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Émeutes d'Oujda et de Jerada

Les Ă©meutes d'Oujda et de Jerada sont une sĂ©rie de pogroms contre les Juifs dans les villes de Oujda et de Jerada, au nord-est du Maroc, qui a Ă©clatĂ© le  après un coup de poignard portĂ© par un juif Ă  un musulman. 42 Juifs y ont Ă©tĂ© tuĂ©s (cinq Ă  Oujda et 37 Ă  Jerada[1]), dont le rabbin de la communautĂ© de Jerada et sa famille, et un citoyen français non-juif. On dĂ©nombre au total 60 blessĂ©s[2].

Émeutes d'Oujda et de Jerada
Date
Lieu Oujda et Jerada (Empire chérifien)
Victimes Juifs du Maroc
Type Pogrom
Morts 43, dont :
42 Juifs (37 Ă  Jerada et 5 Ă  Oujda)
1 citoyen français non-juif
Blessés 60
Motif Déclaration d'indépendance de l'État d'Israël
Participants Population musulmane
CoordonnĂ©es 34° 41′ 12″ nord, 1° 54′ 41″ ouest
GĂ©olocalisation sur la carte : Maroc
(Voir situation sur carte : Maroc)
Émeutes d'Oujda et de Jerada

Contexte

Le  est proclamĂ©e la dĂ©claration d'indĂ©pendance de l'État d'IsraĂ«l. De nombreux Juifs du Maroc Ă©taient intĂ©ressĂ©s Ă  immigrer vers le nouvel État, et la ville d'Oujda, situĂ© Ă  proximitĂ© de la frontière avec l'AlgĂ©rie, devint un point de passage entre le Maroc et l'AlgĂ©rie, qui servait de point de dĂ©part vers IsraĂ«l pour des centaines de Juifs. Les musulmans du Maroc, pour leur part, sympathisaient avec la lutte gĂ©nĂ©rale du monde arabe contre l'État d'IsraĂ«l, et ne voyaient pas d'un bon Ĺ“il le dĂ©part des Juifs vers IsraĂ«l. Les mĂ©dias nationalistes marocains (et en particulier le journal Al Alam) publiaient des articles hostiles au dĂ©part des Juifs. Le roi du Maroc Mohammed V s'exprima dans un discours anti-israĂ©lien au lendemain de la DĂ©claration d'indĂ©pendance, dans lequel il a notamment appelĂ© les Juifs du Maroc Ă  « Ă©viter toute dĂ©marche qui serait perçue comme solidaire envers l’agressivitĂ© sioniste, ce qui pourrait porter atteinte aux droits ou Ă  la citoyennetĂ© marocaine des Juifs du Maroc ». Il a Ă©galement appelĂ© Ă  maintenir la stabilitĂ© et le calme.

Les émeutes ont eu lieu alors que le Maroc était sous protectorat français depuis 1912, protectorat qui allait se terminer en 1956. Au cours de cette période, la sécurité des Juifs au Maroc connut une amélioration par rapport à la période pré-coloniale, à l'exception des événements de 1912 lors de la mise en place du Protectorat. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la loi portant statut des Juifs du régime de Vichy s'applique aux Juifs du Maroc, mais après la guerre, le statut discriminatoire est aboli. Au cours du protectorat français les différences culturelles et politiques entre Juifs et Musulmans au Maroc augmentent. Tandis que les Juifs, pour la plupart, ont tendance à s'assimiler à la culture française et à adopter la langue du pays colonisateur, en particulier sous l'influence de l'Alliance israélite universelle, beaucoup des musulmans du Maroc engagent une lutte nationale contre la France. Ces différences ont également contribué à l'augmentation de l'hostilité contre les Juifs. Toutefois, le niveau de vie des Juifs marocains est à l'époque « inférieur à celui de leurs coreligionnaires européens »[1].

Les Ă©meutes

Oujda

Dans les jours précédents les émeutes, des menaces de mort envers les Juifs sont entendues. Au premier jour des émeutes, le , les employés musulmans dont les patrons sont juifs ne se rendent pas au travail. Dans la matinée, à la suite d'une altercation, un juif poignarde un musulman à Oujda[3]. En l'absence de réactions des autorités françaises, la situation dégénère en émeute à 9h30 du matin.

Une foule armée de haches et de couteaux se rassemble au marché juif et tue cinq personnes, dont quatre Juifs et un postier français qui a vraisemblablement tenté de protéger les victimes[3]. La police maîtrise l’événement et la foule se disperse.

Jerada

Le lendemain, le , des émeutes ont aussi lieu dans la ville voisine de Jerada, située à une soixantaine de kilomètres d'Oujda, après que la nouvelle des évènements de la veille eut été colportée par des voyageurs. L'économie Jerada repose sur le charbonnage et elle vient de vivre une grève durement réprimée[3]. Un incendie mais aussi la vente d'un ticket de loterie non gagnant d'un juif à un musulman sont à l'origine d'un pogrom qui se termine par la quasi destruction de la petite communauté juive de la ville[3]. Trente-huit Juifs sont tués, et parmi elles le rabbin de la communauté, Moché Cohen et sa famille. Le nombre de personnes tuées en deux jours atteint un total de 42, dont 10 femmes et 10 enfants, et le bilan des blessés est de 55. Les émeutes mènent à des pillages de magasins, aussi bien arabes que juifs[3].

Trente-cinq des musulmans ayant participĂ© aux Ă©meutes sont jugĂ©s devant un tribunal militaire français de Casablanca. Deux des accusĂ©s sont condamnĂ©s Ă  mort, deux aux travaux forcĂ©s Ă  perpĂ©tuitĂ©, et le reste Ă  diverses sanctions. Les Ă©meutes choquent profondĂ©ment la communautĂ© juive du Maroc, et l'annĂ©e d'après, 18 000 d'entre eux immigrent en IsraĂ«l.

Références

  1. Abdelkader Guitouni, « Le Maroc oriental de l'établissement du protectorat à la décolonisation : les mutations d'un carrefour ethnique frontalier », Le territoire, lien ou frontière ?, Université Paris-IV, 2-4 octobre 1995.
  2. (en) « This Day in Jewish History / Anti-Jewish rioting in Morocco leaves 44 dead », sur Haaretz.com (consulté le )
  3. Robert Assaraf, Mohammed V et les Juifs du Maroc à l'époque de Vichy, Plon (réédition numérique FeniXX), , 287 p. (ISBN 978-2-259-23855-7, lire en ligne)

Lien externe

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