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TĂȘte de moine

La TĂȘte de Moine AOP est une appellation suisse prĂ©servĂ©e par une AOP suisse dĂ©signant un fromage Ă  base de lait de vache cru et entier.

TĂȘte de Moine AOP
Pays d’origine
RĂ©gion
Zone de montagne du canton du Jura et du Jura bernois
Lait
PĂąte
Appellation

Ce fromage est unique par son mode de consommation sous forme de rosettes obtenues à l'aide de la « girolle ».

Origine géographique

Il est fabriqué dans le canton du Jura et au Jura bernois, la région francophone du canton de Berne. Il provient plus précisément de l'abbaye de Bellelay, située dans la commune de Saicourt, dans l'arrondissement du Jura bernois. Actuellement, moins de dix fromageries de la région de montagne des districts des Franches-Montagnes, de Porrentruy dans le canton du Jura et des anciens district de Moutier et de Courtelary transforment du lait pour fabriquer ce fromage.

Histoire

Les moines de l'Abbaye de Bellelay commencÚrent à le produire il y a plus de huit siÚcles[1]. Il bénéficie d'une AOC suisse depuis janvier 2001[2], devenue une AOP suisse en 2011.

DĂšs l'an 1192[1], des Ă©crits attestent que ce fromage des abbĂ©s avait acquis une telle rĂ©putation qu'il servait Ă  payer les redevances des fermiers aux propriĂ©taires, Ă  rĂ©gler les litiges, Ă  ĂȘtre offert en cadeau aux princes-Ă©vĂȘques de BĂąle ou bien encore de monnaie d'Ă©change. La description la plus ancienne du fromage de Bellelay date de l'annĂ©e 1628. Il est indiquĂ© que l'on doit utiliser pour ce fromage « un lait trĂšs gras d'excellente qualitĂ© issu des meilleures herbes et plantes du pays »[3]. Une lettre datĂ©e du envoyĂ©e par l'abbĂ© de Bellelay au prince-Ă©vĂȘque de BĂąle mentionne le fromage de Bellelay (Belleley Kess)[4] - [5].

À la suite des troubles de la RĂ©volution française, les moines furent chassĂ©s de l'abbaye en 1797. Le fromage continua cependant Ă  ĂȘtre produit dans les fromageries des domaines de l'ancienne abbaye.

Vers le milieu du XIXe siÚcle, un paysan de Bellelay, A. Hofstetter, parvint à donner un nouvel essor à la production. Il reçut un prix au Concours universel de Paris en 1855 et des distinctions à d'autres expositions.

Dans la premiĂšre partie du 20e siĂšcle, les fromageries fermiĂšres se dĂ©veloppĂšrent pour devenir des fromageries villageoises, et la production de fromage augmenta. À partir des annĂ©es 1970, des Ă©vĂ©nements importants ouvrirent un nouveau chapitre de l’histoire de la TĂȘte de Moine AOP. Pour commercialiser la TĂȘte de Moine AOP et pour promouvoir les ventes, les fromageries s’unirent, en 1978, dans l’Association des fabricants de TĂȘte de Moine (AFT)[6].

En 1997, les producteurs, fromagers, affineurs et commerçants fondent l’Interprofession TĂȘte de Moine. Un autre Ă©vĂ©nement important fut l’invention de la GirolleÂź originale en 1982 par Nicolas Crevoisier. Cet outil permet de donner Ă  la TĂȘte de Moine AOP sa forme unique et de dĂ©velopper toute la subtilitĂ© de sa saveur[6].

Depuis 2001, la « TĂȘte de Moine, Fromage de Bellelay » est enregistrĂ©e comme Appellation d’origine protĂ©gĂ©e, portant le label de qualitĂ© AOP (Appellation d’origine protĂ©gĂ©e). D’abord connue comme AOC (Appellation d’origine contrĂŽlĂ©e), le label est devenu AOP (Appellation d’origine protĂ©gĂ©e) en 2010. L’annĂ©e d’aprĂšs, en 2002, les producteurs de lait fondent l’Association des producteurs de lait de TĂȘte de Moine (APLT), servant Ă  dĂ©fendre leurs intĂ©rĂȘts[6].

Le fromage de Bellelay est rebaptisĂ© « tĂȘte de Moine » Ă  la fin du XVIIIe siĂšcle[7] - [8]. Les avis divergent quant Ă  la signification du nom lui-mĂȘme [9]. La « TĂȘte de Moine » doit son nom, selon des histoires racontĂ©es dans le canton du Jura, Ă  une coutume pratiquĂ©e jadis Ă  l'abbaye de Bellelay, oĂč le prieur recevait chaque annĂ©e une piĂšce de fromage par « tĂȘte de moine » ou de la quantitĂ© de fromages stockĂ©e Ă  l'Abbaye « par tĂȘte de moine », ce qui aurait donnĂ©, par extension, son nom au fromage lui-mĂȘme.

