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Règle des 3 R

La règle des 3R (Remplacer, Réduire, Raffiner), créée par W.M.S. Russell (en) et R.L. Burch, est un principe élaboré en 1959 visant à de meilleures pratiques d’expérimentation animale. Chacun des 3R présente cependant des limites dans son principe ou dans son application, ce qui a motivé la proposition de plusieurs « R » supplémentaires par différentes parties concernées.

Historique

La règle des 3R a été exposé pour la première fois par William Russell et Rex Burch en 1959 dans leur ouvrage The Principles of the Humane Experimental Technique[1]. Des principes similaires avaient été proposés par le physiologiste anglais Marshall Hall en 1835 dans ses Principles of Investigation in Physiology[2] - [3].

En France et en Europe

Les 3R ont été repris dans la directive européenne 2010/63/UE sur l'utilisation des animaux à des fins scientifiques[4] (article 4) et transposés dans la réglementation française par l’article R214-105 du Code rural et de la pêche maritime (CRPM)[5]. En 2022, la France s’est dotée d’un « centre 3R » (le FC3R) destiné comme son prédécesseur Francopa à mettre en application les 3R à l’échelle nationale[6].

Remplacer

Le CRPM indique que les expériences ne sont légales que si elles « ont un caractère de stricte nécessité et ne peuvent pas être remplacées par d'autres stratégies ou méthodes expérimentales n'impliquant pas l'utilisation d'animaux vivants et susceptibles d'apporter le même niveau d'information ». Le principe de Remplacement consiste donc à utiliser des méthodes expérimentales non animales lorsqu’elles permettent de répondre aux mêmes questions que l’expérimentation animale.

L'application de ce principe est discutée, notamment en ce qui concerne la méthode de l'ascite (impliquant l'injection dans le péritoine de rongeurs pour le développement de l'ascite contenant les anticorps d'intérêt), encore utilisée pour la production des anticorps monoclonaux d'après les données de la Commission européenne[7]. En effet, le Comité consultatif scientifique (ESAC) du Centre européen pour la validation des méthodes alternatives (ECVAM) a recommandé l'interdiction de cette méthode dès 1998 sauf pour des « circonstances très exceptionnelles dans lesquelles des efforts vérifiables ont été mis en œuvre et ont échoué à produire des anticorps monoclonaux in vitro »[8]. Un nouveau rapport de l'ECVAM publié en 2020 considère que « la production d’anticorps par le biais de la méthode de l’ascite ne devrait plus être acceptable quelles que soient les circonstances »[9].

De plus, alors que la directive européenne et les réglementations nationales sont explicites quant au fait que le principe de Remplacement concerne les méthodes expérimentales sans utilisation d'animaux vivants, les organismes qui pratiquent ou encadrent l'expérimentation animale ont tendance à parler de « remplacement relatif » lorsqu'ils utilisent des invertébrés non protégés par la réglementation (drosophiles, nématodes, etc.), ou même des poissons zèbres[10] - [11].

Enfin, aucune obligation de rechercher ou de développer des méthodes non animales n'est inscrite dans la réglementation. C'est pourquoi en 2021, le Groupe Européen d’Éthique des Sciences et des Nouvelles Technologies a proposé l’introduction de la « Recherche de méthodes alternatives » en tant que quatrième R[12].

RĂ©duire

Le CRPM indique que les expériences ne sont légales que si « le nombre d'animaux utilisés dans un projet est réduit à son minimum sans compromettre les objectifs du projet ».

Le principe de Réduction ne concerne donc pas le nombre total d’animaux utilisés ou destinés à être utilisés à des fins scientifiques (un chiffre qui stagne depuis plusieurs années à près de deux millions d'animaux utilisés et deux millions supplémentaires tués sans avoir été utilisés chaque année, malgré une légère baisse en 2020 liée aux confinements répétés[13] - [14]), mais le calcul statistique du nombre minimum d’animaux adapté pour obtenir les résultats escomptés pour un projet[15].

Raffiner

La réglementation considère comme relevant de l'expérimentation animale toute utilisation d'un animal vertébré, d'un céphalopode ou d'une forme larvaire ou fœtale antérieure au derniers tiers du développement, dès lors que l'utilisation est susceptible « de causer à cet animal une douleur, une souffrance, une angoisse ou des dommages durables équivalents ou supérieurs à ceux causés par l'introduction d'une aiguille effectuée conformément aux bonnes pratiques vétérinaires ». Par définition, l'expérimentation animale est donc source de souffrances physiques et/ou psychiques à différents degrés pour les animaux utilisés.

