Prison en Russie
Les prisons en Russie sont des lieux de privation de libertés de type pénitentiaires où sont envoyées les personnes condamnées par la justice russe, créées il y a plus de 200 ans.
Histoire des prisons en Russie
Les prisons apparaissent en Russie au XIXe siècle et sont complétées par des travaux forcés (katorga) en Sibérie et dans d'autres régions lointaines.
Après la prise de pouvoir des Bolcheviques en 1917, les prisons sont dédiées à l'emprisonnement des espions, des saboteurs, des terroristes, des trotskistes, des mencheviks, des anarchistes, des nationalistes ainsi que tout individu considéré comme dangereux pour son anticommunisme.
Les premiers camps de travail apparaissent en 1929, ils deviennent ensuite des Goulag, constituant une grande partie de l'histoire de l'emprisonnement en Russie.
Dans le cadre de la politique de la glasnost ("transparence"), la loi du marque une rupture, définissant formellement les droits du détenu vis-à-vis de sa sécurité, sa liberté de croyance, ses visites et ses communications téléphoniques. La représentation officielle des prisonniers a été profondément modifiée, cependant, elle ne correspond pas à la réalité et les conditions de vie des détenus sont souvent dénoncées[1].
Les lois officielles sur l'emprisonnement
Le système pénitentiaire Russe se distingue par sa complexité. L'administration qui dirige ce système est nommée « service fédéral d'exécution des peines ». Il se place aujourd'hui sous la tutelle du ministère de la Justice. Plusieurs établissements de détention coexistent dont les principaux sont les maisons d'arrêt, les établissements de rééducation et les colonies et les prisons[2]. Bien que la peine de mort soit légale en Russie, elle n'a pas été officiellement appliquée depuis plus de 25 ans[3] - [4].
À l'aide du Conseil de l'Europe et de la société civile, le gouvernement russe a mis en place, depuis le 14 octobre 2010, une réforme du système pénitentiaire permettant de l'amener au niveau des standards européens et de diminuer la récidive des détenus en leur apportant durant leurs détentions une aide psychologique et sociale tout en développant leurs accompagnements après la sortie de façon à humaniser les conditions de détention[5].
Les conditions d'emprisonnement
Malgré les lois, les conditions de vie des détenus russes restent souvent difficiles[1] - [6]. L'emprisonnement est collectif et chaque salle contient généralement plusieurs dizaines de lits. Les établissements sont éloignés des espaces peuplés et leurs locaux sont souvent vétustes. L'hygiène de vie n'étant pas toujours correcte, de nombreux cas de maladies infectieuses se remarquent au sein des prisons[6]. Le Comité anti torture du Conseil de l'Europe a dénoncé à plusieurs reprises le recours à la torture et aux autres formes de mauvais traitements par les membres des forces de l'ordre et des forces de sécurité ainsi que plusieurs détentions illégales[6] - [3] - [1].
Témoignages sur l'emprisonnement commun
De nombreux détenus ou ex détenus témoignent de leurs expériences dans les prisons en Russie. Au cours de leurs peines, beaucoup racontent avoir subi des violences. Certains avouent même avoir été frappés, ligotés, enchaînés, brutalisés ou même violés[6] - [1].
Dans la continuité de ces témoignages se déroulent parfois des mutineries comme, par exemple, dans la prison d'Angarsk à l'Est de Moscou où de multiples images et vidéos d'une révolte furent diffusées. Ces images montrent les violences exercées sur les prisonniers, mais ils sont aussi vus en train de se scarifier. À la suite de la diffusion d'images comme celles-ci, les gardiens impliqués sont souvent sanctionnés ou emprisonnés[6] - [1].
