Traité de Tchernomen
Le traitĂ© de Tchernomen (en bulgare: ЧДŃĐœĐŸĐŒĐ”ĐœŃĐșĐž ĐŽĐŸĐłĐŸĐČĐŸŃ) fut un traitĂ© de dĂ©fense mutuelle entre lâEmpire bulgare et lâEmpire byzantin signĂ© vraisemblablement le par les empereurs Mikhail III Chichman Asen de Bulgarie et Andronic III PalĂ©ologue de Byzance. Nonobstant cet accord, les hostilitĂ©s entre les deux puissances reprirent dĂšs octobre de la mĂȘme annĂ©e et un nouveau traitĂ© dut ĂȘtre renĂ©gociĂ© en .
Type de traité | Accord de défense mutuelle |
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Signature | |
Lieu de signature | Tchernomen |
Parties |
Empire byzantin Empire bulgare |
Terminaison | Renégocié l'année suivante |
Contexte historique
Le dĂ©but de la dĂ©cennie 1320 fut marquĂ© par la guerre civile qui dĂ©buta Ă Constantinople lorsque le jeune Andronic III (r. 1297 â 1341), couronnĂ© coempereur durant sa jeunesse, se rĂ©volta contre son grand-pĂšre, Andronic II (r. 1282 â 1328). Il devait en rĂ©sulter en un partage des pouvoirs : Andronic III rĂšgnerait sur la Thrace avec Andrinople comme capitale, alors quâAndronic II continuerait Ă rĂ©gner Ă Constantinople et, en thĂ©orie, aurait la responsabilitĂ© de la politique Ă©trangĂšre. En dĂ©pit de cet arrangement, Andronic II nâeut aucun scrupule Ă nĂ©gocier avec ses voisins bulgares et serbes. La trĂȘve ne devait durer que quelques mois et dĂšs les hostilitĂ©s reprirent entre Andronic II et son petit-fils. Profitant de cette querelle, le tsar bulgare Georges II Terter (r. 1322-1323) sâavança en Thrace, occupant Philippopolis[1].
En une nouvelle trĂȘve fut conclue entre Andronic II et Andronic III et peu aprĂšs Georges Terter, le dernier de sa lignĂ©e, mourait ouvrant une crise de succession en Bulgarie. Pendant lâinterrĂšgne Byzance annexa une longue bande de terre au sud de la Bulgarie entre Sliven et Messembria, peuplĂ©e en grande partie de Grecs. Devant le danger dâune expansion de lâEmpire byzantin, les boyards bulgares dont certains possĂ©daient des terres dans la rĂ©gion choisirent comme nouveau tsar Mikhail (Michel) III Chichman Asen (r. 1323 â 1330), despote de Vidin et partisan dâAndronic III. DĂšs son intronisation, celui-ci dĂ©clara la guerre Ă Byzance et rĂ©cupĂ©ra une bonne partie du territoire perdu[2].
Le troisiĂšme protagoniste Ă©tait le roi de Serbie, Stefan UroĆĄ III DeÄanski (r. 1321-1331), partisan dâAndronic II, et beau-frĂšre de Michel III Chichman, lequel avait Ă©pousĂ© sa sĆur, Anna Neda, alors quâil Ă©tait despote de Vidin. Au cours des nĂ©gociations qui eurent lieu en 1323 ou 1324, Stefan UroĆĄ III fut convaincu, aprĂšs la mort de son Ă©pouse ThĂ©odora de Bulgarie, dâĂ©pouser Maria Palaiologina, petite-niĂšce de lâempereur Andronic II[3]. La Serbie sâĂ©loigna ainsi de la Bulgarie, les deux pays soutenant chacun lâun des clans opposĂ©s dans la guerre civile de Constantinople.
Le traité
Les sources diffĂšrent en ce qui concerne lâendroit oĂč le traitĂ© fut signĂ©. Jean CantacuzĂšne mentionne Tchernomen (aujourdâhui OrmĂ©nio en GrĂšce) alors que NicĂ©phore GrĂ©goras mentionne Didymotique (ville de Thrace au nord-est de la GrĂšce). Toutefois, CantacuzĂšne ayant participĂ© aux entretiens entre les deux empereurs, celui-ci est probablement la source la plus fiable. Ni lâun ni lâautre toutefois ne citent de date prĂ©cise; celle-ci est cependant mentionnĂ©e dans une autre chronique[4].
