Arts martiaux vietnamiens
Les arts martiaux vietnamiens (ou Vo Thuat, en vietnamien) regroupent les arts martiaux crĂ©Ă©s ou pratiquĂ©s au Vietnam, et sont constituĂ©s d'une multitude de techniques de combat, de pratiques et de styles, dĂ©veloppĂ©s au ViĂȘt Nam au fil des siĂšcles.
L'histoire du Vo Thuat, intimement liĂ©e Ă lâhistoire de ce pays constamment en butte aux invasions, voit se croiser de multiples influences : chinoises, principalement, mais aussi indonĂ©siennes, tibĂ©taines⊠Le Vo Thuat a ainsi progressĂ© par Ă©changes et absorptions, enrichissant son fond traditionnel sans pour autant perdre son authenticitĂ©, ancrĂ©e dans une mentalitĂ© spĂ©cifique, une culture riche, et une histoire bien particuliĂšre. Du fait des occupations successives, il reste peu de traces de cette histoire, le Vo Thuat Ă©tant le plus souvent obligĂ© de progresser clandestinement, et les rares archives Ă©tant dĂ©truites ou perdues. Pour les mĂȘmes raisons, les Ă©coles ont Ă©tĂ©, et sont toujours, nombreuses, diverses, et, jusquâĂ trĂšs rĂ©cemment, Ă©chappent Ă toute structuration.
Depuis quelques dizaines dâannĂ©es, on a vu naĂźtre des tentatives dâunification et de structuration de ce foisonnement dâĂ©coles et de styles, parfois rivaux, sous forme de fĂ©dĂ©rations. Aux yeux de certains, cela pose la question dâun risque dâappauvrissement et dâuniformisation, et les difficultĂ©s rencontrĂ©es, en France particuliĂšrement, sont peut-ĂȘtre en effet le signe dâun certain contre-sens, historique et culturel. Ă l'heure actuelle, on peut distinguer deux mouvements principaux: le Vo Co Truyen (Vo Thuat Co Truyen: arts martiaux traditionnels vietnamiens, rassemblant une multitude d'Ă©coles) et le Vovinam Viet Vo Dao (Ă©cole de crĂ©ation plus rĂ©cente, visant Ă structurer et crĂ©er une synthĂšse des techniques martiales vietnamiennes).
Vo Thuat : Présentation générale
Vo Thuat : Ătymologie
« VĂ” Thuáșt » est lâexpression vietnamienne pour « arts martiaux », ou encore « art de pratiquer des techniques martiales », « Vo » signifiant « guerre, combat », et « Thuat » signifiant « techniques ». Câest l'Ă©quivalent du terme « Wu Shu » en chinois, ou « Bujutsu » au Japon, et les idĂ©ogrammes sont dâailleurs identiques.
Rappelons, Ă toutes fins utiles, qu'il faut nuancer cette traduction. En effet, lâexpression « art martial », en français, lui-mĂȘme issu de l'anglais « martial art », rend mal compte de la nuance initiale, le terme « martial » - « du dieu Mars »- renvoyant Ă une idĂ©e dâagressivitĂ©, de violence, voire de fureur sanglante. Or, lâidĂ©ogramme pour Vo/Wu/Bu illustre une main (un guerrier) qui arrĂȘte une lance. Ă lâopposĂ© des connotations de « martial » en français, nous nous trouvons donc ici face un concept de non violence, face Ă lâidĂ©e dâĂ©viter lâusage des armes, dâarrĂȘter le coup portĂ© par lâennemi. Ainsi se trace un portrait du combattant plus proche de notre notion du « chevaleresque », avec ce que cela implique de bravoure, et, surtout, de rectitude morale.
Ainsi, le sens de « Vo Thuat » (ou Wu Shu) serait plutĂŽt « art de celui qui sâoppose Ă la violence »[1] - [2].
Le « Dao » (la Voie)
Un concept frĂ©quemment associĂ© au Vo est celui de « Dao », la voie, au sens spirituel du terme, rĂ©unissant tous les principes de vie et conduisant Ă la sagesse (« Tao » en chinois, « Do » en japonais). On le retrouve dans le nom de nombreuses Ă©coles, oĂč il vient souligner le fait que lâapprentissage du Vo ne se limite pas Ă lâacquisition de techniques de combat, purement physiques, mais, bien plus largement, englobe quantitĂ© dâautres apprentissages : connaissance de soi, Ă©thique, tactique et stratĂ©gie, techniques prophylactiques, etc.
Dans cette optique, le Vo Thuat offre Ă ses pratiquants les extraordinaires richesses culturelles accumulĂ©es tout au long de son histoire, au travers de poĂšmes et de rĂ©cits (les « BĂ i thiĂȘu » qui accompagnent les QuyĂȘn, par exemple), de pensĂ©es philosophiques, de connaissances dâordre mĂ©dical, etc., et vise au dĂ©veloppement global de lâindividu : externe (force, souplesse), interne (Ă©nergie, santĂ©), intellectuel et moral[3].
Origines : « Ajouter, modifier, assimiler, ne jamais sâassujettir »
Les arts martiaux traditionnels vietnamiens sont nĂ©s dans les campagnes et les villages. Des fouilles archĂ©ologiques (Dong Son) tĂ©moignent de lâexistence, dĂšs la prĂ©histoire et la haute antiquitĂ©, de techniques guerriĂšres utilisĂ©es par les anciens Vietnamiens. Cet art du combat servait aux cultivateurs et paysans de moyen de dĂ©fense et de survie, Ă un niveau local, dâabord, et ensuite, du fait de sa situation gĂ©ographique, pour lutter contre les multiples tentatives dâinvasion et dâoccupation de leurs belliqueux voisins : la Chine, surtout, mais aussi les Mongols par exemple, et ensuite, bien plus tard, la France, le Japon et les Ătats-Unis enfin. Câest au cours de cette histoire, dans ce creuset particulier quâest le ViĂȘt Nam, que le peuple vietnamien a crĂ©Ă© et enrichi ses propres techniques, dans un mouvement dâinfluences rĂ©ciproques.
Sâil est indĂ©niable que les arts chinois, principalement, ont influencĂ© la pratique martiale au ViĂȘt Nam, et que certaines Ă©coles vietnamiennes anciennes ou actuelles y trouvent directement leur source, le Vo Thuat ne peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un pĂąle ersatz des arts martiaux chinois. Suivant le vieil adage « Ajouter, modifier, assimiler, ne jamais sâassujettir », les maĂźtres vietnamiens ont nourri leur pratique des apports chinois, mais en adaptant tous ces enseignements aux us et coutumes vietnamiens. Ă ce sujet, il faut dâailleurs ajouter ceci : bien que les Vietnamiens se sentent assez proches du peuple chinois, et admirent leur civilisation, ils sont toujours restĂ©s prudents, mĂ©fiants, et ont veillĂ© Ă se protĂ©ger en modifiant tout ce quâils en ont appris. Ainsi, le systĂšme dâĂ©criture dâancien vietnamien Ă©tait semblable en apparence Ă celui de la Chine, mais illisible pour un natif chinois. Les maĂźtres de Vo Thuat ont procĂ©dĂ© de la mĂȘme maniĂšre pour dĂ©velopper leur art martial, avec le souci dâen prĂ©server la richesse, et les secretsâŠ[4]
Ainsi, le Vo Thuat, riche de ses influences chinoises, mais aussi indonĂ©siennes ou tibĂ©taines, peut se targuer dâune rĂ©elle authenticitĂ©, ancrĂ©e dans une mentalitĂ© spĂ©cifique, une culture riche, et une histoire bien particuliĂšre.
LâentraĂźnement
Le Vo Thuat, comme tous les arts martiaux, inclut différentes techniques de combat : combat à mains nues, coups de poing et de pied, et maniement de nombreuses armes traditionnelles.
