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Woelflin de Rouffach

Wœlflin de Rouffach, mort en 1355 sans doute à Strasbourg, est un sculpteur et maître d'œuvre alsacien. Il est l'auteur de plusieurs monuments funéraires, dont ceux d'Ulrich de Werde († 1344) à Saint-Guillaume de Strasbourg et d'Ermengarde de Bade († 1260) à Lichtenthal (Baden-Baden). Par ailleurs, il participe à l'édification de la façade de Notre-Dame de Rouffach. En Alsace, c'est le premier artiste auquel on puisse associer avec certitude des œuvres conservées.

Woelflin de Rouffach
Décès
Activités
Autres activités
Mouvement
Ĺ’uvres principales
Gisant d'Ulrich de Werde Ă  Saint-Guillaume de Strasbourg, gisant d'Ermengarde de Bade Ă  Lichtenthal (Baden-Baden)

Biographie

La vie de Wœlflin de Rouffach est connue par quatre mentions, deux archivistiques et deux signatures sur des monuments conservés :

  • Dans un acte du 13 fĂ©vrier 1341, il achète une demeure Ă  Strasbourg, près de l’HĂ´pital, dans la paroisse Saint-Nicolas. Il y est mentionnĂ© comme "lapicide" et "maĂ®tre de la fabrique de l'Ă©glise de Rouffach"[1].
  • Dans un acte du 7 octobre 1355, sa maison est vendue par ses filles, sans doute Ă  la suite de son dĂ©cès. Il est alors dĂ©crit comme "lapicide" et "maĂ®tre d'Ĺ“uvre Ă  Rouffach"[2].
Les gisants des frères Ulrich (au-dessus) et Philippe (en-dessous) de Werde à Saint-Guillaume de Strasbourg.
  • Sur le gisant d'Ulrich de Werde († 1344) Ă  Saint-Guillaume de Strasbourg, le long de l'Ă©pĂ©e, est gravĂ©e la mention "MaĂ®tre WĹ“lflin de Rouffach, un bourgeois de Strasbourg, est celui qui a rĂ©alisĂ© cette Ĺ“uvre"[3]. Cette sculpture n'est pas datĂ©e avec certitude, mais elle correspond parfaitement aux rĂ©alisations de la dĂ©cennie 1340 et a sans doute Ă©tĂ© mise en place peu de temps après le dĂ©cès d'Ulrich de Werde.
  • Sur le gisant d'Ermengarde de Bade († 1260) Ă  Lichtenthal (Baden-Baden), sur un montant du pinacle, est gravĂ©e la mention "Cette Ĺ“uvre, maĂ®tre WĹ“lflin de Strasbourg l'a faite"[4]. Cette sculpture n'est pas datĂ©e avec certitude, mais son style est similaire Ă  celui des rĂ©alisations alsaciennes de la dĂ©cennies 1340.

Attributions

À partir des deux œuvres signées, les historiens ont proposé différentes attributions, qui demeurent discutées.

Façade de Notre-Dame de Rouffach

Façade de Notre-Dame de Rouffach.

La période durant laquelle l'activité de Wœlflin est documentée correspond, sur le chantier de Notre-Dame de Rouffach, à l'édification de la partie supérieure de la façade, au-dessus du niveau de la rose : le pignon ajouré, la partie supérieure du deuxième niveau de la tour sud (jusqu'à la corniche, les parties en grès rose datant du Second Empire). Toutefois, les sources demeurent trop imprécises pour que nous puissions déterminer la part exacte qui lui revient : le terme de "lapicide" recouvre tous les métiers de la taille de la pierre, du simple tailleur de moellons au sculpteur le plus expérimenté, et les responsabilités exactes d'un "maître de fabrique" ou d'un "maître d’œuvre" sont mal cernées pour cette époque. Quelques conclusions toutefois :