Les castes en milieu carcéral
Les détenus se rangent eux-mêmes traditionnellement en plusieurs classes ou castes plus ou moins respectées ou méprisées. Les vory v zakone (« voleurs dans la loi ») sont les chefs respectés et redoutés de la pègre russe ; ils ont un casier judiciaire chargé, suivent rigoureusement les « principes » (poniatia) du milieu criminel. Ils refusent toute coopération avec les forces de l'ordre, y compris l'administration pénitentiaire. Ils gèrent la caisse commune des détenus (obchtchak) et règlent les conflits et litiges. Un peu en-dessous, les blatnyé (truands, au singulier blatnoï) sont des malfaiteurs endurcis qui respectent les poniatia, gèrent la caisse commune et arbitrent les détenus en l'absence des vory ; un détenu qui a travaillé dans la police ou certains métiers (chauffeur de taxi, serveur, etc.) ne peut devenir blatnoï. Les moujiki (gaillards) sont des détenus non récidivistes qui cherchent à purger leur peine sans coopérer avec l'administration pénitentiaire ni se mêler des querelles des autres détenus. Les aktivisty, kozly, souki (activistes, boucs, chiennes) sont des détenus qui coopèrent avec l'administration en échange d'avantages et fonctions officielles ; il arrive qu'ils soient séparés des autres détenus pour éviter les agressions à leur encontre. Les petoukhi (coqs) et opouchtchennyé (affaissés) sont les plus faibles et méprisés, ou ceux qui ont commis un acte honteux selon les règles des voleurs ; ils doivent se ranger contre le mur au passage des autres détenus ; ils ont leurs propres ustensiles de cuisine, leurs corvées comme le nettoyage des toilettes et personne ne peut leur emprunter de nourriture ou de cigarettes ; les homosexuels sont généralement rangés dans cette classe[7].
Recrutement par le Groupe Wagner
En novembre 2022 et selon l'ONG Rus Sidiachaïa, 30 000 à 35 000 détenus recrutés par le Groupe Wagner, ont été retirés des prisons, maisons d’arrêt et colonies pénitentiaires de Russie pour aller combattre en Ukraine. Evgueni Prigojine, dirigeant le Groupe Wagner, participe directement à ce recrutement. Une vidéo le montre devant les prisonniers de la maison d’arrêt no 15 de Bataïsk, dans la région de Rostov, proposer la liberté au bout de six mois à ceux qui rejoignent le Groupe pour combattre. Les statistiques de Rus Sidiachaïa, montrent qu'un tiers des détenus signent un contrat, alors que le recruteur précise que l'objectif est l'assaut des troupes ennemies avec de faibles chances de réussite. Par ailleurs le mercenaire qui recule, se rend ou déserte sera immédiatement tué. Olga Romanova responsable de Rus Sidiachaïa indique : « Ils sont exclusivement déployés en première ligne. Derrière eux se trouvent les troupes barrières (chargées de tirer sur les soldats de première ligne au cas où ils reculeraient), puis les mobilisés et enfin les soldats professionnels »[8] - [9].
Références
- afp, « Russie: les témoignages de tortures accablent le système pénitentiaire », sur Lacroix.fr, (consulté le )
- ministère de la justice, « Le système judiciaire en Russie », sur justice.gouv.fr, (consulté le )
- « Dans l'enfer des prisons russes » , sur Le Monde, (consulté le )
- « La Russie s'éloigne de la peine de mort », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- Gilles Favarel-Garrigues, Priorités et limites de la politique pénitentiaire en Russie, Presses de Sciences Po, coll. « Critique Internationale », , 196 p. (ISBN 2-7246-0927-1, lire en ligne), p. 121 à 135
- « Viols, torture, humiliations... Une mutinerie met en lumière les dérives dans les prisons de Russie », sur France 24, (consulté le )
- Nikolai Chevtchenko, « Comment fonctionne le système de castes dans les prisons russes? », sur Russia Beyond, (consulté le )
- Emmanuel Grynszpan, « Comment des prisonniers russes sont envoyés par dizaines de milliers en première ligne sur le front ukrainien », sur Le Monde, (consulté le )
- Lou Roméo, « Wagner recrutant dans une prison : une "démonstration de force et un aveu de faiblesse" du Kremlin », sur France24, (consulté le )