Accueil🇫🇷Chercher

NĂ©grologie : pourquoi l'Afrique meurt

Négrologie : pourquoi l'Afrique meurt est un livre controversé, à destination du grand public, écrit en français par le journaliste américain Stephen Smith et paru en 2003 chez Calmann-Lévy[1]. Il a obtenu un grand succès public.

NĂ©grologie : pourquoi l'Afrique meurt
Auteur Stephen Smith
Pays Drapeau de la France France
Éditeur Calmann-Lévy
Lieu de parution Paris
Date de parution 2003
Nombre de pages 248
ISBN 2702133347

Stephen Smith, qui a longtemps été correspondant du journal Le Monde en Afrique, s'attache d'abord à dresser un bilan des maux dont souffre l'Afrique subsaharienne. Ce tableau est pessimiste : « La moitié du continent africain est dévastée par des guerres d'écorcheurs, l'autre vivote entre crise et corruption, tribalisme et anarchie.»

Il cherche à expliquer cet état de fait en « réhabilitant » l'Afrique comme actrice de sa propre histoire. Selon lui, en effet, la responsabilité historique des pays occidentaux dans le dénuement de l'Afrique serait exagérée et les caractéristiques sociologiques africaines seraient les premières responsables du sous-développement. Il pense que « l'Afrique meurt d'un suicide assisté » et qu'elle serait accompagnée dans sa chute par une forme d'« autisme identitaire » qui l'empêcherait de s'attaquer à ses maux. Il analyse aussi les relations de l'Afrique avec la mondialisation et la forme particulière de nationalisme que l'on trouve sur ce continent: il prend pour exemple l'instrumentalisation de l'île de Gorée, dont la maison des Esclaves est utilisée comme "mythe utile" et intouchable mais n'a, de fait, jamais été impliquée dans le commerce triangulaire[2].

Après avoir assez peu ménagé les peuples et cultures africains, Smith explique pourtant dans la conclusion de son ouvrage que « [son] propos le plus dur ne s'adresse pas aux Africains, qui se débattent dans l'adversité, mais à leurs amis occidentaux, qui perçoivent le continent noir comme un parc naturel et leurs habitants — immuables depuis la nuit des temps comme hantés de vieux démons. [...] Ils entretiennent [ainsi] un rêve fou qui tue.»

RĂ©ception de l'ouvrage

NĂ©grologie : pourquoi l'Afrique meurt est fortement critiquĂ© dans le monde acadĂ©mique. Mamoudou Gazibo estime que l’ouvrage « [ramène] au goĂ»t du jour les thĂ©ories de la barbarie, de la cruautĂ© et de la paresse supposĂ©es des Africains » et est « un condensĂ© parfait de la dĂ©rive de l’interprĂ©tation des enjeux politiques africains [...] »[3]. Jean Copans estime que l’ouvrage pèche entre autres par le fait d’assimiler l’Afrique Ă  « une sociĂ©tĂ© globale »[4]. De mĂŞme des historiens comme Jean-Pierre ChrĂ©tien et Pierre Boilley ont rejetĂ© le caractère pathologisant de l’ouvrage, son culturalisme, son assimilation de l’Afrique au primitif voire Ă  l’infĂ©rioritĂ©, ou sa rĂ©duction des Africains Ă  quelques traits psychologiques supposĂ©s, ainsi que son refus des complexitĂ©s de l’histoire, voire son « climat de cafĂ© du commerce »[5]. L’anthropologue Jean-Pierre Olivier de Sardan a lui aussi soulignĂ© le caractère « culturaliste » de cet essai, et sa tendance Ă  expliquer les problèmes du continent avant tout par des « mentalitĂ©s » supposĂ©es[6]. L'Ă©crivain sĂ©nĂ©galais Boubacar Boris Diop et les prĂ©sidents successifs de l'association Survie, Odile Tobner et François-Xavier Verschave ont aussi publiĂ© un ouvrage qui se prĂ©sente comme une rĂ©ponse aux « dĂ©sinformations  Â» de NĂ©grologie[7] - Vincent Bonnecase, «Boubacar Boris Diop, Odile Tobner, François-Xavier Verschave, NĂ©grophobie, Les Arènes, Paris, 2005» dans « Mouvements a lu », Mouvements, 2006/5-6 (no 47-48), p. 240-250. DOI : 10.3917/mouv.047.0240. URL : https://www.cairn.info/revue-mouvements-2006-5-page-240.htm .NĂ©anmoins le livre a reçu le Prix de l'Essai France-TĂ©lĂ©vision en 2004[8] et pour Yves Gounin, Stephen Smith, qui « dĂ©crit une rĂ©alitĂ© sombre sans s'en dĂ©lecter », choisit de mettre les Africains face Ă  leur responsabilitĂ©[9]. Pascal Bruckner, dans Le Monde, et Alfred Grosser dans La Croix, ont publiĂ© des comptes rendus très favorables. D'une manière gĂ©nĂ©rale, la presse a bien accueilli NĂ©grologie, nĂ©anmoins Le Monde diplomatique fut d'un avis contraire.

Stephen Smith s'est expliqué devant Pierre Péan, qui a reproduit son texte dans Noires fureurs, blancs menteurs[10]. Selon MM. Smith et Péan, les attaques venues de Survie à propos de son livre s'expliquent, notamment, par les reportages de Stephen Smith sur les massacres du Front patriotique rwandais.

RĂ©compense

Notes et références

  1. Version poche : (ISBN 2012791999), Hachette
  2. chapitre 4 : « Les portes de l’oubli »
  3. Mamoudou Gazibo, Introduction à la politique africaine, Presses de l’Université de Montréal, coll. « Paramètres », (ISBN 978-2-8218-9809-7, lire en ligne)
  4. Jean Copans, « À quoi servent les livres ? Échos africanisants », Revue Tiers Monde, vol. 45, no 180,‎ , p. 897–907 (DOI 10.3406/tiers.2004.5537, lire en ligne, consulté le )
  5. Chrétien, Jean-Pierre, et al., « Misères de l'afro-pessimisme », Afrique & histoire,‎ (lire en ligne)
  6. Jean-Pierre Olivier de Sardan, « Le culturalisme traditionaliste africaniste », Cahiers d’études africaines, vol. 50, nos 198-199-200,‎ , p. 419–453 (ISSN 0008-0055, DOI 10.4000/etudesafricaines.16181, lire en ligne, consulté le )
  7. Boubacar Boris Diop, Odile Tobner, François-Xavier Verschave, Négrophobie, Paris, Les Arènes, , 200 p. (ISBN 9782912485816)
  8. « Prix : France Télévisions - Essai », babelio.com.
  9. Yves Gounin, « Stephen Smith. Négrologie : Pourquoi l'Afrique meurt (compte-rendu) », Politique étrangère, année 2004, 69-1, p. 195-196.
  10. Éditions Fayard/Mille et une nuits, 2005
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.