Premiers secours sur la route
Les premiers secours sur la route désignent les gestes de premiers secours adaptés au contexte de la voie publique, et en particulier des accidents de la circulation.
Le présent article concerne la conduite à tenir par un témoin seul et sans matériel ; les techniques en équipe avec du matériel spécifique sont traitées dans l'article Prompt secours routier.
L'action d'un tĂ©moin d'un accident de la circulation est la mĂȘme que pour tout accident ; le « premier pas » :
Cependant, les risques spécifiques et la configuration imposent certaines adaptations.
Protéger
Avant toute chose, en tant que bon secouriste, il faut analyser la situation. Il est inutile de se précipiter au risque de mettre sa propre vie en danger.
Premier danger : la circulation
Le principal risque de sur-accident est qu'un vĂ©hicule percute une personne (victime, tĂ©moins, intervenant) ou un vĂ©hicule (vĂ©hicule accidentĂ©, vĂ©hicule d'un tĂ©moin, vĂ©hicule d'intervention) â on se souviendra du drame de Loriol. Les risques sont les plus importants sur les routes Ă grande circulation (autoroutes ou voies express), en pĂ©riode de nuit ou par mauvais temps.
Sur une route rapide à chaussées séparées de type autoroute, en tant que témoin, il faut distinguer deux cas :
- l'accident a lieu sur votre chaussée :
- mettre ses feux de détresse (warning) ;
- si une personne s'est dĂ©jĂ occupĂ©e du balisage en amont, on se contentera d'aller prĂ©venir les secours en s'arrĂȘtant Ă la borne d'appel d'urgence suivante ;
- sinon, s'arrĂȘter si possible aprĂšs l'accident (voir ci-aprĂšs) et sur la bande d'arrĂȘt d'urgence ; mettre un vĂȘtement voyant (vĂȘtement clair la nuit, de couleur vive le jour, gilet de haute visibilitĂ© si vous en possĂ©dez un (obligatoire Ă ce jour en France)[1] ;
- mettre ses proches et les témoins à l'abri derriÚre la rambarde de sécurité ;
- signaler l'accident Ă 150â200 mĂštres au minimum en amont par un triangle de signalisation et/ou une personne faisant des signes (la nuit, penser Ă utiliser un linge blanc ou mieux, Ă une lampe Ă©lectrique) ; la personne effectuant le balisage marchera si possible derriĂšre la barriĂšre de sĂ©curitĂ©, la bande d'arrĂȘt d'urgence pouvant ĂȘtre empruntĂ©e par des vĂ©hicules (automobilistes excĂ©dĂ©s par le ralentissement, services de secours, Ă©cart accidentel d'un vĂ©hicule) ;
- si une personne est Ă©jectĂ©e hors de son vĂ©hicule sur une des voies de circulation, il faut la tirer sur la bande d'arrĂȘt d'urgence (dĂ©gagement d'urgence) en faisant attention Ă ne pas se faire soi-mĂȘme renverser ;
- l'accident a lieu sur la chaussĂ©e de l'autre cĂŽtĂ© de la sĂ©paration : s'arrĂȘter Ă la borne d'appel d'urgence suivante, en mettant ses feux de dĂ©tresse et en stationnant sur la bande d'arrĂȘt d'urgence, et passer l'alerte en prĂ©cisant bien que l'accident a lieu sur l'autre chaussĂ©e ; reprendre la route une fois l'alerte passĂ©e (on ne peut rien faire de plus, et rester sur place est dangereux) ; faire des appels de phare pendant quelques instants pour signaler l'accident aux vĂ©hicules sur l'autre chaussĂ©e.
Sur une route Ă chaussĂ©es non sĂ©parĂ©es, il faut de mĂȘme s'arrĂȘter sur le bas-cĂŽtĂ© en mettant les feux de dĂ©tresse ; il faut assurer un balisage des deux cĂŽtĂ©s, en prioritĂ© sur la voie de circulation gĂȘnĂ©e. S'il y a une courbe proche (moins de 100 m), penser Ă positionner la signalisation avant la courbe. La nuit, on pourra positionner un vĂ©hicule afin d'Ă©clairer l'accident avec les phares (en attendant les secours).
