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Rudolf Haag

Rudolf Haag ( - ) est un physicien théoricien allemand, qui traite principalement des questions fondamentales de la théorie quantique des champs. Il est l'un des fondateurs de la formulation moderne de la théorie quantique des champs et il identifie la structure formelle en termes de principe de localité et d'observables locaux. Il fait également d'importantes avancées dans les fondements de la mécanique statistique quantique[1].

Biographie

Rudolf Haag est nĂ© le 17 aoĂ»t 1922 Ă  TĂŒbingen, ville universitaire au centre du Bade-Wurtemberg. Sa famille appartient Ă  la classe moyenne cultivĂ©e. La mĂšre de Haag est l'Ă©crivaine et femme politique Anna Haag[2]. Son pĂšre, Albert Haag, est professeur de mathĂ©matiques dans un lycĂ©e. AprĂšs avoir terminĂ© ses Ă©tudes secondaires en 1939, il rend visite Ă  sa sƓur Ă  Londres peu avant le dĂ©but de la Seconde Guerre mondiale. Il est internĂ© comme Ă©tranger ennemi et passe la guerre dans un camp de civils allemands au Manitoba. LĂ , il utilise son temps libre aprĂšs le travail obligatoire quotidien pour Ă©tudier la physique et les mathĂ©matiques en autodidacte[3].

AprĂšs la guerre, Haag retourne en Allemagne et s'inscrit Ă  l'UniversitĂ© technique de Stuttgart en 1946, oĂč il obtient son diplĂŽme de physicien en 1948. En 1951, il obtient son doctorat Ă  l'UniversitĂ© de Munich sous la direction de Fritz Bopp et devient son assistant jusqu'en 1956. En avril 1953, il rejoint le groupe d'Ă©tude thĂ©orique du CERN Ă  Copenhague, dirigĂ© par Niels Bohr[4] - [5]. AprĂšs un an, il retourne Ă  son poste d'assistant Ă  Munich et termine l'habilitation allemande en 1954. De 1956 Ă  1957, il travaille avec Werner Heisenberg Ă  l'Institut Max-Planck de physique de Göttingen[6].

De 1957 Ă  1959, il est professeur invitĂ© Ă  l'UniversitĂ© de Princeton et de 1959 Ă  1960, il travaille Ă  l'UniversitĂ© de Marseille. Il devient professeur de physique Ă  l'UniversitĂ© de l'Illinois Ă  Urbana-Champaign en 1960. En 1965, il fonde avec Res Jost la revue Communications in Mathematical Physics. Haag est le premier rĂ©dacteur en chef jusqu'en 1973[7]. En 1966, il accepte le poste de professeur de physique thĂ©orique Ă  l'UniversitĂ© de Hambourg, oĂč il reste jusqu'Ă  sa retraite en 1987[8]. AprĂšs sa retraite, il travaille sur le concept de l'Ă©vĂ©nement physique quantique[9].

Haag dĂ©veloppe un intĂ©rĂȘt pour la musique Ă  un Ăąge prĂ©coce. Il commence l'apprentissage du violon, mais prĂ©fĂšre plus tard le piano, dont il joue presque tous les jours. En 1948, Haag Ă©pouse KĂ€the Fues, avec qui il a quatre enfants, Albert, Friedrich, Elisabeth et Ulrich. AprĂšs sa retraite, il dĂ©mĂ©nage avec sa seconde Ă©pouse Barbara Klie, Ă  Schliersee, un village pastoral dans les montagnes bavaroises. Il est dĂ©cĂ©dĂ© le 5 janvier 2016, Ă  Fischhausen-Neuhaus, dans le sud de la BaviĂšre[10].

CarriĂšre scientifique

Au dĂ©but de sa carriĂšre, Haag contribue de maniĂšre significative aux concepts de la thĂ©orie quantique des champs, notamment le thĂ©orĂšme de Haag, d'oĂč il rĂ©sulte que l'image d'interaction de la mĂ©canique quantique n'existe pas dans la thĂ©orie quantique des champs. Une nouvelle approche de la description des processus de diffusion des particules est nĂ©cessaire. Au cours des annĂ©es suivantes, Haag dĂ©veloppe ce que l'on appelle la thĂ©orie de la diffusion Haag-Ruelle[11].

