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Zadig (livre)

Zadig ou la Destinée est un conte philosophique de Voltaire, publié pour la premiÚre fois en 1747 sous le nom de Memnon. Allongé de quelques chapitres, il fut publié une nouvelle fois en 1748 sous son titre actuel.

Zadig ou la Destinée
Image illustrative de l’article Zadig (livre)
Édition de 1748.

Auteur Voltaire
Pays France
Genre Conte philosophique
Lieu de parution Lyon[1]
Date de parution 1748
Nombre de pages 60

D’aprĂšs Longchamp, secrĂ©taire de Voltaire, c’est au cours des soirĂ©es mondaines donnĂ©es Ă  Sceaux, chez la duchesse du Maine, que l’idĂ©e d’écrire des contes inspire Ă  Voltaire ce petit roman, qualifiĂ© aussi de conte philosophique, qui connaĂźt plusieurs Ă©ditions Ă  partir de 1747. Il s’est par ailleurs dĂ©fendu d’en ĂȘtre l’auteur, le considĂ©rant comme une simple « couillonnerie »[2].

Cette Ɠuvre est inspirĂ©e d'un conte persan intitulĂ© Voyages et aventures des trois princes de Serendip[3]. Cependant Zadig va plus loin que les trois princes de Serendip en ce sens qu'il utilise la science de son temps, un « profond et subtil discernement », pour parvenir Ă  ses conclusions. Il a acquis « une sagacitĂ© qui lui dĂ©couvrait mille diffĂ©rences oĂč les autres hommes ne voient rien que d'uniforme ». Voltaire n'Ă©voque pas le hasard mais parle d'une « bizarrerie de la providence »[4]. Il introduit Ă©galement le suspense dans son rĂ©cit, alors que dans la tradition du conte oriental le lecteur est averti dĂšs le dĂ©part que les trois frĂšres n'ont pas vu l'animal, ce qui rapproche le raisonnement par dĂ©duction de Zadig de la mĂ©thode scientifique.

Résumé

Voltaire retrace les mĂ©saventures d’un jeune homme, nommĂ© Zadig[alpha 1], qui fait l’expĂ©rience du monde dans un Orient de fantaisie.

Tour à tour favorable ou cruelle, toujours changeante, la fortune du héros passe par des hauts et des bas qui rythment le texte : tantÎt victime d'injustices, tantÎt accusé à tort, Zadig échappe plusieurs fois à des amendes ou à la prison. Quand il devient Premier ministre du roi de Babylone, celui-ci l'apprécie fort, car Zadig mÚne une politique équitable, et ses décisions ou jugements ne prennent pas en compte la richesse de ses administrés.

Malheureusement pour lui, l’amour compromettant qu’il porte Ă  la reine AstartĂ© est dĂ©couvert par la Cour. Zadig, craignant que le roi n'assassine la reine par vengeance, se rĂ©sout Ă  fuir le royaume de Babylone.

Durant son voyage Ă  travers le monde, Zadig rencontre de nombreux personnages hauts en couleur, se trouve parfois en proie au dĂ©sespoir ou Ă  la souffrance, doit faire face Ă  l’injustice et Ă  la superstition, ainsi qu’à tous les dangers d'une telle errance, mais ne perd pas l'espoir de retrouver un jour AstartĂ©. Il revient finalement Ă  Babylone, dĂ©fie le roi et, vainqueur, prend sa place.

C'est du chapitre VI qu'est extraite la célÚbre citation « il vaut mieux hasarder de sauver un coupable que de condamner un innocent »[5].

