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Armée de libération du Rwanda

L'Armée de libération du Rwanda (ALiR) était un groupe armé rebelle composé en grande partie des Forces armées rwandaises qui ont perdu la guerre en 1994 après un génocide des Tutsis. Active principalement dans les régions orientales de la République démocratique du Congo, le long de la frontière avec le Rwanda, elle a mené de nombreuses attaques contre la nouvelle armée du Front patriotique rwandais (les FRD) et ses alliés congolais du Rassemblement congolais pour la démocratie. Après la destruction des camps de réfugiés par les FRD, l'ALiR devient anéantie et détruite. En 2000, les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) sont nées pour reprendre le combat et protéger les réfugiés.

Armée de Libération du Rwanda
Idéologie Hutu Power
Objectifs Supériorité politique des Hutus au Rwanda
Statut absorbé par les FDLR
Fondation
Date de formation 1995-1996?
Pays d'origine Drapeau du Rwanda Rwanda
Actions
Zone d'opération Drapeau de la république démocratique du Congo République démocratique du Congo et Drapeau du Rwanda Rwanda
Période d'activité 1995-2000
Organisation
Chefs principaux Paul Rwarakabidje (chef d'état-major)
Membres Entre 12 000 et 22 000 combattants en RDC
Groupe relié FDLR
Guerre du Kivu
Première Guerre du Congo
Seconde guerre du Congo

Création

Après la prise de contrôle du Rwanda par l'Armée patriotique rwandaise, qui a remplacé les FAR sous le commandement de Paul Kagame à partir de juillet 1994, un grand nombre de FAR, malgré la présence des casques bleus français de l'opération Turquoise se joignent aux réfugiés Hutu qui fuyaient le pays et s'installent au Zaïre. De 1995 à 1996, les ex-FAR se sont réorganisés pour former l'Armée pour la libération du Rwanda, en vue de reprendre le pouvoir à Kigali et ont multiplié les incursions au Rwanda. Face à cette situation, le gouvernement rwandais dirigé principalement par le vice-président Paul Kagame a armé et entraîné des milices Tutsi Banyamulenge présentes au Zaïre dans la province du Sud-Kivu et créé, en concertation avec l'Ouganda, un mouvement rebelle zaïrois à sa solde, l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) dirigé par un groupe d'opposants au président Mobutu mais dont les forces militaires étaient composées, pour l'essentiel, de miliciens banyamulenge et de militaires des armées rwandaise et ougandaise.

Première guerre du Congo (octobre 1997-mai 1998)

À partir d', l'AFDL a entamé une opération d'invasion des provinces orientales du Zaïre, marquant ainsi le début de la Première Guerre du Congo. L'AFDL a attaqué et détruit les camps de réfugiés utilisés par l'ALiR comme bases arrière tuant, de façon discriminée, civils et combattants. En , plusieurs centaines de milliers de réfugiés sont rentrés au Rwanda mais près de 300 000 autres se sont enfoncés dans l'intérieur du Zaïre avec l'ALiR. Les troupes de l'AFDL les ont poursuivis à travers tout le Zaïre, commettant de très nombreux massacres jusqu'à la prise de la capitale Kinshasa en . Les miliciens de l'ALiR ont trouvé refuge dans les pays voisins du Zaïre comme la République du Congo, la République centrafricaine, le Tchad, le Soudan, l'Angola, la Zambie ou la Tanzanie. Le , Laurent Désiré Kabila, le porte parole de l'AFDL devenu président du mouvement à partir de s'est auto-proclamé président de la République et a rebaptisé le Zaïre du nom de République démocratique du Congo (RDC).