Ă la diffĂ©rence de certains arts martiaux dâautres cultures, le Vo Thuat a Ă cĆur de conserver une grande souplesse dâapproche, prĂ©fĂ©rant guider lâapprenant (Vo Sinh) sur la voie de sa pratique que le contraindre Ă lâexacte reproduction. Autrefois, la pratique nâĂ©tait pas limitĂ©e par un programme unique, figĂ©, et chaque Vo Sinh choisissait son chemin (ou plutĂŽt, son maĂźtre lâamenait Ă le dĂ©couvrirâŠ) en fonction de sa morphologie et de son tempĂ©rament. Dans certaines Ă©coles, il Ă©tait mĂȘme Ă©tabli un horoscope pour chaque Ă©lĂšve afin dâĂ©tablir le profil de sa pratique personnelle. Câest pour cette raison aussi quâil existe un si grand nombre dâenchaĂźnements par Ă©cole, de façon Ă multiplier les possibilitĂ©s dâun travail personnalisĂ©, et de permettre Ă chacun de trouver des formes correspondant au mieux Ă sa propre personnalitĂ©.
Câest du moins ainsi que le veut la tradition, mais câest un aspect du Vo Thuat auquel se heurtent les actuelles tentatives dâunification et de structuration des diffĂ©rentes Ă©coles. Sous lâinfluence europĂ©enne, cartĂ©sienne, et de par la nĂ©cessitĂ©, il faut bien le dire, de se fĂ©dĂ©rer pour des raisons pratiques (reconnaissance, organisation de rencontres, subventionsâŠ) la tentation de standardiser les techniques est bien lĂ , au risque dâĂ©touffer lâextraordinaire richesse du Vo Thuat, et de trahir son esprit-mĂȘme[5]. Au ViĂȘt Nam, la FĂ©dĂ©ration des Arts Martiaux a rĂ©solu ce âproblĂšmeâ en Ă©tablissant un tronc commun pour le Vo Co Truyen, chaque Ă©cole restant par ailleurs libre de son programme.
Formes / Techniques de base
Guidé par son maßtre (Vo Su), le pratiquant (Vo Sinh) apprend à maßtriser les différentes techniques. Les formes de base sont traditionnellement divisées en trois grands groupes :
- les postures
- formes des membres supĂ©rieurs (coup de poing, mains, doigts, coudeâŠ)
- formes des membres infĂ©rieurs (coups de piedâŠ)
Ces formes de base sont travaillĂ©es sous forme dâenchaĂźnements, de sĂ©quences complexes de mouvements, propres Ă chaque Ă©cole : le quyĂȘn.
QuyĂȘn (Bai Quyen / Thao Quyen)
En France, ces enchaĂźnements sont appelĂ©s « QuyĂȘn ». Cette appellation est impropre, mais nĂ©anmoins solidement implantĂ©e, acceptĂ©e, et nous continuerons donc Ă lâutiliserâŠ
Ătymologiquement, « QuyĂȘn » signifie « poing, boxe ». Par glissement, on en est venu Ă utiliser le terme QuyĂȘn en lieu et place de « Bai QuyĂȘn » (leçon de boxe), puis, lui accordant le sens de « sĂ©rie de mouvement de combat » il est venu remplacer « Bai Thao » (leçon d'enchaĂźnement) ou « Don Luyen » (entraĂźnement en solo, enchaĂźnement tout seul). Aujourdâhui, la plupart des Ă©coles francophones utilisent donc le terme QuyĂȘn, ou Thao QuyĂȘn, pour dĂ©signer leurs enchaĂźnements Ă mains nues (et parfois mĂȘme avec armes).
On entend souvent que « QuyĂȘn » serait l'Ă©quivalent du japonais « Kata ». Ce nâest pas tout Ă fait exact. PremiĂšrement, comme on vient de le dire, QuyĂȘn ne concerne que les enchaĂźnements Ă mains nues (sans arme). DeuxiĂšmement, et plus essentiellement, il y a une vraie diffĂ©rence au niveau du sens profond. Kata, en japonais, dĂ©signe la forme, le moule, la copie conforme et parfaite. LâidĂ©ogramme qui le reprĂ©sente existe aussi au ViĂȘt Nam (« hinh »), mais nâest pas utilisĂ© en arts martiaux. Pourquoi ? Parce quâil nây a pas, dans le Vo Thuat, de concept de modĂšle ou de perfection Ă atteindre. Le pratiquant doit apprendre, mais surtout comprendre, sentir le mouvement, en capter lâessence, et le faire sien[6] - [7].
Traditionnellement, chaque Thao QuyĂȘn est accompagnĂ© dâun titre (une appellation imagĂ©e) et dâun poĂšme (« BĂ i thiĂȘu ») qui, pour lâinitiĂ©, en Ă©claire le sens.
Co Vo Dao, Bai Vu Khi
Le Vo Thuat inclut le maniement de nombreuses armes traditionnelles (« Co Vo Dao »), chaque école faisant ses propres choix. « Bai Vu Khi » est le terme générique le plus couramment utilisé pour désigner les enchaßnements avec armes.
Sabre et bĂąton sont les plus rĂ©pandues, mais, mĂȘme en ce qui concerne ces seules deux, les variations (de forme, de taille, de techniques) peuvent ĂȘtre importantes. Quant aux autres armes utilisĂ©es, cela va du couteau Ă lâĂ©ventail, en passant par la lance ou la fourche⊠En voici une liste, telle quâĂ©tablie par des Ă©coles de Binh Dinh[8].
- Cung â Arc
- Dai Dao â Hallebarde, guisarme
- Don Dao â Song dao Simple sabre, double sabre
- Thuong Dao â Pique, lance
- Doc KiĂȘm, Song KiĂȘm â simple Ă©pĂ©e, Ă©pĂ©e double
- Xa Mau â lance serpentine
- Lang KhiĂȘn â bouclier
- Doc Phu, Song Phu â hache simple, hache double
- Kick â vouge
- Roi â perche
- Crochet â MĂłc của ngÆ°á»i bĂĄn thá»t
- Doc Gian â masse Ă©pĂ©e
- Chuy â masse d'arme
- Dinh Ba â fourche
- Bua Cao â rĂąteau de guerre
- CĂŽn (Doan, Te Mi, Truong) â bĂąton court, moyen, long
- Song TĂŽ â dagues jumelĂ©es
- Song Xi â double bras armĂ©s
- DĂąy â Corde de piano
- Day Xich â chaĂźne
Song Luyen
Lâapprenant, une fois les bases assimilĂ©es, peut commencer Ă sâentraĂźner avec un partenaire ; ce sont les « Song Luyen », ou « combats codifiĂ©s », qui constituent un palier intermĂ©diaire entre le quyĂȘn et le combat.
DiffĂ©rents courants ; une multitude dâĂ©coles
La multiplication de conflits de diffĂ©rents types, la diversitĂ© dâinfluences assimilĂ©es et adaptĂ©es, et les Ă©carts gĂ©ographiques ont entraĂźnĂ©, au sein du Vo Thuat, le dĂ©veloppement dâune extraordinaire richesse de courants de pratique, militaires comme civils, adaptĂ©s Ă la dĂ©fense du territoire autant quâaux luttes intestines.
Ainsi, indĂ©pendamment de la pratique militaire, le ViĂȘt Nam a de tout temps abritĂ© une innombrable quantitĂ© de petites Ă©coles indĂ©pendantes, singuliĂšres et mĂȘme parfois rivales, en tout Ă©tat de cause peu structurĂ©es. On peut y voir un peu plus clair selon trois angles dâapproche :
Répartition géographique
En raison de la longue lutte fratricide qui opposa, du dĂ©but du XVIe Ă la fin du XVIIIe siĂšcle, le nord et le sud, et des influences diffĂ©renciĂ©es qui les ont touchĂ©s, on peut Ă©tablir une diffĂ©renciation entre les Ă©coles selon leur implantation gĂ©ographique. Ainsi, le nord a plutĂŽt subit lâinfluence des styles du sud de la Chine (Bach Ninh), et le sud plutĂŽt celle des Ă©coles chinoise du nord (Vo Lam). Quant au centre, dans la rĂ©gion de Binh Dinh, câest lĂ que sâĂ©tablirent les Ă©coles dâĂ©tat militaires, et que se dĂ©veloppa donc un style plus unifiĂ©, devant rĂ©pondre Ă des critĂšres trĂšs stricts dâefficacitĂ© et dâauthenticitĂ©, le style « officiel » (Vo Quang Binh et Vo Binh Dinh). Aujourdâhui encore, la province de Binh Dinh reste le centre nĂ©vralgique des arts martiaux vietnamiens.