  • Rouffach est une possession temporelle de l'Ă©vĂŞque de Strasbourg, malgrĂ© son appartenance au diocèse de Bâle. Aussi, son Ă©glise principale revĂŞt une fonction symbolique forte qui peut expliquer ses dimensions, imposantes pour une simple paroissiale. Les liens stylistiques avec la cathĂ©drale de Strasbourg sont nombreux et constants, Ă  tel point qu'on peut en dĂ©duire des Ă©changes directs entre les deux chantiers (plans, hommes, mĂ©thodes...), sinon une tutelle commune. WĹ“lflin, bourgeois de Strasbourg, apparaĂ®t alors comme un membre de la loge Ă©piscopale actif sur un chantier dĂ©pendant directement de l'Ă©vĂŞchĂ©[5].
  • Les deux anges dĂ©capitĂ©s situĂ©s de chaque cĂ´tĂ© du pignon central ont Ă©tĂ© attribuĂ©s Ă  WĹ“lflin par Otto Schmitt, et cette proposition est communĂ©ment admise. Elle pose toutefois des problèmes de datation au sein du corpus associĂ© au sculpteur.
  • Sur le mĂŞme niveau, tout un ensemble de sculptures marginales (gargouilles, atlantes, bas-reliefs, figures des rampants du pignon...) se rapproche de manière plus ou moins forte du style de WĹ“lflin. Lui en attribuer telle ou telle partie, sans que cela soit impossible, est nĂ©anmoins particulièrement difficile. Cela pose la question de l'environnement de WĹ“lflin, et des Ă©quipes qui travaillaient pour ou avec lui.

Sculptures conservées

  • Gardiens du Saint-SĂ©pulcre de la chapelle Sainte-Catherine de la cathĂ©drale de Strasbourg (aujourd'hui au MusĂ©e de l'Ĺ’uvre Notre-Dame). L'Ă©vĂŞque Berthold II de Bucheck, qui fait rĂ©aliser la chapelle Sainte-Catherine durant les annĂ©es 1340 et y amĂ©nagera son propre tombeau[6], commande un "Saint SĂ©pulcre", reprĂ©sentation grandeur nature du Christ au tombeau, accompagnĂ© de ses gardiens et des saintes femmes. Seuls quelques fragments sont conservĂ©s, très restaurĂ©s[7]. Certaines figures de gardiens ont Ă©tĂ© proposĂ©es comme Ă©tant de la main de WĹ“lflin.
    Statue de sainte Elisabeth, chapelle Sainte-Catherine, cathédrale de Strasbourg.
  • Statues de la chapelle Sainte-Catherine de la cathĂ©drale de Strasbourg (saint Jean-Baptiste, saint AndrĂ© et sainte Elisabeth). Les deux anges de Rouffach sont extrĂŞmement proches de ces grandes statues, Ă  tel point qu'on peut en dĂ©duire une communautĂ© d'auteur. Celui-ci pourrait ĂŞtre WĹ“lflin, sous rĂ©serve que les anges de Rouffach soient bien de sa main.
  • Gisant de Philippe de Werde († 1332), Ă©glise Saint-Guillaume de Strasbourg. Le monument des frères de Werde se prĂ©sente aujourd'hui comme un ensemble. La signature de WĹ“lflin sur la dalle supĂ©rieure, celle d'Ulrich de Werde, a donc longtemps entraĂ®nĂ© l'attribution au mĂŞme de la dalle infĂ©rieure, celle de Philippe. Or, Ă  l'analyse il apparaĂ®t que cet amĂ©nagement atypique Ă  deux niveaux est largement postĂ©rieur, sans doute du dĂ©but du XVe siècle : finitions peu soignĂ©es, rĂ©fection complète de l'enfeu... Dès lors, l'attribution du gisant de Philippe n'a plus rien d'Ă©vident, et a Ă©tĂ© remise en cause tant les styles sont diffĂ©rents.
  • Gisant de Johanna Rumler-Schaler († 1351), Ă©glise Saint-Jean-Baptiste de Soultzbach-les-Bains. Le monument partage de nombreux points communs avec celui d'Ermengarde de Bade, ce qui a minima le place dans l'environnement de WĹ“lflin[8].
Gisant d’un chevalier, Rouffach
  • Gisant d'un chevalier (Werner Falke von Munsweiler ?), Ă©glise Notre-Dame de Rouffach[9]. La ressemblance gĂ©nĂ©rale a pu faire penser Ă  une attribution Ă  WĹ“lflin. Cette dernière est toutefois peu soutenue aujourd'hui : ce type d'iconographie funĂ©raire avec les armes dĂ©posĂ©es est commune Ă  un groupe assez fourni de monuments rĂ©partis sur tout le Rhin supĂ©rieur, et le traitement des dĂ©tails est trop sommaire.
  • Gisant de Johann Ulrich von Hus († avant 1342), ancienne commanderie d'Issenheim (aujourd'hui au MusĂ©e Unterlinden)[10]. L'attribution Ă  WĹ“lflin a Ă©tĂ© proposĂ©e sur les mĂŞmes bases que pour le monument de Rouffach, mais est aujourd'hui abandonnĂ©e.

