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Abel Muzorewa

Abel Tendekayi Muzorewa, né le en Rhodésie du Sud et mort le à Harare au Zimbabwe, est un évêque méthodiste et homme politique, Premier ministre de Zimbabwe-Rhodésie du 1er juin au .

Abel Muzorewa
Illustration.
Fonctions
Premier ministre rhodésien
–
(6 mois et 11 jours)
Président Josiah Zion Gumede
Prédécesseur Ian Smith
Successeur Robert Mugabe
Biographie
Nom de naissance Abel Tendekayi Muzorewa
Date de naissance
Lieu de naissance Umtali, Rhodésie du Sud
Date de décès
Lieu de décès Harare, Zimbabwe
Nationalité Drapeau du Zimbabwe }Zimbabwéenne
Parti politique United African National Council
Religion méthodiste

Abel Muzorewa
Premiers ministres rhodésiens

Origines

Fils aîné d'une famille de neuf enfants, Abel Muzorewa est né en 1925 dans la colonie britannique de Rhodésie du Sud le , à Umtali[1] - [2].

Après une scolarité dans une école missionnaire puis à l'école méthodiste de Umtali, il devient instituteur à Murewa de 1943 à 1947 avant de commencer à prêcher, de suivre des études théologiques et d'être ordonné en août 1953[1]. De 1955 à 1958, le révérend Muzorewa est pasteur à Chiduku près de la ville de Rusape.

Il poursuit des études en religion chrétienne en Rhodésie et aux États-Unis où il obtient un master[2] en philosophie et religion. En juillet 1963, il devient le pasteur de Umtali puis un an plus tard est nommé directeur national du mouvement de la jeunesse chrétienne.

Évêque et militant politique anti-colonial

En 1966, il devient secrétaire du mouvement chrétien étudiant et en 1968 il est consacré en tant qu'évêque[1] de l'église méthodiste unie de Rhodésie. Abel Muzorewa voyage et fait preuve de sympathie avec les activités des mouvements nationalistes en Afrique australe. Cela lui valut en 1971 d'être refoulé à la frontière du Mozambique et renvoyé à Salisbury dans un train de wagons à bestiaux[1].

Le président du Conseil national africain uni

En 1971, il forme avec le rĂ©vĂ©rend Canaan Banana le Conseil national africain, un mouvement opposĂ© Ă  la lutte armĂ©e contre le gouvernement rhodĂ©sien. En 1972, ils s'opposent avec succès au règlement anglo-rhodĂ©sien (nĂ©gociĂ© entre Ian Smith, le premier ministre rhodĂ©sien et Alec Douglas-Home, le ministre britannique des affaires Ă©trangères) [1] - [3] qui prĂ©voyait la diminution progressive de la sĂ©grĂ©gation raciale jusqu’à son abolition, l’extension du droit de vote aux Africains et leur participation progressive aux affaires politiques du pays. Mais le système envisagĂ© par les Anglais et le pouvoir blanc rhodĂ©sien introduisait des dĂ©lais significatifs. Il aurait ainsi fallu attendre encore 50 ans pour que les Noirs deviennent prĂ©dominants au Parlement.

Muzorewa devient alors un leader national, un interlocuteur et une personnalité internationale reconnue. En 1973, Abel Muzorewa, fut ainsi l'un des 6 lauréats du Prix des droits de l'homme des Nations unies. En août 1973, Muzorewa négocia avec Smith et accepta les termes de l'accord proposé par Douglas-Home l'année précédente[4]. Mais son parti, L'UANC désavoua cette décision en mai 1974 mais les deux hommes continuèrent à échanger de manière sporadique[4].

En décembre 1974, peu après la conférence de Lusaka en Zambie, entre le gouvernement rhodésien et les leaders nationalistes noirs rhodésiens, (une conférence patronnée par 3 chefs d'états africains), (Kenneth Kaunda, le président de la Zambie, Julius Nyerere, le président de la Tanzanie et Seretse Khama, le président du Botswana), les mouvements de guérilla alors interdits en Rhodésie comme l'Union nationale africaine du Zimbabwe (ZANU) du révérend Ndabaningi Sithole, l'Union du peuple africain du Zimbabwe (ZAPU) de Joshua Nkomo et le Front pour la libération du Zimbabwe (FROLIZI) de James Chikerema rejoignent alors l'UANC de Muzorewa.