Pratique populaire et pratique militaire
Un autre angle dâapproche est de distinguer le dĂ©veloppement dâune pratique militaire de lâexistence dâune pratique populaire. Inutile, sans doute de prĂ©ciser que, jusquâĂ trĂšs rĂ©cemment, la pratique du Vo nâĂ©tait en rien un loisir, un hobby ou une passion, mais bel et bien un enseignement essentiel visant Ă dĂ©fendre sa vie, celle de ses proches et ses biens contre bandits et envahisseurs.
Le Vo Thuat restait avant tout le fait de « maĂźtres de village » enseignant Ă un nombre rĂ©duit dâĂ©lĂšves, ou la « propriĂ©tĂ© » de familles aisĂ©es, chacun conservant jalousement les techniques de son Ă©cole. Ă ceci sâajoute une pratique plus disparate du fait de moines itinĂ©rants ou de guĂ©risseurs, marchands et comĂ©diens ambulants.
La diffĂ©rence entre le Vo des Ă©coles militaires, plus formatĂ©, et le style populaire, plus pratique, plus inventif, trĂšs variable en fonction de son origine, doit cependant ĂȘtre nuancĂ© par le fait que nâimporte qui pouvait se prĂ©senter aux concours militaires dâĂ©tat, autant les Ă©lĂšves des Ă©coles militaires que le simple paysan. Ceci a contribuĂ© Ă dĂ©velopper les arts martiaux dans toutes les couches de la sociĂ©tĂ© vietnamienne de l'Ă©poque, car mĂȘme le plus humble pouvait ainsi, par son travail du Vo, sâĂ©lever dans la sociĂ©tĂ© via les concours[9].
Nhu et Cuong
Les arts martiaux vietnamiens peuvent enfin ĂȘtre divisĂ©s en deux groupes : ceux qui pratiquent le "cuong" (dur, fort) et ceux qui pratiquent le "nhu" (souple, doux). Cette distinction est Ă rapprocher, encore qu'elle ne la recouvre pas exactement, de celle faite plus classiquement entre arts martiaux externes et arts martiaux internes [10] - [11].
Les Ă©coles de style Cuong, plus nombreuses et bien connues Ă lâĂ©tranger (Viet Vo Dao, Qwan Ki DoâŠ) visent Ă dĂ©velopper lâaptitude au combat en utilisant la force musculaire dans leurs techniques. Lâaccent est mis sur la rapiditĂ©, la puissance, la prĂ©cision.
Les Ă©coles de style Nhu (Thuy PhapâŠ) visent plutĂŽt Ă canaliser et faire circuler lâĂ©nergie (interne : le « Khi ») et utilisent, dans le combat, la souplesse face Ă la force, retournant vers lâadversaire sa propre puissance. Lâaccent est mis sur la fluiditĂ©, lâĂ©quilibre, la justesse.
Bien entendu, la frontiĂšre entre ces deux approches nâest pas Ă©tanche, et beaucoup dâĂ©lĂ©ments restent communs (postures, etc) ; par ailleurs, toutes les Ă©coles Cuong intĂšgrent, gĂ©nĂ©ralement, des techniques internes Ă leur programme (Khi Cong, Ho Hap Thuat/exercices de respirationâŠ), en raison de leur complĂ©mentaritĂ©, pour amĂ©liorer la concentration, les sensations, ou pour une meilleure harmonisation du souffle avec le mouvement.
Vo Co Truyen : arts martiaux traditionnels
« Vo Co Truyen » (ou Vo Thuat Co Truyen) est lâexpression qui signifie « arts martiaux traditionnels vietnamiens » (Co = tradition ; Truyen = enseignement). BasĂ© sur les trois doctrines bouddhiste, taoĂŻste et confucĂ©enne, ce courant regroupe, comme son nom lâindique, toutes les Ă©coles sâinscrivant dans la tradition de la pratique du Vo.
Au ViĂȘt Nam, ces Ă©coles sont rassemblĂ©es en une fĂ©dĂ©ration, « Lien Doan Vo Thuat Co Truyen Viet Nam », qui en reconnaĂźt lâauthenticitĂ©. Cette fĂ©dĂ©ration a travaillĂ© Ă homogĂ©nĂ©iser certains aspects, comme les passages de grades et (couleurs de) ceintures, et en outre a Ă©tabli un tronc commun constituĂ©, actuellement, de 18 « Quy Dinh », enchaĂźnements Ă mains nues et avec armes[12] - [13] - [14] :
- Tien Ong Quyen (mains nues) ;
- Roi Than Dong Con (bĂąton)
- Lao Ho Thuong Son (mains nues ; « le vénérable tigre qui gravit la montagne »)
- Tu Linh Dao (« le sabre des quatre animaux mystiques ») ;
- Hung Ke Quyen (mains nues ; « le coq vaillant ») ;
- Roi Dang Kon (bĂąton) ;
- Bach Hac Son Quyen (mains nues ; « la grue blanche de la montagne ») ;
- Huynh Long Doc Kiem (« lâĂ©pĂ©e simple du dragon jaune ») ;
- Nhen Chet Noi Bong Toi (« araignée meurtriÚre des lieux obscurs ») ;
- Kim Nguu Quyen (mains nues) ;
- Roi Thai Son (« le bùton de la montagne Thai Son ») ;
- Ngoc Tran Quyen (mains nues ; « le bol de jade ») ;
- Loi Long Dao (« la hallebarde du dragon ») ;
- Tinh HoĂ n Rá»ng (« les balles du dragon ») ;
- Lao Mai Quyen (mains nues ; « le vieux prunier ») ;
- Bat Quai Con (« le bùton des huit points cardinaux » ou « perche des huit trigrammes ») ;
- Sieu Xung Thien (« la hallebarde qui s'élÚve vers le ciel ») ;
- Doc Lu Thuong (« la lance de l'unité » ou « lance de l'encensoir unique »).
Au-delĂ de ce tronc commun â qui nâest pas dĂ©finitif â, chaque Ă©cole reste libre de son programme.
Ăcoles sino-vietnamiennes
Certaines écoles revendiquent plus directement leurs origines chinoises (comme, par exemple, le Thieu Lam, lié au bouddhisme et au courant Shaolin, le Vinh Xuan, tiré du wing chun ou le Wu Dao). Le Qwan Ki Do ou encore le Yang Ki Do sont des synthÚses d'arts martiaux chinois et vietnamiens.
Vovinam Viet Vo Dao
Au XXe siĂšcle, un troisiĂšme mouvement est apparu, fondĂ© par maĂźtre Nguyen Loc dans le but de crĂ©er une synthĂšse de tous les arts martiaux enseignĂ©s aux quatre coins du ViĂȘt Nam : le « Viet Vo Dao », ou « la voie des arts martiaux vietnamiens », aussi appelĂ© « Vovinam ».
On pourrait le considĂ©rer comme une Ă©cole plutĂŽt que comme un « courant », mais, trĂšs rapidement, il a pris de lâampleur et sâest rĂ©pandu dans tout le pays et Ă lâĂ©tranger, devenant lâart martial vietnamien le plus pratiquĂ©. Au ViĂȘt Nam, le gouvernement, inquiet de voir la jeunesse se tourner vers des pratiques martiales venues dâailleurs telles que le Taekwon Do, le KaratĂ© ou le Judo, en favorisa un enseignement de masse, ouvert Ă tous. Ailleurs aussi, les Ă©coles sâen revendiquant se sont multipliĂ©es, gardant cependant une unitĂ© relative du fait de son programme trĂšs codifiĂ©. On peut noter aussi que câest, actuellement, le style enseignĂ© aux forces de lâordre au ViĂȘt Nam.
