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Élisabeth Turgeon

Marie-Élisabeth Turgeon (Saint-Étienne-de-Beaumont, - Rimouski, ) est une religieuse canadienne fondatrice des sœurs de Notre Dame du saint Rosaire et vénérée comme bienheureuse par l'Église catholique.

Marie-Élisabeth Turgeon
Image illustrative de l’article Élisabeth Turgeon
Bienheureuse, religieuse, fondatrice
Naissance , Beaumont, Haut-Canada, Empire britannique
Décès , Rimouski, Québec, Canada
Nationalité Canadienne
Ordre religieux SĹ“urs de Notre Dame du saint Rosaire (fondatrice)
BĂ©atification , Ă  Rimouski, par le cardinal Angelo Amato
Vénérée par l'Église catholique
Fête 17 août

Jeunesse et famille

L'église de Saint-Étienne-de-Beaumont où Marie-Élisabeth Turgeon a été baptisée le .

Marie-Élisabeth Turgeon est née le à Saint-Étienne-de-Beaumont dans la province du Bas-Canada. aujourd'hui la province de Québec. Louis-Marc Turgeon épouse Angèle Labrecque le [1].

La famille Turgeon est originaire de Saint-Jean-de-Mortagne au Perche et arrive au Québec, par Charles Turgeon, vers 1662[2].

Agriculteur et notable de la paroisse, son père eut, entre autres, à jouer un rôle important dans sa communauté à titre de marguillier et président de la Commission scolaire[3].

Cette famille de 9 enfants, croyante et pratiquante, reçoit une Ă©ducation des plus solides oĂą la prière est Ă  l'honneur. Dès son plus jeune âge, elle visite rĂ©gulièrement l'Ă©glise de Beaumont et le Saint-Sacrement[4]. L'Ă©preuve la touche particulièrement Ă  l'âge de 15 ans lorsque son père dĂ©cède prĂ©maturĂ©ment. Elle doit ainsi renoncer Ă  demander son entrĂ©e comme pensionnaire dans un couvent pour complĂ©ter ses Ă©tudes[5].

Formation académique

Élève des Ursulines de Québec, elle a fréquenté l'École normale Laval de Québec de 1860 à 1862, alors que l'abbé Jean Langevin en était le principal[6]. Elle fut diplômée en 1862.

Enseignante

Elle a enseigné successivement à Saint-Romuald, à Saint-Roch de Québec et à Sainte-Anne-de-Beaupré[6].

Sainte-Anne-de-Beaupré (1873-1874)

L'église de Sainte-Anne-de-Beaupré, tout juste avant sa démolition en 1878, comme elle apparaissait lors de la visite d'Élisabeth Turgeon en 1873-1874[7].

À l'été 1873, c'est dans cette dernière paroisse que celle-ci confia ses espoirs de guérison en la bonne sainte Anne. Ne pouvant compter sur la médecine ou les moyens humains pour fins de guérisons, elle mit toute sa confiance dans cette Sainte, pour qui les ancêtres percherons ont importé la dévotion au pays. Sainte-Anne-de-Beaupré, pays des miracles, s'avérait une place de choix pour y prendre direction d'une petite école sise entre la rivière aux Chiens et l'église, non loin (deux milles) de la fameuse basilique Sainte-Anne-de-Beaupré édifiée en l'honneur de la grande Thaumaturge. Pour se rendre favorable à sainte Anne, celle-ci enseignera pendant un an à cette école[8].

Dans ce lieu reculé, Élisabeth découvrira une pauvreté sans précédent. Les Rédemptoristes qui s'y installeront 6 ans plus tard décriront l'endroit comme étant reculé, complètement hors du monde, où seuls les animaux sauvages subsistent et ressemblant plus en hiver à un désert abandonné et terrifiant qu'à un aimable et agréable ermitage. Le Père Klauss, supérieur des Rédemptoristes, définit le peuple comme étant d'une ignorance effrayante : de loin la plus grande partie ne peut ni lire, ni écrire. Plus grande encore que l'ignorance est la pauvreté des gens ; ils sont misérables au sens fort du terme. De surcroît, la terre est mauvaise, peu fertile. Seul espoir au tableau, la région de Sainte-Anne est totalement catholique[9].

