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Tripneustes gratilla

Oursin bonnet de prĂŞtre, Oursin mitre, Oursin collecteur

L’oursin bonnet de prêtre (Tripneustes gratilla) est une espèce d'oursin régulier tropical de la famille des Toxopneustidae, caractérisé par des épines courtes réparties en bandes étroites. C'est un oursin venimeux.

Description

Gros plan sur les radioles et les podia d'un individu réunionnais.
Un oursin collecteur couvert de débris.
le crabe symbiote Zebrida adamsii sur un oursin collecteur.

C'est un oursin rĂ©gulier de forme presque sphĂ©rique, dont le diamètre peut aller jusqu'Ă  15 cm[1]. Les Ă©pines (« radioles ») sont fines et assez courtes, n'excĂ©dant pas cm, avec la base brune et la pointe d'un blanc plus ou moins sale (la rĂ©partition de ces couleurs sur le long des radioles Ă©tant variable, et une partie des piquants peuvent aussi adopter une coloration alternative, plus vive, notamment orangĂ©e). Ces radioles sont disposĂ©es en cinq fois deux bandes, bien dĂ©limitĂ©es, qui alternent avec dix larges bandes sans radioles (appelĂ©es aires ambulacraires), gĂ©nĂ©ralement sombres, souvent noires mais parfois colorĂ©es (vert, bleu, brun, violet ou pourpre), et d'aspect veloutĂ©[2]. Cet aspect est dĂ» au fait que la coquille (appelĂ©e « test Â») est recouverte d'une grande densitĂ© de pĂ©dicellaires venimeux, les bandes garnies d'Ă©pines Ă©tant pour leur part Ă©quipĂ©es de longs podia plus ou moins colorĂ©s et Ă  extrĂ©mitĂ© blanche, dont il se sert pour se fixer, se dĂ©placer mais aussi se couvrir de morceaux de dĂ©bris, qui lui servent de camouflage ou de protection[1]. La largeur relative de ces deux types de zones est très variables, et certains spĂ©cimens sont presque intĂ©gralement couverts de piquants quand d'autres en sont presque totalement dĂ©pourvus.


  • Tripneustes gratilla se recouvrant de dĂ©bris Ă  La RĂ©union.
    Tripneustes gratilla se recouvrant de débris à La Réunion.
  • Individu colorĂ© du Pacifique.
    Individu coloré du Pacifique.
  • Un individu très colorĂ© Ă  Taiwan.
    Un individu très coloré à Taiwan.
  • Les longs podia de cet oursin sont très visibles.
    Les longs podia de cet oursin sont très visibles.
  • Face orale. La symĂ©trie bi-pentaradiale est clairement visible.
    Face orale. La symétrie bi-pentaradiale est clairement visible.
  • Face aborale (supĂ©rieure) d'un test de T. gratilla
    Face aborale (supérieure) d'un test de T. gratilla
  • Face orale.
    Face orale.
  • SpĂ©cimen de musĂ©um (collection Lamarck, MNHN)
    Spécimen de muséum (collection Lamarck, MNHN)

RĂ©partition

Cet oursin relativement commun se rencontre dans toute la zone tropicale du bassin indo-pacifique. On le trouve sur les fonds riches en algues (principalement dans les herbiers), entre la surface et 75 m de profondeur, mais essentiellement Ă  faible profondeur[1].

Écologie et comportement

Cet oursin végétarien est principalement un brouteur d'algues[1], notamment des phanérogames marines comme Thalassodendron ciliatum et Syringodium isoetifolium[3].

La journée, il se recouvre souvent de cailloux, d'algues et de débris pour se dissimuler[1]. En cas de menace, cet oursin peut injecter un puissant venin contenu dans des pédicellaires particuliers, notamment au niveau du péristome[4].

La reproduction est gonochorique, et mâles et femelles relâchent leurs gamètes en même temps en pleine eau, où œufs puis larves vont évoluer parmi le plancton pendant quelques semaines avant de se fixer.

Cet oursin peut héberger certains symbiotes, comme les petites crevettes nettoyeuses du genre Periclimenes ou le crabe Zebrida adamsii, ou la minuscule crevette naine Gnathophylloides mineri, qui lui est un symbiote exclusif[5] .

Pour se protéger des prédateurs, ces oursins semblent capables de projeter un nuage de pédicellaires venimeux dans l'eau[6].

Tripneustes gratilla et l'Homme

C'est un animal courant dans certaines régions où les herbiers sont importants, et où les fréquents attroupements ont une capacité de broutage considérable.

Il convient de se méfier de cet oursin car son camouflage le rend souvent très discret, et ses pédicellaires sécrètent un puissant venin (une lectine appelée TGL-I[7]). L'envenimation provoque une réaction cutanée locale douloureuse accompagnée de nausées, myalgies et parfois d'un malaise général potentiellement dangereux ; ces symptômes peuvent persister jusqu'à 6h[4]. Comme pour l'espèce Toxopneustes pileolus, les pédicellaires de cet oursin semblent toutefois incapables de percer l'épiderme épais de certaines régions du corps comme la paume des mains, et ils semblent donc pouvoir être manipulés sans trop de risque, les envenimations se faisant plutôt sur des peaux plus fines (bras, torse) ou abîmées.

