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Zina Morhange

Zenaida « Zina » Morhange est une femme médecin française (, Lodz - , Paris). Connue dans la Résistance intérieure française sous le nom de Docteur Morhange, elle est déportée à Auschwitz-Birkenau où elle contribue à sauver de nombreuses prisonnières. Après la Libération, elle reprend son activité d’ortho-rhino-laryngologiste et témoigne à sa fille de son expérience concentrationnaire. Celle-ci évoque également cet épisode de la vie de sa mère dans un ouvrage publié en anglais.

Zina Morhange
Nom de naissance Zenaida Paley
Naissance
Lódz (Royaume du Congrès)
Décès
Paris (France)
Nationalité française
Profession
Famille

Jean Morhange (Ă©poux, 1907-1941) Jo Saltiel (Ă©poux, d. 1972)


Claude Morhange-Bégué (fille)

Biographie

Enfance et famille

Zinaïda, dite Zina, Paley naît le , à Lodz en Pologne, dans une famille juive originaire de Russie[1]. Elle est la fille de Struj Mojsze Paley et de Sarah Ryfka Paley[2], née Katz[3]. Arrivée en France avec sa famille, elle épouse Jean Morhange en 1935, un Juif lorrain[4] de deux ans son aîné et médecin comme elle. Jean Morhange est le frère du poète Pierre Morhange[5]. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, les époux Morhange habitent le village de Chamberet, en Corrèze, avec leur fille Claude ainsi que la mère de Zina. Comme nombre de Juifs, ils entrent dans la Résistance intérieure française[6]. Jean Morhange meurt dans un accident d'automobile en 1941[7].

Les années de guerre

Zina Morhange est donc mĂ©decin de campagne et, officieusement, du maquis[8]. Cependant, l'autre mĂ©decin du village, vichyste et accessoirement maire de Chamberet, estime souffrir d’une « compĂ©tition Â» qu’il lui serait aisĂ© d’éliminer, et la dĂ©nonce Ă  la Gestapo[9]. Le Docteur Morhange est arrĂŞtĂ©e tĂ´t dans la journĂ©e du [10] ; sa sĹ“ur, de passage Ă  Chamberet ce jour-lĂ , et sa mère rĂ©ussissent Ă  fuir par la porte arrière de la maison[8].

Claude, alors âgée de 7 ans, a été placée ce matin-là par sa mère chez les parents de l’une de ses camarades de classe, Andrée Balard, qui habite de l’autre côté de la rue[11]. Elle est envoyée à l’école comme tous les matins tandis que le Dr Mohange est interrogée par la Gestapo dans une classe réquisitionnée de cette même école et déclare ne pas savoir où se trouve sa fille.
Deux professeurs de Claude lui font quitter la classe pour la confier à une couturière du village, Marie, qui connaît sa famille. Marie cachera Claude chez elle, ainsi que sa grand-mère et sa tante. Elles passeront la nuit dans une grange avant d’être conduites le lendemain chez des paysans par le forgeron du village. Claude — qu’on fera passer pour une catholique nommée Jeanne Duval[12] — sera ensuite cachée dans un château tandis que sa tante trouvera refuge chez un pasteur protestant près de Castres, dans le Tarn, et sa grand-mère chez une ancienne patiente de sa fille.

MĂ©decin Ă  Auschwitz

Zina Morhange est déportée à Auschwitz de Drancy par le Convoi No.72, en date du . Immatriculée 80636, elle est affectée au Revier, l’« hôpital » du camp qui n'en a le plus souvent que les apparences, et est donc placée sous les ordres de Josef Mengele.
Elle s’efforce de traiter les dĂ©portĂ©es qui aboutissent dans ce qui est pour beaucoup le vestibule des chambres Ă  gaz, falsifiant les diagnostics synonymes de Selektion pour le gazage, libĂ©rant dans les plus brefs dĂ©lais les moribondes qui risqueraient sinon d’être transfĂ©rĂ©es Ă  l’« hĂ´pital spĂ©cial Â», et prodiguant ses soins quand elle le peut[13]. Elle procure ainsi de l'aspirine Ă  Rose Warfman (dĂ©portĂ©e dans le mĂŞme convoi qu’elle) après qu’elle a subi des injections de substances inconnues aux jambes lors d’une opĂ©ration expĂ©rimentale de Mengele pratiquĂ©e sans anesthĂ©sie.

Le retour

Lorsque Zina Morhange retourne à la maison de Chamberet après la Libération, Claude Morhange n’y retrouve pas sa mère[14]. Celle-ci revient des camps après treize mois d'absence, physiquement méconnaissable et éprouvée tant physiquement que moralement.