Le CRPM indique que les expériences ne sont légales que si « les conditions d'élevage, d'hébergement, de soins et les méthodes utilisées sont les plus appropriées pour réduire le plus possible toute douleur, souffrance, angoisse ou dommage durables que pourraient ressentir les animaux ». Le principe de Raffinement consiste donc à « enrichir » les cages, box et autres lieux de détention des animaux utilisés (par l’ajout de jouets ou l’ajustement de la lumière, par exemple), et à utiliser les méthodes expérimentales les moins invasives disponibles, à condition de ne pas nuire à la qualité et à la quantité des résultats escomptés.

Autres R en expérimentation animale

D’autres R ont été proposés à plusieurs reprises par différents groupes.

La « Réhabilitation » (ou Retraite) est autorisée par la réglementation pour les animaux n’ayant pas été tués dans le cadre des expériences, n’ayant pas enduré de souffrances trop importantes et dont la sortie du laboratoire ne pose pas de risque sanitaire ou écologique. Cette issue concerne donc une proportion infime des animaux utilisés[16].

La « Responsabilité » a été largement mise en avant par les associations professionnelles de l’expérimentation animale, notamment dans la perspective de critiquer la réglementation jugée trop contraignante[17].

La « Recherche de méthodes alternatives » a été proposée comme quatrième R en 2021 par le Groupe Européen d’Éthique des Sciences et des Nouvelles Technologies, concernant principalement les primates : « Ainsi, les organismes de financement pourraient obliger les chercheurs qui mènent des expériences sur les PNH à affecter une partie de leur budget à la recherche de méthodes alternatives, et les projets financés par l’UE pourraient prévoir l’obligation d’établir un module de travail intégré ou des activités clairement définies axés sur le développement de méthodes alternatives »[12].

Notes et références

  1. (en) W.M.S. Russell et R.L. Burch, « The Principles of Humane Experimental Technique », sur CAAT / Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health, (consulté le )
  2. (en) Marshall Hall, « Of the Principles of Investigation in Physiology », Circulation, vol. 48, no 3,‎ 1835 (1973), p. 651–654 (DOI 10.1161/01.CIR.48.3.651, lire en ligne, consulté le )
  3. Chantal Autissier, « Réglementation éthique de l’expérimentation animale en recherche biomédicale », médecine/sciences, vol. 24, no 4,‎ , p. 437–442 (ISSN 0767-0974 et 1958-5381, DOI 10.1051/medsci/2008244437, lire en ligne, consulté le )
  4. Directive 2010/63/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques (lire en ligne sur EUR-Lex).
  5. « Article R214-105 du CRPM », sur Legifrance (consulté le )
  6. « Centre Français des 3R - GIS FC3R », sur www.fc3r.com (consulté le )
  7. (en) « Animals in science », sur environment.ec.europa.eu (consulté le )
  8. (en) ESAC/ECVAM, « In vitro production of monoclonal antibodies (hybridoma technique) », sur ECVAM/TSAR, (consulté le )
  9. (en) ECVAM, EURL ECVAM recommendation on non-animal-derived antibodies, (ISBN 978-92-76-18346-4, lire en ligne)
  10. « Expérimentation animale : les 3R, une approche éthique encore méconnue », sur National Geographic, (consulté le )
  11. Morgane Souchal, « Les alternatives aux essais toxicologiques préclinique in vivo des médicaments à usage humain », Thèse de doctorat en sciences du vivant, Université de Bordeaux,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. Groupe européen d’éthique des sciences et des nouvelles technologies, Avis éthique de l’édition génomique, Office des publications de l’Union européenne, (ISBN 978-92-76-30144-8, lire en ligne)
  13. « Les chiffres de l’expérimentation animale en France », sur experimentation-animale.com (consulté le )
  14. « Enquête statistique sur l'utilisation des animaux à des fins scientifiques », sur enseignementsup-recherche.gouv.fr (consulté le )
  15. Gérard Grancher, « Les statistiques prédictives pour une optimisation des effectifs — Formation expérimentation animale », sur Portail vidéo de l'Université de Rouen Normandie, (consulté le )
  16. « La retraite des animaux de laboratoire, une issue heureuse... mais exceptionnelle », sur leparisien.fr, (consulté le )
  17. OPAL, Le 4e R selon l'OPAL : la responsabilité de tous les acteurs de l'expérimentation animale, (lire en ligne)

Articles connexes

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