Caractéristiques

C'est un fromage au lait cru et entier de vache, Ă  pĂąte pressĂ©e demi-cuite ou mi-dure. Actuellement son poids moyen est de 850 grammes, alors qu'Ă  l'Ă©poque son poids pouvait aller jusqu'Ă  2 kg. Il est caractĂ©risĂ© par une forme cylindrique a un diamĂštre de 10 Ă  15 cm dont la hauteur reprĂ©sente 70 % Ă  100 % du diamĂštre. La croĂ»te de couleur brun-rouge est ferme, grainĂ©e, emmorgĂ©e, humide et saine ; la pĂąte de couleur ivoire Ă  jaune pĂąle est homogĂšne, lĂ©gĂšrement humide, adhĂ©sive et crĂ©meuse. En raison de sa texture fine, la TĂȘte de Moine AOP n’est pas coupĂ©e en tranches, mais raclĂ©e Ă  l’aide d’une GirolleÂź originale ou d’un outil similaire pour obtenir des rosettes. La teneur en matiĂšre grasse est en moyenne de 525 g/kg en poids de matiĂšre grasse dans l’extrait sec et au minimum de 315 g/kg en poids de matiĂšre grasse dans le fromage ; la teneur en sel est au maximum de 25 g/kg de fromage[10].

Il est consommable idéalement avec un vin blanc sec, aprÚs un affinage de 2,5 mois minimum sur planchette d'épicéa. Sa meilleure période de consommation s'étend de septembre à décembre[11].

Fabrication selon la recette originale

Le TĂȘte de Moine AOP est un produit de qualitĂ© trĂšs Ă©levĂ©e, fabriquĂ© par les fromageries de la rĂ©gion selon une procĂ©dure traditionnelle et une recette originale conformĂ©ment aux exigences du cahier des charges AOP. La description Ă©crite la plus ancienne de la TĂȘte de Moine AOP date de l’annĂ©e 1628. DĂ©jĂ  Ă  cette Ă©poque, il Ă©tait indiquĂ© qu’il fallait utiliser pour ce fromage « un lait gras d’excellente qualitĂ©, issu des meilleures herbes et plantes du pays ». Pour garantir la qualitĂ© de la fraĂźcheur, la production laitiĂšre et le conditionnement du lait frais se font dans la rĂ©gion AOP. Le fourrage des vaches laitiĂšres doit ĂȘtre entiĂšrement issu de la base fourragĂšre appartenant Ă  la ferme ou des pĂąturages communautaires limitrophes, sur lesquels le bĂ©tail doit ĂȘtre mis en pĂąture au moins 120 jours. Les producteurs de lait, les fromagers et les affineurs travaillent avec les moyens les plus modernes, tout en respectant le savoir-faire artisanal traditionnel. L’emploi de la somatotropine, d’urĂ©e, de produits contenant de l’urĂ©e, de farines animales et d'hormones de croissance ou de produits du mĂȘme type, ainsi que la distribution de fourrages ensilĂ©s, sont interdits[12].

Au bain de saumure suit le temps d’affinage, pendant lequel les meules doivent ĂȘtre entreposĂ©es et affinĂ©es au moins 75 jours sur des planchettes en Ă©picĂ©a dans l’aire gĂ©ographique[12].

Le contrĂŽle qualitĂ© de la TĂȘte de Moine AOP se fait selon les critĂšres dĂ©finis dans le cahier des charges AOP. Chaque mois, une commission effectue une « taxation » (contrĂŽle qualitĂ© et validation) dans les caves des fromageries, Ă©valuant le fromage selon les quatre critĂšres suivants : caractĂ©ristiques optiques extĂ©rieures, ouverture, pĂąte (couleur, raclabilitĂ©), ainsi qu’odeur et goĂ»t. Si le fromage n’atteint pas la qualitĂ© requise, il n’est pas (ne doit pas) ĂȘtre commercialisĂ© sous la dĂ©nomination « TĂȘte de Moine AOP »[12].

La production Ă©tait de 30 tonnes en 1960, puis passe Ă  200 tonnes en 1980[13]. Avec l'invention de la girolle, les ventes explosent : avec 1 200 tonnes produit en 1997, 2 191 tonnes en 2012, 2 700 tonnes en 2019, puis 3 000 tonnes en 2021[14].

