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Article 377 du code pénal indien

L'article 377 du code pénal indien criminalise les actes sexuels « contre l'ordre naturel », visant notamment l'homosexualité.

Cet article a Ă©tĂ© introduit dans le droit indien en 1860, sous le Raj britannique[1] et est restĂ© en vigueur jusqu'en 2018. En juillet 2009, la Haute Cour de Delhi a considĂ©rĂ© l'article comme contraire Ă  la Constitution de l'Inde, dĂ©criminalisant les relations sexuelles entre adultes, mais ce jugement a Ă©tĂ© cassĂ© par la Cour suprĂȘme de l'Inde le 11 dĂ©cembre 2013, la Cour dĂ©clarant que l'amendement ou l'abrogation de l'article 377 Ă©tait la prĂ©rogative du Parlement et non de la justice.

Le 6 fĂ©vrier 2016, la Fondation Naz et d'autres parties ont introduit un nouveau recours devant la Cour suprĂȘme. Un jugement de trois magistrats a dĂ©cidĂ© que les requĂȘtes devaient ĂȘtre examinĂ©es par une formation de cinq juges constitutionnels[2].

Le 6 septembre 2018, l'article est dĂ©clarĂ© illĂ©gal par la cour suprĂȘme[3].

Texte

« 377. Délits contre la nature
Quiconque a de son propre gré un rapport charnel contre l'ordre de la nature avec un homme, une femme ou un animal sera puni de prison à vie, ou d'une peine d'emprisonnement dont la durée peut aller jusqu'à dix ans, et sera aussi susceptible de recevoir une amende.

Explication : La pénétration suffit à constituer le rapport charnel nécessaire au délit décrit dans cet article[4] - [5]. »

Le domaine d'application de l'article 377 comprend toute relation sexuelle mettant en jeu la pénétration du pénis. De ce fait, tous les actes consentis de fellation, sodomie et de zoophilie sont punissables par cette loi.

Perception sociale

Opposition et critiques

Les arrestations sont trĂšs rares et ces vingt derniĂšres annĂ©es il n'y en a eu aucune pour des relations homosexuelles en Inde. Cependant, Human Rights Watch met en avant que cette loi a Ă©tĂ© employĂ©e pour harceler les efforts de prĂ©vention contre le sida, de mĂȘme que des travailleurs du sexe, des homosexuels et d'autres groupes exposĂ©s Ă  la maladie[6], mĂȘme si les personnes reconnues coupables d’extorsion par chantage d'accusations liĂ©es Ă  l'article 377 peuvent risquer la prison Ă  vie grĂące Ă  une clause spĂ©ciale de l'article 389 du code pĂ©nal indien[7]. L'organisation People's Union for Civil Liberties a publiĂ© deux rapports sur la violation de leurs droits que vivent les minoritĂ©s sexuelles[8] en particulier les personnes transgenres en Inde[9].

En 2006, la loi est critiquĂ©e par cent personnalitĂ©s littĂ©raires d'Inde[10], au premier plan desquelles Vikram Seth. À la suite, elle a Ă©tĂ© la cible des critiques de plusieurs ministres, surtout Anbumani Ramadoss[11] et Oscar Fernandes[12]. En 2008, un juge de la Haute Cour de Bombay a appelĂ© Ă  ce que l'Inde se dĂ©barrasse de cette loi[13].

Bataille judiciaire

Le jugement de la Haute Cour de Delhi au 2 juillet 2009 a déclaré des parties de l'article 377 inconstitutionnelles en ce qui concerne les relations sexuelles consenties entre adultes.