Résumé par chapitre

  • I. Le borgne : Zadig est un babylonien vertueux, suivant pieusement les prĂ©ceptes de Zoroastre[6] - [7]. Alors qu'il s'apprĂȘte Ă  Ă©pouser SĂ©mire, femme belle, riche et de haute naissance[8], Orcan, jaloux, vient enlever cette derniĂšre. Zadig dĂ©fend fiĂšrement sa dame[9] mais il est griĂšvement blessĂ©[10]. On fait venir un mĂ©decin de Memphis, HermĂšs, lequel lui annonce que Zadig sera borgne[11]. Toutefois, Zadig guĂ©rit deux jours aprĂšs[12]. Il apprend alors que SĂ©mire, figure de l'inconstance, l'a quittĂ© et s'est mariĂ© Ă  Orcan[13]. Zadig en souffre longuement, mais s'en remet. Il dĂ©cide d'Ă©pouser Azora, une riche bourgeoise[14].
  • II. Le nez : Azora rentre au domicile hors d'elle. Alors que Cosrou, une jeune veuve, avait jurĂ© de rester Ă  cĂŽtĂ© de la tombe de son mari tant que le ruisseau auprĂšs duquel il est enterrĂ© coulerait Ă  cĂŽtĂ©, Azora l'a vue dĂ©tourner le ruisseau. Azora surrĂ©agit et s'emporte. Zadig n'aime pas sa rĂ©action, feinte. Il imagine un stratagĂšme pour vĂ©rifier la probitĂ© de sa femme : Il se fait passer pour mort et demande Ă  son ami Cador de feindre une maladie dont le remĂšde est un bout du nez d'un mort rĂ©cent. Azora, dĂ©jĂ  intĂ©ressĂ©e par Cador, n'hĂ©site pas Ă  aller chercher le nez de Zadig. Ce chapitre est inspirĂ© d'un conte Chinois[15].
  • III. Le chien et le cheval : On recherche la chienne de la reine, et Zadig arrive Ă  dĂ©crire parfaitement l'allure de la chienne mais dit qu'il ne l'a point vue. Il arrive la mĂȘme histoire pour le cheval. On le soupçonne donc du vol des animaux. Il explique qu'il avait devinĂ© leur apparence par les traces qu'ils avaient laissĂ©es dans la forĂȘt. On admire son gĂ©nie mais la justice lui prend plus en frais que l'amende Ă  laquelle il avait Ă©tĂ© condamnĂ©. Un prisonnier politique passe ensuite sous sa fenĂȘtre, mais il ne rĂ©agit pas, par crainte de s'attirer de nouveaux ennuis. Il est condamnĂ© Ă  verser 500 onces d'or. Ce chapitre s'inspire du conte persan Voyages et aventures des trois princes de Serendip.
  • IV. L'envieux : Pour avoir contredit un mage sur le griffon, Zadig est menacĂ© d'exĂ©cution. Un homme jaloux de la renommĂ©e de Zadig, Arimaze, est prĂ©sent un soir chez lui et voit Zadig Ă©crire un poĂšme au sujet du roi sur une tablette puis, insatisfait, la rompre verticalement en deux et la jeter. Arimaze en retrouve une moitiĂ©, y trouve une injure contre le roi Moabdar, se dĂ©pĂȘche de faire incarcĂ©rer Zadig. Pendant son procĂšs, un perroquet rapporte l'autre partie : il apparaĂźt que le texte complet Ă©tait une louange au roi ; Zadig est disculpĂ© et se trouve apprĂ©ciĂ© du roi.
  • V. Les gĂ©nĂ©reux : Pour un Ă©vĂ©nement qui a lieu tous les cinq ans, Zadig est choisi comme le plus vertueux car il a osĂ© parler en bien d'un ministre que le roi venait de renvoyer. Cette marque de courage et d'intĂ©gritĂ© lui vaut le titre de citoyen ayant fait la meilleure action, tandis que le roi acquiert une rĂ©putation de prince magnanime.
  • VI. Le ministre : Zadig devient premier ministre et il est trĂšs aimĂ©. Il dĂ©mĂȘle beaucoup de problĂšmes complexes en donnant raison Ă  celui qui est le plus juste et le moins avare.
  • VII. Les disputes et les audiences : Zadig rĂšgle une dispute entre les adeptes d'un temple dont certains disaient qu'il fallait y entrer du pied gauche et les autres du pied droit, en y entrant Ă  pieds joints. Il accorde aussi de nombreuses audiences aux dames qui veulent le voir, mais on dit qu'il semble prĂ©occupĂ© et ne succombe jamais Ă  leurs charmes.
