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Qu'ils mangent de la brioche !

« ils n'ont pas de pain ? Qu'ils mangent de la brioche ! » serait la rĂ©ponse donnĂ©e par « une grande princesse Â» Ă  qui l'on faisait part du fait que le peuple n'avait plus de pain Ă  manger. Cette rĂ©ponse, par son ironie involontaire, est censĂ©e illustrer la distance sociale qui existait entre les classes populaires et la noblesse : la princesse Ă©tant incapable d'imaginer que c'est en raison de leur dĂ©nuement que ces gens manquent de pain, elle les invite Ă  manger de la brioche alors que cette viennoiserie est encore plus onĂ©reuse que le pain.

« Qu'ils mangent de la brioche! » est communément, bien qu'inexactement, attribué à la reine Marie-Antoinette.

Cette phrase, citée sans nommer la princesse, par Jean-Jacques Rousseau dans ses Confessions écrites en 1765 et publiées en 1782, est souvent attribuée à tort à la reine Marie-Antoinette.

« Environné de petites choses volables que je ne regardais même pas, je m'avisai de convoiter un certain petit vin blanc d'Arbois… et l'occasion fit que je m'en accommodai de temps en temps de quelques bouteilles pour boire à mon aise en mon petit particulier. Malheureusement je n'ai jamais pu boire sans manger. Comment faire pour avoir du pain ? Il m'était impossible d'en mettre en réserve. En faire acheter par les laquais, c'était me déceler, et presque insulter le maître de la maison. En acheter moi-même, je n'osai jamais. Un beau monsieur l'épée au côté aller chez un boulanger acheter un morceau de pain, cela se pouvait-il ? Enfin je me rappelai le pis-aller d'une grande princesse à qui l'on disait que les paysans n'avaient pas de pain, et qui répondit : Qu'ils mangent de la brioche. J'achetai de la brioche. Encore que de façons pour en venir là ! Sorti seul à ce dessein, je parcourais quelquefois toute la ville, et passais devant trente pâtissiers avant d'entrer chez aucun. »

— Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions[1].

Madame Victoire qui aurait prononcé la phrase "Mais mon Dieu, s'ils pouvaient se résigner à manger de la croûte de pâté!".

La princesse à laquelle il fait référence ne peut pas être Marie-Antoinette, puisqu'elle est née en 1755 et ne serait arrivée en France qu'en 1770. Il est possible que les détracteurs de Marie-Antoinette aient par la suite identifié la princesse à la reine autrichienne pour la rabaisser aux yeux de l'opinion publique.

Selon l'historien Paul Johnson, il s'agirait d'une anecdote inventĂ©e par Rousseau car on n'en trouverait trace nulle part ailleurs dans les Ă©crits de l'Ă©poque[2]. Un dĂ©but de rĂ©ponse est cependant prĂ©sent dans les mĂ©moires de Madame de Boigne[3]. Le nom de la princesse y est dĂ©signĂ© : il s'agit de Madame Victoire, l'une des filles de Louis XV, et, contrairement au raccourci de Jean-Jacques Rousseau, l'anecdote de Madame de Boigne enlève le dĂ©dain Ă  la phrase. On ne parle d'ailleurs pas ici de brioche mais de croĂ»te de pâtĂ©, au contraire moins onĂ©reuse que le pain (la pâte feuilletĂ©e n'Ă©tait initialement pas conçue pour ĂŞtre consommĂ©e, mais seulement pour aider Ă  la cuisson et Ă  la conservation du patĂ©) :

« Madame Victoire avait fort peu d'esprit et une extrĂŞme bontĂ©. C'est elle qui disait, les larmes aux yeux, dans un temps de disette oĂą on parlait des souffrances des malheureux manquant de pain : « Mais mon Dieu, s'ils pouvaient se rĂ©signer Ă  manger de la croĂ»te de pâtĂ© ! Â» »

Dans d'autres cultures, on retrouve des formules similaires. Ainsi, l'empereur chinois du IIIe siècle Jin Huidi, alors qu'on lui rapportait que son peuple n'avait plus de riz à manger, aurait répondu : « Pourquoi ne mangent-ils donc pas de viande ? »[4].

Notes et références

  1. Texte du Livre VI (Wikisource).
  2. (en) Paul Johnson, Intellectuals, Harper & Row, 1988 (ISBN 0-06-016050-0), p. 14f.
  3. Mémoires de la comtesse de Boigne, coll. Le Temps Retrouvé, éd. du Mercure de France, 1989, tome 1, p. 55.
  4. (en) « Let them eat cake! » - Mark Israel, Alt-usage-english.org (voir archive).

Bibliographie

  • (en) Archer Taylor, « And Marie Antoinette Said… Â» dans Revista de etnografia 22, 1968, pp. 1-17.
  • VĂ©ronique Campion-Vincent, Christine Shojaei Kawan, « Marie-Antoinette et son cĂ©lèbre dire Â», dans Annales historiques de la RĂ©volution française no 327, 2002, pp. 29-56 [lire en ligne].

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