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Problème de convergence (mathématiques)

En mathématiques, et plus précisément dans la théorie analytique des fractions continues généralisées à coefficients complexes, le problème de convergence est la détermination de conditions sur les numérateurs partiels ai et les dénominateurs partiels bi qui soient suffisantes pour garantir la convergence de la fraction continue , notée désormais dans cet article c'est-à-dire la convergence de la suite de ses réduites

Résultats élémentaires

Condition nécessaire et suffisante de convergence

Par définition, la fraction converge si et seulement si les Bn sont non nuls à partir d'un certain rang et la série de terme général

converge[1], où les An et Bn désignent les numérateurs et les dénominateurs des réduites, et l'égalité ci-dessus se déduit des formules sur les réduites. De plus, si les complexes an et bn sont des fonctions d'une variable z et si la convergence de la série est uniforme par rapport à z, il en est naturellement de même pour la convergence de la fraction continue.

Théorèmes de Stern-Stolz et de Seidel-Stern

Si tous les numérateurs partiels an sont non nuls, on se ramène facilement par conversion au cas où ils sont égaux à 1. On dit alors que la fraction est régulière.

Pour une fraction régulière, on dispose de la majoration D'après le critère ci-dessus, une condition nécessaire pour que cette fraction converge est donc que le produit infini des (1 + |bn|) diverge ou, ce qui est équivalent, que la série des |bn| diverge : c'est le théorème de Stern-Stolz[1],[2],[3],[4],[5],[6].

Pour une fraction à coefficients complexes, cette condition nécessaire de convergence n'est pas suffisante[7] : par exemple, la fraction de période 1 ne converge pas, bien que la série de terme général |i| = 1 soit grossièrement divergente.

Cependant, pour une fraction régulière dont tous les dénominateurs partiels bn sont des réels strictement positifs, cette condition nécessaire est également suffisante : c'est le théorème de Seidel-Stern[8],[9],[10],[11]. En effet, dans ce cas, la série équivalente à la fraction est alternée et les formules de récurrence sur les Bn permettent de les minorer :

Convergence conditionnelle et inconditionnelle

Contrairement à une série, une fraction

peut très bien être convergente sans que ses « fractions extraites »

le soient toutes. Par exemple[12] :

donc

mais

Une fraction convergente est dite inconditionnellement convergente lorsque toutes ses « fractions extraites » convergent, et conditionnellement convergente sinon[12],[13]. Désormais, sauf précision contraire, lorsqu'on parlera de convergence d'une fraction continue généralisée, il s'agira implicitement de la « bonne » notion : celle de convergence inconditionnelle qui, par définition, est héritée par les « fractions extraites »[12].

La convergence vers x d'une fraction est inconditionnelle si et seulement si aucune de ses réduites n'est égale à x[12],[13].

Fractions continues périodiques

Une fraction continue périodique[14] (dont un cas particulier est celle correspondant à un irrationnel quadratique) est une fraction continue dont les deux suites des numérateurs partiels et des dénominateurs partiels sont, à partir d'un certain rang, périodiques, et dont les numérateurs partiels sont non nuls. Pour les étudier, il suffit évidemment[15] de se concentrer sur celles dites « purement périodiques » avec de plus b0 = 0, c'est-à-dire celles de la forme

En appliquant la théorie des transformations de Möbius à Ak–1, Bk–1, Ak et Bk sont les numérateurs et les dénominateurs des réduites d'indices k – 1 et k de x, on montre que si x converge, elle converge vers un des points fixes de s(w). Plus précisément, soit r1 et r2 les racines de l'équation du second degré qui sont les points fixes de s(w). Si Bk–1 n'est pas nul, x converge vers r1 si et seulement si

  1. r1 = r2 ou
  2. la réduite d'indice k – 1 est plus proche de r1 que de r2 et, si k ≥ 2, aucune des k – 1 réduites précédentes (d'indices 0, … , k – 2) n'est égale à r2.

Si Bk–1 est nul, tous les Bnk–1 s'annulent aussi, et la fraction continue ne converge pas. Lorsqu'aucune des deux conditions précédentes n'est remplie, la suite des réduites oscille sans converger[15],[16],[17].

Cas particulier où la période est égale à 1

Si la période k vaut 1, c'est-à-dire si (avec b non nul), alors A0/B0 = 0/1 = 0, A1/B1 = a/b et l'équation précédente devient : w2 + bw – a = 0, qui n'est autre que D'après le résultat précédent, x converge vers r1 si et seulement si r1 = r2 ou |r1| < |r2|.

