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Ambrogio Contarini

Ambrogio Contarini (1429-1499) est un marchand et diplomate vénitien connu pour son récit de voyage relatant son ambassade en Perse (1474-1477). Envoyé par la Sérénissime République pour nouer une alliance de revers contre les Ottomans, Ambrogio Contarini traverse l'Europe centrale, orientale, la Russie, le Caucase, vit de multiples aventures au péril de sa vie. La relation de voyage qu'il tire de son long périple, les longues descriptions de la vie à la cour d'Ispahan permettent aux Occidentaux de compléter une géographie lacunaire et de découvrir une civilisation méconnue.

Ambrogio Contarini
Biographie
Naissance
Décès
Activités

Biographie

Issu de la grande famille vénitienne des Contarini, Ambrogio vit durant sa jeunesse à Constantinople où il exerce la profession de marchand ; à partir de 1463, il participe à la guerre turco-vénitienne sur des navires de la Sérénissime République, en particulier L'Égée avec lequel il livre des combats contre la flotte ottomane de Mehmed II[1]. Soucieux de nouer une alliance de revers avec les Perses, d'ouvrir un front oriental contre les Turcs, le sénat de Venise décide d'envoyer une ambassade auprès du souverain Uzun Hasan en 1473 avec pour représentant Ambrogio Contarini qui quitte les rives de l'Adriatique le (1473 selon le calendrier vénitien, qui débutait au 1er mars). Il n'est cependant pas le premier représentant de la grande cité maritime à se rendre en Orient dans le même but car deux autres italiens, Caterino Zeno et Josaphat Barbaro, l'avaient précédé de quelques mois[2]

Contraint d'éviter les territoires sous contrôle ottoman, le diplomate effectue un long périple par le nord à travers l'Europe centrale, la Pologne où il est l'hôte de Casimir IV (roi de Pologne et grand-duc de Lituanie), passe par Kiev et Caffa, traverse la mer Noire pour atteindre le Caucase, la Géorgie, l'Arménie avant d'arriver à Tabriz en . Reçu le par Uzun Hasan à Ispahan après avoir été présenté par Josaphat Barbaro déjà sur place, il est écouté avec bienveillance par le souverain perse mais ce dernier ne répond pas favorablement au projet d'alliance militaire avec Venise[3]. Ambrogio demeure plusieurs mois à la cour d'Ispahan, ne reprenant la route pour l'Europe qu'en juin 1475. Le voyage de retour s'avère très long et difficile car les Ottomans, informés des contacts entre Vénitiens et Perses, surveillent les routes et se sont emparés de Caffa et du khanat de Crimée[2]. L'envoyé de Venise est alors obligé de passer par Derbent, hiverne sur les rives occidentales de la mer Caspienne au milieu d'une communauté de pêcheurs, puis embarque pour Astrakhan remontant la Volga, il rejoint la Moscovie où il est reçu par le grand-duc, Ivan III avant de retrouver le roi Casimir IV en sa résidence de Trakai[4]. Rentré à Venise, le , Ambrogio Contarini fait un rapport détaillé de son ambassade devant le Conseil des Dix. Il faut attendre 1487 pour que soit publié à Venise[5] son récit de voyage sous le titre de Questo e el viazo de mister Ambrosio Contarin ambasador de la illustrissima signoria de Venesia al signor Uxuncassan Re di Persia[1].