Monuments disparus

Certains monuments disparus mais connus par des dessins ou gravures ont été rapprochés de l'œuvre de Wœlflin, même s'il est aujourd'hui impossible de trancher.

  • Gisant de Berchtold Waldner († 1343), anciennement dans l'Ă©glise Saint-Maurice de Soultz-Haut-Rhin, connu par une gravure de Loutherbourg publiĂ©e par Jean-Daniel Schoepflin dans son Alsatia illustrata Germanica Gallica[11].
  • Gisant d'Elisabeth de GĂ©roldseck († 1341), anciennement dans l'abbaye de Pairis, connu par un dessin conservĂ© aux Archives dĂ©partementales du Haut-Rhin[12].

Voir aussi

Bibliographie

  • Victor Beyer, « WĹ“lflin, Wölflin de Rouffach », Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne,‎ , t. 40, p. 4286
  • Julien Louis, « Wölflin de Rouffach : L'identitĂ© d'un artiste strasbourgeois du XIVe siècle », La Revue de l'art,‎ , n° 149, p. 13-26 (lire en ligne)
  • Philippe Lorentz, Strasbourg 1400 – Un foyer d’art dans l’Europe gothique, Strasbourg, , p. 18-20, 210
  • Julien Louis, « Ă€ propos de Wölflin de Rouffach : La sculpture en Basse-Alsace dans la première moitiĂ© du XIVe siècle », Bulletin de la cathĂ©drale de Strasbourg,‎ , n° 29, p. 147-160 (lire en ligne)

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Wolframus lapicida magister fabrice ecclesie Rubiacensis - Hans Witte, Privatrechtliche Urkunden und Rathlisten von 1332 bis 1400, Strasbourg, , n° 270, p. 81.
  2. Wölfelini lapicide olim magistri operis in Rubiaco - document détruit en 1870, mentionné dans Louis Schneegans, Code historique et diplomatique de la ville de Strasbourg, Strasbourg, (lire en ligne), t. 2, p. 3.
  3. Meister Wolvelin von Rufach ein Burger zu Strasburg der het dis Werk gemaht.
  4. Dis Werg mahte mester Wlvelin von Strasburg - (de) « Nr. 23, Baden-Baden-Lichtental, Kloster Lichtenthal, Fürstenkapelle », sur Deutsche Inschriften online, (consulté le ).
  5. D'autres chantiers similaires existent alors en Alsace, comme celui de la Collégiale Saint-Florent de Niederhaslach.
  6. « 1340 à 1371 : Construction de la chapelle Sainte-Catherine et de la tour nord », sur oeuvre-notre-dame.org (consulté le )
  7. « Saint-Sépulcre », sur Joconde (consulté le )
  8. « Dalle funéraire d'une épouse d'un chevalier de Hattstatt », sur Base Palissy, (consulté le )
  9. « Dalle funéraire de Werner Falke », sur Base Mistral, (consulté le )
  10. « Le Gisant du chevalier de Hus », sur Commune d'Issenheim (consulté le )
  11. (la) Jean-Daniel Schoepflin, Alsatia illustrata Germanica Gallica, Colmar, (lire en ligne), p. 683
  12. E. 1039, f° 29 (actuellement dans « Grands documents Â», n° 2).
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