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Étienne Destot

Étienne Destot (né le à Dijon, mort le à Châtillon-sur-Seine) est un radiologiste et anatomiste français. Il est connu à la fois pour avoir ouvert l'un des tout premiers services de radiologie de France mais également pour avoir décrit, après radiographie, les premières fractures du poignet et du pied. Enfin, il fut l'un des pionniers français des techniques stéréotaxiques[1].

Étienne Destot
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Étienne Auguste Joseph Destot
Nationalité
Activités

Origine et cursus universitaire

Étienne Auguste Joseph Destot est né le à Dijon, d’un père marchand de tissu et d’une mère femme au foyer. Après une scolarité effectuée à Dijon, il se destina à une carrière de médecin militaire. Il s’inscrivit à la Faculté de Médecine à Lyon à l’âge de 20 ans mais, au cours d’une visite médicale à l'Hôpital du Val de Grâce, on découvrit qu’il était atteint d’une tuberculose pulmonaire. Il partit alors se soigner à Alger et s’y présenta au concours de l’internat : il y fut admis en 1886. Deux ans plus tard, il repassa le concours de l’internat des Hospices Civils de Lyon[1].

Avant la découverte des rayons X par Roentgen

En 1889, à l'instigation du professeur Victor Augagneur, futur maire de Lyon, dont il fut l'interne, Destot s'inocula le psoriasis avec succès à des fins de recherches sur la contagiosité de cette maladie inflammatoire. Il décrivit lui-même l’évolution de son mal à la Société des sciences médicales de Lyon[2]. Il effectua tout son cursus universitaire à Lyon.

En 1891, Destot fut nommé aide dans le laboratoire d'anatomie du professeur Léo Testut, l'un des pères de cette discipline[3]: c’est dans ce laboratoire qu’il fut formé à l’analyse anatomique.

En , Destot fut ensuite envoyé en mission à Neuville-les Dames (Ain) pour comprendre les mécanismes de la propagation d'une épidémie de diphtérie. Destot détermina les origines de la contamination[4]. Pour son dévouement, la médaille des épidémies lui fut décernée.

En 1892, le , Destot présenta ses travaux de thèse intitulée Études statistiques sur la mortalité dans les services de chirurgie des Hôpitaux de Lyon[5] dans laquelle il n’hésita pas à fustiger les pratiques de certains personnels de santé. Cet ouvrage lui valut de nombreuses inimitiés auprès de certains médecins lyonnais.

En 1893, Destot entra dans le service de clinique médicale du professeur Raphaël Lépine où il s’initia aux applications médicales de l’électricité. En particulier, après quelques mois d’étude seulement, Destot exposa en 1894 ses travaux sur la cataphorèse électrique, c'est-à-dire les propriétés de certains courants électriques pour traiter les rhumatismes, la goutte et pour améliorer la pénétration de certains médicaments[6].

Les premiers clichés radiographiques et développements technologiques

Les 5 et , c'est-Ă -dire environ un Ă  deux mois après la dĂ©couverte des rayons X par Wilhelm Conrad Roentgen, Destot fit fonctionner un tube de Crookes fourni par les frères Lumière devant la SociĂ©tĂ© des sciences mĂ©dicales de Lyon et rĂ©alisa plusieurs clichĂ©s radiographiques [7] - [8]. Destot crĂ©a l’un des tout premiers laboratoires de radiologie de l’Histoire en occupant une boutique dĂ©saffectĂ©e d’un bouquiniste situĂ©e au rez-de-chaussĂ©e de l'HĂ´tel-Dieu de Lyon et s’ouvrant sur les quais du RhĂ´ne. Cet antre devint « la boutique de Destot »[9]. Dans sa « boutique », Destot effectua des milliers de radiographies dont de nombreuses sur des patients que lui envoyait le chirurgien, Louis LĂ©opold Ollier (1830–1900)[10]. De plus, il proposa d'innombrables dĂ©veloppements technologiques sur les tubes Ă  rayons X ou sur la prise ou l'analyse de l'image[1]. En particulier,