Au cours de ce travail, il se rend compte que la relation rigide entre les champs et les particules qui a Ă©tĂ© postulĂ©e jusque-lĂ , n'existe pas, et que l'interprĂ©tation des particules doit ĂȘtre basĂ©e sur le principe de localitĂ© d'Albert Einstein, qui attribue des opĂ©rateurs aux rĂ©gions d'espace-temps. Ces idĂ©es trouvent leur formulation finale dans les axiomes de Haag-Kastler pour les observables locaux des thĂ©ories quantiques des champs[12]. Ce cadre utilise des Ă©lĂ©ments de la thĂ©orie des algĂšbres d'opĂ©rateurs et est donc appelĂ© thĂ©orie quantique algĂ©brique des champs ou, du point de vue physique, physique quantique locale[13].

Ce concept s'avĂšre fructueux pour comprendre les propriĂ©tĂ©s fondamentales de toute thĂ©orie dans l'espace de Minkowski Ă  quatre dimensions. Sans faire d'hypothĂšses sur les champs de changement de charge non observables, Haag, en collaboration avec Sergio Doplicher et John E. Roberts, Ă©lucide la structure possible des secteurs de sursĂ©lection des observables dans les thĂ©ories avec des forces Ă  courte portĂ©e. Les secteurs peuvent toujours ĂȘtre composĂ©s les uns avec les autres, chaque secteur satisfait les statistiques para- Bose ou para-Fermi et pour chaque secteur il y a un secteur conjuguĂ©. Ces informations correspondent Ă  l'additivitĂ© des charges dans l'interprĂ©tation des particules, Ă  l'alternative de Bose-Fermi pour les statistiques des particules et Ă  l'existence d'antiparticules. Dans le cas particulier des secteurs simples, un groupe de jauge global et des champs porteurs de charge, qui peuvent gĂ©nĂ©rer tous les secteurs Ă  partir de l'Ă©tat de vide, sont reconstruits Ă  partir des observables[14] - [15]. Ces rĂ©sultats sont ensuite gĂ©nĂ©ralisĂ©s pour des secteurs arbitraires dans le thĂ©orĂšme de dualitĂ© de Doplicher-Roberts[16]. L'application de ces mĂ©thodes aux thĂ©ories dans les espaces de faible dimension conduit Ă©galement Ă  une comprĂ©hension de l'occurrence des statistiques de groupe de tresses et des groupes quantiques[17].

En mĂ©canique statistique quantique, Haag, avec Nicolaas Marinus Hugenholtz et Marius Winnink, rĂ©ussit Ă  gĂ©nĂ©raliser la caractĂ©risation de Gibbs-von Neumann des Ă©tats d'Ă©quilibre thermique en utilisant la condition KMS (du nom de Ryƍgo Kubo, Paul C. Martin et Julian Schwinger) dans de telle maniĂšre qu'elle s'Ă©tend aux systĂšmes infinis dans la limite thermodynamique. Il s'avĂšre que cette condition joue Ă©galement un rĂŽle de premier plan dans la thĂ©orie des algĂšbres de von Neumann et aboutit Ă  la thĂ©orie de Tomita-Takesaki. Cette thĂ©orie est un Ă©lĂ©ment central dans l'analyse structurelle et rĂ©cemment Ă©galement dans la construction de modĂšles thĂ©oriques concrets de champs quantiques. Avec Daniel Kastler et Ewa Trych-Pohlmeyer, Haag rĂ©ussit Ă©galement Ă  dĂ©river la condition KMS des propriĂ©tĂ©s de stabilitĂ© des Ă©tats d'Ă©quilibre thermique[18]. Avec Huzihiro Araki, Daniel Kastler et Masamichi Takesaki, il dĂ©veloppe Ă©galement une thĂ©orie du potentiel chimique dans ce contexte[19].

Le cadre crĂ©Ă© par Haag et Kastler pour Ă©tudier les thĂ©ories quantiques des champs dans l'espace de Minkowski peut ĂȘtre transfĂ©rĂ© aux thĂ©ories dans l'espace-temps courbe. En travaillant avec Klaus Fredenhagen, Heide Narnhofer et Ulrich Stein, Haag apporte d'importantes contributions Ă  la comprĂ©hension de l'effet Unruh et du rayonnement Hawking[20].

