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Althée

AlthĂ©e (en grec ancien áŒˆÎ»ÎžÎ±ÎŻÎ± / AlthaĂ­a) est un personnage de la mythologie grecque, fille de Thestios et d'EurythĂ©mis, est l'Ă©pouse d'ƒnĂ©e (roi de Calydon). Elle est la mĂšre de MĂ©lĂ©agre, TydĂ©e, MĂ©lanippe, DĂ©janire et AgĂ©las.

Althée jetant la bûche pour venger la mort de ses frÚres. Gravure de Johann Wilhelm Baur.

Étymologie

AlthĂ©e ou Althea (en grec ancien áŒˆÎ»ÎžÎ±ÎŻÎ± / AlthaĂ­a), est un dĂ©rivĂ©e du verbe althainein qui signifie guĂ©rir, cette variante du prĂ©nom grec Althaia se traduit par « guĂ©risseuse » ou « celle qui possĂšde des pouvoirs de guĂ©rison ».

Mythe

Statue de Méléagre

À la naissance de MĂ©lĂ©agre, les Moires lui prĂ©disent qu'il mĂšnerait une vie glorieuse, tant que les tisons du foyer familial ne sont pas consumĂ©s par le feu. AlthĂ©e Ă©teignit alors immĂ©diatement la bĂ»che et la dissimula afin de protĂ©ger la vie de son fils.

Plus tard, faisant des sacrifices pour obtenir une bonne rĂ©colte, ƒnĂ©e, oublie d'honorer les autels de la dĂ©esse ArtĂ©mis (ou Diane) ce qui provoque la colĂšre de celle-ci. IrritĂ©e, la dĂ©esse dĂ©cide d'envoyer un sanglier ravager la rĂ©gion de Calydon.

Ayant atteint l'Ăąge adulte, MĂ©lĂ©agre dĂ©cide d'organiser la chasse au sanglier et y convie de grands hĂ©ros grecs, parmi lesquels Jason, ThĂ©sĂ©e, TĂ©lamon, Nestor, Castor et Pollux, ainsi que Plexippe et ToxĂ©e, fils de Thestios et frĂšres d’AlthĂ©e. Atalante, future argonaute est prĂ©sente et MĂ©lĂ©agre en tombe amoureux. La bĂȘte est tuĂ©e : le premier coup est donnĂ© par Atalante, le coup fatal par MĂ©lĂ©agre. DĂ©sireux d’honorer sa bien-aimĂ©e, il lui offre la tĂȘte et la peau du sanglier, ce qui suscite la jalousie de ses deux oncles, Plexippe et ToxĂ©e, qui la convoitaient Ă©galement. Au cours de leur querelle, MĂ©lĂ©agre les tue. En apprenant la mort de ses frĂšres, AlthĂ©e se dĂ©cide Ă  tirer vengeance de son fils. Les sentiments de sƓur d'AlthĂ©e l'emportĂšrent sur ceux de mĂšre, et elle jeta la bĂ»che conservĂ©e depuis sa naissance au feu. Elle se consume et MĂ©lĂ©agre meurt. AccablĂ©e de remords et se souvenant de la prophĂ©tie, elle sombre dans la folie et se donna la mort.

Selon un autre mythe, Dionysos aurait demandĂ© Ă  ƒnĂ©e de lui prĂȘter son Ă©pouse AlthĂ©e. En guise de rĂ©compense, ƒnĂ©e aurait reçu de ce dieu un plant de vigne, qui jusqu'alors, Ă©tait inconnu dans son royaume[1].