Ce succĂšs rapide et, pourrait-on dire, universel est, hors ViĂȘt Nam (et en France en particulier) Ă lâorigine de frĂ©quents malentendus, le terme Viet Vo Dao Ă©tant souvent utilisĂ© de maniĂšre erronĂ©e pour dĂ©finir les arts martiaux vietnamiens en gĂ©nĂ©ral, la locution, il est vrai, prĂȘtant Ă confusion. Il en rĂ©sulta une certaine amertume, les autres Ă©coles reprochant au Vovinam Viet Vo Dao sa prĂ©tention Ă ĂȘtre « le meilleur des arts martiaux du ViĂȘt Nam », ou ses visĂ©es hĂ©gĂ©moniques[15] lors des tentatives de crĂ©ation dâune fĂ©dĂ©ration française. Le maĂźtre patriarche du Vovinam, LĂȘ SĂĄng, calma le jeu en 1998, en appelant Ă ne plus dissocier le terme Viet Vo Dao de celui de Vovinam, les deux Ă©tant en fait synonymes, et en rappelant quâils ne renvoyaient quâĂ cette seule et mĂȘme Ă©cole[2].
Les Ă©coles
Il demeure encore trĂšs difficile de lister les Ă©coles de Vo Thuat, ou de les structurer de maniĂšre satisfaisante.
Au ViĂȘt Nam, non seulement chaque Ă©cole veillait Ă garder ses secrets, mais en outre les Ă©coles devaient, bien souvent, rester secrĂštes elles-mĂȘmes. Dans des contextes dâoccupation, de guĂ©rilla ou de luttes intestines, les dĂ©tenteurs dâun savoir martial se sont protĂ©gĂ©s par lâanonymat, et ont enseignĂ© clandestinement Ă quelques rares disciples. De nombreuses Ă©coles se sont ainsi perdues dans les mĂ©andres de lâhistoire, ou ont Ă©voluĂ© sans historique bien affirmĂ©, handicapant les successeurs dâun lĂ©gitime dĂ©sir de reconnaissance et dâaffiliation. Actuellement encore, certaines Ă©coles, ou styles, ne portent pas de nom, car elles sont tout simplement enseignĂ©es dans un cadre familial. Ă lâinverse, on connaĂźt aussi certains maĂźtres « sans Ă©cole ».
Pour ce qui est de la diaspora vietnamienne, implantĂ©e notamment en Europe et aux Ătats-Unis, ce foisonnement dâĂ©coles et de styles, parfois rivaux, est toujours la rĂšgle malgrĂ© les diffĂ©rentes tentatives de regroupement en fĂ©dĂ©rations. Ce foisonnement pose problĂšme pour nos esprits cartĂ©siens qui voudraient que tout puisse ĂȘtre structurĂ©, codifiĂ©. Câest cependant la preuve de la richesse du Vo [16], capable des crĂ©ations les plus diverses Ă partir du fond traditionnel. Dans le Vo Thuat, chacun peut crĂ©er sa propre Ă©cole, et en ĂȘtre maĂźtre ; câest totalement lĂ©gitime, câest conforme Ă lâhistoire et Ă la culture de ce pays. On objectera que c'est laisser la porte ouverte Ă n'importe quel pseudo-maĂźtre, prĂȘt Ă abuser le naĂŻf ou, pire sans doute, irresponsable dans sa pratique. Il est fort Ă parier quâune telle Ă©cole ne durerait guĂšre, trĂšs vite dĂ©savouĂ©e par ses pairs, voire par ses Ă©lĂšves eux-mĂȘmes. Reste que câest un risque Ă courir ; celui de voir le Vo Thuat se figer, et ainsi sâĂ©tioler, serait bien plus dommageableâŠ
La fĂ©dĂ©ration française des arts martiaux vietnamiens[17] regroupe actuellement une vingtaine de styles diffĂ©rents, de factures plus ou moins rĂ©centes. On peut y voir le Vovinam, le Thanh Long, le Minh Long, le Kim Long, le Han Bai, le Viet Kune Dao, le Viet Vo Dao, le Qwan Ki Do, l'Aiki Vu Dao, etc. Mais les arts martiaux du ViĂȘt Nam ne se rĂ©sument pas Ă une vingtaine dâĂ©coles, et la liste suivante est loin dâĂȘtre exhaustive.
Par ordre alphabétique[18] - [19] - [15] - [20] - [21] :
- Aiki Vu Dao
- Ba Chuan Tao Yi
- Bach Hac
- Bach Ho
- Bach Ninh (ou Bac Ninh)
- Binh Dinh
- Can Tho
- Chau Gia Duong Lang Nam Phai
- Con Luan
- Cá»u-Long VĂ”-ÄáșĄo
- Cuu Mon
- Dai Bang Phai
- Dong HaĂŻ Thanh Long
- Dong Fang Hong Long
- Duong Lang
- Giáșżt NgÆ°á»i HĂ ng LoáșĄt
- Hac Ho
- Hac Long
- Han BaĂŻ
- Hau Quyen
- He Phai
- Hiep Khi Vo Dao
- Hoa Linh Bac Tru Quyen
- Hoa Long Vo Dao
- HĂČa SÆĄn VĂ” ÄáșĄo
- HĂła ThiĂȘn Äuong
- Hoang Nam
- Ho Bao Phuong Hoang
- Ho Long Hoang Vo Dao
- Hong Gia Vo Dao
- Hop Thuan Dao
- Huynh Long Phai
- JeetkĂŻdo-kaĂŻkan
- Kim Ke
- Kim Long
- Kung-fu Binh Dinh
- Giáșżt ngÆ°á»i hĂ ng loáșĄt
- La Han Quyen
- La Son Phai
- Lam Son Vo Dao
- Long Hai
- Long Ho Dao
- Long Ho Hoi
- Long Qing Phai
- Mei Hoa Quyen
- Minh Long
- Nam Hai Vo Dao
- Nam Ho Quyen
- Nam Hong Son
- Nam Phai Duong Lang
- Nga My Phai
- Nga My Son Phat Gia Quyen
- Nghia Long
- Phung Ho Vo Dao
- Phuong Long Vo Dao
- Puduku
- Quang Binh
- Qwan Ki Do ( Quan Khi Dao)
- Sa Long Cuong Luong
- Shao Ling Bach My
- Son HaĂŻ
- Song Long Khien
- Son Long Quyen Thuat
- Tai Cuc
- Tam Quyen Dao
- Tan-Khanh Ba-Tra
- Tay Son Nhan
- Taysonvodao
- Thai Vo Dao
- ThÄng Long VĂ” ÄáșĄo
- Thanh Long (Dragon vert) de MaĂźtre Nguyá» n DĂąn PhĂș
- Thanh Long Truong Son PhaĂŻ de MaĂźtre Nguyá» n DĂąn Viet GĂ©rard
- Thanh Long VĂ” ÄáșĄo de ÄáșĄi VĂ” sÆ° LĂȘ Kim HĂČa
- Tháș§n Long ThiĂȘn ĂáșĄi Há»
- That Son Than Vo Dao
- Thien Long
- Thieu Lam
- Thieu Lam Hong Gia Vo
- Thieu Lam Nam Phai
- Thieu Lam Noi Quyen
- Thuy Phap
- Tien Giang Vo Dao
- Tinh vo dao
- Tinh Vo Hoi
- Tinh Vo Nam Hai Dao
- Truong Bach Long
- Truong Son Vo Dao
- Trang Si Dao
- Trung Hoa Vo Dao
- Truong Vo Thuat
- Van An Phai[22]
- Van Lang Vo Duong
- Van Vo Dao
- Van Long Vo Dao
- Van Lang Vo Dao
- Vat Lieu Doi
- Viet Kune Dao
- Viet quyen anh
- Viet Quyen Thuat
- Viet Tai Chi
- Viet Vo Dao
- Viet vu dao
- Vinh Xuan Quyen
- Vo An Vinh
- Vo Bac Ninh
- Vo Binh Dinh
- Vo Co Truyen
- Vo Cuu Long
- Vo Dang
- Vo Dan Toc
- Vo Dao Trung Hoa
- Vo Dao Vietnam
- Vo Duong Cay Lau
- Vo Hoang Nam
- Vo Khi Thuat
- Vo Kinh
- Vo Lac Hong
- VĂ”-LĂąm
- Vo Lam Son
- Vo Nha Chua
- Vo Nhat Nam
- Vo Quang Binh
- Vo Quang Nam
- Vo Quyen Dao
- Vo Song Be
- Vo Song Long
- Vo Ta
- Vo Tan Kanh
- Vo Tay Son
- Vo Thanh Long
- Vo That Son
- Vo Thuat Cong Phu
- Vo Thuat Van Vo Dao (VÄn VĂ” ÄáșĄo)
- Vo Thuat Y Quyen
- Vo Tong Hop
- Vo Trung Hoa
- Vo Tu Do (Boxe vietnamienne)
- VĂ”-ViĂȘtnam
- Vovinam Viet Vo Dao
- Vu Dao
- Wu Dao
- Xich Long
- Yi-King Do - Viá»t Nam ThĂĄi Cá»±c Quyá»n
Au ViĂȘt Nam
Au ViĂȘt Nam[23], les Ă©coles dâarts martiaux vietnamiens traditionnels (« Vo Co Truyen ») sont rassemblĂ©es en une fĂ©dĂ©ration, « Lien Doan Vo Thuat Co Truyen Viet Nam », qui en reconnaĂźt lâauthenticitĂ©. Cette fĂ©dĂ©ration a en outre Ă©tabli un tronc commun constituĂ©, principalement, dâun certain nombre dâenchaĂźnements Ă mains nues et avec armes ; au-delĂ de ce tronc commun, chaque Ă©cole reste libre de son programme.