  • La machine de Destot : Destot remarqua que la haute tension nĂ©cessaire Ă  l’obtention des rayons X et gĂ©nĂ©ralement obtenue par les bobines d’induction (notamment celles de Ruhmkorff) pouvait ĂŞtre aussi produite par des machines Ă©lectrostatiques surpuissantes. Il mit ainsi au point une machine de type Whimshurst avec 12 plateaux mobiles de 55 centimètres de diamètre et tournant Ă  700 tours par minute[11].
  • Le stĂ©rĂ©oscope radiographique de Destot : Destot fut Ă©galement l’un des premiers Ă  dĂ©velopper des techniques stĂ©rĂ©oscopiques de la radiographie pour obtenir une image en 3 dimensions. Son système Ă©tait notamment basĂ© sur 2 Ă©crans placĂ©s Ă  des angles connus. Les principes de la stĂ©rĂ©oscopie furent particulièrement utiles pour la radiologie de guerre en 1914-1918[11].
  • L’orthodiagraphe de Destot : afin de mesurer pour la première fois le rapport cardiothoracique, Destot fabriqua un stĂ©rĂ©ographe composĂ© dans grand Ă©trier dont une branche porte le tube Ă  rayons X et l’autre un Ă©cran au centre duquel se trouve fixĂ© un crayon qui est mobile et sert Ă  dessiner des contours observĂ©s sur une feuille de papier millimĂ©trĂ©e situĂ© derrière l’écran[12].
  • Les premières investigations radiographiques des viscères : Avec l'aide de LĂ©on BĂ©rard, Destot fut sans doute l'un des premiers mĂ©decins Ă  injecter des sels mĂ©talliques de composition diverse dans les vaisseaux pour opacifier la circulation viscĂ©rale[13].
  • L’endoscopie radiographique : en 1897, Destot modifia des tubes pour pouvoir sonder l’intĂ©rieur des cavitĂ©s anales, buccales et vaginales. Le principe consistait Ă  considĂ©rer le tube comme un système unipolaire et en reliant le patient Ă  la terre[14].
  • La radiocinĂ©matoscopie : Destot fut l’un des premiers Ă  tenter d’appliquer le cinĂ©matographe en radiologie afin de voir les organes vivre et bouger. Malheureusement, les nombreuses difficultĂ©s techniques le firent abandonner cette entreprise originale[15].

 Apport dans la radiographie articulaire et osseuse

Étienne Destot contribua très significativement au développement de l'orthopédie et fut notamment le premier médecin à employer le terme « pilon » dans la littérature orthopédique en 1911[16].

Destot Ă©tudia les lĂ©sions du poignet et de l’extrĂ©mitĂ© infĂ©rieure du radius. Ce travail fit l’objet d’un premier livre : « Le poignet et les accidents du travail », paru en 1905[17]. Il fut Ă©galement le co-auteur d’un ouvrage sur les « Traumatismes du coude chez l’enfant » en 1909[18]. Il scruta Ă©galement les diffĂ©rentes fractures possibles de l’astragale et rĂ©digea un autre ouvrage : Â« Traumatismes du pied et rayons X » Ă©ditĂ© en 1911[19]. Il met ainsi en Ă©vidence ce concept tout Ă  fait nouveau pour l’époque, des fractures sans dĂ©placement en montrant les lĂ©sions de l’astragale et aussi une fracture assez particulière, marginale postĂ©rieure du tibia, qui porte encore le nom de fracture de Destot[1].

Destot et la Grande Guerre

En 1913, atteint par des radiodermites aux mains, il est contraint de cesser ses activités de radiologue : il part alors pour Paris où il deviendra expert près le tribunal de la Seine.

Quand la guerre éclata, Destot avait 50 ans et donc ne pouvait prétendre à aucun service sur le front. Pourtant, il écrivit au responsable de l’Armée :

« J'ai l’honneur de vous adresser une supplique et j’ose espérer que vous voudrez bien l’accueillir avec bienveillance. Réformé en 1886 comme élève du Service de Santé Militaire, je désirerais être réintégré sous les contrôles de l’armée, soit comme chirurgien, soit comme radiographe, soit comme simple conducteur d’automobile, j’ai cinquante ans et malgré les brûlures occasionnées par la radiographie, je puis encore rendre des services »[1].

Nommé aide-major, il fut envoyé à Epernay, puis à Château-Thierry. Après un bref passage à Paris, il fut transporté à Dijon puis revint à Paris en , d'abord à l'Hôpital auxiliaire 101, puis au Grand-Palais jusqu’en [1].

Épuisé, il choisit Châtillon-sur-Seine en Bourgogne, attiré par d’anciens amis et des souvenirs d’enfance. Après une promenade le , il succomba à une maladie coronarienne au 57 de la rue de Chaumont. La tombe d’Etienne Destot se trouve aujourd’hui à Arc-et-Senans dont sa belle-famille (Les Aigrot) est originaire. Étienne Destot ne laissera pas de descendants directs[1].

Un touche-à-tout de génie

Statue de Léopold Ollier, Musée Ollier des Vans

Passionné d’art et de culture, Destot réalisa une impressionnante statue de son maître Louis Léopold Ollier « qui calme l’angoisse d’une mère agenouillée lui présentant le pied bot de son enfant. On lui doit aussi le buste d'Émilie Rozès situé dans l'entrée d'honneur de la mairie de Sainte-Foy-lès-Lyon. Il participa aussi à quelques caricatures et compositions de poèmes ou de chansons qui firent sa popularité à la Faculté de Médecine. Dans la rue, outre son autre "boutique" de photographie (le « Bi »), Destot se distingua aussi en circulant un temps dans une voiture au carénage aérodynamique de sa fabrication - aucune photographie n’est restée[1].