La tĂȘte de moines est exportĂ©e dans 45 pays[13].

Le chiffre d'affaires est d'environ 90 millions de francs suisses[13].

La girolle et son influence

Rosette de TĂȘte de Moine obtenue grĂące Ă  une girolle

SpĂ©cialement Ă©tĂ© inventĂ©e pour la TĂȘte de Moine AOP Ă  Lajoux par Nicolas Crevoisier en 1981[2], et brevetĂ©e en 1982, la « GirolleÂź » est un appareil qui permet de faire des « rosettes de TĂȘte de Moine » en faisant tourner un racloir sur un axe plantĂ© dans le centre du fromage[15]. Cet appareil donna une impulsion dĂ©cisive Ă  la demande et donc Ă  la production de ce fromage[16].

La GirolleÂź est composĂ©e d’une planche en bois ronde, dotĂ©e d’une tige verticale au milieu et d’une manivelle. Le fromage cylindrique est d’abord coupĂ© en deux, puis plantĂ© sur la tige[17]. Le fromage Ă©tait servi en raclant la surface du fromage avec un couteau, dans un geste circulaire, pour en faire comme des copeaux. Cela nĂ©cessitait une certaine habiletĂ©, et expliquait aussi une certaine lenteur dans le service. Le geste rappelle la tonsure moniale et donne une autre explication au nom du fromage.

Notes et références

  1. Histoire de la TĂȘte de Moine AOC ; selon J-P PronguĂ©, La Franche-Montagne de Muriaux Ă  la fin du Moyen Age, thĂšse, Porrentruy, SJE, 2000, p 157 n. 118, la premiĂšre mention de fromages de Bellelay dans un acte remonte Ă  1346.
  2. « Histoire - TĂȘte de moine AOP - Fromage de Bellelay », sur tetedemoine.ch (consultĂ© le )
  3. Guido Burkhalter, Le fromage de Bellelay et sa rĂ©gion d'origine, Schaffhouse, KĂŒhn, 1979, p.16
  4. Mention du « fromage de Bellelay » dans une lettre datĂ©e du 16 aoĂ»t 1570 que l'abbĂ© de Bellelay de l'Ă©poque adresse au prince-Ă©vĂȘque de BĂąle. Il y est question de « dryssig Belleley kess » (« trente fromages de Bellelay ») que l'abbĂ© a fait livrer.
  5. La Liberté, 8 août 2009.
  6. « Histoire - TĂȘte de moine AOP - Fromage de Bellelay », sur www.tetedemoine.ch (consultĂ© le )
  7. La premiÚre mention de ce nom se trouve dans les actes du Département du Mont-Terrible, (la région avait été annexée par la France et transformée en département).
  8. Dans un document, dans les années 1790, imprimé portant le titre « Tableau du maximum des objets de premiÚre nécessité ».
  9. (cf. Guido Burkhalter, La TĂȘte de Moine (fromage de Bellelay) et sa rĂ©gion d'origine, Schaffhouse, KĂŒhn, 1979, p.8)
  10. « Cahier des charges - TĂȘte de moine AOP - Fromage de Bellelay », sur www.tetedemoine.ch (consultĂ© le )
  11. Pierre Breteau, « Manger du reblochon l’étĂ©, du mont-d’or l’hiver : quelle saisonnalitĂ© pour les fromages ? » AccĂšs libre, sur Les DĂ©codeurs, Le Monde, (consultĂ© le )
  12. « Fabrication - TĂȘte de moine AOP - Fromage de Bellelay », sur www.tetedemoine.ch (consultĂ© le )
  13. « La TĂȘte de Moine fĂȘte ses 20 ans d'appellation d'origine protĂ©gĂ©e », sur rts.ch, (consultĂ© le )
  14. « Records de production et de vente pour la TĂȘte de Moine AOP », sur rts.ch, (consultĂ© le )
  15. « La girolle, le coup de gĂ©nie qui a boostĂ© la tĂȘte de moine il y a 40 ans », sur rts.ch, (consultĂ© le )
  16. « MĂ©dias - TĂȘte de moine AOP - Fromage de Bellelay », sur tetedemoine.ch (consultĂ© le )
  17. « Astuces - TĂȘte de moine AOP - Fromage de Bellelay », sur www.tetedemoine.ch (consultĂ© le )

Annexes

Bibliographie

  • Bellelay et son fromage la tĂȘte de moine, DelĂ©mont, 1947

Articles connexes

Liens externes

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