Yusuf (sourate)
La sourate Yusuf (arabe : ÙÙŰłÙ, français : Joseph) est la 12e sourate du Coran, le texte sacrĂ© de l'islam. Elle comporte 111 versets. RĂ©digĂ©e en arabe comme l'ensemble de l'Ćuvre religieuse, elle fut proclamĂ©e, selon la tradition musulmane, durant la pĂ©riode mecquoise.
12e sourate du Coran Joseph | |
Le Coran, livre sacré de l'islam. | |
Informations sur cette sourate | |
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Titre original | ÙÙŰłÙ, Yusuf |
Titre français | Joseph |
Ordre traditionnel | 12e sourate |
Ordre chronologique | 53e sourate |
PĂ©riode de proclamation | PĂ©riode mecquoise |
Nombre de versets (ayat) | 111 |
Ordre traditionnel | |
Ordre chronologique | |
Origine du nom
Bien que le titre ne fasse pas directement partie du texte coranique[1], la tradition musulmane a donné comme nom à cette sourate Joseph car elle traite notamment du prophÚte Joseph[2].
Historique
Il n'existe Ă ce jour pas de sources ou documents historiques permettant de s'assurer de l'ordre chronologique des sourates du Coran. NĂ©anmoins selon une chronologie musulmane attribuĂ©e Ă ÇŠaÊżfar al-áčąÄdiq (VIIIe siĂšcle) et largement diffusĂ©e en 1924 sous lâautoritĂ© dâal-Azhar[3] - [4], cette sourate occupe la 53e place. Elle aurait Ă©tĂ© proclamĂ©e pendant la pĂ©riode mecquoise, c'est-Ă -dire schĂ©matiquement durant la premiĂšre partie de l'histoire de Mahomet avant de quitter La Mecque[5]. ContestĂ©e dĂšs le XIXe par des recherches universitaires[6], cette chronologie a Ă©tĂ© revue par Nöldeke[7] - [8], pour qui cette sourate est la 77e. Les traditions musulmanes anciennes ont conservĂ© les traces de dĂ©bats sur lâintĂ©gration ou non de cette sourate dans le corpus coranique[9].
Cas exceptionnel pour le Coran, cette sourate contient une narration suivie sur presque la totalitĂ© de la sourate, ce qui fait de lâhistoire de Joseph le plus long rĂ©cit du Coran. Ce rĂ©cit appartient au genre du conte, du type conte-922. La partie centrale montre une construction en chiasme, selon le principe de la rhĂ©torique sĂ©mitique[9].
MalgrĂ© ce rĂ©cit continu, diffĂ©rents trait stylistiques montrent une volontĂ© de rĂ©unir plusieurs sections. Les versets 4-101 forment la partie centrale tandis que lâassociation du prologue et de la conclusion sont lâĆuvre dâune « activitĂ© scribale ultĂ©rieure »[9]. Les premiĂšres attestations de cette sourate dans l'Ă©pigraphie montrent des variantes et des recompositions[10].
Interprétation
Dieu sâinterroge sur le fait que des personnages plus importants que Joseph n'ont pas de sourate qui leur est consacrĂ©e[10]. Joseph est citĂ© Ă deux autres reprises dans le Coran. NĂ©anmoins, le Joseph de la sourate 40 est diffĂ©rent de celui de la sourate 12[9].
La sourate contient de nombreuses diffĂ©rences avec le texte biblique. « Ces diffĂ©rences avec le rĂ©cit biblique sâexpliquent souvent par le dĂ©tour des textes exĂ©gĂ©tiques chrĂ©tiens et juifs de lâAntiquitĂ© tardive ». Les omissions sont souvent liĂ©es Ă la suppression dâĂ©lĂ©ments considĂ©rĂ©s comme annexes au sujet central et Ă une simplification de la psychologie des personnages. Elles permettent, en outre, dâĂ©carter les aspects peu flatteurs de Joseph, modifications qui sâobservent dĂ©jĂ dans un texte homilĂ©tique syriaque (Ă propos de lâaspect dĂ©lateur et arrogant de Joseph). Ces omissions montrent que le texte prĂ©suppose une connaissance du rĂ©cit biblique par lâauditoire[9].
