Tragédie de Mocoa
La tragédie de Mocoa est une coulée de boue qui a eu lieu le à Mocoa, dans le sud de la Colombie. C'est l'une des pires catastrophes naturelles de l'histoire du pays[2]. Au , le bilan des victimes s'élève à 323 morts, 332 blessés et 103 disparus.
DĂ©roulement
Dans la nuit du au , 130 millilitres de pluie, soit 30 % de la moyenne mensuelle, sont tombĂ©s sur Mocoa[2]. Les pluies sont particulièrement abondantes de 23 h Ă 1 h du matin[3]. Ces fortes prĂ©cipitations ont abouti Ă la montĂ©e des eaux simultanĂ©e des rĂos Mocoa, Mulato et Sancoyaco qui entourent la municipalitĂ© colombienne[4]. Vers 23 h 30[5], s'ensuit une immense coulĂ©e de boue et de divers matĂ©riaux charriĂ©s qui frappe Mocoa, emportant sur son passage plusieurs habitations, des vĂ©hicules, des arbres, et au moins deux ponts[6].
Le président colombien Juan Manuel Santos est averti à 5 h des faits, un premier bilan de 14 morts lui étant annoncé[3].
Raisons du drame
Les pluies torrentielles Ă l'origine des crues des rivières autour de Mocoa sont dues au phĂ©nomène climatique El Niño[2]. Cette coulĂ©e de boue peut Ă©galement ĂŞtre expliquĂ©e par un phĂ©nomène bien moins naturel, Ă savoir la dĂ©forestation intensive du secteur qui a rendu Mocoa plus vulnĂ©rable aux glissements de terrain, les rivières ne rencontrant aucun obstacle en sortant de leur lit[7]. Ainsi, le , après le drame, Luis Alexander MejĂa, le directeur de Corpo Amazonia, une agence environnementale rĂ©gionale, a dĂ©clarĂ© avoir « clairement vu que l'utilisation inadĂ©quate des sols a activĂ© d'anciens glissements de terrain et en a crĂ©Ă© de nouveaux » au terme d'un survol de la zone dĂ©vastĂ©e[8].
D'après l’ex-ministre de l’Environnement Adriana Soto : « Le premier facteur, c’est le changement climatique. Partout dans le monde, nous assistons à une multiplication des événements climatiques extrêmes. Le second facteur est lié à la déforestation dans le bassin de Mocoa, qui favorise les glissements de terrain et les avalanches ; les rivières qui entourent la ville n’ont trouvé aucun obstacle en sortant de leur lit[9] ».
Bilan et conséquences
Bilan humain
Le au soir, à l'issue de la fermeture de la « fenêtre des 72 heures », durant laquelle des vies peuvent encore être sauvées après une catastrophe, le président Juan Manuel Santos déclare que le bilan est de 273 morts et 262 blessés[10]. De son côté, la Croix-Rouge dénombre 220 disparus, estimant par ailleurs qu'environ 45 000 habitants de Mocoa ont été affectés par la coulée de boue[10].
Selon un bilan officiel du , la coulée de boue a fait 323 morts, 332 blessés et 103 disparus[1]. Parmi les disparus, la moitié sont des mineurs de moins de 18 ans[1]. De plus, le bilan fait état de 5 883 familles sinistrées et de 1 869 hébergées dans des refuges[1].
Secours
Au , plus de 2 500 personnes, dont 800 policiers, 1 400 soldats de l'Armée et 300 secouristes, sont déployées sur le terrain pour venir en aide aux victimes[11]. L'armée fournit également 63 véhicules, 10 hélicoptères, 7 bateaux et 6 avions pour l'opération de sauvetage[11].
Juan Manuel Santos décrète l'état de « calamité publique » le [6], à savoir une situation d'urgence économique, sociale et écologique, qui devrait permettre aux autorités de mettre en œuvre rapidement la reconstruction[10]. Il nomme son ministre de la Défense, Luis Carlos Villegas, chargé de la reconstruction[10]. Par ailleurs, le gouvernement approuve le versement de 40 milliards de pesos à l'Unité nationale de gestion du risque de catastrophe (UNGRD) qui dirige la réparation des infrastructures de Mocoa[10]. Pour éviter des épidémies, le gouvernement lance également une campagne de prévention et de vaccination[10]. De plus, des kits de produits alimentaires et d'hygiène ont été distribués tandis qu'une assistance psychologique et cinq refuges ont été mis en place pour les sinistrés[10].