Par ailleurs, il existe aussi une fĂ©dĂ©ration des arts martiaux qui regroupe l'ensemble des arts martiaux reprĂ©sentĂ©s au ViĂȘt Nam, quelles que soient leurs origines (câest-Ă -dire aussi les arts martiaux dâorigine Ă©trangĂšre : judo, karatĂ©âŠ).
En France
Il n'est pas aisĂ© de savoir Ă quand remonte l'arrivĂ©e des premiĂšre formes de combat vietnamiens. La premiĂšre fĂ©dĂ©ration de combat vietnamiens (la FĂ©dĂ©ration de Vo Viet Nam) daterait de 1957[24], mais c'est surtout en 1973 que la premiĂšre fĂ©dĂ©ration officielle voit le jour. Il s'agit de la FĂ©dĂ©ration française dâarts martiaux vietnamiens et chinois â Vietvodao, qui obtient des agrĂ©ments provisoires du ministĂšre de la jeunesse et des sports jusquâen 1985. En 1986, aprĂšs diffĂ©rentes scissions, les arts martiaux vietnamiens (AMV) se retrouvent sous lâĂ©gide la FĂ©dĂ©ration française de karatĂ©. Ă cette Ă©poque, elle regroupe une grande partie des arts martiaux asiatiques (vietnamiens donc, mais aussi chinois) et connaĂźt des difficultĂ©s de toutes sortes[25]. LâĂ©tat incite alors les arts martiaux chinois Ă sâĂ©manciper et favorise la crĂ©ation des premiĂšres fĂ©dĂ©ration de Wushu et de Tai-chi mais reste plus floue quant Ă ses attentes concernant les AMV.
Les AMV dĂ©pendent alors dâune multitude de fĂ©dĂ©rations plus ou moins autonomes ou elles-mĂȘmes rattachĂ©es Ă la FĂ©dĂ©ration française de karatĂ© ou Ă la FĂ©dĂ©ration française de judo qui aura un temps la dĂ©lĂ©gation du ministĂšre. La situation des arts martiaux vietnamiens est assez confuse jusquâĂ ce quâune des fĂ©dĂ©rations finisse par se dĂ©marquer. En effet, la FĂ©dĂ©ration des arts martiaux traditionnels vietnamiens (FAMTV) est parvenue Ă fĂ©dĂ©rer un grand nombre de pratiquants et est mĂȘme sur le point dâobtenir la reconnaissance qui lui permettrait de devenir fĂ©dĂ©ration dĂ©lĂ©gataire. En 2004, la FAMTV est dĂ©signĂ©e par le ministĂšre des sports, de la jeunesse et de la vie associative pour regrouper lâensemble des AMV.
Mais quelques mois plus tard, le renouvellement du conseil dâadministration de la FAMTV tourne Ă la catastrophe[25]. L'Ă©quipe dirigeante perd les Ă©lections et quitte la FAMTV pour crĂ©er une autre fĂ©dĂ©ration, la FRAMV, et demande Ă son tour, sans succĂšs, lâagrĂ©ment du ministĂšre. Ă lâissue de cet Ă©pisode le ministĂšre dĂ©cide de confier la gestion et lâagrĂ©ment Ă une fĂ©dĂ©ration dĂ©jĂ existante et considĂ©rĂ©e comme capable dâencadrer toutes ces pratiques. En 2007, câest donc finalement la FĂ©dĂ©ration française de KaratĂ© (devenu la FFKDA), qui aprĂšs des annĂ©es tumultueuses est dĂ©sormais organisĂ©e et gĂ©rĂ©e avec lâefficacitĂ© qui semble convenir au ministĂšre, qui est dĂ©signĂ© pour chapeauter les AMV[26]. Deux commissions sont alors crĂ©Ă©es au de la FFKDA : la premiĂšre concerne exclusivement le Vovinam Viet Vo Dao, qui est relativement bien structurĂ© et unifiĂ©, et la seconde regroupe tous les autres AMV sous lâappellation « arts martiaux vietnamiens traditionnels ».
En 2006, la direction des sports estimait Ă 19 000 le nombre de pratiquants dâarts martiaux vietnamiens en France, toute fĂ©dĂ©rations et toutes Ă©coles confondues.
Depuis, plusieurs Ă©coles dâarts martiaux vietnamiens en France, insatisfaites de leur subordination Ă la fĂ©dĂ©ration de karatĂ©, tentent Ă nouveau de sâunir afin de conquĂ©rir lâindĂ©pendance de leur dĂ©lĂ©gation mais ces initiatives tendent Ă de nouveau Ă©parpiller les diffĂ©rents clubs. Au moins deux fĂ©dĂ©rations ont en effet vu le jour. Une premiĂšre en 2008, la FĂ©dĂ©ration de Vo Co Truyen Viet Nam de France et une seconde plus rĂ©cemment en 2012 : la FĂ©dĂ©ration de Viet Vo Dao, Vo Co Truyen et Disciplines AssociĂ©es (FVVDVCTDA).
Histoire des arts martiaux vietnamiens
Hung Vuong 1er
Des fouilles archĂ©ologiques (Dong Son) tĂ©moignent de lâexistence, dĂšs la prĂ©histoire et la haute antiquitĂ©, de techniques guerriĂšres utilisĂ©es par les anciens vietnamiens.
Ces techniques commencĂšrent Ă vĂ©ritablement sâaffiner et Ă se dĂ©velopper pendant la dynastie des Hung Vuong qui rĂ©gna sur le Van-Lang (royaume de lâancien ViĂȘt Nam) du VIIe au IIIe siĂšcle av. J.-C. Lâempereur Hung Vuong Ier est considĂ©rĂ© comme Ă©tant le crĂ©ateur du Vo Thuat par de nombreuses Ă©coles qui lui rendent hommage, Ă ce titre, chaque annĂ©e. Ă cette Ă©poque, lâĂ©tude du Vo Ă©tait surtout basĂ©e sur lâapprentissage des techniques dâarmes comme la hache, le poignard, lâarc ou encore lâarbalĂšte. De nombreuses lĂ©gendes, relatives Ă cette pĂ©riode, racontent les exploits de personnages rendus cĂ©lĂšbres grĂące Ă leurs armes devenues magiques (tel An Duong Vuong et son arbalĂšte magique qui pouvait tuer 1 000 adversaires Ă la fois).