Présence dans la culture littéraire

À travers le mythe de MĂ©lĂ©agre dans l'Iliade d'HomĂšre

L’histoire de MĂ©lĂ©agre est racontĂ©e par HomĂšre et par les mythographes. Dans sa version, AlthĂ©e est tiraillĂ©e entre sa colĂšre de sƓur qui vient de perdre ses frĂšres, tuĂ©s de la main de son fils, et ses sentiments de mĂšre, fiĂšre de la victoire de ce dernier. Elle ne peut se rĂ©soudre Ă  tuer son fils de ses propres mains, alors elle ne cesse de supplier les dieux - ce qui ne manque pas d'irriter son fils qui, de son cĂŽtĂ©, savoure sa victoire dans les bras d'Atalante - afin qu'ils accomplissent sa tĂąche dĂ©chirante Ă  sa place :

« Méléagre oubliait la gloire dans les bras de cette épouse, nourrissant le chagrin qui le consumait, courroucé des imprécations que sa mÚre Althée ne cessait d'adresser aux dieux, dans le désespoir qu'elle ressentait de la mort de son frÚre, qu'il avait tué dans un combat. Elle tombait à genoux, frappait de ses mains à coups redoublés la terre nourrice des hommes, appelait le cruel Pluton et l'horrible Proserpine, et les conjurait, en arrosant son sein d'un torrent de larmes, de donner la mort à son fils. »

Dans les MĂ©tamorphoses d'Ovide

AlthĂ©e, qui fĂȘtait l'exploit de son fils MĂ©lĂ©agre, ne songe plus qu'Ă  le punir quand elle apprend le meurtre de ses propres frĂšres. Elle se souvint alors de la souche de bois, qu'elle avait sauvegardĂ©e et dont dĂ©pendait la vie de son fils. Les Parques en effet avaient annoncĂ©, lors de sa naissance, qu'elles accordaient Ă  l'enfant la mĂȘme durĂ©e de vie qu'Ă  ce morceau de bois. Se sentant tenue de venger ce meurtre et partagĂ©e entre son amour pour ses frĂšres et son amour maternel, elle fait prĂ©parer un feu, dans lequel elle hĂ©site longtemps Ă  faire disparaĂźtre la souche fatidique. Finalement, la sƓur en elle l'emporte : bien consciente de commettre une abomination, elle dĂ©cide non sans dĂ©chirement de sacrifier la vie de son fils en invoquant les dĂ©esses de la vengeance, sĂ»re ainsi d'accomplir un devoir sacrĂ© Ă  l'Ă©gard de ceux de son sang. DĂ©sespĂ©rĂ©e, elle jette le tison dans le feu, maudissant sa famille et dĂ©sirant rejoindre ses frĂšres dans la mort [2]:

« Althée apporte cette souche, fait entasser des bûches de pin
et des débris de bois, puis elle y boute un feu ravageur.
Alors, quatre fois, elle tenta de poser la souche sur les flammes,
quatre fois, elle se retint ; la mĂšre et la sƓur en elle sont en lutte. »

Le matricide dans la littérature des Temps Modernes

Plusieurs rĂ©Ă©critures de l’histoire de MĂ©lĂ©agre sont rĂ©alisĂ©es en France entre 1580 et 1650, cet infanticide, rappelant celui perpĂ©trĂ© par MĂ©dĂ©e et mĂȘlant les sentiments d’une mĂšre et l’expression des devoirs d’une sƓur qui doit sauver l'honneur de ses frĂšres, peut ĂȘtre commis de maniĂšres bien diffĂ©rentes selon les dramaturges. Les trois rĂ©Ă©critures suivantes proposent de grandes variations en ce qui concerne l'Ă©laboration de l'infanticide :

Pierre de Bousy, Méléagre :

Bousy Ă©voque dans les sonnets du paratexte « l’horreur » et « le sanglant Eschafaut ». En jouant sur le motif amoureux et la dĂ©ploration d’AlthĂ©e sur les corps de ses frĂšres, Boissin cherche le pathĂ©tique.