  • VIII. La jalousie : Il tombe amoureux de la reine, AstartĂ©. La femme de l'envieux envoie sa jarretiĂšre de la mĂȘme couleur que celle de la reine au roi et celui-ci se rend compte que les rubans de cette derniĂšre sont de la mĂȘme couleur que le chapeau de Zadig, ce qui suffit au roi, trĂšs jaloux, pour tirer ses conclusions. Il veut les tuer dans la nuit mais le muet de la reine l'avertit et Zadig s'enfuit, demandant Ă  Cador de s'occuper de la reine. Cador prĂ©tend que Zadig est allĂ© vers la route des Indes alors que celui-ci est allĂ© vers l'Égypte.
  • IX. La femme battue : Il rencontre en Égypte une femme battue, Missouf, qui lui demande de la sauver de son agresseur. Ce dernier arrive et attaque Zadig, qui se dĂ©fend et n'a d'autre choix que de le tuer. Missouf est fĂąchĂ©e de son geste. Des gens viennent l'enlever mais Zadig dĂ©cide de ne plus la sauver.
  • X. L'esclavage : En entrant dans la ville, il se fait arrĂȘter pour avoir tuĂ© ClĂ©tofis, mais il est seulement vendu comme esclave Ă©tant donnĂ© la nature de lĂ©gitime dĂ©fense de son geste. SĂ©toc, un marchand, l'achĂšte et finit par le trouver intelligent. Zadig fait ses preuves alors qu'il le tire d'une affaire avec un HĂ©breu qui lui devait de l'argent : tous les tĂ©moins de l'entente sont morts mais Zadig fait avouer Ă  l'HĂ©breu qu'il connaissait l'existence du lieu du pacte et donc que ce dernier avait bel et bien Ă©tĂ© conclu.
  • XI. Le bĂ»cher : Zadig trouve ridicule la tradition du bĂ»cher de veuvage qui veut que les femmes se brĂ»lent avec leur mari lorsqu'il dĂ©cĂšde. Il rĂ©ussit Ă  s'entretenir avec une veuve, Almona, et la persuade de ne pas se brĂ»ler vu tous ses charmes et ce qu'elle a encore devant elle. Il conclut que chaque veuve devra maintenant s'entretenir toute une heure avec un jeune homme avant de se brĂ»ler et Ă©radique la tradition.
  • XII. Le souper : SĂ©toc et Zadig vont Ă  la grande foire de Balzora, oĂč ils assistent Ă  un souper durant lequel des marchands se chicanent pour des croyances spirituelles culturelles diffĂ©rentes. Zadig finit par leur montrer qu'ils croient en fait tous au mĂȘme Dieu crĂ©ateur.
  • XIII. Les rendez-vous : Les prĂȘtres n'apprĂ©cient pas la fin des bĂ»chers de veuvage et l'arrĂȘtent. Almona le sauve en priant quatre prĂȘtres de signer la libertĂ© de Zadig en Ă©change de ses faveurs. Elle leur donne rendez-vous tous au mĂȘme endroit et invite les juges Ă  assister Ă  leur arrivĂ©e pour montrer leur manque de vertu. Zadig est libĂ©rĂ© et SĂ©toc Ă©pouse Almona.
  • XIV. Le brigand : Zadig et son accompagnateur se font arrĂȘter par des soldats qui disent qu'ils leur appartiennent. Ils se battent tout de mĂȘme courageusement et Arbogad, le maĂźtre du chĂąteau, les voit et les invite Ă  entrer. Il leur explique qu'il est le plus grand des brigands. Il apprend aussi Ă  Zadig que le roi Moabdar est mort et que Babylone va trĂšs mal. En revanche, il ne sait pas oĂč est AstartĂ©.
  • XV. Le pĂȘcheur : Zadig croise un pĂȘcheur qui dit ĂȘtre le plus malheureux des hommes et veut mettre fin Ă  ses jours. Il Ă©tait auparavant un marchand de fromage Ă  la crĂšme Ă  Babylone, mais un jour il n'a pas Ă©tĂ© payĂ© par Zadig et la reine car ils s'Ă©taient enfuis. Il alla par la suite chez Orcan pour demander de l'aide mais celui-ci n'aida que sa femme qu'il garda avec lui. Il voulut ensuite vendre sa maison mais elle fut brĂ»lĂ©e. Zadig lui dit d'aller voir Cador Ă  Babylone et de l'attendre. Il lui donne la moitiĂ© de son argent et lui redonne espoir.