Au cours de l'année suivante, l'ALiR est parvenue à se réorganiser. Forte encore de près de 20 000 hommes[1], elle a repris l'offensive dans l'Est de la RDC, notamment dans les forêts des territoires de Walikale et Masisi ainsi que dans le Parc national des Virunga[2]. À la fin 1997, l'ALiR a lancé une grande offensive dans le nord du Rwanda avec pour objectif de reprendre le pouvoir à Kigali. L'opération s'est accompagnée de massacre de civils, 19 passagers d'un bus brulés vifs à Bulinga, dans la province de Gitarama, le ; 46 civils tués et 30 blessés près de Gisenyi, le [3]; 58 civils tués et 64 blessés à Rubavu, une commune de Gisenyi en [4]; 26 survivants du génocide tués à Msumbira dans la commune de Gitarama en [4]; 29 civils tués (Tutsi) dans la commune de Kayove, dans la préfecture de Gisenyi en [4]; 51 civils (Tutsi) tués et 62 blessés dans la camp de transit de Nkamira, le [4]; 18 civils tués et 40 blessés entre Kigali et Kibuye le [4]; 32 civils et 2 militaires APR tués le à l'hôtel Pensez-y près de Tare, à 22 km à Kigali[4]. La branche politique de l'ALiR, le Parti pour la libération du Rwanda (PALIR) a justifié ces attaques par la volonté de renverser le gouvernement de Paul Kagame. Compte tenu de la présence en son sein de nombreux éléments génocidaires, l'ALiR était cependant soupçonnée et accusée par les observateurs internationaux de vouloir parachever le génocide des Tutsi rwandais[4].

Au cours du premier semestre 1998, les forces de l'AFDL ont multiplié les opérations contre l'ALiR dans les provinces orientales de la RDC. Sur le terrain cependant, les groupes Mayi-Mayi qui avaient soutenu l'AFDL lors de la première guerre du Congo refusaient désormais de participer aux opérations contre l'ALiR. Convaincus que les offensives contre l'ALiR étaient un prétexte utilisé par l'armée rwandaise pour coloniser le territoire congolais, ils se sont affrontés militairement aux troupes de l'AFDL, plaçant le président Kabila dans une position délicate vis-à-vis de ses alliés rwandais et ougandais. Conscient de la fragilité de sa base politique à l’ouest du pays, Kabila n'a pas voulu perdre le soutien des populations des Kivus qu’il savaient solidaires des groupes Mayi-Mayi et impatientes de voir les troupes rwandaises quitter leur territoire et il a tenté de négocier avec les Mayi-Mayi. Kigali et Kampala ont interprété ces tergiversations comme un refus de lutter efficacement contre l'ALiR et ont décidé d'écarter du pouvoir Kabila.

Seconde guerre du Congo (août 1998-juin 2003)

En , l'alliance du président Kabila avec ses parrains rwandais et ougandais a volé en éclats. Lorsque le président Congolais a demandé aux soldats rwandais et ougandais de quitter la RCD, ces derniers ont créé un nouveau mouvement rebelle congolais, le Rassemblement congolais pour la Démocratie (RCD) afin de provoquer un changement de régime à Kinshasa. Fort du soutien de l'Angola, de la Namibie, du Zimbabwe ainsi que de la majorité de la population de Kinshasa, Kabila est parvenu à se maintenir au pouvoir mais la RDC a sombré dans un conflit pendant 5 ans. Au cours de cette seconde guerre, Kabila a noué une alliance militaire avec l'ALiR afin de lutter contre le RCD, le Rwanda, l'Ouganda ainsi qu'un autre mouvement rebelle congolais alors allié à l'Ouganda, le Mouvement de Libération du Congo (MLC). À partir de la fin 1998, l'ALiR a commencé à de Kabila des armes et des munitions[1].

Jusqu'à sa fusion avec les FDLR (voir ci-dessous), l'ALiR qui comptait, semble-t-il 12 000 hommes, était organisée en deux divisions composées chacune de trois brigades de 2 000 hommes. La première division était basée dans la province du Nord-Kivu et la seconde autour du parc national de Kahuzi-Biega, dans la province du Sud-Kivu. Le chef d'état-major de l'ALiR était Paul Rwarakabije et son quartier général se trouvait dans la province du Nord-Kivu[1].