Alexandre Hardy, Méléagre :

Le MĂ©lĂ©agre d’Alexandre Hardy est d’une violence extrĂȘme et programme une lecture politique. De mĂȘme, Alexandre Hardy a retirĂ© tout sentiment maternel Ă  AlthĂ©e, et n’a rien gardĂ© ni de la douleur, ni de la lutte de sentiments qu’Ovide lui avait attribuĂ© dans ses MĂ©tamorphoses. Pour se rendre compte de la diffĂ©rence qui existe entre les sentiments de ces deux femmes comparons leurs discours : Quatre fois elle fait un effort pour poser le tison sur le feu, quatre fois elle s’arrĂȘte indĂ©cise ; en elle la mĂšre et la sƓur se combattent et ces deux noms tirent un seul et mĂȘme cƓur en sens contraires. TantĂŽt l’horreur du crime qu’elle va commettre fait pĂąlir son visage ; tantĂŽt les feux de la colĂšre font monter Ă  ses yeux leurs rouges lueurs ; parfois il semble que ses traits menaçants annoncent je ne sais quelle action cruelle, parfois ils offrent l’expression de la pitiĂ© ; Ă  peine l’ardeur sauvage de son courroux a-t-elle sĂ©chĂ© ses larmes qu’elle trouve encore des larmes. Comme un vaisseau, entraĂźnĂ© d’un cĂŽtĂ© par le vent, de l’autre par le flot, subit ces deux forces contraires et leur obĂ©it dans sa course incertaine ; ainsi la fille de Thestius flotte irrĂ©solue entre des sentiments divers ; tour Ă  tour sa colĂšre se calme et aussitĂŽt aprĂšs se rĂ©veille.La MesnardiĂšre imagine Ă  partir de cette histoire une fable morale et juste pour un spectacle qui refuse l’horreur et utilise le sang avec parcimonie. BensĂ©rade, qui l’a probablement lu, semble suivre les leçons du thĂ©oricien mais sa mise en Ɠuvre de l’infanticide n’est pas sans cruautĂ© – le jeune homme meurt en se consumant durant tout le dernier acte[3].

Isaac de Bensérade, Méléagre :

Portrait d'Isaac de Bensérade

Contrairement Ă  La MesnardiĂšre qui imagine Ă  partir de ce mythe une fable morale et juste pour un spectacle qui rejette l’horreur et agence des scĂšnes violentes avec modĂ©ration, BensĂ©rade, lui, semble suivre les leçons du thĂ©oricien mais sa reprĂ©sentation du meurtre d'AlthĂ©e n’est pas sans cruautĂ© : en effet, le personnage de MĂ©lĂ©agre est soumis Ă  un sort en apparences beaucoup plus atroce que dans les autres rĂ©Ă©critures puisqu'il meurt en se consumant durant tout le dernier acte dans d'horribles souffrances.

Interprétations modernes

Puissante et conséquente, elle est un symbole du matriarcat, et un exemple tragique d'infanticide[4] - [5] - [6]

Sources

Notes et références

  1. Joël Schmidt, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Paris, Larousse, , 366 p. (ISBN 9-782035-936318), p. 28
  2. « Ovide, Métamorphoses, 8, 260-546 », sur bcs.fltr.ucl.ac.be (consulté le )
  3. « MĂ©lĂ©agre. TragĂ©die — BibliothĂšque dramatique, CELLF », sur bibdramatique.huma-num.fr (consultĂ© le )
  4. Clotilde Thouret, « La merveilleuse irrésolution d'Althée sur la mort de Méléagre », Littératures classiques no 67, 2008/3, p. 59-70 [lire en ligne].
  5. SénÚque l'évoque dans Médée, III, 3: "tes mains impies, Î Méléagre, ont détruit les frÚres de ta mÚre qui a vengé leur mort par la tienne."
  6. Allah-Shokr ASSADOLLAHI, Mahdi AFKHAMINIA, Mehrnoosh KEYFAROKHI, « Etude psychanalytique de l'infanticide dans l'univers des mythes », Études de Langue et LittĂ©rature Françaises,‎ , p. 10 (lire en ligne)
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