Les mois passèrent et la bonne sainte Anne ne l'oublia pas. Son état de santé s'améliora au point où, pour remercier sainte Anne de son intercession auprès de Dieu, Élisabeth ouvre pendant six mois une classe gratuite pour les pauvres. C'est durant ce dernier semestre de 1874 que Jean Langevin lui adressera une seconde lettre la pressant d'acquiescer à sa demande. Étant encore souffrante, elle s'est dite heureuse de ne pouvoir refuser la demande sous bon prétexte de sa promesse, redoutant la charge d'une classe nombreuse à Rimouski[8]. Monseigneur connaissait fort bien les qualités exceptionnelles de son ancienne élève. Tenace, ce dernier avait des vues bien à lui pour cette femme d'exception...

Vie religieuse

Le , à l'invitation de Jean Langevin, premier évêque du diocèse de Rimouski, elle entra chez les Sœurs des Petites-Écoles, dans le but de former des institutrices qualifiées pour les écoles des paroisses du diocèse de Rimouski. Elle fit profession des vœux de religion, avec 12 compagnes, le [6].

Directrice et fondatrice

RĂ©sidence des SĹ“urs de Notre-Dame du Saint-Rosaire Ă  Rimouski.

Le , elle est nommée première supérieure de la congrégation des Sœurs des Petites-Écoles, qui devient en 1891, la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire. De 1875 jusqu'à sa mort en 1881, elle a consacré plus particulièrement son œuvre à assurer l'encadrement et la pérennité des établissements d'enseignement du diocèse de Rimouski.

Première fondation à Saint-Gabriel-de-Rimouski

Cette femme de santé fragile mais dotée d'une vive intelligence, donnera sa vie à l'établissement des premières écoles de ces petits villages qui jadis très pauvres, éloignés et venant tout juste d'être colonisés, font aujourd'hui la fierté de nos belles régions québécoises. Il suffit d'évoquer le cas de Saint-Gabriel-de-Rimouski, où en , eut lieu l'établissement d'une première mission. Les deux premières missionnaires y découvrent leur première école : La maison mesure 26 x 20 pieds dans un petit village perdu en pleine forêt. Neuf pieds sont réservés pour la chambre des résidentes. Les fenêtres ne sont pas posées, une ouverture sur le toit attend le tuyau de l'unique poêle, mais laisse aussi entrer les vents et la neige. Une couche de glace couvre le plancher. Le froid est extrême dans cette école construite à la hâte[10].

Missions de Port-Daniel et Saint-Godefroi

Les conditions d'Ă©tablissement de fondation ne s'amĂ©liorent pas pour nos bonnes sĹ“urs. De surcroĂ®t, elles devront affronter de grandes distances pour l'Ă©poque avec des moyens de transport sans grand confort (train et bateau). C'est plus de 386 km Ă  parcourir pour atteindre les deux nouvelles fondation de Port-Daniel et Saint-Godefroi. MalgrĂ© l'avis contraire de son mĂ©decin, Élisabeth voulut prĂ©sider elle-mĂŞme Ă  l'installation des sĹ“urs dĂ©signĂ©es pour ces localitĂ©s lointaines[11]. Elle part le . Le voyage fut extĂ©nuant. Particulièrement en mer oĂą elle en fut très mal accommodĂ©e. Ă€ son retour, elle dĂ©couvrit qu'elle avait trop exigĂ© de sa faible constitution. DĂ©jĂ  affaiblie par un dĂ©but de tuberculose pulmonaire, elle ne devait pas se relever de cet excès d'Ă©puisement[12]. Mais le mal sournois accomplira son Ĺ“uvre et le reste sera l'histoire d'une longue et lente agonie dans des circonstances non moins hĂ©roĂŻques...