Michel III Chichman et Andronic III se rencontrĂšrent Ă Tchernomen sur la frontiĂšre byzantino-bulgare en . DĂ©sirant garder leurs nĂ©gociations Ă lâabri des informateurs dâAndronic II, ils prirent comme prĂ©texte une rĂ©union de famille, lâimpĂ©ratrice byzantine Rita dâArmĂ©nie dĂ©sirant retrouver sa fille, Maria Palaiologina quâelle nâavait pas vue depuis vingt-trois ans alors quâAndronic avait un Ă©gal dĂ©sir de revoir sa sĆur [5]. Dans son rĂ©cit de cette rencontre familiale, Jean CantacuzĂšne, prĂ©sent aux entretiens, se garde bien de mentionner leur vĂ©ritable raison dâĂȘtre se contentant de dĂ©crire les huit jours de rĂ©jouissances et de fĂȘtes auxquels elles donnĂšrent lieu[5] - [6] - [7].
Au cours de ces huit jours, les deux empereurs et leurs dĂ©lĂ©gations tinrent plusieurs sĂ©ances de nĂ©gociations. Il devait en rĂ©sulter un traitĂ© dâassistance mutuelle contre leurs ennemis rĂ©ciproques : lâempereur bulgare devait porter assistance Ă son collĂšgue byzantin, alors que ce dernier devait aider le Bulgare dans sa lutte contre les Serbes [6]. Il Ă©tait Ă©galement convenu que si Andronic III devenait seul empereur[N 1], il cĂ©derait Ă la Bulgarie plusieurs territoires frontaliers en plus de verser une somme importante Ă titre de dot[5]. Les deux parties y trouvant leur avantage, le traitĂ© fut conclu sans difficultĂ© : Michel III Chichman dĂ©sirait reconquĂ©rir la MacĂ©doine, alors quâAndronic III se prĂ©parait pour lâultime confrontation avec son grand-pĂšre[6].
Les suites
En dĂ©pit de ce traitĂ©, les hostilitĂ©s reprirent dĂšs lâautomne 1327 permettant Ă Andronic III de se soumettre la MacĂ©doine et de capturer Thessalonique, la deuxiĂšme citĂ© en importance de lâempire, en [6] - [8]. Surpris par la victoire soudaine de son « alliĂ© », Michel Chichman se tourna vers Andronic II en Ă©change dâune remise de tous les territoires frontaliers et dâune importante somme dâargent. Il envoya aussi au vieil empereur une garde de trois mille cavaliers sous le commandement dâIvan le Russe, prĂ©tend-il pour le protĂ©ger, en rĂ©alitĂ© pour le capturer et devenir maĂźtre de Constantinople. Andronic III cependant eut vent de la chose; le complot Ă©choua et le dĂ©tachement bulgare dut retourner dans son pays[9] - [10].
AprĂšs de nombreuses dĂ©monstrations de force et accusations de violations du traitĂ©, les deux empereurs renĂ©gociĂšrent celui-ci en . Les Bulgares sâengageaient Ă ne pas sâemparer de territoires byzantins et obtenaient un large dĂ©dommagement monĂ©taire [11] - [12]. Alors que les relations entre la Serbie et la Bulgarie en venaient au point de rupture[8], les deux empereurs organisĂšrent une nouvelle rencontre Ă Krimni entre Sozopol et Anchialos au dĂ©but de 1329 et conclurent « une paix dĂ©finitive et une alliance Ă©ternelle »[13]. Ils convinrent dâattaquer conjointement la Serbie, leurs deux armĂ©es devant se rejoindre en MacĂ©doine. Mais les Serbes rĂ©ussirent Ă intercepter lâarmĂ©e bulgare avant que celle-ci nâait pu effectuer sa jonction et la Bulgarie fut vaincue Ă la bataille de Velbajd le au cours de laquelle Michel III fut mortellement blessĂ©[14]. Apprenant la chose, Andronic III dĂ©cida dâabandonner la campagne contre la Serbie et se retourna contre la Bulgarie.