Contrairement à d’autres survivants, Zina Morhange parle à sa fille, devenue sa confidente. Elle lui raconte nuit après nuit, pendant des années, la marche forcée de Pologne en Allemagne, alors que les nazis battent en retraite, sa vie de médecin juive au Revier, ses efforts pour soigner au plus vite les mourantes qui y arrivent et leur éviter la Selektion, son désespoir également lorsqu’elle ne peut sauver ces femmes malades et démoralisées qui ont perdu le désir de survivre[15].

Cependant, le Docteur Morhange ne se livre qu’à sa fille ; elle ne couche pas ce qu'elle a vĂ©cu sur papier et dit mĂŞme : « Je n'ai pas envie d'Ă©crire Â»[16]. C’est donc au dĂ©tour de ses propres mĂ©moires que sa fille Claude, devenue Ă  son tour mère d’une fille de sept ans, Ă©voque le vĂ©cu de sa mère, trente ans après les faits. AchevĂ© Ă  la fin des annĂ©es 1970, le livre intitulĂ© Fragments d’une Enfance Ordinaire demeure Ă  ce jour inĂ©dit dans sa version originale. Une traduction en anglais parait en 1987 (annĂ©e de la mort du Docteur Morhange) aux États-Unis sous le titre Chamberet: Recollections from an Ordinary Childhood, puis en Angleterre en 1990 sous le titre The True Story of a Jewish Family in Wartime France[17]. En 1985, Zina Morhange-Saltiel, avait consignĂ© son propre tĂ©moignage dans le magazine DiffĂ©rences, conservĂ© depuis dans les archives du MRAP[18] - [19] - [20].

Selon Christophe Boltanski (20017), Zina Morhange ne pratique plus la médecine, depuis son retour d'Auschwitz. Elle possède un magasin de vétements à Marseille, qui appartenait à son deuxième mari, Joe Saltiel, qui se suicide en 1972. Dès qu'elle peut, elle quitte ce commerce et va à Paris[5].

Mort

Zina Morhange meurt le Ă  Paris.

Pour Approfondir

Liens externes

  • Zina Morhange-Saltiel, « J'Ă©tais sous les ordres de Mengele », DiffĂ©rences,‎ , p. 32-34 (lire en ligne, consultĂ© le ).

Bibliographie

  • Zina Morhange-Saltiel. J'Ă©tais sous les ordres de Mengele. DiffĂ©rences n°44 - avril 1985[21]
  • (en) Claire Gorrara. Women's Representation of the Occupation in Post '68 France. Macmillan: Basingstoke, 1998.
  • Serge Klarsfeld. Le MĂ©morial de la dĂ©portation des Juifs de France. Beate et Serge Klarsfeld: Paris, 1978. Nouvelle Ă©dition, mise Ă  jour, avec une liste alphabĂ©tique des noms.FFDJF (Fils et Filles des DĂ©portĂ©s Juifs de France), 2012.
  • (en) Aukje Kluge and Benn E. Williams. Re-examining the Holocaust through Literature.Camridge Scholars Publishing: Newcastle Upon Tyne, 2009. (ISBN 1443801763), (ISBN 9781443801768)
  • (en) Benoit Mandelbrot, The Fractalist : Memoir of a Scientific Maverick, New York, First Vintage Books Edition, , 324 p. (ISBN 978-0-307-38991-6, lire en ligne)
  • (en) Claude Morhange-BĂ©guĂ© (trad. Austryn Wainhouse), Chamberet : Recollections from an Ordinary Childhood, Marlboro, Vermont, Northwestern University Press, , 115 p. (ISBN 978-0-8101-6077-4, lire en ligne), [Une Ă©dition est parue en Angleterre, sous un autre titre: The True Story of a Jewish Family in Wartime France. Peter Owen: London, 1990.]
  • (en) Efraim Sicher, Breaking crystal : writing and memory after Auschwitz, University of Illinois Press, , 378 p. (ISBN 0-252-06656-1 et 9780252066566, lire en ligne)
  • (en) Louise O. Vasvari, « Introduction to and Bibliography of Central European Women's Holocaust Life Writing in English. », Purdue University Press,‎ (ISSN 1481-4374)
  • (en) Susan Zuccotti, The Holocaust, The French, And The Jews, New York, Basic Books (Harper Collins Publishers), , 383 p. (ISBN 0-465-03034-3)
  • (en) Christophe Boltanski, The Safe House: A Novel, Chicago, University of Chicago Press, , 240 p. (ISBN 022644922X)

Notes et références

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