La condition pour que la fraction converge est bien sûr la même, et sa limite est alors b + r1, c'est-à-dire cette fois (puisque r1 + r2 = – b) la racine de plus grand module de l'équation v2bv – a = 0, qui n'est autre que

En posant z = a/b2, la convergence de x et y a donc lieu si et seulement si les deux racines carrées de 1 + 4z sont soit égales, soit non équidistantes de 1, c'est-à-dire si et seulement si z n'est pas un réel < −1/4.

En particulier, la fraction converge si et seulement si 1/b2 n'est pas un réel < −1/4, c'est-à-dire si le complexe b (supposé non nul) n'appartient pas à l'intervalle imaginaire pur ]−2i, 2i[.

La convergence était prévisible pour b réel positif[18], par le théorème de Seidel-Stern vu plus haut (et pour b de module supérieur ou égal à 2, par le critère de Śleszyński-Pringsheim[19] ci-dessous).

Critère de Śleszyński-Pringsheim

À la fin du dix-neuvième siècle, Ivan Śleszyński (en) et Alfred Pringsheim montrèrent que si les numérateurs et dénominateurs partiels vérifient |bn| ≥ |an| + 1 pour n ≥ 1, alors

[20]

donc (cf. § « Condition nécessaire et suffisante de convergence » ci-dessus) la fraction

converge[21] et ses réduites sont de modules strictement inférieurs à 1. En utilisant des fractions de période 1, on peut d'ailleurs montrer[22] que l'« ensemble limite des fractions de Śleszyński-Pringsheim » — c'est-à-dire l'ensemble de toutes les limites de fractions vérifiant les hypothèses de ce théorème — est exactement le disque unité fermé.

Théorème de Worpitzky

Auparavant (en 1865[23]), Julius Worpitzky (de) avait démontré, dans ce qui semble être « la plus ancienne publication d'un mémoire sur la convergence des fractions continues algébriques[24] », que si les numérateurs partiels an de la fraction continue

sont tels que |an| ≤ 1/4 alors la fraction converge, uniformément par rapport à z si les complexes an sont des fonctions d'une variable z.

Ce théorème se déduit aujourd'hui de celui de Śleszyński-Pringsheim, par l'équivalence de fractions Il permit à Worpitzky de montrer que si

et si |ci| ≤ 1/4 pour tout i, alors, pour |z| ≤ 1, la fraction f(z) converge uniformément, donc f est holomorphe sur le disque unité ouvert[23].

Il est immédiat que de plus, toutes les réduites de f(z) appartiennent au disque ouvert Ω de rayon 2/3 centré en 4/3 et que l'ensemble limite est le disque fermé Ω.

On peut aussi montrer que[25] 1/4 est le plus grand majorant des |ci| pour lequel la convergence de f(1) a toujours lieu.

Théorème de Van Vleck

Jones et Thron attribuent à Edward Burr Van Vleck (en) le résultat suivant, qui généralise le théorème de Seidel-Stern. Si tous les ai valent 1, et si tous les bi ont des arguments tels que ε est un nombre positif fixé inférieur à π/2 (autrement dit si tous les bi sont dans un secteur angulaire d'ouverture π – 2ε et symétrique autour de l'axe des réels positifs), alors la i-ième réduite fi de la fraction continue est située dans le même secteur, c'est-à-dire qu'elle vérifie

Dans ce cas, les suites des réduites d'indice pair et des réduites d'indice impair convergent, mais pas forcément vers la même limite ; leur limite est commune (et alors la fraction continue converge) si et seulement si la série des |bn| est divergente[26].