Les FARC proposent d'envoyer sur place une colonne de 400 guérilleros pour aider à la recherche des survivants et à la reconstruction[12].
Reconstruction
Le , les services énergétiques et la communication terrestre avec le reste du pays sont rétablis à Mocoa[13]. Néanmoins, les autorités estiment que la reconstruction de la ville pourrait prendre jusqu'à deux ans[13]. Le , le président Santos clôture la phase d'urgence, annonçant que les opérations de réhabilitation de la ville entrent dès lors dans une étape de « stabilisation »[1].
EnquĂŞte
Le , une enquête est ouverte quant aux circonstances du drame. La juge chargée de l'enquête évoque des soupçons de négligence de la part des autorités[14]. Selon les autorités judiciaires, l'objectif de cette procédure est de déterminer quelles mesures « préventives ou correctives » auraient pu être prises pour éviter la catastrophe[14]. Il est prévu que plusieurs personnes soient entendues, dont le maire de Mocoa, le gouverneur du Putumayo et leurs prédécesseurs, ainsi que les responsables d'entités chargés de la prévention des désastres et des membres de Corpo Amazonia[14].
Polémiques
Selon les habitants de cette zone considérée à risque d'après un documentaire, cette tragédie « était prévisible » et le débordement des trois cours d'eau environnants de Mocoa « était prévu »[15].
Les environnementalistes qui luttent contre la déforestation en Colombie confirment que cette catastrophe était « prévisible ». Ainsi, Corpo Amazonia et le gouvernement du Putumayo avaient rendu un rapport établi en aux autorités locales et nationales[8]. Avec l'aide du Service géologique colombien, les risques de glissements de terrain et d'inondations autour de Mocoa y avaient été modélisés[8]. Cette étude recommandait aussi l'évacuation d'une partie de la municipalité de Mocoa, notamment du quartier San Miguel le plus touché par la coulée de boue, et le relogement de ses habitants[7] - [8]. Alors que les autorités locales savaient que cette zone était particulièrement exposée à une inondation car construites sur l'ancien emplacement des lits des rivières avoisinantes, aucune mesure de prévention n'avait été prise[8].
Corpo Amazonia demande le , après le drame, la mise en place d'un système d'alerte précoce sur la montée des eaux pour éviter de telles catastrophes[10].
Un sénateur du Centre démocratique, parti conservateur hostile au processus de paix, prétend « détenir des informations » prouvant que la coulée de boue avait été causée par des explosifs placés par les FARC. Devant le tollé provoqué par sa déclaration, il se rétracte[12].
Notes et références
- « SColombie : le bilan de la coulée de boue de Mocoa s'alourdit à 323 morts », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- « Colombie : recherches désespérées pour des survivants après l'immense coulée de boue », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- (es) « Noche trágica en Mocoa por avalancha », El Espectador,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- (es) « Tragedia en Mocoa: desbordamiento de tres rĂos acaba con la vida de 176 personas », El Espectador,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
- « Coulée de boue en Colombie : 200 morts et des centaines de disparus », Ouest-France,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- AFP et Reuters, « La Colombie en deuil à la suite d’une coulée de boue dévastatrice qui a fait 200 morts », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Christelle Guibert, « Coulée de boue en Colombie. La déforestation à l'origine du drame », Ouest-France,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Aude Massiot, « Colombie: les autorités étaient au courant des graves risques de coulées de boue », Libération,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- « En Colombie, la coulée de boue a été causée par la déforestation », sur Reporterre
- « Mocoa décrétée en situation d'urgence », Le Parisien,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- (es) « Tragedia en Mocoa: van 254 muertos y centenares de heridos por avalancha », Semana,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- « Le drame de Mocoa ravive les rivalités politiques en Colombie », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
- (es) « Sube a 320 el número de muertos por avalancha de Mocoa », El Heraldo,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- « Coulée de boue en Colombie : le bilan grimpe à 290 morts, une enquête ouverte », Le Parisien,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- G.D. avec AFP, « Colombie: la tragédie de Mocoa était "prévisible" », BFM TV,‎ (lire en ligne, consulté le ).