Winnipeg (bateau)
Le Winnipeg (ex-Jacques Cartier) est le nom du bateau affrété en 1939 par Pablo Neruda pour emmener 2 500 réfugiés espagnols, républicains, anarchistes ou communistes, fuyant l'Espagne franquiste après la victoire du camp nationaliste, vers le Chili.
Histoire
Lorsque éclate la guerre civile, Pablo Neruda, qui avait été précédemment consul du Chili en Espagne, se préoccupe du sort des réfugiés espagnols en France, retenus dans des camps dans des conditions déplorables. En accord avec le président chilien de l'époque Pedro Aguirre Cerda, intéressé par l'idée de faire venir de nouveaux immigrants, il décide d'affréter un bateau : le Winnipeg.
Celui-ci, un ancien cargo français de 9 000 tonnes habituellement utilisé pour transporter une centaine de passagers entre le port de Marseille et l'Afrique du Nord, fut aménagé pour recevoir plus de 2 500 réfugiés espagnols. Il leva l'ancre le du port de Trompeloup sur la commune de Pauillac[1] près de Bordeaux, et accosta à ValparaÃso le .
Sur le navire, le service santé, remarquable, repose sur la fille de Marcel Cachin et sur son époux. Ils doivent notamment faire face à plusieurs cas de typhoïde. Des assemblées générales de partis (Parti communiste d'Espagne, Parti socialiste (PSOE), Gauche républicaine, CNT-FAI, etc.) se succèdent[2].
Le recrutement des passagers est controversé : certains prétendent que Pablo Neruda sélectionna à l'embarquement les communistes et empêcha les troskistes et les anarchistes d'embarquer. Selon l'historien allemand David Schidlowsky, « 86 % des demandes des réfugiés anarchistes furent refusées » et « les anarchistes qui arrivent finalement au Chili représentent 0,9 % de l'ensemble[3] ». La réalité est plus complexe. S'il est certain que beaucoup de communistes embarquèrent, Neruda n'était pas seul responsable des choix: il avait l'ordre d'embarquer des familles et des professions précises. De plus, au moment de l'embarquement, beaucoup de réfugiés se présentèrent au dernier moment, ayant appris la nouvelle du départ. On estime à 600 personnes les passagers embarqués qui n'étaient pas sur les premières listes.
À leur retour en France, les marins sont déclarés « mutins » par les autorités et emprisonnés plusieurs semaines. Le tribunal militaire conclura finalement que l’affaire a été montée de toutes pièces[2].
En fiction
Un roman de Ramón Chao, L'Odyssée du « Winnipeg » relate le transport des réfugiés républicains à bord de ce navire en soutenant la thèse de l'exclusion des anarchistes du bateau
Pablo Neruda a publié un poème en prose en 1969 intitulé "El Winnipeg" qui raconte cet épisode. Celui-ci a été réimprimé dans la revue de la fondation Pablo Neruda no 82 å l'occasion des 80 ans de cette traversée.
Notes et références
- « En 1939, un « bateau de l’espoir » parti de Pauillac a mis à l’abri 2500 migrants espagnols », sur rue89bordeaux.com, (consulté le )
- « Le Winnipeg, un vieux rafiot chargé de fraternité », sur L'Humanité,
- (es) La otra historia del Winnipeg: los que Neruda excluyó
Voir aussi
Bibliographie
- Jean Ortiz et Marielle Nicolas, De Madrid à ValparaÃso : Neruda et le « Winnipeg », Biarritz, Atlantica-Séguier, , 112 p. (ISBN 978-2-7588-0455-0).
- Fiction : Ramón Chao, L'Odyssée du « Winnipeg », Buchet Chastel, , 254 p. (ISBN 978-2-283-02245-0 et 2-283-02245-2).
- Documentaire "les Navires de légende, Winnipeg, la traversée de l'espoir" Olivier Guiton
- Dominique Grisoni et Gilles Hertzog "Les Brigades de la mer" Ed. Grasset 1979
- à paraître "Le voyage du Winnipeg, el barco de la esperanza" Béatrice Barnes et Madeleine Tirtiaux, Ed Un Autre Regard