En ville, il suffit de mettre des témoins pour dévier la circulation et éviter les conduites à risque des conducteurs énervés par l'encombrement.
Si un tĂ©moin en vĂ©hicule s'arrĂȘte et descend pour porter secours, il est recommandĂ© qu'il garde avec lui ses clefs de contact pour Ă©viter le vol de son vĂ©hicule.
- Pourquoi faut-il s'arrĂȘter aprĂšs l'accident ?
- Les autres conducteurs sont distraits par l'accident, le risque est donc en amont ;
- certains vĂ©hicules de secours devront se garer devant le vĂ©hicule, il faut donc ne pas les gĂȘner et laisser un passage plus large qu'un vĂ©hicule lĂ©ger de tourisme ;
- dans tous les cas, la présence de véhicule avant (en amont) d'un accident risque de le masquer : la visibilité de l'accident réduit le risque de sur-accident.
- Pourquoi le balisage est-il Ă 150â200 m ?
Ă 130 km/h, il faut environ 150 Ă 200 m pour s'arrĂȘter ; si un conducteur n'aperçoit le balisage qu'au dernier moment, il lui reste ainsi le temps d'effectuer un freinage d'urgence. Ă 90 km/h, il suffit d'une centaine de mĂštres pour s'arrĂȘter, on pourrait donc faire un balisage plus proche sur une route « normale », mais il convient de garder en tĂȘte des chiffres simples et de ne pas multiplier les cas particuliers au risque de tout oublier.
DeuxiĂšme danger : l'incendie
Le deuxiÚme risque est le risque d'incendie. Si vous avez un extincteur, sortez-le et mettez-le à proximité du véhicule accidenté. Si l'on peut ouvrir la portiÚre du véhicule accidenté, il faut couper le contact. Il faut interdire de fumer à proximité de l'accident.
Un vĂ©hicule peut brĂ»ler trĂšs vite. Il faut donc, en cas d'incendie, dĂ©gager la personne rapidement. Mais le risque d'explosion est proche du zĂ©ro absolu, mĂȘme en cas de vĂ©hicule GPL (car muni d'une soupape).
- Que faire en cas de début d'incendie ?
Si vous avez un extincteur, tester l'extincteur dans une zone sûre, puis attaquer la base des flammes. Si la fumée sort de dessous le capot, arroser initialement par une des déformations du capot sans le soulever (afin de ne pas apporter d'air), puis soulevez le capot sans vous brûler (à l'aide d'un gant de manutention ou d'un chiffon) et terminer d'arroser en vous protégeant du capot. Si le capot ne présente pas de déformation, on peut déclencher l'ouverture (la manette se trouve en général prÚs du volant), ce qui va avoir pour effet de légÚrement le lever ou bien arroser à travers la calandre et la prise d'air cÎté pare-brise ; cependant, dans le cas général, le moteur prend feu s'il est touché (fuite d'essence), il y aura donc toujours une déformation du capot.
Si vous n'avez pas d'extincteur ou que l'extinction est inefficace, il faut extraire les victimes du véhicule (dégagement d'urgence).
Notez que le contact doit ĂȘtre coupĂ© pour prĂ©venir l'apparition du feu ; si le feu dĂ©marre avant que vous ayez eu le temps de couper le contact, il est alors inutile de le faire, cela retarde mĂȘme inutilement (et donc dangereusement) les autres gestes (extinction, dĂ©gagement d'urgence...).
- Note : Lorsque l'on s'approche du vĂ©hicule accidentĂ© pour ouvrir la portiĂšre, il est recommandĂ© de l'aborder par l'avant, ainsi, les victimes verront arriver le sauveteur et ne seront pas surprises lors de l'ouverture de la portiĂšre (en cas de surprise, elles risquent de tourner la tĂȘte et donc d'aggraver un Ă©ventuel traumatisme aux vertĂšbres cervicales).