Le mouvement pour l'abrogation de l'article 377 a Ă©tĂ© lancĂ© par le groupe de lutte contre le sida AIDS Bhedbhav Virodhi Andolan en 1991. Leur ouvrage historique, Less than Gay: A Citizen's Report, a mis au jour les problĂšmes posĂ©s par l'article 377 et a rĂ©clamĂ© son abrogation[14]. Alors que l'affaire s'Ă©ternisait d'annĂ©e en annĂ©e, elle est remise sur le devant de la scĂšne par l'ONG Naz Foundation (India) Trust, qui dĂ©pose une plainte pour l'intĂ©rĂȘt public devant la Haute Cour de Delhi en 2001, pour lĂ©galiser les relations homosexuelles entre adultes consentants[15] - [16]. En 2003, la Haute Cour de Delhi refuse d'examiner une requĂȘte concernant la lĂ©galitĂ© de l'article, soutenant que les requĂ©rants n'ont pas d'intĂ©rĂȘt Ă  agir sur ce sujet. Pour statuer sur ce sujet, la Haute Cour doit ĂȘtre saisie par une personne condamnĂ©e par cette loi. La Fondation Naz en a alors appelĂ© Ă  la Cour suprĂȘme, qui a dĂ©cidĂ© que la Fondation Naz avait un intĂ©rĂȘt Ă  agir pour dĂ©poser une plainte d'intĂ©rĂȘt public, et a renvoyĂ© l'affaire devant la Haute Cour[17]. Une coalition de militants pour les droits des LGBT, des femmes et pour les droits humains de Delhi, sous le nom de 'Voices Against 377' (Des voix contre 377), soutenait la demande d'amender l'article 377 pour exclure les relations entre adultes consentants[18].

En mai 2008, l'affaire est passĂ©e en audience devant la Haute Cour de Delhi, mais le gouvernement n'avait pas de position fixĂ©e, le ministre de l'intĂ©rieur s'opposant au ministre de la santĂ© sur l'application de l'article 377 en ce qui concerne l'homosexualitĂ©. Le ministre de la santĂ© indien soutenait la requĂȘte, tandis que le ministre de l'intĂ©rieur refusait toute modification[19]. Le 12 juin 2009, le nouveau ministre de la justice Veerappa Moily a reconnu que la loi Ă©tait obsolĂšte[20].

Finalement, dans un jugement historique rendu le 2 juillet 2009, la Haute Cour de Delhi a déclaré caduc l'article vieux de cent-cinquante ans[21], légalisant les actes homosexuels consentis entre adultes. La Cour a déclaré que s'il n'était pas amendé, l'article 377 contrevenait à l'article 14 de la Constitution de l'Inde, qui garantit pour tout citoyen l'égalité des chances dans la vie et devant la loi.

« S'il est un principe constitutionnel dont on peut dire qu'il est un thĂšme sous-jacent de la Constitution de l'Inde, c'est celui de l'« inclusivitĂ© ». Cette cour croit que la Constitution de l'Inde reflĂšte cette valeur profondĂ©ment enracinĂ©e dans la sociĂ©tĂ© indienne, entretenue depuis plusieurs gĂ©nĂ©rations. Cette inclusivitĂ© que la sociĂ©tĂ© indienne dĂ©ploie par tradition, littĂ©ralement dans tous les aspects de la vie, est manifeste quand elle reconnaĂźt un rĂŽle dans la sociĂ©tĂ© pour chacun. Ceux que la majoritĂ© perçoit comme « dĂ©viants » ou « diffĂ©rents » ne sont pas sur ce point exclus ou ostracisĂ©s. LĂ  oĂč la sociĂ©tĂ© peut montrer inclusion et comprĂ©hension, de telles personnes peuvent ĂȘtre assurĂ©es d'une vie digne et sans discrimination. C'Ă©tait l'« esprit derriĂšre la RĂ©solution » dont parlait Nehru avec tant de passion. Selon nos vues, le droit constitutionnel de l'Inde ne permet pas qu'un texte de droit pĂ©nal soit maintenu tel quel en raison d'idĂ©es fausses du peuple sur ce que sont les LGBT. Il ne peut ĂȘtre oubliĂ© que la discrimination est l'antithĂšse de l'Ă©galitĂ© et que c'est la reconnaissance de l'Ă©galitĂ© qui garantit la dignitĂ© de tout individu[22]. »

La Cour déclare que son jugement sera maintenu jusqu'à ce que le parlement décide d'amender la loi. Ce jugement laisse intactes les clauses de l'article 377 en tant qu'elles s'appliquent à tout rapport non consenti et non vaginal avec des mineurs[21].