  • XVI. Le basilic : Zadig croise des femmes qui cherchent un basilic pour soigner leur maĂźtre Ogul qui souffre d'obĂ©sitĂ©. Il voit AstartĂ© qui lui raconte toute l'histoire : le frĂšre de Cador l'a enfermĂ©e dans une statue alors que Cador donnait des fausses pistes sur leur fuite au roi. On crut alors l'avoir trouvĂ©e alors qu'il s'agissait de Missouf, mais le roi Moabdar dĂ©cida de la prendre pour femme, et elle rĂ©gna trĂšs mal sur Babylone. Moabdar vint supplier la statue oĂč AstartĂ© se trouvait et elle lui rĂ©pondit que les dieux ne l'aideraient pas. Il devint fou. AstartĂ© se trouva enlevĂ©e par un prince mais Missouf prit sa place, vu leur ressemblance, et elle s'enfuit. Cependant, le voleur Arbogad l'enleva et la vendit Ă  Ogul. AprĂšs avoir appris toute l'histoire, Zadig donne un faux basilic Ă  Ogul et lui dit non pas de le manger mais de le pousser et de faire un rĂ©gime. Il demande la libertĂ© d'AstartĂ© en Ă©change. Ogul maigrit et se sent mieux. Le mĂ©decin d'Ogul veut l'empoisonner, mais il est sauvĂ© Ă  temps par une lettre d'AstartĂ©.
  • XVII. Les combats : AstartĂ© revient glorieusement Ă  Babylone et on dĂ©cide pour choisir le roi que le prĂ©tendant au trĂŽne devra rĂ©ussir une Ă©preuve de combat et une Ă©nigme. Zadig gagne les combats mais Itobad lui vole son armure durant la nuit et est proclamĂ© vainqueur Ă  sa place.
  • XVIII. L'ermite : Zadig croise un ermite qui lit le livre des destinĂ©es et lui fait promettre d'ĂȘtre patient et de rester avec lui quelques jours. La premiĂšre nuit, ils dorment dans un riche chĂąteau abritant un vaniteux qui les sert bien mais sans chaleur. L'ermite vole un bassin d'or incrustĂ© de pierres. Ensuite, ils vont dans la petite maison d'un avare qui les traite trĂšs mal, mais l'ermite lui donne le bassin, disant Ă  Zadig que le vaniteux deviendrait plus sage et que l'avare suivrait les rĂšgles de l'hospitalitĂ©. La deuxiĂšme nuit, ils dorment dans la charmante maison d'un philosophe. L'ermite y met le feu. La troisiĂšme nuit se passe chez une veuve avec son neveu de 14 ans, et l'ermite noie le neveu. En fait, l'ermite est l'ange Jesrad, qui explique Ă  Zadig qu'il a fait ces choses car elles apporteront par la suite du bien (le philosophe trouvera une rĂ©serve d'or sous sa maison et le neveu aurait tuĂ© sa tante) et que les maux sont nĂ©cessaires : il n'y a pas de hasard, seulement la Providence, il est important de se faire Ă  l'idĂ©e que le mal est un Ă©lĂ©ment nĂ©cessaire Ă  l'ordre du monde et Ă  la naissance du bien. Jesrad indique Ă  Zadig qu'il doit se rendre Ă  Babylone. Zadig n'est pas vraiment convaincu par le discours sur le mal nĂ©cessaire, mais se dirige vers Babylone[alpha 2]
  • XIX. Les Ă©nigmes : Zadig revient Ă  Babylone et dit que quelqu'un lui a volĂ© sa gloire lors des combats. Il rĂ©ussit les Ă©nigmes et dĂ©fie Itobad qui perd. Il devient roi, peut Ă©pouser AstartĂ©, et rĂšgne en homme bon en adorant la Providence.
  • Appendice (Les deux chapitres suivants sont des ajouts) XX. La Danse : Zadig est contraint d'aller sur l'Ăźle de Serendib Ă  la place de SĂ©toc. LĂ -bas, le roi Nabussan recherche un trĂ©sorier qui ne le vole pas. Zadig fait passer les prĂ©tendants par une salle du trĂ©sor (non gardĂ©e), puis, en guise d'examen, leur ordonne de danser pour le roi. Les prĂ©tendants Ă©chouent tous Ă  cause de leurs poches pleines de l'or qu'ils viennent de voler, Ă  l'exception d'un seul qui est donc nommĂ© trĂ©sorier.
  • Appendice, XXI. Les yeux bleus : La seule femme que Zadig recommanda au roi avait les yeux bleus. Cependant, les lois interdisaient d'aimer une femme aux yeux bleus. Zadig, accusĂ© par tous, fuit l'Ăźle et reprend son pĂ©riple Ă  la recherche d'AstartĂ©.

