Association de malfaiteurs en droit pénal belge
L'association de malfaiteurs est définie depuis longtemps par le Code pénal belge, crée 8 juin 1867, à l'article 322, comme « toute association formée dans le but d'attenter aux personnes ou aux propriétés est un crime ou un délit, qui existe par le seul fait de l'organisation de la bande[1].»
Toutefois, cette notion pĂ©nale d'association des malfaiteurs est jugĂ© insuffisant afin de lutter contre la criminalitĂ© organisĂ©e par la commission dâenquĂȘte belge[2].
Historique
Code pénal belge de 1867
Le Code pénal belge (Strafwetboek en néerlandais) défini dÚs 1867 l'association de malfaiteurs à l'article 322 au sein du chapitre I « de l'association formée dans le but d'attenter aux personnes ou aux propriétés et de l'organisation criminelle » au titre VI intitulé « des crimes et délits contre la sécurité publique ».
« Art. 322. Toute association formée dans le but d'attenter aux personnes ou aux propriétés est un crime ou un délit, qui existe par le seul fait de l'organisation de la bande. »[3]
Loi du 10 janvier 1999 portant abolition de la peine de mort et modifiant les peines criminelles
Toutefois, devant le développement de la criminalité organisée, une loi du 10 janvier 1999 a créé une autre infraction à cÎté de celle- ci : il s'agit du délit d'organisation criminelle qui est une :
« association structurĂ©e de plus de deux personnes, Ă©tablie dans le temps, en vue de commettre de façon concertĂ©e, des crimes et dĂ©lits punissables d'un emprisonnement de trois ans ou d'une peine plus grave, pour obtenir, directement ou indirectement, des avantages patrimo-niaux » (art. 324 bis CP belge[3]), en utilisant l'intimidation, la menace, la violence, des manĆuvres frauduleuses ou la corruption ou en recourant Ă des struc-tures commerciales ou autres pour dissimuler ou faciliter la rĂ©alisation des infractions » ( art. 324 ter CP belge[3]).
Caractéristiques du délit d'association de malfaiteurs en droit pénal belge
La dĂ©finition pĂ©nale de lâassociation de malfaiteurs vise Ă punir les attentats contre les personnes et les propriĂ©tĂ©s. Ainsi, la commission d'enquĂȘte a considĂ©rĂ© Ă cet Ă©gard « que lâon peut donner une trĂšs large dĂ©finition au membre de phrase âattentats contre les personnes ou les propriĂ©tĂ©sâ utilisĂ© dans le cadre de lâassociation de malfaiteurs »[4].
Lâassociation de malfaiteurs contient trois Ă©lĂ©ments constitutifs : lâexistence dâune association, lâorganisation de la bande et lâintention dâattenter aux personnes et aux propriĂ©tĂ©s.
Concernant l'Ă©lĂ©ment moral de l'infraction, la jurisprudence belge considĂšre quâune intention personnelle de commettre un dĂ©lit au sein de lâassociation, câest-Ă -dire attenter aux personnes et aux propriĂ©tĂ©s, nâest pas nĂ©cessaire. Par contre, elle requiert, en tant quâĂ©lĂ©ment moral, que le suspect ait eu la volontĂ© dĂ©libĂ©rĂ©e dâĂȘtre membre de la bande « en sachant que celle-ci est formĂ©e dans le but dâattenter aux personnes ou aux propriĂ©tĂ©s »[5].
Les dispositions lĂ©gales sur lâassociation de malfaiteurs portent sur certaines infractions, mais peuvent Ă©galement sâappliquer Ă la structure criminelle, le SĂ©nat l'ayant affirmĂ©e en se fondant sur une jurisprudence de la Cour de cassation[6]âŻqui avait jugĂ© que :
« Quand lâassociation constitue un groupe organisĂ© de personnes qui a pour but de commettre des attentats contre les personnes et les propriĂ©tĂ©s, ses membres tombent sous le coup de la loi pĂ©nale, mĂȘme sâils ne se mettent pas effectivement Ă en commettre. Le texte originel de la loi Ă©tait rĂ©digĂ© ainsi âquand mĂȘme il nâaurait Ă©tĂ© accompagnĂ© ni suivi dâaucune infractionâ. Les ayant estimĂ©s inutiles, lâon a supprimĂ© ces mots. »[7].