TroisiÚme danger : les mouvements du véhicule accidenté
Le troisiÚme risque est le mouvement des véhicules accidentés : serrer le frein à main et engager une vitesse (le contact étant coupé).
Pour ces opérations (couper le contact, serrer le frein à main et engager une vitesse), il faut faire attention à n'engager que le bras dans le véhicule en raison du risque de déclenchement intempestif des coussins gonflables à explosif (Airbags). Par ailleurs, il faut s'attacher à éviter de faire trop bouger les suspensions, afin de ne pas faire bouger les victimes et aggraver un éventuel traumatisme.
Alerter
Sur la route hors agglomération, indiquer :
- le numéro de la route (par exemple « RN 11 », « RD 95 »),
- une estimation de la position (par exemple « entre la sortie de Beaulieu et la sortie de Dompierre ») ; penser à utiliser les panneaux indicateurs ainsi que les points kilométriques qui jalonnent certaines routes ;
- la voie sur laquelle s'est produit l'accident, surtout pour les routes à chaussées séparées de type autoroute (par exemple « dans le sens La Rochelle-Niort »).
En raison des difficultĂ©s de localisation, il est prĂ©fĂ©rable d'utiliser les bornes d'appel d'urgence sur les autoroutes et voies express, ou les tĂ©lĂ©phones fixes si disponible (cabine publique, commerce, habitation). De ce fait, mĂȘme si l'on voit une personne appeler de son portable sur le bord de la route, il faut tout de mĂȘme s'arrĂȘter Ă la borne d'appel suivante ; les secours auront donc un appel sur place permettant d'avoir une bonne estimation de la gravitĂ©, et un appel d'une borne permettant d'avoir une bonne localisation.
En France, les bornes d'appel qui sont présentes sur certaines routes départementales (les ex-nationales) ne sont plus entretenues et sont amenées à disparaßtre[2].
Secourir
Si l'on est formé aux gestes de premiers secours, il faut les adapter à la configuration.
Il est important d'agir mĂȘme si l'on n'est pas le premier sur les lieux. En effet, du fait de la sidĂ©ration (surprise, fascination, peur), il est probable que les personnes prĂ©sentes n'aient pas eu la prĂ©sence d'esprit ou le courage de protĂ©ger et d'alerter. Pour ce qui est des actes de secours Ă personne, il convient de rester trĂšs prudent en raison des risques extrĂȘmes, en respectant les prĂ©cautions Ă©lĂ©mentaires, en particulier marcher de l'autre cĂŽtĂ© de la barriĂšre de sĂ©curitĂ© en surveillant en permanence la circulation. Il importe Ă©galement de se conformer aux indications des services de secours, donnĂ©s lors de l'appel ou bien lorsqu'ils se prĂ©sentent.
Victime allongée sur la chaussée
Le cas d'une victime allongée sur la chaussée ou sur le bas-cÎté (piéton, deux roues, personne éjectée) est assez proche des situations d'accident domestique.
Les blessures sont souvent multiples, il faut donc, en attendant les secours, traiter en prioritĂ© les dĂ©tresses vitales : hĂ©morragie, inconscience, arrĂȘt de la respiration. On soupçonnera toujours une atteinte traumatique du dos, on interdira donc de bouger la victime et on maintiendra systĂ©matiquement la tĂȘte dans la position dans laquelle on a trouvĂ© la personne, sauf si celle-ci est inconsciente (mise en PLS) ou soumise Ă un danger imminent (dĂ©gagement d'urgence). Les autres atteintes (plaies, brĂ»lures) sont secondaires et seront prises en charge par les secours.