Haag a une certaine mĂ©fiance envers ce qu'il considĂšre comme des dĂ©veloppements spĂ©culatifs en physique thĂ©orique[4] mais traite parfois de telles questions. La contribution la plus connue est le thĂ©orĂšme de Haag–ƁopuszaƄski–Sohnius, qui classe les supersymĂ©tries possibles de la matrice S qui ne sont pas couvertes par le thĂ©orĂšme de Coleman–Mandula[21].

Honneurs et récompenses

En 1970, Haag reçoit la médaille Max-Planck pour ses réalisations en physique théorique[22] et en 1997 le prix Henri-Poincaré[23] pour ses contributions fondamentales à la théorie quantique des champs en tant que l'un des fondateurs de la formulation moderne[1]. Depuis 1980, Haag est membre de l'Académie nationale allemande des sciences Leopoldina[24] et depuis 1981 de l'Académie des sciences de Göttingen[25]. Depuis 1979, il est membre correspondant de l'Académie bavaroise des sciences[26] et depuis 1987 de l'Académie autrichienne des sciences[27].

Références

  1. « Henri Poincaré Prize citation », International Association of Mathematical Physics (consulté le )
  2. (de) Rudolf Haag et Anna Haag, Leben und gelebt werden: Erinnerungen und Betrachtungen, Silberburg, (ISBN 978-3874075626) Edward Timms, Anna Haag and her Secret Diary of the Second World War: A Democratic German Feminist's Response to the Catastrophe of National Socialism, Peter Lang AG, Internationaler Verlag der Wissenschaften, (ISBN 978-3034318181)
  3. Kastler, « Rudolf Haag – Eighty years », Communications in Mathematical Physics, vol. 237, nos 1–2,‎ , p. 3–6 (DOI 10.1007/s00220-003-0829-1, Bibcode 2003CMaPh.237....3K, S2CID 121438414)
  4. Haag, « Some people and some problems met in half a century of commitment to mathematical physics », The European Physical Journal H, vol. 35, no 3,‎ , p. 263–307 (DOI 10.1140/epjh/e2010-10032-4, Bibcode 2010EPJH...35..263H, S2CID 59320730)
  5. « Closure of CERN's Theoretical Study Division in Copenhagen », timeline.web.cern.ch (consulté le )
  6. (de) Buchholz et Fredenhagen, « Nachruf auf Rudolf Haag », Physik Journal, vol. 15,‎ , p. 53 (lire en ligne)
  7. Jaffe et Rehren, « Rudolf Haag », Physics Today, vol. 69, no 7,‎ , p. 70–71 (DOI 10.1063/PT.3.3244, Bibcode 2016PhT....69g..70J)
  8. (de) Schönhammer, « Nachruf auf Rudolf Haag. 17. August 1922 – 5. Januar 2016 », Jahrbuch der Akademie der Wissenschaften zu Göttingen,‎ , p. 236–237 (DOI 10.1515/jbg-2016-0026, S2CID 188592087)
  9. Haag, « Fundamental Irreversibility and the Concept of Events », Communications in Mathematical Physics, vol. 132, no 1,‎ , p. 245–252 (DOI 10.1007/BF02278010, Bibcode 1990CMaPh.132..245H, S2CID 120715539, lire en ligne) Rudolf Haag, The Message of Quantum Science, vol. 899, Springer, Berlin, Heidelberg, coll. « Lecture Notes in Physics », , 219–234 p. (ISBN 978-3-662-46422-9, DOI 10.1007/978-3-662-46422-9_9), « Faces of Quantum Physics » Haag, « On quantum theory », International Journal of Quantum Information, vol. 17,‎ , p. 1950037–1–9 (DOI 10.1142/S0219749919500370, Bibcode 2019IJQI...1750037H)
  10. Buchholz, Doplicher et Fredenhagen, « Rudolf Haag (1922 - 2016) », News Bulletin, International Association of Mathematical Physics,‎ , p. 27–31 (lire en ligne)
  11. See e.g. the review: Detlev Buchholz et Stephen J. Summers, Encyclopedia of Mathematical Physics, Academic Press, , 456–465 p. (ISBN 978-0-12-512666-3, DOI 10.1016/B0-12-512666-2/00018-3, arXiv math-ph/0509047, S2CID 16258638), « Scattering in Relativistic Quantum Field Theory: Fundamental Concepts and Tools »
