Règlement 3926
Le Règlement concernant certaines mesures exceptionnelles pour assurer aux citoyens la paisible jouissance de leurs libertés, réglementer l'utilisation du domaine public et prévenir les émeutes et autres troubles de l'ordre, de la paix et de la sécurité publics, plus communément appelé le Règlement 3926, était un règlement municipal de la Ville de Montréal. Il permettait au Conseil exécutif de la ville, sur rapport du chef de police et du chef du contentieux, d'émettre une ordonnance interdisant toute assemblée, attroupement ou défilé sur le territoire de la municipalité pour une période déterminée dans l'ordonnance.
Titre | Règlement concernant certaines mesures exceptionnelles pour assurer aux citoyens la paisible jouissance de leurs libertés, réglementer l'utilisation du domaine public et prévenir les émeutes et autres troubles de l'ordre, de la paix et de la sécurité publics |
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Pays | Canada |
Province | Québec |
Territoire | Montréal |
Type | Règlement municipal |
LĂ©gislature | Administration Drapeau |
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Gouvernement | Conseil municipal de Montréal |
Adoption |
Il fut adopté le 12 novembre 1969 sous l'administration du maire Jean Drapeau. Lors d'une refonte de la réglementation en 1994, il devint le Règlement P-6, qui fut lui-même amendé plus tard pour répondre au mouvement québécois de grève étudiante de 2012.
Histoire
Le règlement fut adopté à la suite d'une grève déclenchée par les policiers et les pompiers de la ville[1]. Le jour même de l'adoption du Règlement 3926, une ordonnance fut émise interdisant la tenue de toute assemblée, défilé ou attroupement pour une période de trente jours[2]. Dès la fin du mois de novembre, le règlement fut contesté en Cour supérieure. Cette dernière déclara le règlement inconstitutionnel. La Ville de Montréal porta alors le jugement en Cour d'appel, qui l'annula. L'affaire rendit enfin jusqu'à la Cour suprême du Canada, qui maintint la validité du règlement.
Le 28 novembre 1969, la mesure provoqua la manifestation de 200 femmes du Front commun des Québécoises, qui s'enchaînèrent symboliquement dans la rue. 165 des 200 protestataires furent alors arrêtées par la police municipale. Après la manifestation, un groupe de femmes inspiré de cet événement fonda le Front de libération des femmes du Québec[3]. Trois semaines plus tard, une autre manifestation dirigée par le poète Gaston Miron s'opposa également au règlement.
Le règlement 3926 suscita également la réprobation du monde syndical, et le premier ministre du Canada, Pierre Elliott Trudeau, invita les citoyens à le contester devant les tribunaux[4]. Aussi, en entrevue, Paul Rose justifia les actions du Front de libération du Québec, lors de la crise d'Octobre 1970, en invoquant le blocage des « moyens démocratiques » représenté alors notamment par le règlement 3926[5].
Extraits
« [...]
2. Les assemblées, défilés et autres attroupements qui mettent en danger la tranquillité, la sécurité, la paix ou l'ordre public sont interdits sur les voies et places publiques et dans les parcs ou autres endroits du domaine public de la Ville; [...]
4. Toute assemblée, défilé ou attroupement dans le domaine public dont le déroulement s'accompagne d'une violation d'un des articles du présent règlement ou d'actes, conduites ou propos qui troublent la paix ou l'ordre public devient dès lors une assemblée, un défilé ou un attroupement qui met en danger la tranquillité, la sécurité, la paix ou l'ordre public au sens de l'article 2 du règlement et doit immédiatement se disperser;
5. Lorsqu'il y a des motifs raisonnables de croire que la tenue d'assemblées, de défilés ou d'attroupements causera du tumulte, mettra en danger la sé[cu]rité, la paix ou l'ordre public, ou sera l'occasion de tels actes, sur rapport du directeur du service de la police et du chef du contentieux de la Ville qu'une situation exceptionnelle justifie des mesures préventives pour sauvegarder la paix ou l'ordre public, le comité exécutif peut, par ordonnance, prendre des mesures pour empêcher ou supprimer ce danger en interdisant pour la période qu'il détermine, en tout temps ou aux heures qu'il indique, sur tout ou une partie du domaine public de la Ville, la tenue d'une assemblée, d'un défilé ou d'un attroupement ou de toute assemblée, défilé ou attroupement; [...][2]. »
Références
- Ann Dominique Morin, Le règlement P-6 de la Ville de Montréal et son application par les policier-ère-s du SPVM : une atteinte aux droits à la liberté et à la sécurité des manifestant-e-s non conforme aux principes de justice fondamentale, Université du Québec à Montréal, , 122 p. (lire en ligne), p. 10
- Gaston Nadeau, « Les limitations à la liberté de manifestation et d'association », Les Cahiers de droit, vol. 19, no 4,‎ , p. 1027 (lire en ligne)
- Sean Mills, « Québécoises deboutte! Le Front de libération des femmes du Québec, le Centre des femmes et le nationalisme », Mens, vol. 4, no 2,‎ , p. 187 (lire en ligne)
- Sébastien Lavoie, « P-6 vu par l’histoire », Le journal des Alternatives,‎ (lire en ligne)
- Les Rose de FĂ©lix Rose, 2020 [voir en ligne]