Voyant le danger, le nouvel empereur bulgare, Ivan Aleksander Asen dĂ©cida de se rapprocher des Serbes. En 1332, il conclut un traitĂ© de paix avec eux, confirmĂ© par le mariage entre le roi serbe Stefan UroĆĄ IV DuĆĄan et la sĆur de l'empereur, Elena. Au cours de l'Ă©tĂ© de la mĂȘme annĂ©e, les Byzantins rassemblĂšrent une armĂ©e et avancĂšrent Ă travers la Bulgarie. Ils devaient toutefois ĂȘtre vaincus Ă la bataille de Rusokastro, le [15] - [16].
Ce devait ĂȘtre la derniĂšre bataille entre l'Empire bulgare et l'Empire byzantin. Les Bulgares rĂ©cupĂšrent les territoires qu'ils avaient perdus en Thrace tout en renforçant leur position internationale. Le successeur de l'empereur bulgare Michael Assen, ĂągĂ© de 18 ans, Ă©pousa Maria, la fille de l'empereur byzantin Andronic III, permettant ainsi de cimenter la paix entre les deux Ătats.
Bibliographie
- (bg) Andreev, Jordan; Milcho Lalkov. The Bulgarian Khans and Tsars. Veliko Tarnovo, Abagar, 1996. (ISBN 954-427-216-X).
- (bg) Bozhilov, Ivan; Vasil Gyuzelev . History of Medieval Bulgaria 7th-14th Centuries. Sofia, Anubis, 1999. (ISBN 954-426-204-0).
- (fr) Bréhier, Louis. Vie et mort de Byzance, Paris, Albin Michel, coll. « L'évolution de l'humanité », 1946 (ISBN 2-226-05719-6).
- (fr) CantacuzĂšne, Jean-Michel. Mille ans dans les Balkans : chronique des CantacuzĂšne dans la tourmente des siĂšcles, Paris, Ăditions Christian, 1992, 494 p. (ISBN 2-86496-054-0).
- (en) Fine, J. The Late Medieval Balkans. A Critical Survey from the Late Twelfth Century to the Ottoman Conquest. Ann Arbor, The University of Michigan Press, 1987. (ISBN 0-472-10079-3).
- (bg) Greek Sources for Bulgarian History (GIBI), volume X. Sofia, Izdatelstvo na BAN, 1980.
- (fr) Ostrogorsky, Georges. Histoire de lâĂtat byzantin. Paris, Payot, 1983 [1956]. (ISBN 2-228-07061-0).
- (en) Rogers, Clifford. The Oxford Encyclopedia of Medieval Warfare and Military Technology: Vol. 1, Oxford, Oxford University Press, 2010. (ISBN 978-0-195-33403-6).
- (en) Shepard, Jonathan (ed). The Cambridge History of the Byzantine Empire c. 500-1492. Cambridge, Cambridge University Press, 2008. (ISBN 978-0-521-83231-1).
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Treaty of Chernomen » (voir la liste des auteurs).
Notes
- Il fut co-empereur du 2 février 1325 au 23 mai 1328 et seul empereur du 23 mai 1328 au 15 juin 1341.
Références
- Fine (1987) pp. 250-251
- Fine (1987) pp. 269-279
- Fine (1987) p. 270
- Bozhilo, Gyuzelev (1999) p. 565
- Andreev (1996) p. 259
- Bozhilov, Gyuzelev (1999) p. 566
- GIBI (1980) p. 235
- Fine (1987) p. 252
- Andreev (1996) pp. 256-260
- GIBI (1980) pp. 255-259
- Andreev (1996) p. 261
- Bozhilov (1999) pp. 567-568
- Bozhilov (1999) p. 568
- Andreev (1996) pp. 263-264
- Andreev (1996) p. 269
- Rogers 2010, p. 288