Au cours de cette période, l'ALiR a mèné plusieurs attaques contre les groupes armés hostiles à Kabila. À l'instar des autres belligérants, elle a commis aussi plusieurs violations graves des droits de l'homme et du droit international humanitaire tant qu'en RDC qu'au Rwanda et en Ouganda. Le , l'ALiR a pris en otage des touristes occidentaux venus dans le Parc national Bwindi en Ouganda pour observer les gorilles des montagnes. Huit de ces touristes (4 Britanniques, deux Américains et deux Néo-Zélandais ainsi qu'un garde forestier ougandais) ont été tués tandis que six autres ont réussi à s'enfuir[5]. L'ALiR a présenté cette opération comme une action effectuée en représailles à la politique de soutien des États-Unis et du Royaume-Uni envers Paul Kagame[6].

Le , sous forte pression, un accord de cessez-le-feu a été signé à Lusaka. Cet accord prévoyait notamment le déploiement d'une force de maintien de la paix chargée de désarmer sans condition des « forces négatives », parmi lesquels l'ALiR (mentionnés dans l'accord sous les noms d'ex-FAR et Interahamwe). Au cours des années suivantes, l'accord a été régulièrement violé mais la ligne de front s'est stabilisé tandis que l'Ouganda et le Rwanda s'affrontaient, à plusieurs reprises, pour le contrôle des ressources naturelles congolaises dans la partie orientale de la RDC. L'ALiR a continué de mener des attaques contre les troupes rwandaises et ougandaises et leurs alliés. Après l'assassinat de Laurent Désiré Kabila le et l'arrivée au pouvoir, à Kinshasa de Joseph Kabila, l'ALiR a consolidé son alliance avec l'organisation Hutu basé à Kinshasa, les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR). Depuis lors, même si elle n'a pas été officiellement dissoute, l'ALiR s'est progressivement intégrée au sein des FDLR.