Problèmes de santé et décès

Incendie du 2e séminaire de Rimouski en 1881, inauguré en 1876 par Jean Langevin.
Le Grand Vicaire du diocèse de Rimouski, Edmond Langevin, frère de Jean Langevin

De son lit, elle continua à diriger, dans les moindres détails, les activités de la congrégation. Le , son confesseur et le médecin furent appelés d'urgence à la suite d'hémorragies qui se répétèrent. Le , vers minuit, une crise plus grave fit craindre la fin et son confesseur lui récita la prière des agonisants[13].

Le , le récent séminaire, fruit de tant de sacrifices par le clergé et la population, fut rasé par les flammes[14]. Comme elle souffrait davantage du mal des autres que de sa propre maladie, elle ira jusqu'à offrir en gage de générosité la demeure qu'occupait la congrégation à Jean Langevin pour que le séminaire puisse reprendre son œuvre. Elle fut donc contrainte à superviser de son lit toute l'opération de déménagement de la congrégation dans ses nouveaux locaux. Il fallut attendre le avant de transporter la malade dans le nouvel emplacement de la congrégation.

Le , se souvenant que la fondatrice avait obtenu jadis de la bonne sainte Anne des faveurs de soulagement et de guérison, la communauté passa la journée de la fête de la Sainte à la chapelle. Malgré les prières continues à haute voix, la chère Mère ne reçoit aucun soulagement[15]. Au début du mois d'août, le mal reprit de la virulence. La malade était trop faible pour se lever. Le , la fondatrice est dans un état de grande faiblesse. Le 14, monsieur le Grand Vicaire, Edmond Langevin, fait communier la malade en viatique[15]. Le , fête de l'Assomption, deux jeunes professes et deux postulantes sont admises auprès de la mourante : « La chère Mère sourit aux deux jeunes professes ; celles-ci prolongent leur visite. Elle console, leur recommande la soumission à l'adorable volonté de Dieu... Sa voix est si faible, ses paroles sont si douces, ses regards si tendres, que toutes voudraient rester près de sa couche... Elle porte un long regard sur les deux postulantes, puis elle dit : Ces chères enfants sont biens jeunes pour rester orphelines[16].» Le , le docteur Fiset vient la voir : « Mourrais-je aujourd'hui ? » lui demande-t-elle. Il lui répondit : « Si vous passez la journée, vous ne passerez pas la nuit prochaine. » En lui serrant la main, il dit : « Vous paraissez si contente de mourir[17]. » « Le Grand Vicaire s'agenouille auprès du lit funèbre ; il prie en silence puis se tournant vers les sœurs, il dit d'un ton grave et ému : Laissez-la partir » « L'agonie est courte et paisible ; elle expire, il est minuit et vingt minutes, le mercredi[18]. »

BĂ©atification

Son œuvre ayant été remarquée, la cause de canonisation d'Élisabeth Turgeon a été ouverte au diocèse de Rimouski en 1990 puis au Vatican en 1994[19]. Le [20], le pape François reconnaît par décret officiel l'héroïcité de ses vertus faisant d'elle la première diocésaine de Rimouski à être reconnue comme vénérable[21] par le Vatican. Cette reconnaissance précède la béatification et la canonisation éventuelles.

En , le pape François a promulgué un décret reconnaissant un miracle qui lui est attribué[22].

Sa béatification a été faite le à Rimouski, au Québec[23].