Devant lâimminence de lâinvasion chinoise, la formation militaire du peuple vietnamien et la construction dâouvrages fortifiĂ©s ne firent que sâaccĂ©lĂ©rer (la construction de la citadelle de Co-Loa en est un exemple). Mais au-delĂ des seules techniques de combat, on assista aussi Ă lâĂ©mergence des premiĂšres thĂ©ories dĂ©finissant lâutilisation stratĂ©gique et tactique de lâart guerrier, tant pour lâarmĂ©e â combats de groupe â que pour la pratique individuelle.
Ces thĂ©ories donnĂšrent dâailleurs naissance Ă de nouvelles techniques plus riches encore, dont certaines constituent encore la racine des formes travaillĂ©es aujourdâhui. Certains novateurs comme Trieu Quang Phuc, Ly Nam De, Trung Vuong, utilisĂšrent contre les Chinois des techniques basĂ©es sur le « Di doan thang truong » (supĂ©rioritĂ© des techniques rapprochĂ©es), le « Phan tan biĂȘn phap » (mĂ©thodes des esquives sans rĂ©sistance) ou encore le « Di nhu thang cuong » (utilisation de la souplesse contre la force), lors dâune longue lutte oĂč les Vietnamiens dĂ©veloppĂšrent la pratique de la guĂ©rilla (du Kich chiĂȘn) face Ă la puissance militaire des envahisseurs.
PremiĂšre occupation chinoise (111 av. J.-C. Ă 938 ap. J.-C.)
Cependant, la prĂ©sence chinoise au ViĂȘt Nam devait durer prĂšs de 1000 ans (111 av. J.-C. Ă 938 apr. J.-C.) ; dix siĂšcles pendant lesquels la culture, lâorganisation (administration, langueâŠ) et la philosophie (TaĂŽisme, confucianisme, bouddhisme) chinoises aller marquer durablement le peuple vietnamien, sans pour cela rĂ©ussir Ă lui ĂŽter son originalitĂ©. OrganisĂ© « Ă la chinoise », le ViĂȘt Nam conserva farouchement et sauvegarda sa propre culture ancestrale, ainsi que ses traditions martiales, qui se perpĂ©tuĂšrent dans le secret. Aussi, de puissants soulĂšvements purent-ils avoir lieu (sĆurs Trung, Ly Bon, Bo Cai Dai Vuong), montrant que le peuple vietnamien prenait peu Ă peu conscience de sa nationalitĂ© et de sa volontĂ© dâindĂ©pendance.
Ă cette Ă©poque, le ViĂȘt Nam Ă©tait un vĂ©ritable carrefour Ă©conomique et un creuset culturel, Ă©tape rĂ©putĂ©e entre lâInde et la Chine. Il profitait de lâinfluence conjuguĂ©e de ces deux pays, sans oublier celle de la Malaisie et des Ăźles indonĂ©siennes, influences qui marquĂšrent profondĂ©ment la vie culturelle, mais aussi le domaine des arts martiaux. TrĂšs tĂŽt (IIe siĂšcle), le Bouddhisme indien fĂ»t introduit au ViĂȘt Nam, peu Ă peu remplacĂ© (vers la fin du VIe siĂšcle) par le Bouddhisme thien (chan) dâobĂ©dience chinoise, ce qui ne sera pas sans consĂ©quence sur la pratique martiale.
En 938, Ngo Quyen chasse lâenvahisseur chinois et fonde un Ă©tat indĂ©pendant.
Dynastie des Ly : les chevaliers au grand cĆur
Le pays sâorganise et devient, sous la dynastie des Ly, le DaĂŻ Viet. Le Vo sort enfin de lâombre ; il va participer Ă lâĂ©ducation gĂ©nĂ©rale du peuple vietnamien auquel ses dirigeants veulent insuffler un sentiment dâunitĂ© nationale. Ses techniques ont atteint un haut niveau et sa pratique repose sur un esprit chevaleresque empreint des principes des trois philosophies (Tam Giao : confucianisme, taoĂŻsme et bouddhisme).
Câest Ă ce moment quâapparaĂźt le terme « Dao » (« Voie », au sens spirituel). Câest une grande nouveautĂ©, Ă une Ă©poque oĂč les mĆurs restent encore trĂšs frustes (le plus souvent basĂ©es sur la violence), de voir la pratique martiale comme une voie pour lâaccomplissement spirituel de lâindividu.
La frontiĂšre entre lâart de la guerre (Ă lâusage de lâarmĂ©e) et les arts martiaux se creuse : de nombreux maĂźtres quittent le devant de la scĂšne pour sâisoler dans la montagne, refusant ainsi les honneurs pour ne se consacrer quâĂ leur recherche physique et mentale. Ces maĂźtres nâacceptaient que peu de disciples, leur enseignant des disciplines aussi diverses que la calligraphie, les Ă©checs chinois, la philosophie ou encore les secrets de la mĂ©decine traditionnelle. Ils vivaient le plus souvent trĂšs modestement, certains dâentre eux Ă©tant de perpĂ©tuels voyageurs allant de temples en villages et nâĂ©tant soumis Ă aucun carcan administratif. La littĂ©rature vietnamienne regorge de rĂ©cits retraçant les pĂ©rĂ©grinations de ces hommes, dĂ©crits comme des « chevaliers aux grands cĆurs » et qui nâhĂ©sitaient pas Ă se porter au secours des humbles villageois.
Dâautres maĂźtres dâarts martiaux, par contre, recevront des nominations officielles pour aller enseigner dans les plus lointains villages (chaque village devait avoir son instructeur reconnu) ou pour dispenser leurs connaissances aux gens de la cour impĂ©riale (obligation Ă©tant faite Ă tous les fonctionnaires et courtisans de pratiquer le Vo). Des rencontres rĂ©gionales et nationales avaient lieu tous les ans, pour les premiĂšres, et tous les trois ans pour les secondes, permettant aux meilleurs Ă©lĂ©ments dâobtenir des postes dâofficiers dans la garde ImpĂ©riale.
Dynastie des Tran : les invasions Mongoles (XIIIe)
Sous la dynastie des Tran (1225-1400) seront crĂ©Ă©s des licences et doctorats dâarts martiaux, ainsi quâune acadĂ©mie des arts martiaux. Câest lĂ une vĂ©ritable « Ăąge dâor » de la pratique martiale au ViĂȘt Nam, Ăąge dâor qui donne toute son originalitĂ© au Vo en tant quâart martial portĂ© par tout un peuple. Il existait, bien sĂ»r, de nombreuses Ă©coles (aux styles parfois fort diffĂ©rents) ; cependant, Ă la diffĂ©rence dâautres pays asiatiques, la pratique martiale, en cette fin de « Moyen Ăge » vietnamien, nâest pas rĂ©servĂ©e Ă la seule caste militaire ou aux nobles.
Lors des invasions mongoles (XIIIe siĂšcle), le gĂ©nĂ©ral Tran Hung Dao rĂ©unit tous les maĂźtres dâarts martiaux pour leur demander de sâunifier afin de former lâossature de lâarmĂ©e populaire, armĂ©e qui devait, par trois fois, vaincre la puissante armĂ©e mongole. Pour la premiĂšre fois, Ă cette occasion, toutes les techniques seront prĂ©sentĂ©es et codifiĂ©es, dâautres Ă©tant inventĂ©es ou amĂ©liorĂ©es pour rĂ©pondre Ă la menace spĂ©cifique (notamment les techniques de ciseaux destinĂ©es Ă dĂ©sarçonner les cavaliers aprĂšs leur avoir tendu des embuscades dans des chemins creux).
Ă la suite de cette victoire sur lâarmĂ©e mongole, les techniques martiales vietnamiennes, recevant lĂ un Ă©clat particulier, connurent une forte popularitĂ© auprĂšs des diffĂ©rents peuples de la pĂ©ninsule indochinoise et du sud de la Chine.
Malheureusement, cet essor des arts martiaux vietnamiens sera de courte durĂ©e. Ă la fin de la dynastie des Tran (1400), le pouvoir impĂ©rial, en pleine dĂ©cadence, se mit Ă craindre le peuple et lui interdit toute pratique martiale, celle-ci devenant lâapanage des officiers, des nobles et gens de cour. LâarmĂ©e se sĂ©pare ainsi peu Ă peu de la population et lors de lâinvasion des Ming (1406) elle sâĂ©croule littĂ©ralement devant les troupes chinoises.
