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Arts mécaniques

Les arts mécaniques, en latin artes mechanicæ, représentent les branches de la science pratique, à l'imitation de la nature selon la tradition antique. Il s'agit d'abord concrètement d'un ensemble d'applications techniques mises en œuvre sur les chantiers, par ailleurs surveillées par les autorités religieuses et temporelles, mais surtout pour le monde des clercs ou savants lettrés, de disciplines techniques admises progressivement et enseignées sous leur contrôle, au Moyen Âge, de façon à pouvoir surveiller leurs évolutions.

Un haut site de la construction médiévale. Extrait de la Bible de Maciejowski.

Les sept arts

Une tradition cléricale du Moyen Âge définit ces « arts mécaniques», par opposition analogique avec les sept arts libéraux, et les distinguent de la même façon en sept branches.

Au IXe siècle, Jean Scot Érigène, le premier, utilise l'expression « arts mécaniques » dans son commentaire de Martianus Capella, sans toutefois les énumérer[1].

Vers 1125, Hugues de Saint-Victor présente une liste plus précise :

« Les sept arts mécaniques comprennent : la fabrication de la laine, l'armement, la navigation, l'agriculture, la chasse, la médecine et le théâtre. Parmi ceux-ci trois sont externes à la nature, puisqu'ils protègent celle-ci des préjudices, tandis que quatre sont internes, afin qu'elle se nourrisse, alimentée et entretenue[2] »

Il ne faut pourtant pas s'arrĂŞter Ă  cette prĂ©sentation didactique trop sommaire ou source de mĂ©prise si le lexique est compris dans un sens moderne, restreint. Dans l'esprit de l'Ă©cole cathĂ©drale de Chartres, l'art de la laine ou lanificium couvre la noble filière lainière, de la tonte des moutons Ă  la draperie en passant par le travail de la laine, et cette catĂ©gorie gĂ©nĂ©rique englobe Ă©videmment par allusion l'art textile Ă  partir de fibres diverses, les apprĂŞts textiles, la teinture, la tannerie, la fabrique de velin Ă  partir de peaux fines ou de papier Ă  partir de tissus usagĂ©s... Le terme latin "armatura" dĂ©signe aussi et surtout la "construction" au sens large, incluant l'art de la charpente, l'architecture ou l'art de la construction de maisons et des navires, la fabrication d'outils ou d'ustensiles les plus divers, y compris l'armement technique des navires ou les objets domestiques les plus communs en pierre, bois, cordes, mĂ©taux ou cĂ©ramiques. Le mot "navigatio" est emblĂ©matique du transport commercial le plus aisĂ©, la navigation fluviale ou maritime, sur lacs ou plans d'eau Ă©phĂ©mères, il englobe le dĂ©placement au sens large des marchandises et denrĂ©es diverses, et donc les charrois et le commerce avec les nĂ©cessaires Ă©quipements ou moyens de pontage, portage, dĂ©bardage et roulage. Rappelons que l'agriculture, outre la gamme extraordinairement variĂ©e des productions vĂ©gĂ©tales et animales via les cultures et les Ă©levages, y compris les ressources piscicoles (gestion des Ă©tangs) ou sylvicoles (cueillettes, bois), les carrières et l'extraction minière, dĂ©bouche sur la gestion des domaines, des biens fonciers et des terres en gĂ©nĂ©ral, donc a un rapport Ă©troit avec l'Ă©conomie et l'investissement rentable ou rentier, bien au-delĂ  des moyens de subsistances ou de l'art culinaire induit que la dĂ©finition n'aborde qu'en consĂ©quence tacite. La chasse ou « venatio Â», outre l'art de la vĂ©nerie et de la venaison essentiellement de gibiers Ă  plumes, est aussi l'art de gĂ©rer et sĂ©lectionner le gibier des vastes foresteries ou des modestes breuils de la noblesse, ainsi que des techniques annexes comme la pelleterie ou l'Ă©levage de chiens de chasse qui se nourrissent surtout de gibier Ă  poils. La mĂ©decine englobe l'art mĂ©dical avec la prĂ©paration des remèdes traditionnels Ă  base de plantes ou de minĂ©raux, et en un sens la pharmacie qui est dĂ©jĂ  une science affirmĂ©e dans le sud de l'Europe au XIe siècle. Enfin, le théâtre ne se limite aux reprĂ©sentations ou aux jeux scĂ©niques, mais couvrent les arts de la scène et les effets d'artifices et d'illusions les plus variĂ©s, y compris la « magie blanche Â».

Influencé par ses lectures des érudits arabes, le traducteur Dominique Gundissalvi définit les arts mécaniques comme étant de la géométrie appliquée.

La notion est ensuite reprise au XIIIe siècle, dans une conception plus négative marquée par la théologie[3] par Bonaventure[4], Robert Kilwardby[5] ou encore Thomas d'Aquin[6]. D'autres auteurs médiévaux font preuve d'une vision plus favorable, en particulier Roger Bacon ou Raymond Lulle[3].

Annexes

Références

  1. Annotationes, 170, 14, p. 86, 29.
  2. Didascalicon, II, 20-27 (PL col. 760a) : « Mechanica septem scientias continet: lanificium, armaturam, navigationem, agriculturam, venationem, medicinam, theatricam. ex quibus tres ad extrinsecus vestimentum naturae pertinent, quo se ipsa natura ab incommodis protegit, quattuor ad intrinsecus, quo se alendo et fovendo nutrit. »
  3. Ruedi Imbach, article « Arts mécaniques » du Dictionnaire du Moyen Âge, Claude Gauvard, Alain de Libera, Michel Zink (dir.), Paris, PUF, 2002
  4. De reductione artium ad theologiam
  5. De ortu scientiarum
  6. Somme théologique, II-II, 187-3

Sources

Études

Articles

Articles connexes

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