Le 5 mars 1975, Abel Muzorewa annonça la suspension des pourparlers engagés entre le gouvernement rhodésien et le conseil national africain (qui deviendra le conseil national africain uni (UANC) en 1977) sur un règlement constitutionnel en Rhodésie au lendemain de la seconde arrestation de son allié, le révérend Ndabaningi Sitholé, accusé de planifier un complot contre les autres leaders nationalistes noirs rhodésiens[5],(raison officielle évoquée par le gouvernement rhodésien). Dix jours plus tard, le 15 mars, John Vorster, le premier ministre sud-africain, convoqua alors en urgence au Cap, Ian Smith et son ministre de la défense et des affaires étrangères P. K. van der Byl. Les Sud-Africains étaient extrêmement mécontents de cette action et soupçonnaient que la véritable raison était que les Rhodésiens s'opposaient à Sitholé et préféraient négocier avec le chef de la ZAPU, Joshua Nkomo[6]. Van der Byl n'a pas réussi à rassurer les Sud-Africains et un mois plus tard, le 4 avril 1975, moins de 48 heures après la visite éclair en Rhodésie du ministre sud-africain des affaires étrangères, Hilgard Muller[7], Sitholé est relâché pour qu'il puisse assister à la conférence des ministres de l'O.U.A. à Dar-Es-Salaam[8]. (Le retour en prison du révérend Sitholé profita aussi et surtout à Robert Mugabe qui fut désigné comme nouveau chef de la ZANU aux dépens de Sitholé lors d'une élection interne en prison en 1974), (ce que Sitholé n'a jamais reconnu). Mugabe, bénéficia également de l'assassinat de Herbert Chitepo le 18 mars 1975 en Zambie.

Le 9 août 1975, Muzorewa rencontra à Londres le ministre des affaires étrangères britannique James Callaghan, bien que le 2 avril 1975, dans une interview accordée au Washington Post, Muzorewa se montra particulièrement critique vis à vis du gouvernement britannique en déclarant, (nous avons perdu notre temps en nous adressant à la Grande-Bretagne), il jugea au contraire décisive " l'influence de l'Afrique du Sud sur la Rhodésie, estimant qu'elle est la véritable " source du pouvoir dans ce pays, Muzorewa estima par ailleurs que le premier ministre sud-africain, John Vorster pourrait être invité à présider les prochaines négociations entre les mouvements de libération et le gouvernement rhodésien)[9]. Ce qui fut le cas lorsque Vorster organisa en concordance avec Kenneth Kaunda le président de la Zambie, la conférence de Victoria Falls, le 25 août 1975, une conférence organisée à la frontière entre la Rhodésie et la Zambie, dans un wagon sud-africain à laquelle Muzorewa en tant que président de l'UANC, participa avec Ian Smith[10]. Au bout de 9 heures, cette conférence se solda par un échec[11].

Toujours en 1975, des dissensions internes entre les mouvements de libération nationale minent l'UANC sur la question de la lutte armée contre le gouvernement rhodésien. La ZANU se scinde en deux, Ndabanigi Sitholé fonde l'aile modérée du mouvement, l'Union nationale africaine du Zimbabwe - Ndonga et reste membre de l'UANC, alors que l'aile radicale de la ZANU dirigée par Robert Mugabe (qui fut désigné aux dépens de Sitholé comme nouveau chef de la ZANU lors d'une élection interne en prison en 1974 ce que Sitholé n'a jamais reconnu) rejette les négociations avec le gouvernement blanc et reprend la lutte armée, tout comme la ZAPU de Nkomo qui se sépare avec l'UANC le 4 septembre 1975. L'UANC devient alors le seul mouvement nationaliste noir rhodésien à rejeter la violence.

En 1976, comme lors de la conférence de Victoria Falls, 1 an plus tôt Muzorewa conduit la délégation de l'UANC dans laquelle figurera ses alliés Sitholé, et Chikerema, à la conférence de Genève, les deux autres délégations présentes à cette conférence furent celle du gouvernement rhodésien dirigé par Ian Smith et celle du Front Patriotique menée par Nkomo et Mugabe, cette conférence fut organisée par le Royaume-Uni qui en confia la présidence à Ivor Richard, ambassadeur du Royaume-Uni aux Nations-Unies. Après 6 semaines de négociations menées du 28 octobre au 14 décembre 1976, Cette conférence de Genève se solda également par un échec.

Les accords de Salisbury

La signature des accords de Salisbury en : Muzorewa au côté de Ian Smith, du Chef Jeremiah Chirau et du révérend Sitholé

Le , Abel Muzorewa, Ndabaningi Sithole et plusieurs leaders internes de Rhodésie parviennent à un accord avec Ian Smith[12]. Ces accords de Salisbury, annoncés dés le 16 février 1978 prévoyaient la formation d'un gouvernement de transition[12] dirigé par un conseil exécutif comprenant Muzorewa, Sithole, le chef Jeremiah Chirau et Ian Smith. Des élections sont programmées, sur la base « un homme une voix », tandis qu'une nouvelle constitution devait être rédigée.

Le gouvernement transitoire est rapidement mis en place le . Un rĂ©fĂ©rendum, auquel participent les seuls Blancs, est organisĂ© en janvier 1979 pour l'adoption d'une nouvelle constitution pour le nouvel État de Zimbabwe-RhodĂ©sie, entĂ©rinĂ©e par une majoritĂ© de 85 % des voix. En arrière-plan ont lieu plusieurs attentats terroristes, dont, Ă  six mois d'intervalle, deux avions civils d'Air Rhodesia abattus par la guĂ©rilla. La nouvelle constitution accorde Ă  la minoritĂ© blanche une franchise de 10 sièges au SĂ©nat et de 28 sièges Ă  la chambre, laquelle compte 100 sièges, ainsi qu'un quart des postes du cabinet ministĂ©riel pour une durĂ©e dĂ©terminĂ©e.