RĂ©cit de voyage

Viaggio al signor Usun Hassan re di Persia, 1487

L'ouvrage dans lequel Ambrogio Contarini dĂ©crit son pĂ©riple de plusieurs milliers de kilomètres tient davantage de la relation de voyage que du rapport de mission diplomatique. Le VĂ©nitien insiste plus sur les vicissitudes personnelles qu'il a pu rencontrer au milieu de terres peuplĂ©es de Tatars hostiles, de brigands caucasiens, sur les souffrances et les privations endurĂ©es que sur des considĂ©rations historiques, gĂ©ographiques et/ou politiques[6]. Au dĂ©but et Ă  la fin du rĂ©cit, l'auteur dĂ©crit son voyage d'aller et de retour au grĂ© de ses rencontres, de ses embĂ»ches, alternant souvenirs agrĂ©ables comme le sĂ©jour chez le roi Casimir IV ou moments plus difficiles comme ceux passĂ©es au milieu d'une escorte tatare dont les coutumes barbares, la vie fruste et la consommation immodĂ©rĂ©e d'hydromel le consternent - « Les Tatars, se nourrissant exclusivement de viande de cheval, sentaient si abominablement qu'il Ă©tait tout Ă  fait intolĂ©rable de s'approcher d'eux... Â»[6]. Le corps de l'ouvrage est consacrĂ© Ă  son sĂ©jour en Perse, Ă  la description des villes iraniennes, de la cour du palais d'Ispahan, de la personne du roi, d'un dĂ©filĂ© de 25 000 cavaliers organisĂ© en son honneur[1].

«  J’admets que j’aurais pu en dire plus et de manière plus Ă©lĂ©gante sur le succès de mon voyage ainsi que sur mon sĂ©jour en Allemagne mais comme toutes ces choses sont dĂ©sormais connues de tous, cela ne m’a pas semblĂ© appropriĂ©. Tout ce que j’ai dit, cependant, ne relève que de la vĂ©ritĂ© et, sur ce point, je n’ai rien dissimulĂ©.  Â» ainsi conclut Ambrogio Contarini. Pourtant son rĂ©cit fait dĂ©couvrir Ă  l'Occident une partie du monde mal connu des EuropĂ©ens, parfois vĂ©ritable terra incognita comme le Caucase, ainsi que les fastes d'une cour orientale[6]. « Ces premières communications des VĂ©nitiens avec la Perse, quoique faites dans un but politique, sont un Ă©vĂ©nement dans l'histoire des voyages et dans celle de la civilisation. Elles ouvrirent aux observations des occidentaux des rĂ©gions inconnues et mirent en rapport des peuples qui semblaient sĂ©parĂ©s pour toujours, rĂ©pandant au passage quelques lueurs sur la gĂ©ographie, jusqu'alors si confuse. »[2].

Bibliographie

  • (en) Albert C. Cizauskas, A venetian diplomat in 15 th century Lithuania in Lithuanian quarterly journal of arts and sciences, Vol. 30, n° 3, 1984. Lire en ligne
  • (it) L. Lockhart, R. Morrozo della Roccan MF Tiepolo, I Viaggi en Perse degli Ambasciatori Veneti Barbaro e Contarini, Rome, 1973.
  • François Angelier, Dictionnaire des voyageurs et explorateurs occidentaux du XIIIe au XXe siècle, Pygmalion, Paris, 2011.
  • Pascal Vuillemin, Une itinĂ©rance prophĂ©tique. Le voyage en Perse d'Ambrogio Contarini, Paris, 2016.

Notes et références

  1. Filippo Bertotti, Contarini, Ambrogio, in Encyclopædia Iranica, 1992, Vol. VI, Fasc. 2, p. 220. Lire en ligne.
  2. Présentation du journal de voyage d'Ambrogio Contarini.
  3. François Angelier, Dictionnaire des voyageurs et explorateurs occidentaux du XIIIe au XXe siècle, p. 228.
  4. (en) Janet Martin, Medieval Russia, 980-1584, Cambridge University Press, 1995, pp. 274 et 314.
  5. Certaines sources évoquent une publication à Vicence en 1486, ce qui semble hautement improbable. D'une part, aucun exemplaire n'a subsisté de cette prétendue édition princeps. D'autre part, et toujours selon ces témoignages, elle aurait été imprimée par Leonardo da Basileia dont on sait au contraire qu'il avait catégoriquement refusé de prendre en charge cette édition [A. Zeno, Dissertazioni vossiane, Venise, 1752, vol 1, p. 241-242]. Dès lors, la première édition du Viazo date bien de 1487, sur les presses vénitiennes d'Hannibal Fosio, comme l'indique le colophon de ladite édition : Impressum Venetiis per Hannibalem Fosium parmensem anno incarnationis Domini Mcccclxxxvii. die. xvi. januarii.
  6. Albert C. Cizauskas, A venetian diplomat in 15 th century Lithuania.

Voir aussi

Liens externes

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