  12. Romeo Brunetti et Klaus Fredenhagen, Encyclopedia of Mathematical Physics, Academic Press, , 198–204 p. (ISBN 978-0-12-512666-3, DOI 10.1016/B0-12-512666-2/00078-X, arXiv math-ph/0411072, S2CID 119018200), « Algebraic Approach to Quantum Field Theory »
  13. Rudolf Haag, Local quantum physics: Fields, particles, algebras, Springer-Verlag Berlin Heidelberg, (ISBN 978-3-540-61049-6, DOI 10.1007/978-3-642-61458-3)
  14. Klaus Fredenhagen, Advances in Algebraic Quantum Field Theory, Springer International Publishing, coll. « Mathematical Physics Studies », , 1–30 p. (ISBN 978-3-319-21352-1, DOI 10.1007/978-3-319-21353-8_1), « An Introduction to Algebraic Quantum Field Theory »
  15. Doplicher, Haag et Roberts, « Fields, observables and gauge transformations I », Communications in Mathematical Physics, vol. 13, no 1,‎ , p. 1–23 (DOI 10.1007/BF01645267, Bibcode 1969CMaPh..13....1D, S2CID 123420887, lire en ligne) Doplicher, Haag et Roberts, « Fields, observables and gauge transformations II », Communications in Mathematical Physics, vol. 15, no 3,‎ , p. 173–200 (DOI 10.1007/BF01645674, Bibcode 1969CMaPh..15..173D, S2CID 189831020, lire en ligne)
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  18. Christian D. JĂ€kel, Encyclopedia of Mathematical Physics, Academic Press, , 227–235 p. (ISBN 978-0-12-512666-3, DOI 10.1016/B0-12-512666-2/00089-4), « Thermal Quantum Field Theory »
  19. Longo, « Notes for a quantum index theorem », Communications in Mathematical Physics, vol. 222, no 1,‎ , p. 45–96 (DOI 10.1007/s002200100492, Bibcode 2001CMaPh.222...45L, arXiv math/0003082, S2CID 14305468)
  20. Bernard S. Kay, Encyclopedia of Mathematical Physics, Academic Press, , 202–212 p. (ISBN 978-0-12-512666-3, DOI 10.1016/B0-12-512666-2/00018-3, arXiv gr-qc/0601008, S2CID 16258638), « Quantum Field Theory in Curved Spacetime »
  21. Maldacena, « The Large N limit of superconformal field theories and supergravity », Advances in Theoretical and Mathematical Physics, vol. 2, no 4,‎ , p. 231–252 (DOI 10.1023/A:1026654312961, arXiv hep-th/9711200, S2CID 12613310) Stephen P. Martin, Perspectives on Supersymmetry II, vol. 21, , 1–153 p. (ISBN 978-981-4307-48-2, DOI 10.1142/9789814307505_0001, Bibcode 2010pesu.book....1M, arXiv hep-ph/9709356), « A Supersymmetry Primer »
  22. (de) « Max Planck Medal Prize winners », German Physical Society (consulté le )
  23. « Henri Poincaré Prize winners », International Association of Mathematical Physics (consulté le )
  24. « German National Academy of Sciences Leopoldina member page of Rudolf Haag », German National Academy of Sciences Leopoldina (consulté le )
  25. (de) « Göttingen Academy of Sciences member page of Rudolf Haag », Göttingen Academy of Sciences (consulté le ) (de) (:Unkn) Unknown, Jahrbuch der Akademie der Wissenschaften zu Göttingen 2010, De Gruyter, (ISBN 978-3110236767, DOI 10.26015/adwdocs-386)
  26. « Bavarian Academy of Sciences member page of Rudolf Haag », Bavarian Academy of Sciences (consulté le )
  27. « Austrian Academy of Sciences member page of Rudolf Haag », Austrian Academy of Sciences (consulté le )

Bibliographie

Liens externes

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