Crimes imputés à l'ALiR par le Projet mapping

Crimes imputés à l'ALiR par le Projet Mapping
DateLieuIncidentRéférences
Entre 1996 et 2001Territoire de la République démocratique du CongoEnlèvement d'enfants et utilisation d'enfants dans les groupes armésRapport du Projet Mapping, article 701, p. 352.
Entre et groupement d'Irhambi-Katana, à 53 km au nord de Bukavu; chefferie de Kabare dans le parc de Kahuzi-Biega; territoire de KaleheViols, esclavages sexuels.Rapport du Projet Mapping, article 355, p. 192.
Village d'Umangi et Edjeke, près de Lisala, province de l'ÉquateurAssassinat de quatre civils.Rapport du Projet Mapping, article 383, p. 214.
24-Lisala, province de l'ÉquateurLancement d'obus sur la ville par des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila, de l'Armée nationale tchadienne (ANT), de l'ALiR, de l'armée du Mouvement de libération du Congo et l'armée ougandaise provoquant la mort d'au moins 15 civilsRapport du Projet Mapping, article 383, p. 214.
Village de Bopuo, près de Lisala, province de l'ÉquateurAssassinat de trois civils.Rapport du Projet Mapping, article 384, p. 214.
Village de Ngonzi-Rive, près de Lisala, province de l'ÉquateurAssassinat de sept civils par des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila, de l'Armée nationale tchadienne (ANT) et de l'ALiR.Rapport du Projet Mapping, article 384, p. 215.
territoire de Businga, province de l'ÉquateurAvec des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila et l'Armée nationale tchadienne (ANT), pillages.Rapport du Projet Mapping, article 382, p. 214.
Villages de Lwazi, Mpende, Mufunqwa, territoire de NyunzuVillages incendiés; leurs habitants étaient accusés de collaborer avec l'APR et l'armée du RCD.Rapport du Projet Mapping, article 380, p. 209.
Entre Businga et Loko + villages de Bokosa, Bogbudu, Bobusu et Bobale, province de l'ÉquateurAvec des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila assassinats de trois mineurs et d'un nombre indéterminé de civils adultes.Rapport du Projet Mapping, article 386, p. 215.
villages de Inke à 50 km de Gbadolite, province de l'ÉquateurAvec des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila, assassinats d'au moins huit civils.Rapport du Projet Mapping, article 386, p. 215.
Luke et ses environs, territoires de WalikaleAssassinat par balle ou à coups de machette d'une centaine de civils accusés de collaborer avec l'APR et l'armée du RCD; pillage du village.Rapport du Projet Mapping, article 343, p. 177.
Territoires de Befale province de l'ÉquateurAvec des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila, assassinats d'au moins neuf civils par balle, coups de massue ou asphyxieRapport du Projet Mapping, article 389, p. 217.
Fin Village de Mange, province de l'ÉquateurAvec des éléments des Forces armées congolaises (FAC) fidèles à Laurent Désiré Kabila, viol d'une vingtaine de femmes dont l'une est décédée des suites des blessures infligées; enlèvement d'un nombre indéterminé de femmes utilisées comme esclaves sexuellesRapport du Projet Mapping, article 389, p. 218.
29-Village d'Igobegobe, à 40 km de BukavuAssassinat de deux civils, plusieurs civils blessés, pillage systématique du village.Rapport du Projet Mapping, article 353, p. 189.
Cishozi, à 35 km de Bukavu, territoire de KabareUn civil brûlé vif.Rapport du Projet Mapping, article 353, p. 189.
Centre-ville de Kabare et ses environsPillage et recours au travail forcé.Rapport du Projet Mapping, article 353, p. 189.
Camp de déplacé à SakeAssassinat de 34 à 42 civils, en majorité des ethnies Hunde et Tembo, pour la plupart des femmes et des enfants.Rapport du Projet Mapping, article 343, p. 177.
Le Village de Kalundu, dans la collectivité du Nord-Lukuga, territoire de NyunzuAssassinat de deux civils dont le chef du village.Rapport du Projet Mapping, article 380, p. 210.
Parc national de Kahuzi-Biega, territoires de Kabare/KaleheAssassinat, avec des Mayi-Mayi, de 10 personnes dont des membres de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN), un journaliste et deux gardes forestiers; recours au travail forcé.Rapport du Projet Mapping, article 355, p. 191.
Centre-ville de KabareEnlèvement d'un nombre indéterminé de jeunes filles qui sont violées; certaines sont relâchées, d'autres sont portées disparues ; pillages.Rapport du Projet Mapping, article 355, p. 191.
Citungano dans la province du Sud-KivuEnlèvement de deux civils, un père et sa fille; recours au travail forcé, les victimes sont libérées après le viol de la fille.Rapport du Projet Mapping, article 355, p. 192.
Village de Kalenge, près de NyunzuAssassinat de trois civils accusés de collaborer avec l'APR et l'armée du RCD.Rapport du Projet Mapping, article 380, p. 211.
12-Village de Lipenda et bivouac de Nathanali, près de NyunzuAssassinat, avec des Mayi-Mayi de 12 civils accusés d'avoir accueilli chez eux des militaires de l'APR et de l'armée du RCD.Rapport du Projet Mapping, article 380, p. 211.
Village de Biengele, à km de NyunzuAssassinat avec des Mayi-Mayi Pygmées de sept hommes; 20 femmes dénudées; les victimes étaient accusés d'avoir fourni des vivre à l'armée du RCD.Rapport du Projet Mapping, article 380, p. 211.

Références

  1. Les Rebelles Hutu Rwandais au Congo: Pour une Nouvelle Approche du Désarmement et de la Réintégration, ICG Rapport Afrique no 63, 23 mai 2003, p. 5.
  2. Rapport du Projet Mapping concernant les violations les plus graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la République démocratique du Congo, Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, art 341, août 2010, consulté le 18 mars 2012.
  3. Gérard Prunier, From Genocide to Continental War: The "Congolese" Conflict and the Crisis of Contemporary Africa, C. Hurst & Co, 2009, p. 193.
  4. Globalsecurity.org, Article Interahamwe, consulté le 26 mars 2012
  5. Mortel safari en Ouganda, Le Soir, 3 mars 1999, consulté le 26 mars 2012
  6. Rwandan guilty of tourist murders, BBC News, 9 January 2006

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