Premier ministre de Zimbabwe-Rhodésie

Les élections d', boycottées par la ZANU de Mugabe et la ZAPU de Nkomo, donnent la victoire à l'évêque Muzorewa et à l'UANC[13]. Muzorewa devient le nouveau Premier ministre à compter du , tandis que Josiah Zion Gumede obtient le poste honorifique de président de la République. Mais ni l'accord de Salisbury, ni les élections d' ni le nouveau gouvernement de Muzorewa ne font l'objet d'une reconnaissance internationale et sont même condamnés par l'ONU. Au contraire des espoirs des signataires de l'accord de Salisbury, la lutte armée menée par les mouvements de guérilla s'amplifie. Il eu aussi le boycott du parlement par un aillé de Muzorewa, le révérend Ndabaningi Sitholé, le chef de la Zimbabwe African National Union – Ndonga, un parti politique modéré, un boycott qui durera jusqu'au 31 juillet 1979. Le Zimbabwe African National Union – Ndonga intégrera le gouvernement de Muzorewa le 15 août 1979.

Le , Muzorewa effectue une visite à Washington pour tenter sans succès de plaider sa cause auprès du gouvernement démocrate de Jimmy Carter. Les gouvernements sud-africain et britannique finissent par convaincre Muzorewa de participer à de nouvelles négociations à Londres avec les partis de Mugabe et de Nkomo.

Lors des nĂ©gociations de Lancaster House menĂ©es Ă  Londres Ă  partir d', Muzorewa accepte de remettre la souverainetĂ© du Zimbabwe-RhodĂ©sie aux Britanniques. Le , Lord Christopher Soames est nommĂ© gouverneur de la colonie de RhodĂ©sie, mettant fin au mandat de Muzorewa et du prĂ©sident Josiah Zion Gumede. Les accords de Lancaster House sont signĂ©s le . De nouvelles Ă©lections auxquelles participent la ZANU de Mugabe et la ZAPU de Nkomo sont organisĂ©es en fĂ©vrier 1980. Après une courte campagne, marquĂ© par un climat de violence et d'intimidation, la ZANU de Mugabe remporte la majoritĂ© absolue des 80 sièges de dĂ©putĂ©s Ă  la nouvelle assemblĂ©e alors que l'UANC est laminĂ© et ne sauve que 3 sièges.

La spirale des Ă©checs politiques

Peu après l'indépendance officielle du Zimbabwe en avril 1980, Muzorewa est accusé de participer à un complot contre le nouvel État et est arrêté. Lors des élections générales de 1985, il tente de se faire élire dans la circonscription de Glen View mais est battu. En mars 1996, Muzorewa tente de défier Mugabe, qui contrôle les médias, à l'élection présidentielle et présente contre lui sa candidature[14]. Sous la pression, il la retire finalement 15 heures avant le début du vote. Son nom figurant néanmoins sur les bulletins de vote, il recueille officiellement 4,8 % des suffrages contre 92,7 % à Robert Mugabe.

En 2001, il se retire de la politique active[12]. De santé fragile, il meurt le quelques heures après avoir pris connaissance du décès de l'un de ses frères[15] - [16].

Notes et références

  1. « Mgr Abel Muzorewa (A.N.C.) », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  2. (en) « Bishop Abel Muzorewa », The Guardian,‎ (lire en ligne)
  3. « M. Banana sera le chef de l'État • L'ancien premier ministre, M. Garfield Todd est désigné comme sénateur », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  4. Berlyn 1978, p. 213-215.
  5. Rhodesia Jails a Black Leader; Parleys Broken Off in Response, article du New-York Times du 5 mars 1975
  6. Michael Knipe, "Sithole arrest linked with death list", The Times, Friday, 7 March 1975, p. 8
  7. La libération du Révérend Sithole : un nouveau " geste de détente, article du Monde du 7 avril 1975
  8. M. Ian Smith se déclare prêt à reprendre immédiatement les pourparlers avec les nationalistes, article du Monde du 21 avril 1975
  9. La libération du Révérend Sithole : un nouveau " geste de détente, article du monde du 7 avril 1975.
  10. La dernière chance de M. Ian Smith, article du Monde du 14 août 1975
  11. M. Ian Smith quitte la conférence constitutionnelle de la Rhodésie, article du Monde du 27 août 1975.
  12. « Zimbabwe: décès de l’ex-Premier ministre Abel Muzorewa », Jeune Afrique,‎ (lire en ligne)
  13. Jean-Claude Pomonti, « L'évêque Muzorewa est assuré de diriger le futur gouvernement biracial », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  14. Frédéric Chambon, « Au Zimbabwe, une élection en forme de plébiscite », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  15. (en-US) Alan Cowell, « Abel Muzorewa, Zimbabwe Cleric, Dies at 85 », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne)
  16. (en) « Abel Muzorewa Dies », The Herald (Zimbabwe),‎ (lire en ligne)

Liens externes

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