Publications

  • De la cataphorèse Ă©lectrique, ses applications thĂ©rapeutiques, Imprimerie L. Bourgeon Ă  Lyon, , 31 p. (lire en ligne).

Postérité

Espace de Destot
  • Espace de Destot : Espace dans le poignet limitĂ© par l'hamatum, l'os capitatum, l'os triquetrum et l'os lunatum[20] - [Note 1].
  • Fracture de Destot : Fracture assez particulière, marginale postĂ©rieure du tibia[1].
  • Sa vie et son Ĺ“uvre ont fait l'objet d'une thèse de mĂ©decine en 1995[21].
  • Mort pour la France, son nom est inscrit au monument aux morts d'Arc-et-Senans[1].
  • Son nom est gravĂ© sur le MĂ©morial de radiologie (de), qui commĂ©more les pionniers et martyrs de la radioactivitĂ© (physiciens, chimistes, mĂ©decins, infirmiers, laborantins etc), victimes parmi les premiers utilisateurs des rayons X dans le monde entier. Le mĂ©morial qui comportait Ă  l'origine 159 noms a Ă©tĂ© Ă©rigĂ© dans le jardin de l'ancien hĂ´pital Saint-Georges (de) Ă  Hambourg (Allemagne) et a Ă©tĂ© inaugurĂ© le [22].
  • MĂ©morial de radiologie, Clinique Asklepios Saint-Georges Ă  Hambourg, (Allemagne)
    MĂ©morial de radiologie, Clinique Asklepios Saint-Georges Ă  Hambourg, (Allemagne)

Notes et références

Notes

  1. Cet espace fait référence à l'emplacement où les clous de la crucifixion de Jésus-Christ ont percé son poignet

Références

  1. Foray, N., Amiel, M. et Mornex, R., « Etienne Destot (1864-1918) ou l’autre père de la radiologie française », Cancer Radiothérapie,‎ , in press
  2. Destot, E., « Origine parasitaire du psoriasis », Comptes-rendus de la Société des sciences médicales de Lyon. La Province médicale,‎ séance du 29 mai 1889
  3. Testut, L., Traité d'anatomie humaine, Paris, Édition Octave Doin,
  4. Destot E., Relation d'une épidémie de diphtérie à Neuville-les-Dames (Ain), Lyon, Éditions Delaroche, .
  5. Destot, E., Thèse de médecine : Études statistiques sur la mortalité dans les services de chirurgie des hôpitaux de Lyon, Lyon, Université de Lyon, .
  6. Destot, E., « De la cataphorèse électrique. Lyon médical 1894;38:466-469 », Lyon médical,‎ , p. 38, 466-469.
  7. Destot, E., « Clichés photographiques pris avec la méthode de roentgen. Comptes-rendus de la Société des sciences médicales de Lyon. Séance du 5 février 1896 », Lyon médical,‎ , p. 81:211-212.
  8. Destot, E., « Fonctionnement d'un tube de crookes. Comptes-rendus de la société des sciences médicales de Lyon. Séance du 25 février 1896 », La Province médicale,‎ , p. 11:107-108.
  9. Briau, E., « Étienne Destot. », Lyon médical,‎ , p. 75-77.
  10. Cat.inist.fr Étienne Destot (1864-1918), chirurgien, anatomiste, fondateur de la radiologie lyonnaise, etc.
  11. Destot, E., « Technique radiographique : Procédés et appareils du Dr. Destot. », Revue illustrée de polytechnique médicale et chirurgicale.,‎ , p. 12:68-74.
  12. Destot, E., « Topographie cardio-pulmonaire », Lyon médical,‎ , p. 35:381-382.
  13. Destot E. et Bérard. L., « Société des sciences médicales de Lyon - séance du 11 novembre 1896. », Lyon médical,‎ , p. 88:392.
  14. Destot, E., Titres et travaux scientifiques., Lyon, Édition Paul Legendre et Cie, .
  15. Destot, E., « Stéréo-cinématoscope », Province médicale,‎ , p. 14:261-262.
  16. eMedicine Fractures du pilon
  17. Destot, E., Le poignet et les accidents du travail., Paris, Vigot Frères,
  18. Destot E., Vignard P. et Barlatier R., Les fractures du coude chez l'enfant., Paris, Doins et fils, .
  19. Destot E., Traumatismes du pied et rayons X, Paris, Masson,
  20. Wiktionary Definition of eponym
  21. Boutineau L., Thèse: Etienne destot ou la naissance de la radiologie à lyon de 1895 à 1918., Lyon, Université de Lyon,
  22. Olivier Renault, « Les pionniers de l’Ouest victimes des rayons X », sur ouest-france.fr, (consulté le ).

Liens externes

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