RĂ©pression
Peines applicables
« Les provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui y auront exercé un commandement quelconque » (article 323 du Code pénal belge)
S'agissant des provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui y auront exercé un commandement quelconque :
- Lorsque l'association a eu pour but la perpétration de crimes emportant la peine de réclusion à perpétuité ou la réclusion de dix ans à quinze ans ou un terme supérieur, la peine de réclusion est de cinq ans à dix ans.
- Lorsque l'association de malfaiteurs a été formée pour commettre d'autres crimes, la peine d'emprisonnement est de deux ans à cinq ans.
- Lorsque association de malfaiteurs a été formée pour commettre des délits, la peine d'emprisonnement est de six mois à trois ans.
« Art. 323. Si l'association a eu pour but la perpétration de crimes emportant la peine de réclusion à perpétuité ou la réclusion de dix ans à quinze ans ou un terme supérieur, les provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui y auront exercé un commandement quelconque, seront punis de la réclusion de cinq ans à dix ans. Ils seront punis d'un emprisonnement de deux ans à cinq ans, si l'association a été formée pour commettre d'autres crimes, et d'un emprisonnement de six mois à trois ans, si l'association a été formée pour commettre des délits. »[3]
« Tous autres individus faisant partie de l'association et ceux qui auront sciemment et volontairement fourni à la bande ou à ses divisions des armes, munitions, instruments de crime, logements, retraite ou lieu de réunion » (article 324 du Code pénal belge)
S'agissant de tous autres individus faisant partie de l'association et ceux qui auront sciemment et volontairement fourni à la bande ou à ses divisions des armes, munitions, instruments de crime, logements, retraite ou lieu de réunion, seront punis :
- Lorsque l'association a eu pour but la perpétration de crimes emportant la peine de réclusion à perpétuité ou la réclusion de dix ans à quinze ans ou un terme supérieur, la peine d'emprisonnement est de six mois à cinq ans.
- Lorsque l'association de malfaiteurs a été formée pour commettre d'autres crimes, la peine d'emprisonnement est de deux mois à trois ans.
- Lorsque association de malfaiteurs a été formée pour commettre des délits, la peine d'emprisonnement est d'un mois à deux ans.
« Art. 324. Tous autres individus faisant partie de l'association et ceux qui auront sciemment et volontairement fourni à la bande ou à ses divisions des armes, munitions, instruments de crime, logements, retraite ou lieu de réunion, seront punis :
Dans le premier cas prévu par l'article précédent, d'un emprisonnement de six mois à cinq ans;
Dans le second cas, d'un emprisonnement de deux mois Ă trois ans;
Et dans le troisiÚme, d'un emprisonnement d'un mois à deux ans. »[3]
L'interdiction
Les provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui y auront exercĂ© un commandement quelconque, condamnĂ©es Ă une peine d'emprisonnement, pourront, de plus, ĂȘtre condamnĂ©s Ă l'interdiction. Autrement dit, ils se verront interdire, en tout ou en partie, pour un terme de cinq ans Ă dix ans, l'exercice des droits Ă©numĂ©rĂ©s Ă l'article 31, alinĂ©a 1er, Ă savoir le droit : de remplir des fonctions, emplois ou offices publics, d'Ă©ligibilitĂ©, de porter aucune dĂ©coration, aucun titre de noblesse, d'ĂȘtre jurĂ©, expert, tĂ©moin instrumentaire ou certificateur dans les actesâŻ; de dĂ©poser en justice autrement que pour y donner de simples renseignements [...].
Art. 325. Les coupables condamnĂ©s, en vertu des articles 323(, 324 et 324ter), Ă la peine d'emprisonnement, pourront, de plus, ĂȘtre condamnĂ©s Ă l'interdiction, conformĂ©ment Ă l'article 33 (...)[3].
Section V. - Des peines communes aux crimes et aux délits.
