Veronika de Desinić
Veronika de Desinić, en croate Veronika Desinićka, est le nom attribué à deux personnages légendaires de Croatie, associés au château de Veliki Tabor à Desinić.
Un amour contrarié
La légende pluriséculaire de Veronika de Desinić en Croatie est celle d'un amour passionné mais interdit entre le jeune Frédéric II de Celje, fils du puissant comte Hermann II de Celje, et Veronika, beauté paysanne qui vivait à Desinić, au pied du château du Veliki Tabor. Accusé de l'assassinat de sa première femme Elizabeth Frankopan, fille du prince Stjepan Ier Frankopan, Frédéric s'enfuit avec Veronika dans son château de Friedrichstein près de Gottschee, et organise un mariage secret. Le comte Hermann leur envoie ses hommes d'armes, jette Frédéric en prison et, après un procès en sorcellerie, fait noyer Veronika, qu'il emmure dans l'une des parois du Veliki Tabor.
Un nettoyage complet des lieux en 1982 a permis de découvrir le crâne d'une femme, désormais conservé dans la chapelle Saint-Pierre et Saint-Paul du château, qui fait rêver les poètes et les littérateurs.
Sources historiques
Certains historiens sont d'avis que Veronika était née à Desinić, d'autres qu'elle était de Gottschee (Kočevje en Slovénie), et certains même de Silésie. Quant à son statut social, d'après la Chronique de Celje ("Celjska kronika"), si c'était une belle jeune fille de Desinić issue de la chevalerie, on n'en trouve aucune trace dans aucun texte ; quant aux deux autres sources historiques, Widecke et Aeneas Sylvius, elles la décrivent seulement comme une maîtresse qui aurait tellement embobiné le comte qu'elle l'aurait amené à laisser tomber sa légitime. Frédéric lui-même l'avait présentée aux Vénitiens comme la fille d'un grand baron hongrois, venue de la Cour de Hongrie. Quoi qu'il en soit, indépendamment des désaccords sur son origine, son statut dans la société et le lieu où on l'a enterrée, on sait que le comte Frédéric II de Celje l'avait épousée en 1422.
Né le , Frédéric était l'aîné de six fils de Hermann II, comte de Celje ; son père lui avait accordé la ville de Kranj et plusieurs châteaux en Slavonie. Il avait été fiancé dans son enfance à Elizabeth, fille unique du prince Stjepan Ier Frankopan et de sa femme Caterina Carrara de Padoue, et l'avait épousée en 1405. Son mariage lui avait apporté une immense dot, garantie par la moitié de l'île de Krk et trois forteresses à Vinodol[1]. en 1406 elle lui avait donné un fils, Ulrich.
Les trois sources historiques racontent que Frédéric s'était entiché d'une certaine Veronika, avec laquelle il avait vécu quelque huit années séparé de sa femme. Son père et son beau-père l'avaient convoqué pour qu'il finisse par se réconcilier avec sa femme, selon les sources vers 1422 ou 1423 à Krapina. D'après Aeneas Sylvius, Frédéric aurait tué Elizabeth avec un couteau de chasse, alors que les deux autres sources rendent compte de la rumeur publique comme quoi Frédéric aurait tué sa femme afin de pouvoir épouser « une sorte de jolie fille, du nom de Veronika ».
Après le meurtre de sa femme, il se réfugia à la Cour de Hongrie ; sous pression de la famille Frankopan, le Roi Sigismond le condamna à mort par contumace, mais son père mit la main sur lui et l'emprisonna jusqu'en 1429[2].
Dans la littérature
Des auteurs croates, slovènes, tchèques, allemands, italiens et autres ont repris la légende de la malheureuse Veronika de Desinić.
Josip Jurčić en a fait un roman, Veronika Desinićka ("Veronika de Desinić"), de même que Hinko Davila : Zagorska ruža ("La rose du Zagorje")[3].
Oton Župančić en a fait une tragédie : le chef d'orchestre Danilo Švara en a tiré le livret, Stanko Vraz composé la ballade, Jean Lihatovski et Josip Eugen Tomić mis en scène son histoire[4]
Un peintre slovène du XIXe siècle a prétendu faire son portrait, qui se trouve à la photothèque du Musée régional de Celje.
De même le Croate contemporain Stjepan Đukić Pišta, en bas-relief[5].
Une ensorceleuse de Turcs
L'autre légende de Veronika de Desinić représente celle-ci comme une enchanteresse qui aurait sauvé des Turcs le château du Veliki Tabor : ayant percé le mur d'enceinte (aujourd'hui disparu), les Turcs se trouvaient en face du château. Veronika, à la fenêtre, débitait de la paille en menus fétus, qu'elle jeta sur les Turcs lorsqu'ils se furent rapprochés, et qui se transformèrent en essaim de frelons, les mettant en fuite[6].
Voir aussi
Notes et références
- Croatia
- Frédéric II succéda à son père en 1435 comme gefürsteter Graf ("comte princier") von Cilli (Celje) und Ortenburg-Sternberg.
Après la mort en 1444 du Ban de Slavonie Matko Talovac, il s'empara avec son fils d'une grande partie des terres du susdit, dont toute la région de Zagreb, et s'autoproclama Ban de Slavonie. Jean Hunyade, régent de Hongrie, le força à abandonner les possessions conquises, mais accepta de le nommer Ban de Slavonie, tout en nommant Jan Szekély Vice-Ban en Croatie, Dalmatie et Slavonie. De même, après la mort en 1453 du Ban de Croatie Petar Talovac, il réclama son poste, et réussit à s'emparer de la plupart de ses terres. Pour se protéger contre les représailles de Jean Hunyade, il forma une alliance avec Stefan Vukčić Kosača. Il est mort le .
Cf. J. V. A. Fine, The Early Medieval Balkans, A Critical Survey from the Sixth to the Late Twelfth Century, Ann Arbour, University of Michigan Press, 1991, p. 551 & 552 - Hinko plemeniti Davila, Zagorska ruža, Zagreb, 1899
- Josip Eugen Tomić: Veronika Desinićka: historijska tragedija u četiri čina ("Veronika de Desinić, tragédie historique en quatre actes"), Matica hrvatska, Zagreb
- Ivo Šućuro: "Tragična ljubav Veronike Desinićke i mladoga grofa Fridriha Celjskog" (hr)
- "Veronika Desinićka", Wikipedija(hr)