Jugement de 2013

Le 11 dĂ©cembre 2013, la Cour suprĂȘme de l'Inde a balayĂ© le jugement donnĂ© en 2009 par la Haute Cour de Delhi, affirmant qu'une intervention judiciaire n'Ă©tait pas requise dans cette affaire. Cette dĂ©cision criminalise Ă  nouveau les relations sexuelles « contre l'ordre de la nature ». Dans leur jugement, les deux juges dĂ©clarent :

« Au regard de la discussion ci-dessus, nous maintenons que l'article 377 IPC ne souffre pas du vice d'inconstitutionnalité, et la déclaration faite par la Haute Cour est légalement intenable[23]. »

Les deux juges notent cependant que le Parlement de l'Inde devrait dĂ©battre du sujet et statuer. Le gouvernement central a Ă©mis une requĂȘte le 21 dĂ©cembre 2013, qui dit : « Le jugement souffre d'erreurs apparentes au regard du dossier, et il est contraire aux principes bien Ă©tablis de la loi formulĂ©s par la Cour du sommet Ă©nonçant la portĂ©e et l'Ă©tendue des Droits fondamentaux sous les articles 14, 15 et 21 de la Constitution[24]. » La fondation Naz a aussi Ă©mis une requĂȘte contre cet ordre de la Cour suprĂȘme sur la section 377[25]. La Cour suprĂȘme a rejetĂ© les recours dĂ©posĂ©s par le gouvernement central, par la fondation Naz et par d'autres, le 28 janvier 2014[26] - [27].

Notes et références

  1. (en) Gardiner Harris, « India's Supreme Court Restores an 1861 Law Banning Gay Sex », The New York Times,‎ (lire en ligne)
  2. (en) « Supreme Court agrees to hear petition on Section 376, refers matter to five-judge bench », Indian Express,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  3. « Inde : la Cour suprĂȘme dĂ©pĂ©nalise l’homosexualitĂ©, une dĂ©cision historique », Le Monde, 6 septembre 2018
  4. (en) « India », TimesSodomy Laws Around the World,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  5. (en) « Indian Penal Code », District Court Allahabad (consulté le )
  6. India: Repeal Colonial-Era Sodomy Law, report from Human Rights Watch, 11 January 2006.
  7. http://indiankanoon.org/doc/970675/
  8. http://www.altlawforum.org/PUBLICATIONS/PUCL%20REport%201
  9. http://www.altlawforum.org/PUBLICATIONS/PUCL%20REPORT%202003
  10. (en) Randeep Ramesh, « India's literary elite call for anti-gay law to be scrapped », The Guardian, London,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  11. (en) Kounteya Sinha, « Legalise homosexuality: Ramadoss », The Times of India,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  12. (en) Vikram Doctor, « Reverse swing: It may be an open affair for gays, lesbians », The Economic Times,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  13. (en) Shibu Thomas, « Unnatural-sex law needs relook: Bombay HC », The Times of India,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  14. Vimal Balasubrahmanyan, « Gay Rights In India », Economic and Political Weekly.
  15. (en) « Chronology: 8-year-long legal battle for gay rights », CNN-IBN (consulté le )
  16. (en) Kian Ganz, « Lawyers Collective overturns anti-gay law », legallyindia.com, (consulté le )
  17. (en) Sheela Bhatt, « Gay Rights is matter of Public Interest: SC », Rediff News, (consulté le )
  18. (en) Shibu Thomas, « Delhi HC to take up PIL on LGBT rights », The Times of India,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  19. « Centre divided on punishment of homosexuality », Daily News & Analysis
  20. (en) « Moily signals rethink on anti-gay law », The Times of hindustan,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  21. « Delhi High Court legalises consensual gay sex », CNN-IBN (consulté le )
  22. « Naz Foundation v. NCT of Delhi », Delhi High Court (consulté le )
  23. CIVIL APPEAL NO.10972 OF 2013, Supreme Court od India.
  24. (en) « Centre moves apex court for review of Section 377 ruling », The Hindu, Chennai (Inde),‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  25. « Naz Foundation files review petition against SC order on Section 377 », CNN-IBN, (consulté le )
  26. « Supreme Court refuses overruling its Verdict on Section 377 and Homosexuality », IANS, Biharprabha News (consulté le )
  27. « SC Refuses To Review Sec 377 Order », BTVi, (consulté le )
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