Personnages

  • Zadig : philosophe de Babylone, personnage principal de l’histoire ;
  • AstartĂ© : reine de Babylone, dernier amour de Zadig ;
  • Moabdar : le roi de Babylone ;
  • SĂ©toc : maĂźtre de Zadig esclave, en hĂ©breu « tais-toi » ;
  • Cador : ami fidĂšle et confident de Zadig ;
  • SĂ©mire : premier amour de Zadig ; le trahit en Ă©pousant Orcan ;
  • HermĂšs : grand mĂ©decin provenant de Memphis ;
  • Orcan : rival de Zadig, qui lui vole sa premiĂšre femme ;
  • Azora : deuxiĂšme amour de Zadig ;
  • Almona : veuve, en hĂ©breu Almana « veuve » ;
  • Arbogad : riche brigand ;
  • Arimaze: surnommĂ© « l'envieux », il veut nuire Ă  Zadig
  • Ogul : le maitre d'AstartĂ© quand celle-ci fut esclave
  • Missouf : elle sera la seconde Ă©pouse de Moabdar. Elle deviendra ensuite esclave du prince d'Hyrcanie auprĂšs d'AstartĂ© ;
  • L'Ermite : Il prĂ©tend se nommer Jesrad, mais il est en rĂ©alitĂ© un ange qui guidera Zadig vers le bonheur.

Zadig est le personnage principal et Ă©ponyme du conte. Son nom signifie « le vĂ©ridique » (áčŁÄdiq) ou « l’ami » (áčŁadÄ«q) en langue arabe et « le juste » (áčŁaddÄ«q) en hĂ©breu. Il est prĂ©sentĂ© dĂšs le premier chapitre comme un homme trĂšs vertueux, sans aucun dĂ©faut pour la sociĂ©tĂ© de Voltaire. Son meilleur ami Cador est un beau jeune homme, dont le portrait n’est pas prĂ©cis. En arabe, Cador signifie « le tout puissant » (qaddĆ«r).

Le premier amour de Zadig, auprĂšs de laquelle celui-ci croit vivre dans le bonheur, se nomme SĂ©mire. Mais celle-ci se rĂ©vĂ©lera infidĂšle ainsi que sa deuxiĂšme Ă©pouse, Azora. La femme du roi Moabdar, son dernier amour, et qui lui fait perdre la raison s’appelle AstartĂ©, une femme trĂšs belle avec qui il se mariera Ă  la fin du roman.

Depuis le premier chapitre, Voltaire fait rĂ©fĂ©rence aux principes de Zoroastre, que Zadig observe. Dans ceux-ci, le principe du mal est appelĂ© Ahriman – comme le courtisan envieux appelĂ© Arimaze au chapitre IV –, opposĂ© au principe du bien Orzmud. L’archimage de Zoroastre est appelĂ© YĂ©bor, anagramme de Boyer, nom de l’évĂȘque de Mirepoix et ennemi de Voltaire.

Zadig est avant tout une satire fĂ©roce de la sociĂ©tĂ© française de son Ă©poque, transposĂ©e dans un orient imaginaire, peuplĂ© de personnages outrĂ©s, sans nuance. Elle est peuplĂ©e d'hypocrites, dont les actions vont Ă  l'encontre de l'amitiĂ©, de l'amour, ou des nobles principes religieux qu'ils professent en public. Les rois n'y sont pas mauvais, mais ils sont incapables de rĂ©gler leurs problĂšmes, et le rĂ©sultat ne sera bon que s'ils Ă©coutent le hĂ©ros, alors qu'ils Ă©coutent tout autant les trompeurs. Le peuple suit bĂȘtement la tradition, mais il est prĂȘt Ă  y renoncer si on lui montre qu'elle est mauvaise.