DeuxiÚme occupation chinoise et libération par Le-Loi
La colonisation des Ming est particuliĂšrement pesante et fĂ©roce ; on assiste Ă une politique dâassimilation sociale et culturelle forcenĂ©e. Les chinois rĂ©quisitionneront mĂȘme tous les grands ouvrages de la littĂ©rature vietnamienne pour les brĂ»ler ou les conserver pour eux-mĂȘmes, tentant ainsi dâanĂ©antir le patrimoine culturel du ViĂȘt Nam. Les tentatives de rĂ©volte furent vite Ă©crasĂ©es, tant Ă©tait pesante et efficace la « chape de plomb » chinoise. Cependant, durant les vingt annĂ©es dâoccupation, les Chinois nâont pas fait que dĂ©truire ; ils ont aussi amenĂ© avec eux une multitude dâartistes, dâuniversitaires, de scientifiques et, bien sĂ»r, dâexperts en arts martiaux, dont les apports seront intĂ©grĂ©s. Il faut attendre Le-Loi et ses partisans pour voir le peuple vietnamien, grĂące Ă une Ă©nergie patiemment et secrĂštement emmagasinĂ©e, rĂ©ussir Ă rejeter lâenvahisseur hors de ses frontiĂšres (1427).
ArrivĂ© au pouvoir, Le-Loi va rĂ©organiser le pays, instituant des concours littĂ©raires pour recruter les cadres de lâadministration impĂ©riale (le Confucianisme va alors prendre le pas sur le Bouddhisme) et favorisant le dĂ©veloppement de la pratique des arts martiaux auprĂšs de toutes les couches de la population. Il organisera des examens de Vo Ă diffĂ©rents Ă©chelons afin de sĂ©lectionner les meilleurs Ă©lĂ©ments pour la garde ImpĂ©riale. Lâinstruction suscitera lâĂ©mergence dâune pratique martiale alliĂ©e Ă lâacquisition de connaissances intellectuelles et philosophiques ; on retrouve lĂ , notamment, lâinfluence de Nguyen-Train, cĂ©lĂšbre Ă©crivain et penseur qui seconda Le Loi lors de la guerre dâindĂ©pendance.
Du début du XVIe à la fin du XVIIIe : une guerre fratricide
Pendant la longue pĂ©riode qui va suivre (dĂ©but du XVIe siĂšcle Ă la fin du XVIIIe siĂšcle le ViĂȘt Nam va connaĂźtre une guerre fratricide continuelle entre le nord (dynastie des Mac et des Trinh) et le sud (dynastie des Le, puis des Nguyen).
Le Vo va alors se sĂ©parer en plusieurs courants ennemis selon le soutien apportĂ© Ă lâune ou lâautre dynastie. Il connaĂźtra ainsi une diffĂ©renciation de plus en plus forte entre les pratiques, suivant leur implantation gĂ©ographique, amenant la crĂ©ation de styles bien spĂ©cifiques. Par ailleurs, le ViĂȘt Nam absorbe deux nouvelles vagues dâinfluences chinoises. Quand, en 1644, la dynastie Ming sâeffondre devant l'invasion des mandchous et cĂšde la place Ă celle des Qing, de nombreux opposants Ă la dynastie des Qing sâenfuient et demandent asile au ViĂȘt Nam. Ils sâĂ©tablissent essentiellement dans le sud, et influencent durablement les Ă©coles de cette rĂ©gion.
Plus tard, lâempereur Quian Long (1736-1795) se mĂ©fiant de chaque organisation structurellement forte comme le Temple Shao Lin, fomente un complot visant Ă semer la discorde parmi les Ă©coles dâarts martiaux, et surtout monte Wu Tang contre Shao Lin. Jour aprĂšs jour, la relation se dĂ©grade entre eux. Une nuit sans lune, les combattans de Wu Tang attaquent le temple de Shao Lin, dĂ©truisant et tuant tout, exceptĂ© le dernier grand maĂźtre, vĂ©nĂ©rable Chi Thien, qui s'en sort en utilisant son lĂ©gendaire Tai Chi Chuan (disparu depuis lors, il n'est pas celui enseignĂ© de nos jours).
Lâempereur continue de manĆuvrer en vue dâĂ©radiquer lâopposition. DĂšs que Wu Tang a battu Shao Lin, les associations de boxeurs sont interdites dans tout lâempire. Les gagnants et les perdants ont dĂ» Ă©migrer, et beaucoup dâexperts dâarts martiaux, de Wu Tang ou de Shao Lin, choisissent de s'installer au ViĂȘt Nam, qui absorbe ainsi une nouvelle vague de connaissances en arts martiaux chinois.
RĂ©unification par lâempereur Quang Trung
Ă la fin du XVIIIe siĂšcle, une violente rĂ©volte, partie du sud, va balayer les Ă©tats Nguyen et Trinh. Les TĂąy-Son, conduits par Nguyen-Hue, grĂące Ă leurs pratique martiale intelligemment utilisĂ©e, vont dĂ©faire les troupes impĂ©riales, ainsi que celles envoyĂ©es par la dynastie chinoise des Quing, lors de la bataille Thang-Long (nom de lâancienne capitale du Nord ViĂȘt Nam). Ayant rĂ©unifiĂ© le pays, Nguyen-Hue prit le nom de rĂšgne de Quang-Trung.
Le hĂ©ros, devenu empereur, assura le renouveau de la nation vietnamienne en sâappuyant sur une solide bureaucratie mandarinale oĂč les militaires prenaient largement le pas sur les civils, et redonna au Vo sa valeur Ă©ducative pour lâindividu en renforçant la composante philosophique et morale. Le respect dâun code dâhonneur et de conduite, fortement influencĂ© par les doctrines confucĂ©ennes, devient fondamental, et on voit lâĂ©dification de normes strictes pour ce qui concerne lâentrĂ©e et lâappartenance Ă une Ă©cole dâarts martiaux. Ainsi, selon la trilogie Quan, Su, Phu (Roi, Professeur, PĂšre), l'Ă©lĂšve devait accorder Ă son professeur non seulement toute son estime mais aussi un rĂŽle plus crucial quâĂ son propre pĂšre. Ainsi aussi, Ă lâinstar de ce que lâon retrouve Ă la mĂȘme Ă©poque en Chine et surtout au Japon, lâacte de suicide sera de mise lorsque les principes inhĂ©rents Ă ces codes de conduite nâauront pas Ă©tĂ© respectĂ©s par les membres de la caste guerriĂšre ou par des mandarins.
Au niveau des techniques, Quang Trung assembla et synthĂ©tisa les apports des Ă©lites martiales vietnamiennes, et y associa les meilleures Ă©coles frontaliĂšres. Il favorisa lâimplantation dâĂ©coles dâart martiaux dans tout le pays et, surtout, institua lâapprentissage obligatoire de cet art martial Ă toute son armĂ©e. Ă cette fin, il regroupa, dans sa province dâorigine, au centre du ViĂȘt Nam, des Ă©coles qui prĂ©parent aux concours militaires : câest la naissance de lâart martial de Binh Dinh. Ces Ă©coles reprĂ©sentaient un standard, une norme de qualitĂ©, tout comme lâĂ©taient en Chine les Ă©coles du temple de Shaolin ou celles du mont Wu Dang. Câest lĂ que seront formĂ©s de nombreux maĂźtres importants et cĂ©lĂšbres, et aujourdâhui encore la rĂ©gion de Binh Dinh reste le centre nĂ©vralgique des arts martiaux vietnamiens.
Ă cette Ă©poque apparaĂźtront des groupes de guerrier trĂšs spĂ©ciaux comme les Bao Tieu (« protecteurs des biens ») qui louaient leurs services auprĂšs des riches marchands ou des seigneurs afin dâassurer la protection de ceux-ci lors de leurs dĂ©placements, ou lors de convois spĂ©ciaux attirant la convoitise de bandits de grand chemin. Plus secrets seront les Nhan Da ou Kieu Dung (semblables aux ninjas japonais), pratiquants dâarts martiaux de haut niveau qui connaissaient parfaitement le maniement des armes traditionnelles et diverses techniques secrĂštes permettant de sâintroduire sans bruit dans les chĂąteaux en se fondant dans la nuit, prĂȘts Ă surgir au moment propice.