Sous-section I. - Des peines communes aux crimes et aux délits applicables aux personnes physiques.
Art. 33. Sous réserve de l'application des articles 31 et 32, les cours et tribunaux pourront, dans les cas prévus par la loi, interdire, en tout ou en partie, aux condamnés correctionnels, l'exercice des droits énumérés [à ] l'article 31, alinéa 1er, pour un terme de cinq ans à dix ans.
Ils pourront prononcer la mĂȘme interdiction pour la mĂȘme durĂ©e Ă l'Ă©gard des coupables dont la peine criminelle aura Ă©tĂ© commuĂ©e en un emprisonnement de moins de dix ans[3].
Art. 31.Tous jugements ou arrĂȘts de condamnation Ă la rĂ©clusion ou dĂ©tention Ă perpĂ©tuitĂ© ou Ă la rĂ©clusion d'une durĂ©e Ă©gale ou supĂ©rieure Ă dix ans ou Ă l'emprisonnement d'une durĂ©e Ă©gale ou supĂ©rieure Ă vingt ans prononceront, contre les condamnĂ©s, l'interdiction Ă perpĂ©tuitĂ© du droit :
1° De remplir des fonctions, emplois ou offices publics;
2° (...) d'éligibilité ;
3° De porter aucune décoration, aucun titre de noblesse;
4° D'ĂȘtre jurĂ©, expert, tĂ©moin instrumentaire ou certificateur dans les actes; de dĂ©poser en justice autrement que pour y donner de simples renseignements;
5° D'ĂȘtre appelĂ© aux fonctions de tuteur, subrogĂ© tuteur ou curateur, si ce n'est de leurs enfants; comme aussi de remplir les fonctions d'administrateur judiciaire des biens d'un prĂ©sumĂ© absent ou d'administrateur d'une personne qui est protĂ©gĂ©e en vertu de l'article 492/1 du Code civil
6° de fabriquer, de modifier, de réparer, de céder, de détenir, de porter, de transporter, d'importer, d'exporter ou de faire transiter une arme ou des munitions, ou de servir dans les Forces armées[3].
Exemption de peine
Toutefois, les coupables qui, avant toute tentative de crimes ou délits faisant l'objet de l'association et avant toutes poursuites commencées, auront révélé à l'autorité l'existence de ces bandes et les noms de leurs commandants en chef ou en sous-ordre seront exemptés des peines.
Art. 326. Seront exemptés des peines prononcées par le présent chapitre, ceux des coupables qui, avant toute tentative de crimes ou délits faisant l'objet de l'association et avant toutes poursuites commencées auront révélé à l'autorité l'existence de ces bandes et les noms de leurs commandants en chef ou en sous-ordre[3].
Références
- L'article 322, Code pénal belge, , 3133 p. (lire en ligne)
- Chambre, Doc. parl., 954-17 (1996-1997)
- Code pénal de 1867 (lire en ligne)
- SĂ©nat, Rapport de la Commission dâenquĂȘte sur la criminalitĂ©
- RĂ©union du 16 juillet 1997, p. 49/6, SĂ©nat, Doc. parl., 1-326/9.
- Cassation, 4-12-1984 no 8290, ArrĂȘtĂ© Cassation 1984-1985, p. 466, RDP, 1985, p. 580, in 1-326/9, p. 76.
- A. De Nauw, Inleiding tot het bijzonder strafrecht, Antwerpen, Kluwer, 1992, p. 61 ; cité par Sénat, Doc. parl., 1-326/9.
Voir aussi
Articles et catégories connexes
Lien externe
- Droit pénal comparé, Jean PRADEL, Dalloz, Précis, septembre 2016, page 81
- DĂ©finition lĂ©gale de lâorganisation criminelle et rĂ©organisation du pouvoir dâĂtat, Jean-Claude Paye, Dans Les Temps Modernes 2001/4-5 (no 615-616), pages 371 Ă 388
- Les définitions légales de l'organisation criminelle, Jean-Claude Paye, Dans Courrier hebdomadaire du CRISP 2000/32 (no 1697), pages 5 à 43