Toute l'habiletĂ© du hĂ©ros le met plus souvent en mauvaise posture qu'elle ne le sauve, il ne doit son salut qu'Ă  plusieurs miracles. La vertu et les bonnes actions du hĂ©ros lui attirent les mauvais sentiments de ses contemporains (jalousie, vengeance, etc.) et lui valent une suite ininterrompue d'avanies bien plus crĂ©dibles que les miracles qui le sauvent par la suite. Le monde de Zadig annonce dĂ©jĂ  celui du Candide et la conception de Voltaire face au problĂšme du mal : ĂȘtre vertueux ne vous protĂšge pas du mal, au contraire, cela vous expose Ă  la mĂ©chancetĂ©, et vous en aurez quand mĂȘme subi les consĂ©quences mĂȘme si finalement un miracle survient qui vous sauve. Cependant, le mĂ©chant ne triomphe pas, il finit mal, mĂȘme si ça prend du temps.

Histoire Ă©ditoriale

Une premiĂšre version plus brĂšve intitulĂ©e Memnon, histoire orientale est publiĂ©e pendant l’étĂ© 1747 en Hollande sans grand Ă©cho en France[alpha 3]. SĂ©journant Ă  Sceaux chez la duchesse du Maine, Voltaire complĂšte le conte, en y ajoutant les chapitres Le Souper, Les Rendez-Vous, Le PĂȘcheur, ainsi qu'une ÉpĂźtre dĂ©dicatoire. Il paraĂźt en septembre 1747 sous le titre Zadig, ou la destinĂ©e[16].

Voltaire modifie encore plusieurs fois son texte. En 1752, pour une Ă©dition de ses ƒuvres chez l'Ă©diteur Georg Conrad Walther, il rajoute dans le chapitre L’Envieux l’anecdote Ă  propos de Yebor. En 1756, pour une Ă©dition chez Cramer, le chapitre Les Jugements est complĂ©tĂ© et scindĂ© en deux : Le Ministre et Les Disputes et les audiences. L'Ă©dition posthume de Kehl rajoutera en 1784 deux nouveaux chapitres : La Danse et Les Yeux bleus que Voltaire n'avait pas retenus de son vivant[16].

Zadig paraßt d'abord anonymement et Voltaire, comme souvent, en dénie d'abord la paternité. Les réactions virulentes sont rares et le conte connaßt un grand succÚs[16].

Analyse

L'organisation du texte est une accumulation d’aventures dans un mode de composition oĂč le dĂ©tail et l’intĂ©rĂȘt de chaque Ă©pisode l’emportent sur celui de l’ensemble. Les fables sont indĂ©pendantes, mais leur sens global reflĂšte une rĂ©flexion philosophique[17].

On retrouve dans Zadig les critiques habituelles de Voltaire envers la corruption politique, les flatteurs trop Ă©coutĂ©s par les rois, l’aviditĂ© des prĂȘtres jaloux de leur pouvoir, l’avarice des riches. Et un rĂ©sumĂ© de sa philosophie : dĂ©isme, tolĂ©rance, bon usage de la raison au-delĂ  des croyances immĂ©diates et des superstitions anciennes, exaltation des vertus sociales et du commerce, et de la politique Ă©clairĂ©e par la philosophie[18].

La signification du conte est toujours discutĂ©e : « Faut-il prendre Voltaire au sĂ©rieux et croire que la leçon du  conte est que nous sommes tous les marionnettes de la Providence et  que nous devrions nous rĂ©signer Ă  notre destin inaltĂ©rable ? Ou faut-il plutĂŽt croire que Voltaire se moque de l'idĂ©e exprimĂ©e par Pope et Leibnitz et selon laquelle chaque Ă©vĂ©nement fait partie de l'ordre de l'univers, et selon laquelle tout mal entraĂźne un plus grand bien ? Ou est-ce que le conte illustre le dilemme de Voltaire qui doit reconnaĂźtre l'existence ou la coexistence du mal et du bien sans pouvoir concevoir comment ils s'accordent ?[19] »

Dans son livre Le Plagiat par anticipation, en 2009, Pierre Bayard dĂ©veloppe par jeu l'idĂ©e que Voltaire aurait plagiĂ© dans Zadig en 1747 les enquĂȘtes de Sherlock Holmes d'Arthur Conan Doyle parues quelque 150 ans aprĂšs. C'est un moyen humoristique de montrer que Zadig est un prĂ©curseur des enquĂȘtes policiĂšres Ă  la Sherlock Holmes, fondĂ©es sur la recherche de preuves matĂ©rielles et une sĂ©rie de dĂ©ductions ingĂ©nieuses.

