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Transfert modal

Le transfert ou report modal désigne la modification des parts de marché des différents modes de transport entre elles. Elle est le plus couramment utilisée dans le sens de la promotion des alternatives à l'automobile, principalement dans et aux alentours des agglomérations. Ainsi, lorsque les pouvoirs publics déclarent vouloir "favoriser le transfert modal", ils sous-entendent généralement la diminution de l'utilisation de l'automobile au profit des modes de déplacement moins générateurs d'effets négatifs externes que sont typiquement la marche à pied, le vélo et les transports en commun. Plus précisément, le report modal suppose le report de l’usage particulier, individuel de la voiture vers l’usage de modes alternatifs, y compris des façons d’utiliser collectivement l’objet automobile.

Enjeux du transfert modal

Les transports automobiles engendrent un grand nombre d’effets positifs, que ce soit sur le plan du développement économique (« Là où passe la route, suit le développement ») et d’intégration sociale. Mais ces bénéfices ont des conséquences négatives pour l’environnement au sens large (naturel et humain) : on parle dans ce cas « d’effets négatifs externes ».

Ces « effets négatifs externes » sont nombreux et de différentes sortes : nuisances sonores, pollutions chimiques aériennes et liquides (dans ruissellement eaux de pluie), amenuisement des réserves énergétiques, effets de coupures, consommation d’espace, impacts paysagers. Les autres modes de transport sont également producteurs d’effets négatifs externes, mais la différence se joue principalement sur le fait que dans le cas d’un usage particulier de l’automobile, les effets négatifs produits rapportés au nombre de personnes transportées sont beaucoup plus importants que dans le cas de transports collectifs ou d’un usage partagé de l’automobile. Un bus articulé par exemple consomme plus d’énergie qu’une automobile, mais il transporte beaucoup plus de personnes : chaque voyageur du bus aura moins consommé d’énergie et moins émis de polluants chimiques pour se déplacer que les passagers de la voiture.

Mesures de transfert modal

Gêner l'usage de la voiture particulière

Ces premières mesures visent à rendre l'usage de la voiture particulière moins automatique. Il s’agit de faire appel à la raison économique (augmenter les coûts ou les temps de déplacement) tout autant que de rompre l’habitude et obliger à une remise en balance des différents modes.

  • le pĂ©age urbain, visant Ă  faire payer un forfait aux automobilistes qui entrent en zone centrale (ex. : pĂ©age de Londres ou de Stockholm)
  • la rĂ©duction des voies autorisĂ©es Ă  la circulation des voitures
  • la rĂ©duction du stationnement en voirie et/ou le rendre plus coĂ»teux
  • la limitation des vitesses autorisĂ©es (zone 30, quartier vert, zone piĂ©tonne)
  • la programmation des feux tricolores pour qu’ils arrĂŞtent systĂ©matiquement les voitures
  • l’organisation du plan de circulation de telle sorte qu’il complique le passage dans certaines zones (en particulier en zones centrales)

Favoriser un usage non particulier de l’objet voiture

L’objectif est d’assurer un remplissage plus important de chaque automobile, mais également de créer un écart entre usage et propriété de la voiture : si les personnes ne possèdent pas de voiture, elles ne feront la démarche de rechercher un conducteur ou de louer une voiture que pour les déplacements pour lesquels elles ne peuvent pas se passer de la voiture. Cela limite les automatismes du type : le soir, pour aller chercher la pizza ou louer une vidéo je prends la voiture puisqu’elle est disponible).

Aménager une ville dense

La voiture a favorisé la ville diffuse jusqu’à un point de non-retour, celui de la dépendance automobile [1]. Aujourd’hui, la ville diffuse, les couronnes périurbaines constituées de pavillons et ponctuées de loin en loin par des centres commerciaux ne peuvent plus être desservies que par l’automobile. Pour réduire l’usage de la voiture, ce sont donc de nouvelles formes urbaines qu’il faut faire émerger, plus denses, en particulier autour des gares.

