme si rien ne s’était passĂ©, et ne commença Ă agir qu’à partir du 24 aoĂ»t, 9 jours après l'attentat. Ce jour-lĂ , il appela au tĂ©lĂ©phone le gĂ©nĂ©ral Varela, qui lui dit qu’il avait Ă©tĂ© victime d’un attentat et qu’il avait par chance Ă©chappĂ© Ă la mort, Ă quoi Franco rĂ©pondit : « Que tout soit fait dans la plus grande Ă©quitĂ©, car puisqu’il s’agit d’une provocation, les choses varient »[3] - [2]. Des huit phalangistes impliquĂ©s dans l'attentat de Begoña, deux furent condamnĂ©s Ă mort, DomĂnguez et Hernando Calleja Calleja, mais la peine du second fut finalement commuĂ©e — DomĂnguez fut effectivement fusillĂ© —[1].
Franco profita de l'incident de Begoña pour Ă©vincer les phalangistes du gouvernement, y compris son propre beau-frère Serrano Suñer, alors ministre des Affaires Ă©trangères , ainsi que Galarza Morante, ministre du Gouvernement, et le gĂ©nĂ©ral Varela, ministre de l'ArmĂ©e[1]. Le chef des milices phalangistes JosĂ© Luna MelĂ©ndez fut Ă©galement destituĂ©, bien qu’il ait dĂ©clarĂ© sa loyautĂ© inĂ©branlable envers le GeneralĂsimo. Il fut remplacĂ© par Manuel de Mora-Figueroa (es)[2], qui n’exerça qu’un court mandat, car Franco finit par dissoudre la milice du parti, malgrĂ© les quelques oppositions internes que cette dĂ©cision suscita[4] - [5].
Notes et références
- (es) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en espagnol intitulé « Atentado de Begoña » (voir la liste des auteurs).
- (es) Alfredo Amestoy (es), « El falangista que fusiló Franco », El Mundo),‎ (lire en ligne)
- (es) Luis Suárez Fernández (es), Franco. Los años decisivos: 1931-1945, Barcelone, Ariel, (ISBN 84-344-1332-9), p. 221-224
- « Que se haga todo dentro de la mayor equidad, porque ya tratándose de una provocaciĂłn, las cosas varĂan »
- (en) Wayne H. Bowen (es), Spain during World War II, Columbia, University of Missouri Press (en), (ISBN 0-8262-6515-4), p. 88
- (es) Pedro MontoliĂş, Madrid en la posguerra, 1939-1946: Los años de la represiĂłn, Madrid, SĂlex ediciones, (ISBN 84-7737-159-8), p. 297