Se pose cependant le problĂšme du casque :
- le retrait du casque est une opération délicate qui risque d'aggraver un possible traumatisme de la nuque ; il faut donc laisser le casque en place sur une personne consciente, se contenter d'ouvrir la visiÚre en maintenant le casque dans la position d'origine ;
- si la personne est inconsciente mais respire, il faut la tourner en position latérale de sécurité ; il existe une technique de retrait de casque permettant une meilleure prise en charge, si on ne la connaßt pas, on se contente de tourner la personne avec son casque ;
- si la personne ne respire pas, il faudra de toute maniĂšre lui retirer le casque pour lui faire la ventilation artificielle, peu importe la maniĂšre avec une extrĂȘme prudence.
Victime debout
Une victime peut parfois se lever d'elle-mĂȘme. Si cela est un bon prĂ©sage (elle est consciente), elle peut ĂȘtre tout de mĂȘme gravement blessĂ©e et son Ă©tat peut se dĂ©grader. En particulier, elle peut trĂšs bien souffrir d'une fracture du rachis qui n'aurait pas encore bougĂ© mais pourrait se mobiliser par la suite, d'un traumatisme crĂąnien, d'une hĂ©morragieâŠ
Le principal problÚme sera de calmer la victime et de la faire patienter jusqu'à l'arrivée des secours. Le problÚme de la position d'attente est ici délicat : si la position la mieux adaptée est la position allongée, le changement de position va occasionner une mobilisation du rachis et donc peut faire bouger un traumatisme instable et causer des dégùts irréparables (paralysie voire décÚs). Il n'y a pas de réponse simple à ce problÚme.
Cela est à moduler en fonction du mécanisme et de la cinématique de l'accident.
Victime dans un véhicule
Dans le cas d'une personne dans un véhicule se pose le problÚme :
- de l'accĂšs : si les portes ne s'ouvrent pas (par exemple Ă cause de la dĂ©formation de la tĂŽle), il peut ĂȘtre nĂ©cessaire de casser une vitre (par exemple avec la manivelle d'un cric) en faisant attention Ă ne pas se blesser et Ă ne pas blesser les occupants, et toujours casser la vitre du cĂŽtĂ© opposĂ© Ă la victime ;
- les coussins gonflables explosifs (type Airbag), s'ils ne se sont pas déclenchés, présentent un risque ; il ne faut en particulier pas s'interposer entre le tableau de bord et les occupants ;
- les victimes sont assises, il faut Ă©viter de les mobiliser donc les laisser dans l'habitacle (sauf nĂ©cessitĂ© d'un dĂ©gagement d'urgence) ; les gestes doivent donc ĂȘtre adaptĂ©s Ă la situation assise :
- libĂ©ration des voies aĂ©riennes : une victime inconsciente et qui respire doit ĂȘtre laissĂ©e assise, mais il faut la redresser contre le dossier et maintenir sa tĂȘte en bascule prudente;
- arrĂȘt d'une hĂ©morragie : outre les appuis manuels directs et tampons relais, seuls les points de compression aux membres supĂ©rieurs et au cou sont possibles ; il n'est pas possible de faire un point de compression aux membres infĂ©rieurs, donc si l'appui manuel direct est impossible ou inefficace, il faut directement faire un garrot.
Il faut bien penser à interroger les personnes impliquées pour savoir combien de personnes étaient dans le véhicule ; en effet, des personnes peuvent avoir été éjectées hors de vue. Penser aussi à interroger les témoins à ce sujet.
Accident collectif
Dans le cas d'un accident collectif (par exemple un accident de car), on s'attachera en priorité à s'occuper des personnes valides afin de les regrouper dans une zone de sécurité en attendant les secours, et ce d'autant plus qu'étant choquées psychologiquement, les impliqués n'ont pas leur capacité de réflexion et peuvent déambuler sur la chaussée ; il vaut mieux éviter de nouvelles victimes plutÎt que de se focaliser sur une seule détresse.
Notes et références
- En 2005 en France, 20 piétons sont morts sur autoroute, et dans 75 % des cas la nuit, ce qui montre l'importance de la visibilité. [PDF] autoroutes.fr
- Adrien Bossard, « Routes nationales : vers la fin des bornes d'appels d'urgence », (consulté le )