  • Villes amĂ©nagĂ©es en fonction des plans de transport, en particulier dans le cas de villes nouvelles
  • Densification autour des gares et des nouvelles haltes
  • Villes denses de manière gĂ©nĂ©rale (plus faciles Ă  desservir par les transports collectifs mais Ă©galement Ă  pied)
  • Éviter les ruptures urbaines (linĂ©aires ou surfaciques) pour permettre des dĂ©placements locaux / Ă  faible vitesse

Rendre les modes alternatifs plus compétitifs au regard de l’automobile

L’enjeu est tout simplement de développer les transports alternatifs de manière à les rendre plus compétitifs dans le registre de performance de l’automobile : rapidité, flexibilité, portage. Un nombre très important de mesures peut être imaginé ; en voici quelques-unes :

  • Donner la prioritĂ© des bus et tramways aux feux
  • Augmenter les frĂ©quences de telle sorte que l’on puisse se rendre Ă  l’arrĂŞt sans avoir vĂ©rifiĂ© l’horaire auparavant, c’est-Ă -dire sans avoir planifiĂ© son voyage.
  • Augmenter les plages de service des transports collectifs. Si l’on veut rester en centre-ville après le travail mais que le service de transport collectif ne fonctionne plus, on paye une fois le taxi et la fois suivante on prend sa voiture dès le matin ("au cas oĂą").
  • Faciliter les courses sans voiture en mettant en place un système de livraison y compris pour les courses de dĂ©tail
  • RĂ©duire les itinĂ©raires vĂ©los (contre-sens cyclables / limiter les effets de coupure)
  • CrĂ©er des voies dĂ©diĂ©es pour les lignes de chemin de fer urbain

Améliorer l’image des modes alternatifs en développant leurs atouts propres

L’objectif est à la fois d’améliorer la praticité à l’usage des modes alternatifs et de communiquer autour de cela. La communication doit s’appuyer sur les atouts propres des modes alternatifs : valeur écologique, partage / solidarité / en commun (et non individualisme), faible coût, sécurité, bonne santé.

  • Campagnes de communication
  • Travail sur la forme des vĂ©hicules
  • Lignes de pĂ©dibus : donner l’habitude très tĂ´t aux enfants de ne pas associer voiture et dĂ©placement

Provoquer le choix modal

Il s'agit ainsi de rendre les personnes conscientes de leurs choix modal et éviter qu'elles ne prennent la voiture que par habitude, alors qu'un autre mode serait peut-être tout aussi pratique et d'un coût inférieur ou équivalent.

  • Offrir des tickets gratuits, par exemple Ă  l'occasion de la mise en service d’une nouvelle ligne
  • RĂ©aliser avec la personne (campagnes d’appels tĂ©lĂ©phoniques) le bilan de ses choix de dĂ©placements

Assurer une réserve de capacité au sein des transports publics

Ce n’est pas le tout de vouloir que les personnes cessent d’utiliser leur voiture, encore faut-il qu’elles puissent rejoindre les modes de transport alternatifs. S’il s’agit de modes non motorisés donc individuels, pas de problème. S’il s’agit de transports collectifs qui rencontrent un problème de congestion très fort, en particulier dans les grandes agglomérations, le report n’est pas envisageable.

  • Construire de nouvelles infrastructures, investir massivement dans les transports collectifs

Améliorer la sécurité des transports alternatifs individuels

Les deux-roues (motorisés ou non), mais également les piétons sont très vulnérables, ce qui peut freiner leur usage, en particulier chez les parents inquiets de la sécurité de leurs enfants.

  • Limitation des vitesses (zones 30)
  • Voies piĂ©tonnes
  • Villes sans signalisation / sans sĂ©paration de la chaussĂ©e : si tous les modes sont mĂ©langĂ©s, tous (surtout les plus dangereux) doivent faire attention Ă  ce qui se passe autour d’eux
  • Interdiction des 4x4 en ville, en particulier aux abords des Ă©coles

Permettre l’intermodalité

L’objectif est de provoquer un report modal sur une partie seulement du trajet. Puisque la voiture est le seul moyen de desservir efficacement les zones peu denses, autant essayer de réduire son usage dans les tronçons plus denses où elle gêne plus et où les transports collectifs sont plus compétitifs. Pour cela, il faut réduire au minimum la rupture de charge. Un système de transbordement pour voyageurs équivalent au ferroutage n’est malheureusement pas possible, mais :

  • Parcs-relais, c'est-Ă -dire parcs de stationnement associĂ©s Ă  des pĂ´les d'Ă©change, ce qui limite le coĂ»t de stationnement et le temps mis Ă  chercher une place
  • Favoriser les commerces et services au sein des pĂ´les d’échanges qui permettent aux usagers de rendre utile une rupture de charge obligatoire et leur Ă©vite d’avoir Ă  faire un dĂ©tour pour accĂ©der Ă  ces commerces et services

Notes et références

Références bibliographiques

Kaufmann, V., 2000. Mobilité quotidienne et dynamiques urbaines : la question du report modal, Lausanne: Presses polytechniques et universitaires romandes.

Notes

  1. Dupuy, G. 1999. La dépendance automobile : symptômes, analyses, diagnostics, traitements. Paris : Economica.
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