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Plan Fouchet

Le plan Fouchet est un projet politique européen avorté. Il a été élaboré en 1961 par une commission intergouvernementale des six états de la Communauté économique européenne. Le travail de cette Commission, présidée par le Français Christian Fouchet, aboutit à une première version présentée le [1], puis à une seconde en [2].

Contexte

La réalisation de ce plan s'effectue dans un contexte troublé pour l'Europe communautaire. C'est en effet une période où la guerre froide s'intensifie, et où s'effectue le retour au pouvoir de De Gaulle en France. Or, celui-ci est un farouche opposant au supranationalisme européen. Il conçoit l'Europe comme une organisation internationale, chargée entre autres de conserver son autonomie face aux deux superpuissances que sont à cette époque les États-Unis et l'Union soviétique.

Histoire

Depuis l'échec de la Communauté européenne de défense (CED) en 1954, la communauté européenne avait relancé le processus de construction institutionnelle de l'Europe par l'intermédiaire des traités de Rome de 1957, qui instituaient la Communauté économique européenne (CEE) et la Communauté européenne de l'énergie atomique (CEEA). Ces deux communautés restaient toutefois axées sur l'économie, et n'abordaient pas frontalement la question de l'Europe politique (pas de mutualisation de souveraineté ni institution communautaire).

Cette question faisait l'objet d'un désaccord entre, d'un côté, la France, favorable à une simple coopération intergouvernementale, et de l'autre les 5 autres pays membres de la CEE, favorables quant à eux à l'octroi de compétences de type politiques à l'Europe communautaire.

Il fut donc décidé par les chefs d'État ou de gouvernement des Six d'instituer une commission intergouvernementale chargée d'étudier les problèmes concernant la coopération politique européenne, lors du Sommet européen de Paris (10 et ). Cet objectif fut réitéré lors du Sommet européen de Bonn, en . La déclaration de Bonn précisait que ce projet devait donner « forme à la volonté d'Union politique, déjà implicite dans les traités qui ont institué les Communautés européennes ». Le premier plan Fouchet fut présenté le [1], puis face aux réticences des membres de la Communauté européenne, un second fut présenté en .

Le projet, qui ne convenait pas aux pays de la CEE autres que la France, resta finalement lettre morte. Le traité de l'Élysée sera un pis-aller de ce plan en reprenant les principales dispositions mais en les limitant à deux pays, l'Allemagne de l'Ouest et la France[3].

Contenu

Entre juillet et , Charles de Gaulle s’entretient avec l’ensemble de ses partenaires européens de la question de l’organisation politique de l’Europe. Cette initiative est à l’origine en de la création par les Six d’une commission d’études, présidée par le gaulliste Christian Fouchet (« commission Fouchet »), dont le rôle est de présenter des propositions destinées à donner « un caractère statutaire à l’union de leurs peuples » (conférence de Bonn, ). En fait, seule la France présente publiquement un projet structuré d’union politique.

Le premier plan Fouchet distinguait les compétences de la Communauté européenne et celles de la future Union politique. Il prévoyait la mise en place d'une coopération entre les États membres en matière de politique étrangère et de défense, de science, de culture et de protection des droits de l'homme.

Le plan Fouchet prévoyait la création de plusieurs institutions :

  • un Conseil des chefs d'État et de gouvernement. Il devait ĂŞtre l'organe de dĂ©cision, et Ă©tait composĂ© des chefs de gouvernements des États membres. Il devait se rĂ©unir trois fois par an et statuer Ă  l'unanimitĂ© ;
  • trois ComitĂ©s des ministres : un ComitĂ© des ministres des Affaires Ă©trangères, devant assurer l'intĂ©rim du Conseil des chefs d’État et de gouvernement, un ComitĂ© des ministres de la DĂ©fense et un ComitĂ© des ministres de l’Éducation nationale ;
  • une AssemblĂ©e parlementaire europĂ©enne consultative, institution commune Ă  la CommunautĂ© europĂ©enne. L'AssemblĂ©e des CommunautĂ©s devait reprĂ©senter l'Ă©lĂ©ment dĂ©mocratique, mais elle n'avait selon le plan qu'un rĂ´le consultatif ;
  • une Commission politique. Elle devait ĂŞtre composĂ©e de hauts fonctionnaires appartenant Ă  l’administration des Affaires Ă©trangères des États membres. La prĂ©sidence de cette AssemblĂ©e Ă©tait tournante et correspondait dans le temps Ă  celle du Conseil des chefs d’État et de gouvernement.

Échec des négociations

Le plan Fouchet est cependant rejeté, la rupture définitive entre la France et ses partenaires européens s’effectuant le autour de trois points :

  1. Référence à l'OTAN, rejetée par la France ;
  2. Réorganisation des institutions : la première version du plan Fouchet prévoit en effet que la révision du traité de l’Union doit avoir pour objectif une centralisation des institutions de l’ensemble des communautés européennes existantes au sein de l’Union. Or la deuxième version du plan Fouchet ne parle plus de centralisation au sein de l’Union mais de coopération entre les institutions des communautés européennes et de l’Union. Dans la troisième version du plan Fouchet, le général de Gaulle opère en outre deux autres modifications. D’une part il ajoute aux buts de l’Union (politique étrangère, politique de défense, politique culturelle et scientifique) la politique économique, ce qui touche donc aux domaines d’action des communautés européennes préexistantes. D’autre part il supprime dans l’article 17, consacré à la réorganisation des institutions de l’Union, la phrase suivante : « dans le respect des structures prévues aux traités de Paris et de Rome instituant les communautés européennes » ;
  3. Candidature de la Grande-Bretagne, problème résumé par Paul-Henri Spaak : « Si vous ne voulez pas l’intégration, alors il faut la Grande-Bretagne et si vous ne voulez pas de la Grande-Bretagne, alors il faut l’intégration. Il nous faut l’un ou l’autre. Nous ne pouvons pas nous trouver sans l’intégration, ni sans la Grande-Bretagne »[4].

Conséquences politiques en France

L'Ă©chec du plan Fouchet ainsi que les railleries du gĂ©nĂ©ral de Gaulle concernant « les apatrides Â» et « les adeptes du volapĂĽk intĂ©grĂ© Â» ont pour consĂ©quence la dĂ©mission, en , des cinq ministres du Mouvement rĂ©publicain populaire (MRP) qui avaient acceptĂ© de faire partie du gouvernement constituĂ© un mois plus tĂ´t par Georges Pompidou. Cette rupture entraĂ®nera le passage du MRP Ă  l'opposition et Ă  terme la candidature contre le GĂ©nĂ©ral Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 1965 de Jean Lecanuet[5].

Sources

Références

  1. « Plan Fouchet I » (version I), sur le site du CVCE.
  2. « Plan Fouchet II » (version II), sur le site du CVCE.
  3. Anne-Cécile Robert, « Un anniversaire morose pour le couple franco-allemand », sur Le Monde diplomatique,
  4. Jean Arthuis, président de la commission des budgets du Parlement européen, « Brexit : « L'Europe doit sortir de son silence » », Le Monde, (consulté le ).
  5. René Rémond, « De Gaulle et les forces politiques françaises », dans La politique étrangère du général de Gaulle, Genève, Graduate Institute Publications, , 208 p. (présentation en ligne).

Bibliographie

  • Blaes R., Le Plan Fouchet et le problème de l'Europe politique, Bruges, Éditions du Collège d'Europe, 1971.
  • L. de Boissieu, Une certaine idĂ©e de l'Europe.

Compléments

Articles connexes

Liens externes

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