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Ange radar

Les anges radar (ou Ă©cho-mirage) sont des Ă©chos radar qui ne peuvent ĂȘtre attribuĂ©s Ă  des rĂ©flexions sur des cibles liquides ou solides, mais Ă  des variations de l'indice de rĂ©fraction de l'air[1]. Ce phĂ©nomĂšne est comparable Ă  l'effet miroir que l’on peut noter lorsqu’on regarde Ă  travers un certain nombre de verres. À l'interface entre le milieu optiquement plus dense (verre) et le milieu optiquement mince (air), le rayon lumineux est en partie rĂ©flĂ©chi. On voit donc une rĂ©flexion bien qu’il n’y ait pas de miroir Ă  proprement parler. Le mĂ©canisme sous-jacent est dĂ» Ă  la diffusion de Bragg.

Ange radar
Écho-mirage sur l'image d'un radar en 1959.
Présentation
Type

Histoire

Les premiers radars britanniques de la Chain Home furent construit Ă  la fin des annĂ©es 1930 et se rĂ©vĂ©lĂšrent cruciaux lors de la bataille d'Angleterre. Cependant de fausses alertes se produisirent comme tard la nuit du alors que la menace d'invasion allemande subsistait. Cette nuit-lĂ , le Fighter Command fut placĂ© en alerte rouge lorsque jusqu'Ă  cinq stations distinctes signalĂšrent une formation massive d'Ă©chos se dĂ©plaçant lentement Ă  travers la Manche, exactement comme pour un raid nocturne massif des bombardiers allemands. Les spots se sont approchĂ©s de la pĂ©ninsule de Cherbourg en France jusqu'Ă  moins de 60 km de la cĂŽte du Dorset mais aucune attaque ne se produisit. À la base RAF Worth, ils sont restĂ©s sur l'affichage radar pendant deux heures et ont semblĂ© passer de groupes massifs Ă  des Ă©chos uniques qui ont ensuite disparu[2].

L'expĂ©rience se produisit plusieurs fois sans obtenir d'explication. AprĂšs la guerre, ce phĂ©nomĂšne a fait l'objet d'Ă©tudes considĂ©rables dans les annĂ©es 1950. Les premiers radars Ă©taient soumis Ă  de forts Ă©chos du sol et leurs affichages prĂ©sentaient souvent de nombreux Ă©chos permanents qui masquaient des parties de l'Ă©cran. Sur ces systĂšmes, les anges Ă©taient difficiles Ă  distinguer dans le fouillis radar. Le dĂ©veloppement du concept de l'oscillateur cohĂ©rent (COHO) au Royaume-Uni a permis d'Ă©liminer ces Ă©chos permanents, permettant aux anges d'ĂȘtre clairement vus pour la premiĂšre fois sur une base continue[2].

Anges résolus

Certains Ă©chos qui originellement Ă©taient associĂ©s Ă  des « anges Â» ont Ă©tĂ© rĂ©solus comme des cibles biologiques. En effet, des Ă©tudes in situ par des observateurs et des radars verticaux Ă  trĂšs haute rĂ©solution de zones oĂč Ă©taient rĂ©guliĂšrement notĂ©s des Ă©chos Ă  certaines pĂ©riodes de la journĂ©e ont rĂ©vĂ©lĂ© la correlation entre l'apparition et la disparition des Ă©chos avec le vol en groupe d'insectes ou d'oiseaux. Ainsi, en temps de migration des oiseaux, des Ă©chos apparaissent aprĂšs le coucher du soleil et disparaissent Ă  son lever, les volatiles prenant avantage de la plus faible turbulence nocturne pour effectuer leur dĂ©placement[2].

L'un des premiers exemples a été enregistré en 1953 sur le radar anti-aérien n ° 4 Mk. 7, l'un des premiers à systÚme COHO. Certains d'entre eux ont été identifiés comme des volées d'oiseaux, ce qui a conduit un ornithologue à acheter un radar antiaérien n° 3 Mk. 7 excédentaire pour effectuer le suivi des oiseaux[3].

Bien que les oiseaux aient été un problÚme pour tous les radars de l'époque, ils ont rendu le réseau d'alerte précoce de la ligne Mid-Canada presque inutilisable au printemps et à l'automne lorsque des millions d'oiseaux migrent sur le Canada[4]. Ces radars à ondes entretenues n'avait pas de signaux cohérents et l'effet était si puissant que les radars AN/FPS-23 similaires utilisés sur la ligne DEW alors en construction furent dotés du filtrage des vitesses Doppler afin de supprimer les objets se déplaçant à moins de 200 km/h à l'écran[5].