Witztum a étudié en 2011 les sources syriaques de cette sourate[10] Pour Kropp, cette sourate s'inspire de la forme des poÚmes syriaque appelés soghitha en incluant des particularités de la poésie arabe[10]. Certains ont vu dans cette sourate des liens avec certains midrashs. Néanmoins, certains de ceux-ci sont plus récents que le Coran et pourrait illustrer une influence musulmane. Pour Decharneux, ce texte montre bien davantage une influence syriaque (liens lexicaux, forme dialoguée...)[9]..
Ce passage est utilisĂ©, selon Grodzki, par la tradition musulmane comme une preuve de la mission prophĂ©tique de Mahomet dans un milieu qui n'est pas censĂ© connaĂźtre l'histoire de Joseph. Pour autant, ce texte est un rĂ©cit ayant besoin de la connaissance du rĂ©cit biblique pour ĂȘtre compris pleinement[10] Dans ce texte, le Coran ne souhaite pas raconter lâhistoire mais faire passer un message, ici lâimpossibilitĂ© de contrer le plan divin. Cette simplification a aussi permis la crĂ©ation dâune typologie du prophĂšte coranique, dans laquelle sâinscrit Mahomet. Decharneux considĂšre que cette typologie a nĂ©anmoins une « base friable »[9]..
Alors que le Coran n'existe pas encore en tant que tel, la sourate prĂ©cise : "Nous lâavons fait descendre, un Coran en [langue] arabe". Pour Reynolds, cette mention ne concerne que la sourate en question. Tandis que les arabes connaissait l'histoire de Joseph par les Ă©crits d'autres langues, pour la premiĂšre fois, ils ont leur propre histoire.[10]
Voir aussi
Articles connexes
- Ayat, nom donné pour les versets du Coran
Bibliographie
- J. Decharneux, "Sourate 12", Le Coran des historiens, t.2a, 2019, p. 509 et suiv.
- R. Paret, Der Koran. Kommentar und konkordanz, 1980[Note 1].
- G.S. Reynolds, The Quran and its biblical Subtext, 2010.
Liens externes
- Texte de la sourate 12 en français, d'aprĂšs la traduction de Claude-Ătienne Savary de 1783.
Notes et références
Notes
- En 2019, seuls deux ouvrages peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des commentaires scientifiques et continus du texte coranique. Il s'agit du Commentary on the Qur'an de Richard Bell publiĂ© en 1991 (aujourd'hui datĂ©) et du Coran des historiens publiĂ© en 2019. L'ouvrage de Paret s'inscrit, avec ceux de BlachĂšre, Khoury et Reynolds, dans un ensemble de traduction avec apparat critique. Voir : Sourate
Références
- A. Chouraqui, Le Coran, traduction et commentaires, 1990, p. 15.
- A. Chouraqui, Le Coran : L'appel, France, Robert Laffont, , 625 p. (ISBN 2-221-06964-1)
- G.S. Reynolds, « Le problÚme de la chronologie du Coran », Arabica 58, 2011, p.477-502.
- R. BlachĂšre, Introduction au Coran, p.244.
- R. BlachĂšre, Le Coran, 1966, p. 103.
- M. Azaiez, « Chronologie de la Révélation »
- G. Dye « Le Coran et son contexte Remarques sur un ouvrage récent », Oriens Christianus no 95, 2011, p. 247-270.
- E. Stefanidis, « The Qur'an Made Linear: A Study of the Geschichte des Qorùns' Chronological Reordering », Journal of Qur'anic Studies, X, II, 2008, p.13.
- J. Decharneux, "Sourate 12", Le Coran des historiens, t.2a, 2019, p. 509 et suiv.
- M. Azaiez (Ed.), G.S. Reynolds (Ed.), T. Tesei (Ed.), et al. (2016). The Qur'an Seminar Commentary / Le Qur'an Seminar. A Collaborative Study of 50 Qur'anic Passages / Commentaire collaboratif de 50 passages coraniques. Berlin, Boston: De Gruyter. partie QS 15 Q 12