Les toxines de cet oursin sont également étudiées par les biologistes pour leurs potentielles propriétés pharmaceutiques[7].

En dépit de sa venimosité, cet animal est aussi apprécié en aquariophilie marine tropicale pour ses belles couleurs et sa facilité d'élevage[8].

L'oursin bonnet de prêtre est comestible, et notamment consommé aux Philippines, où il est surtout un produit d'exportation important, en direction du Japon où sa consommation est extrêmement populaire[9]. En ce qui concerne le territoire français, il est consommé à la Réunion[10].

Origine du nom

Son nom français fait naturellement rĂ©fĂ©rence Ă  son test veloutĂ© et parfois très colorĂ© ; dans le mĂŞme esprit, il est parfois aussi appelĂ© « oursin-mitre Â» ; son habitude de se couvrir de dĂ©bris (et notamment de coquillages) lui vaut aussi le surnom, traduit de l'anglais, d'« oursin collecteur Â» (ou « collectionneur Â»). Son nom scientifique est d'origine obscure : tri = trois, pneo = poumons, ce qui pourrait faire rĂ©fĂ©rence aux plaques ambulacraires trigĂ©minĂ©es (portant des triplets de paires de pores) de ce genre. Gratilla signifie « gracile » en latin. Il est appelĂ© parson's hat urchin ou collector urchin en anglais.

Sous-espèces

Tripneustes gratilla elatensis en Mer Rouge.

World Register of Marine Species (26 juin 2014)[11] donne deux variétés géographiques pour cette espèce :

  • sous-espèce Tripneustes gratilla elatensis Dafni, 1983 (Mer Rouge)
  • sous-espèce Tripneustes gratilla gratilla (Linnaeus, 1758) (Indo-Pacifique).

La sous-espèce de mer rouge, Tripneustes gratilla elatensis, a été décrite par J. Dafni en 1983[12] : elle se caractérise par ses gros pédicellaires blancs et ses longs podias rouges ; elle a aussi beaucoup moins de radioles (parfois on n'en voit aucune sur l'animal vivant) et un péristome plus large.

Les limites gĂ©ographiques de ces deux sous-espèces sont encore mal connue, et probablement permĂ©ables. La sous-espèce de la Mer Rouge, aux couleurs souvent plus visibles, semble pouvoir supporter des salinitĂ©s très Ă©levĂ©es (jusqu'Ă  45 ppm Ă  15 °C)[13]. Cette espèce Ă©tant très largement rĂ©partie et morphologiquement très variable, il est possible que d'autres crypto-sous-espèces existent.


  • Tripneustes gratilla elatensis
    Tripneustes gratilla elatensis
  • idem
    idem
  • Test (squelette)
    Test (squelette)

Références taxinomiques

Liens externes

Notes et références

  1. François Cornu, « Oursin bonnet de prêtre », sur Sous Les Mers (consulté le ).
  2. Alain Guille, Pierre Laboute et Jean-Louis Menou, Guide des étoiles de mer, oursins et autres échinodermes du lagon de Nouvelle-Calédonie, ORSTOM, , 244 p. (lire en ligne).
  3. Jean Maharavo, « Étude de l'oursin comestible Tripneutes gratilla (L. 1758) dans la région de Nosy Be (côte Nord Ouest de Madagascar) : densité, morphométrie, nutrition, croissance, processus reproducteurs, impact de l'exploitation sur les populations », Thèse de doctorat sous la direction de Régis-Marie Berthe (Université d'Aix-Marseille 3),‎ (lire en ligne).
  4. Dr Jean-Michel Rolland, « Pathologies liées à l'oursin », sur ARESUB, (consulté le )
  5. DORIS, consulté le 23 novembre 2022
  6. (en) Hannah Sheppard-Brennand, Alistair G. B. Poore et Symon A. Dworjanyn, « A Waterborne Pursuit-Deterrent Signal Deployed by a Sea Urchin », The American Naturalist,‎ (DOI 10.1086/691437, lire en ligne).
  7. (en) Nakagawa, H., Yamaguchi, C., Sakai, H. et al., « Biochemical and physiological properties of pedicellarial lectins from the toxopneustid sea urchins Â», Journal of natural toxins, 1999, Volume 8 n°3, p.297-308. lire en ligne
  8. Source : site AquaPortail.
  9. Camille Oger, « Le goût des oursins », sur LeManger.fr (consulté le )
  10. « L'oursin comestible (Tripneustes gratilla) », sur liledelareunion.com.
  11. World Register of Marine Species, consulté le 26 juin 2014
  12. (en) J. Dafni, « A new sub-species of Tripneustes gratilla (L.) from the northern Red Sea (Echinodermata: Echinoidea: Toxopneustidae) - See more at: http://www.nhm.ac.uk/our-science/data/echinoid-directory/taxa/taxon.jsp?id=952#sthash.VZMD9MLn.dpuf », Israeli Journal of Zoology, vol. 32,‎ , p. 1-12 (lire en ligne).
  13. SeaLifeBase, consulté le 26 juin 2014
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