La colonisation
Le XIXe siĂšcle va marquer un tournant dans lâhistoire du ViĂȘt Nam (comme dâailleurs pour de nombreux autres pays asiatiques). Lâinfluence occidentale se fera de plus en plus pesante, pour aboutir finalement Ă la colonisation française. La dynastie des Nguyen, embourbĂ©e dans une tradition trop passĂ©iste, ne fera que retarder lâĂ©chĂ©ance sans pouvoir changer le cours des choses. Les Français, forts de leur puissance mĂ©canique, vont assez rapidement se rendre maĂźtre du pays, faisant Ă©clater les structures sociales archaĂŻques et obligeant les Ă©coles dâarts martiaux Ă se rĂ©fugier dans la clandestinitĂ©. Cependant, lors de lâinvasion Ă©trangĂšre, de nombreux pratiquants firent preuve dâun hĂ©roĂŻsme extraordinaire (malheureusement inefficace) en nâhĂ©sitant pas Ă affronter les armes Ă feu avec leurs seules armes naturelles ou armes blanches. Beaucoup dâexperts et de maĂźtres de la « vieille Ă©cole » trouvĂšrent ainsi la mort lors de ces combats inĂ©gaux.
Pendant toute la pĂ©riode de la colonisation, le Vo se rĂ©fugia dans lâombre, peu Ă peu oubliĂ© par le peuple soumis aux conceptions et au mode de vie des occidentaux, mais toujours pratiquĂ© derriĂšre « la haie de bambou » et ressurgissant notamment lors de coups dâĂ©clat perpĂ©trĂ©s par les sociĂ©tĂ©s secrĂštes.
LâindĂ©pendance et la diaspora
La deuxiĂšme moitiĂ© du XXe siĂšcle est particuliĂšrement dramatique pour le ViĂȘt Nam. AprĂšs l'occupation japonaise et la guerre dâIndochine, le pays se voit, en 1954 (accords de GenĂšve), divisĂ© en deux : la RĂ©publique DĂ©mocratique du ViĂȘt Nam au nord, dirigĂ©e par Ho Chi Minh, et la RĂ©publique du ViĂȘt Nam au sud, dirigĂ©e par Ngo Dinh Diem.
Alors que, sous couvert dâassociations sportives, diffĂ©rentes Ă©coles avaient vu le jour dans le but de rĂ©habiliter les arts martiaux vietnamiens (citons en particulier le mouvement Vovinam de maĂźtre Nguyen Loc), elles sont balayĂ©es par les Ă©vĂ©nements. Au sud, Ngo Dinh Diem va mĂȘme jusquâĂ officiellement interdire la pratique des arts martiaux, obligĂ©s de se replier Ă nouveau dans la clandestinitĂ©. Ce nâest quâen 1964 que cette interdiction est levĂ©e. En effet, les autoritĂ©s commencent Ă sâinquiĂ©ter de lâinfluence grandissante, auprĂšs de la jeunesse vietnamienne, de disciplines martiales venant dâautres pays asiatiques, et crĂ©ent donc le Tong Hoi Vo Hoc Viet Nam, câest-Ă -dire la ConfĂ©dĂ©ration nationale pour lâĂ©tude des arts martiaux vietnamiens.
Cette tentative de structuration sera cependant de courte durĂ©e, car entre-temps, câest la guerre du Vietnam qui est dĂ©clarĂ©e et, avec la victoire du nord en 1975, ce cadre Ă©clate. Des Ă©coles sont Ă nouveau interdites, des maĂźtres emprisonnĂ©s pour raisons politiques et envoyĂ©s en camps de rĂ©Ă©ducation. Dâautres, comme de nombreux vietnamiens, nâont dâautre choix que lâexil. Câest le dĂ©but de la diaspora vietnamienne, qui choisira principalement lâOccident pour destination (Europe et Ătats-Unis).
Aujourdâhui
Aujourdâhui, les arts martiaux vietnamiens ont retrouvĂ© leur place dans leur pays, se sont regroupĂ©s en fĂ©dĂ©ration, sont enseignĂ©s aux forces de lâordre et sont au programme des universitĂ©s.
On trouve aussi des Ă©coles dâarts martiaux vietnamiens dans le monde entier, et en France en particulier, oĂč de nombreux vietnamiens sont venus sâinstaller en raison des liens qui unissaient les deux pays. Un certain nombre de maĂźtres sont restĂ©s fidĂšles Ă lâĂ©cole oĂč au style que leur propre maĂźtre leur avait enseignĂ©, mais dâautres se sont Ă©mancipĂ©s pour crĂ©er leur propre style, sâĂ©loignant plus ou moins des racines nationales et traditionnelles.
Notes et références
- http://www.tao-yin.com/archives/archives_wushu_001.html
- http://www.tao-yin.com/wai-jia/arts_martiaux_vietnam2.html
- « Contes et récits des Arts Martiaux », réunis par Pascal Fauliot, collection Spiritualités Vivantes no 45, Albin Michel, 1984. (ISBN 978-2-226-02120-5)
- http://www.thuyphap.be/EN/history
- « Vo Thuat, arts martiaux vietnamiens », Serj Le Malefan, Ăditions Amphora, 1997 â (ISBN 2-85180-308-5) (ĂpuisĂ©), citĂ© dans : http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/4/16/75/27/historique.pdf
- « Vovinam Viet Vo Dao », tome 2, p. 67, Patrick Levet, cité dans : http://www.vo-thuat.net/index.php?op=newindex&catid=18
- http://www.kwoon.info/forum/viewtopic.php?t=17148
- http://www.tao-yin.com/wai-jia/arts_martiaux_vietnam9.html
- http://www.tao-yin.com/wai-jia/arts_martiaux_vietnam7.html
- « Définition des Arts internes », sur vocotruyen-france.fr (consulté le ).
- http://www.ecole.nam-ho-quyen.com/ecole/qigong/141-artsinternes.html
- « Officielkaratemagazine ⹠Officiel Karaté Magazine », sur Officiel Karaté Magazine, (consulté le ).
- www.vocotruyen-france.fr
- http://www.ecole.nam-ho-quyen.com
- http://www.tao-yin.com/wai-jia/arts_martiaux_vietnam6.html
- « Le Manifeste de l'Institut des Arts Martiaux Vietnamiens Viet Vo Dao · vietvodaoinstitut.com », sur Institut des Arts Martiaux Vietnamiens (consulté le ).
- Fédération française des arts martiaux vietnamiens.
- « Institut des Arts Martiaux Vietnamiens - Viet Vo Dao », sur Institut des Arts Martiaux Vietnamiens (consulté le ).
- « FĂ©dĂ©ration de VĂ” cá» truyá»n Viá»t Nam de France », sur vocotruyen-france.fr (consultĂ© le ).
- « Histoire », sur usgvothuat.free.fr (consulté le ).
- Quentin Stainer, « Origines du style Thanh Long », sur www.vietvodao-grenoble.fr (consulté le )
- Van An Phai.
- http://www.vothuatcotruyen.vn/home/
- Voir l'article VĂ”-ViĂȘtnam
- Rapport concernant la situation actuelle et en devenir des arts martiaux vietnamiens, Jean-Richard Germont (inspecteur général de la jeunesse et des sports), avril 2007
- Courrier du 11 octobre 2007 « adressé par le ministÚre à la FFKDA »
Liens externes
- Section Vovinam viet vo dao rattachée à la Fédération française de karaté et disciplines associées
- Section arts martiaux traditionnels vietnamiens rattachée à la Fédération française de karaté et disciplines associées
- Fédération de Vo Co Truyen Viet Nam de France
- site de l'UFV Union française de Vo (Fédération d'arts martiaux vietnamiens traditionnels)
- site de l'AikiVuDao
- site de la Fédération des Arts Martiaux Traditionnels Vietnamiens