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé .
  1. (de) Oskar Perron, Die Lehre von den Kettenbrüchen, Teubner, (lire en ligne), chap. VII, § 49 (« Divergenz Kriterien von Broman und Stern ») .
  2. (en) William B. Jones et W. J. Thron, Continued Fractions : Analytic Theory and Applications, Addison-Wesley, coll. « Encyclopedia of Mathematics and its Applications » (no 11), (ISBN 978-0-201-13510-7), p. 79 .
  3. (de) A. Pringsheim, Vorlesungen über Zahlen- und Funktionenlehre, vol. I, , chap. 3, p. 846 et 966 .
  4. Voir aussi (en) Hubert Stanley Wall (en), Analytic Theory of Continued Fractions, AMS, (1re éd. 1948), 433 p. (ISBN 978-0-8218-2106-0), p. 27-28 et 424 , sur le lien avec le travail de Helge von Koch, « Sur un théorème de Stieltjes et sur les fractions continues », Bull. SMF, vol. 23,‎ , p. 33-40 .
  5. (en) Lisa Lorentzen et Haakon Waadeland, Continued Fractions : Convergence theory, Atlantic Press, (lire en ligne), p. 94 .
  6. Pringsheim 1921, p. 846.
  7. Wall 2000, p. 29.
  8. Perron 1913, chap. VII, § 50, « Konvergenz bei positiven Elementen ».
  9. Lorentzen et Waadeland 2008, p. 98.
  10. Pringsheim 1921, p. 764 et 962.
  11. Dans Jones et Thron 1980, p. 87, le théorème de Seidel-Stern est présenté sous une forme un peu renforcée, incluant des énoncés sur la façon dont la suite des réduites converge.
  12. Perron 1913, chap. VII, § 48, « Bedingte und unbedingte Konvergenz ».
  13. (de) A. Pringsheim, « Ueber die Convergenz unendlicher Kettenbrüche », S'ber. math.-phys. München, vol. 28,‎ , p. 295-324 (lire en ligne) .
  14. Perron 1913, chap. VII, § 55, « Periodische Kettenbrüche ».
  15. (de) Otto Stolz, Vorlesungen über allgemeine Arithmetik, vol. 2, (lire en ligne), chap. VIII, § 14 (« Periodische Kettenbrüche »), p. 299-304 .
  16. (de) A. Pringsheim, « Ueber die Convergenz periodischer Kettenbrüche », S'ber. math.-phys. München, vol. 30,‎ , p. 463-488 (lire en ligne) .
  17. (de) O. Perron, « Über die Konvergenz periodischer Kettenbrüche », S'ber. math.-phys. München, vol. 35,‎ , p. 495-503 (lire en ligne) .
  18. Dans ce cas, x est égal à (b2 + 4b)/2 : pour b = 2, on trouve ainsi la fraction continue de 2 – 1 et pour b = 1, celle de l'inverse du nombre d'or.
  19. Lorentzen et Waadeland 2008, p. 32.
  20. Plus précisément (Perron 1913, chap. VII, § 53, « Die Konvergenzkriterien von Pringsheim ») : |Bn| – |Bn–1| ≥ |a1an|.
  21. Voir par exemple Jones et Thron 1980, p. 92, Theorem 4.35.
  22. Lorentzen et Waadeland 2008, p. 131.
  23. (de) J. Worpitzky, « Untersuchungen über die Entwickelung der monodromen und monogenen Functionen durch Kettenbrüche : Erste Folge », Friedrichs-Gymnasium und Realschule (de) Jahresbericht, Berlin,‎ , p. 3-39 (lire en ligne) .
  24. (en) E. B. Van Vleck, « Selected topics in the theory of divergent series and of continued fractions », dans The Boston Colloquium, (lire en ligne), p. 75-187 (note p. 147).
  25. (en) J. Findlay Paydon et H. S. Wall, « The continued fraction as a sequence of linear transformations », Duke Mathematical Journal, vol. 9, no 2, 1942, p. 360-372.
  26. Jones et Thron 1980, p. 88, Theorem 4.29.

Bibliographie complémentaire

  • (en) George E. Andrews et Bruce C. Berndt, Ramanujan's Lost Notebook, vol. I, Springer, (lire en ligne)
  • (en) Annie Cuyt et Luc Wuytack, Nonlinear Methods in Numerical Analysis, Elsevier, (lire en ligne), chap. I, § 4 (« Convergence of continued fractions »)
  • (en) David F. Dawson, « A theorem on continued fractions and the fundamental inequalities », Proc. Amer. Math. Soc., vol. 13,‎ , p. 698-701 (lire en ligne)
  • (en) Amparo Gil, Javier Segura et Nico M. Temme, Numerical Methods for Special Functions, SIAM, (lire en ligne), « § 6.5 : Convergence of continued fractions »
  • (en) W. T. Scott et H. S. Wall, « A convergence theorem for continued fractions », Trans. Amer. Math. Soc., vol. 47,‎ , p. 155-172 (lire en ligne)
  • (en) Haakon Waadeland, « Some Recent Results in the Analytic Theory of Continued Fractions », dans Nonlinear Numerical Methods and Rational Approximation, (lire en ligne), p. 299-333
  • (en) Haakon Waadeland, « Some Probabilistic Remarks on the Boundary Version of Worpitzky's Theorem », dans Orthogonal functions, moment theory and continued fractions, Marcel Dekker, (lire en ligne), p. 409-416