Bibliographie

Éditions

  • Xavier Darcos, Zadig, Classiques Hachette-Éducation, 1re Ă©d. 1993, 20e rĂ©Ă©d. en 2006, (ISBN 2-01-020710-6) (BNF 35610517).
  • Pascal Debailly, Zadig de Voltaire, Profil d'une Ɠuvre, Ă©ditions Hatier.
  • ƒuvres complĂštes de Voltaire, volume 30B, Oxford, Voltaire Foundation, 2004. Édition critique par Haydn T. Mason. (notice en anglais)

Articles critiques

  • MarilĂšne ClĂ©ment, Zadig, ou La destinĂ©e, histoire orientale de Voltaire; Ă©tude et analyse, Collection Mellottee, Paris, Éditions de la PensĂ©e moderne, 1972.
  • Jean Goulemot, AndrĂ© Magnan, Didier Masseau, Inventaire Voltaire, Gallimard, collection Quarto, 1995, p. 1413-1416.
  • Raymond Trousson, Jeroom Vercruysse [Dir], Dictionnaire gĂ©nĂ©ral de Voltaire, HonorĂ© Champion, 2020, p. 1233-1237. Notice de S. Menant.
  • Roseann Runte, RĂ©pĂ©tition et instabilitĂ© : la signification de Zadig, in Man and Nature / L'homme et la nature, Volume 3, 1984, p. 63–76. Lire en ligne.
  • Jean Sareil, De "Zadig" Ă  "Candide", ou permanence de la pensĂ©e de Voltaire, Romanic Review, Vol. 52, N° 4,  (Dec 1, 1961). Lire en ligne (accĂšs restreint).
  • Jean-François Perrin, L'orientale allĂ©gorie : le conte oriental au XVIIIe siĂšcle en France : (1704-1774), Paris : HonorĂ© Champion Éditeur, 2015.

Dérivés

Notes et références

Notes

  1. La racine du nom Zadig pourrait ĂȘtre l'hĂ©breu tsadik qui dĂ©signe le Juif juste et vertueux. Lire en ligne
  2. . Ce passage a Ă©tĂ© rapprochĂ© de la cĂ©lĂšbre sourate La Caverne (S. 18. V. 60-82) du Coran, lorsque MoĂŻse accompagne un ĂȘtre mystĂ©rieux (Al-Khidr) douĂ© d'une grande connaissance Ă  travers son pĂ©riple, mais l'auteur de Le Fanatisme ou Mahomet le ProphĂšte a Ă©tĂ© accusĂ© de copier quasiment mot pour mot la fable the hermit de Thomas Parnell, et il n'est pas possible de savoir si la transmission de ce conte oriental classique, prĂ©existant au Coran, est passĂ© par cette source ou par une autre.
  3. Voltaire reprendra ce nom dans le conte Memnon ou la sagesse humaine.

Références

  1. « Zadig, ou la Destinée, histoire orientale », sur BNF, consulté le=1 mars 2021.
  2. L’encyclopĂ©die des Ă©nigmes - Docteur Mops, p. 151.
  3. Voltaire, Zadig, chapitre III.
  4. France culture - Émission Science publique, « La sĂ©rendipitĂ© : Quel rĂŽle joue le hasard dans la science ? » (consultĂ© le )
  5. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  6. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  7. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  8. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  9. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  10. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  11. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  12. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  13. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  14. Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  15. Voir la note : Citation dans Zadig, sur www.lirtuose.fr
  16. ƒuvres complùtes de Voltaire, volume 30B, Oxford, Voltaire Foundation, 2004, p.69-74.
  17. Raymond Trousson, Jeroom Vercruysse [Dir], Dictionnaire général de Voltaire, Honoré Champion, 2020, p. 1233-1237
  18. Jean Goulemot, André Magnan, Didier Masseau, Inventaire Voltaire, Gallimard, collection Quarto, 1995, p. 1413-1416.
  19. Roseann Runte, RĂ©pĂ©tition et instabilitĂ© : la signification de Zadig, in Man and Nature / L'homme et la nature, Volume 3, 1984, p. 63–76. Lire en ligne.

Articles connexes

Liens externes

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