Notes et références

  1. Giselle Huot, Un rêve inouï...des milliers de jeunes, Mère Marie-Élisabeth, 1840-1881), fondatrice de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire de Rimouski, Sainte-Foy, Éditions Anne Sigier, 1991, p. 43.
  2. Giselle Huot, Un rêve inouï...des milliers de jeunes, Mère Marie-Élisabeth, 1840-1881), fondatrice de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire de Rimouski, Sainte-Foy, Éditions Anne Sigier, 1991, p. 39.
  3. Louis-Marc Turgeon fait le rapport de l'élection des commissaires au Dr J.-B. Meilleur, Beaumont, 6 juillet 1846, ANQ-Q, Éducation, L.R., E-13/294, 773 (1846).
  4. Élisabeth Turgeon (Mère Marie-Élisabeth) - Hier et Aujourd'hui, Centre Élisabeth-Turgeon de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire, Vol. VI, no. 7 Printemps 2013, p. 73-74. Bibliothèque nationale du Québec-ISBN D 373098. Le tout avec la permission (1989) de Mgr Gilles Ouellet, archevêque de Rimouski.
  5. Élisabeth Turgeon (Mère Marie-Élisabeth) - Hier et Aujourd'hui, Centre Élisabeth-Turgeon de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire, Vol. VI, no. 9 Automne 2013, p. 97. Bibliothèque nationale du Québec-ISBN D 373098. Le tout avec la permission (1989) de Mgr Gilles Ouellet, archevêque de Rimouski.
  6. Turgeon 2010, p. 292. Vol. V, no. 5, Automne 2010.
  7. Site du sanctuaire Sainte-Anne
  8. Giselle Huot, Un rêve inouï...des milliers de jeunes, Mère Marie-Élisabeth, 1840-1881), fondatrice de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire de Rimouski, Sainte-Foy, Éditions Anne Sigier, 1991, p. 131.
  9. Lettre du Père Klauss au supérieur général des Rédemptoristes, dans Jean-Pierre Asselin, les Rédemptoristes au Canada...: 24-24.
  10. Élisabeth Turgeon (Mère Marie-Élisabeth) - Hier et Aujourd'hui, Centre Élisabeth-Turgeon de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire, Vol. VI, no. 3 Printemps 2012, p. 25-26. Bibliothèque nationale du Québec-ISBN D 373098. Le tout avec la permission (1989) de Mgr Gilles Ouellet, archevêque de Rimouski.
  11. Tessier 1962, p. 147.
  12. Tessier 1962, p. 148.
  13. Tessier 1962, p. 172-173.
  14. Tessier 1962, p. 175.
  15. Tessier 1962, p. 183.
  16. Tessier 1962, p. 184.
  17. Tessier 1962, p. 185.
  18. Tessier 1962, p. 186.
  19. Jean-Charles Fortin, Antonio Lechasseur et al., Histoire du Bas-Saint-Laurent, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, 1993, Coll. « Les régions du Québec », no 5, p. 796.
  20. (it) Promulgazione di decreti della congregazione delle cause dei santi, 17.12.2007.
  21. Congrégation des causes des saints.
  22. Conférence des évêques catholiques du Canada, Les évêques reçoivent les rapports annuels de l’Organisme catholique pour la vie et la famille, de Développement et paix et du Conseil autochtone catholique du Canada, Conférence des évêques catholiques du Canada, 17 septembre 2014, page consultée le 18 septembre 2014
  23. Maurice Page, Canada: Élisabeth Turgeon béatifiée à Rimouski. 27 avril 2015.

Annexes

Bibliographie

  • Élisabeth Turgeon, Hier et aujourd'hui, vol. V, Centre Élisabeth-Turgeon de la congrĂ©gation des SĹ“urs de Notre-Dame du Saint-Rosaire, (ISSN 0847-0766), chap. 5, p. 292. Bibliothèque nationale du QuĂ©bec-ISBN D 373098. Le tout avec la permission (1989) de Mgr Gilles Ouellet, archevĂŞque de Rimouski. Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Albert Tessier, Les SĹ“urs des Petites-Écoles, 1872-1894, Rimouski, Maison mère des SĹ“urs de Notre-Dame du Saint-Rosaire, , 282 p. (prĂ©sentation en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Antonio Lechasseur, Jean-Charles Fortin et al., Histoire du Bas-Saint-Laurent, QuĂ©bec, Institut quĂ©bĂ©cois de recherche sur la culture, coll. « Les rĂ©gions du QuĂ©bec », , 292 p. (prĂ©sentation en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

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