Principe

Lorsque le faisceau radar passe sur une courte distance entre deux masses d’air ayant des propriĂ©tĂ©s de rĂ©fraction trĂšs diffĂ©rentes mais sans prĂ©cipitations, une partie du signal est rĂ©trodiffusĂ© vers l'antenne rĂ©ceptrice[6]. Les principaux types d'anges sont[7] :

  • des Ă©chos discrets stables (cohĂ©rents) dans le temps et non stratifiĂ©s qui se produisent au hasard dans la zone de mĂ©lange de l'air sous les nuages convectifs ou des groupes d'Ă©chos incohĂ©rents associĂ©s aux bulles thermiques ;
  • les Ă©chos associĂ©s aux limites des nuages cumulus ;
  • des Ă©chos stratifiĂ©s, gĂ©nĂ©ralement incohĂ©rents lorsqu'ils sont vus Ă  de grandes distances mais cohĂ©rents notĂ©s Ă  la verticale, et associĂ©s Ă  des couches de variation rapide d'humiditĂ©.

Par exemple, lors d’une inversion matinale, les terres se rĂ©chauffent plus rapidement que les lacs au lever du soleil et les masses d’air qui les surplombent ont des caractĂ©ristiques de tempĂ©ratures et d’humiditĂ© diffĂ©rentes. Cela se produit Ă©galement si un courant d'air ascendant chaud et sec suit un autre froid et descendant dans des rouleaux de convection[6]. Cet effet est appelĂ© la diffusion de Bragg et donne des « échos en air clair »[6]. Le radar peut mĂȘme noter une vitesse de dĂ©placement de ces Ă©chos, par l’effet Doppler-Fizeau, car les frontiĂšres des diffĂ©rents milieux peuvent se dĂ©placer. Le front de brise marine est aussi associĂ© Ă  l'apparition d'anges alors que le gradient d'indice de rĂ©fraction est trĂšs fort entre les masses marines et terrestres.

Impact

L'ange semble ĂȘtre un objet physiquement Ă©norme sur l'Ă©cran, ayant un diamĂštre de plusieurs dizaines de kilomĂštres, qui peut obscurcir de vraies cibles. Ce phĂ©nomĂšne peut confondre l’opĂ©rateur radar en n’étant pas filtrĂ© par les systĂšmes de visualisation des cibles mobiles. Il a par le passĂ© donnĂ© lieu Ă  des alertes et Ă  l’envoi d’avions intercepteurs pour identifier ces « anges »[6].

Ceci est particuliÚrement notable dans les radars à balayage en mer par avions et satellites lorsque la période des vagues correspond à un certain multiple de la longueur d'onde du radar[8]. Cet effet a été exploité dans des radars qui mesurent l'état de la mer au large (diffusiomÚtre) ou des radars de mesure du vent (profileur de vents)[9].

Références

  1. Bureau de la traduction, « Ange radar », TERMIUM Plus, Gouvernement du Canada, (consulté le ).
  2. (en) David Clarke, « Radar Angels », sur drdavidclarke.co.uk, (consulté le ).
  3. Gough 1993, p. 140.
  4. Skolnik, Griffiths et Nicholas 2007, p. 45.
  5. Ray 1965, p. 24.
  6. Christian Wolff (trad. Pierre Vaillant), « Anges radar », sur Radartutorial.eu, (consulté le ).
  7. (en) David Atlas, « Radar studies of meteorological “angel” echoes », ournal of Atmospheric and Terrestrial Physics, Elsevier Ltd, vol. 15, nos 3-4,‎ , p. 262-264, IN9-IN10, 265-266, IN11-IN13, 267-274, IN15-IN16, 275-278, IN17, 279-280, IN19-IN20, 281-282, IN21-IN23, 283-287 (DOI 10.1016/0021-9169(59)90109-6).
  8. (en) « Bragg scattering », sur earth.esa.int
  9. Christian Wolff (trad. Pierre vaillant), « Diffusion de Bragg », sur Radartutorial.eu, (consulté le ).

Bibliographie

  • (en) Jack Gough, Watching the skies : a history of ground radar for the air defence of the United Kingdom by the Royal Air Force from 1946 to 1975, HMSO, , 328 p. (ISBN 978-0-11-772723-6, lire en ligne)
  • (en) Thomas Ray, A History of the DEW Line 1964 - 1964, Air Force Historical Research Agency, (lire en ligne)
  • (en) W. G. Harper, « Detection of bird migration by centimetric radar—a cause of radar ‘angels’ », Proceedings of the Royal Society of London, vol. 149, no 937,‎ , p. 484-502 (DOI 10.1098/rspb.1958.0088, lire en ligne)
  • (en) Merrill Skolnik, Hugh Griffiths (dir.) et Willis Nicholas (dir.), Advances in Bistatic Radar, SciTech Publishing, (ISBN 978-1-61353-129-7, DOI 10.1049/sbra001e_ch3), « Fluttar DEW-Line Gap-Filler », p. 35-46
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