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Milly Witkop

Milly Witkop (Rocker) ( – ) est une anarcho-syndicaliste, fĂ©ministe, Ă©crivaine et militante juive ukrainienne. Elle Ă©tait la conjointe de fait de l'anarchiste Rudolf Rocker.

Milly Witkop
Milly Witkop (premier rang, première en partant de la gauche) avec Rudolf Rocker (derrière elle) et d'autres anarchistes à Londres en 1912.
Biographie
Naissance

Zlatopol (en)
Décès
Nationalité
Domiciles
Activités
Militante pour les droits des femmes, écrivaine, syndicaliste
Fratrie
Conjoint
Enfant
Fermin Rocker (en)
Autres informations
Idéologie

Enfance et éducation

Witkop est nĂ©e sous le nom de Vitkopski dans le shtetl ukrainien de Zlatopol dans une famille de juifs russo-ukrainiens, l’aĂ®nĂ©e de quatre sĹ“urs. La plus jeune des quatre, Rose, est Ă©galement devenue anarchiste. En 1894, Witkop quitte l'Ukraine pour Londres. Dans les dĂ©cennies suivant l'assassinat du tsar Alexandre II en 1881, de nombreux Juifs quittent la Russie Ă  la suite de pogroms anti-Juifs dans tout l'Empire. La plupart partent au Royaume-Uni ou aux États-Unis[1].

Décembre 1906 édition de Germinal

Ă€ Londres, elle travaille dans un atelier de tailleur et Ă©conomise assez d'argent pour financer le passage vers l'Angleterre de ses parents et de ses sĹ“urs. Les conditions difficiles de son travail la conduise Ă  remettre en question sa foi. Son implication dans la grève dans une boulangerie la conduit Ă  s'impliquer avec le groupe qui gravite autour du journal anarchiste juif Arbayter Fraynd. Elle est influencĂ©e par l'Ĺ“uvre du thĂ©oricien anarchiste Pierre Kropotkine. En 1895, elle rencontre Rudolf Rocker pendant une action politique de son groupe. En , Rocker l'invite Ă  l'accompagner Ă  New York, oĂą il espère trouver un emploi. Les deux sont pourtant refoulĂ© Ă  leur arrivĂ©e car ils refusent de se marier lĂ©galement. Ils repartent vers le Royaume-Uni dans le mĂŞme bateau avec lequel ils sont arrivĂ©s. L'affaire reçoit, Ă  l'Ă©poque, une couverture mĂ©diatique aux États-Unis, attaquant l'amour de ce couple non mariĂ©[2] - [3].

Ă€ partir d', Rocker et Witkop co-Ă©ditent le Arbeyter Fraynd[3]. En , les deux commencent Ă©galement Ă  publier le journal Germinal, plus axĂ© sur les sujets culturels. En 1907, le fils du couple, Fermin, naĂ®t. Rocker et Witkop s'opposent Ă  la Première Guerre mondiale, Ă  la diffĂ©rence de beaucoup d'autres anarchistes comme Kropotkine qui soutient lui les AlliĂ©s. Pour soulager la pauvretĂ© et la misère causĂ©e par le chĂ´mage pendant la guerre, Witkop et son mari ouvrent une soupe populaire. En , Rocker est internĂ© au Royaume-Uni comme beaucoup d'autres Allemands et d'Autrichiens en tant que sujet d'un pays ennemi. Witkop continue son activisme anti-guerre jusqu'Ă  son arrestation en 1916 et le reste jusqu'Ă  l'automne 1918[3]. Ă€ sa libĂ©ration, elle quitte le Royaume-Uni pour rejoindre son mari et son fils aux Pays-Bas[1].

En Allemagne

Au dĂ©but, le couple accueille avec joie l'annonce des RĂ©volutions de fĂ©vrier et d'octobre en Russie, mais après le coup d'Ă©tat bolchĂ©vique, ils commencent Ă  critiquer le dirigisme Ă©tatique et le totalitarisme de ce qui allait devenir l'Union soviĂ©tique. En , ils dĂ©mĂ©nagent Ă  Berlin ; les Rocker sont invitĂ©s par Fritz Kater, le prĂ©sident de l'Association libre des syndicats allemands (FVdG), Ă  se joindre Ă  lui dans la construction de ce qui devient par la suite l'Union libre des travailleurs allemands (FAUD), un syndicat anarcho-syndicaliste[4]. Rocker et Witkop deviennent membres de la FAUD[1].

Après sa crĂ©ation au dĂ©but de l'annĂ©e 1919, une discussion sur le rĂ´le des filles et des femmes dans l'union commence. L'organisation Ă  prĂ©dominance masculine ignore d'abord ces questions de genre, mais les femmes finissent par organiser des rĂ©unions parallèles Ă  celles de la FAUD. Witkop est l'une des principales fondatrices de l'Union des Femmes Ă  Berlin en 1920. Le , les syndicats fĂ©minins tiennent un congrès national Ă  DĂĽsseldorf et l'Union des Syndicats des Femmes (SFB) est fondĂ© au niveau national[3]. Peu de temps après, Witkop rĂ©dige Was will der Syndikalistische Frauenbund? (Qu'est-ce que le syndicats fĂ©minins veulent ?) en tant que porte-parole du SFB. Ă€ partir de 1921, Der Frauenbund est publiĂ© en tant que supplĂ©ment au journal de la FAUD Der Syndikalist, et Witkop est l'une de ses principales rĂ©dactrices[1].

Witkop pense que les femmes prolĂ©tariennes sont exploitĂ©es, non seulement par le capitalisme comme les hommes, mais aussi par leurs collègues de sexe masculin. Elle fait valoir par consĂ©quent que les femmes doivent participer activement Ă  la lutte pour leurs droits, tout comme les travailleurs doivent se battre contre le capitalisme pour les leurs. Elle insiste Ă©galement sur la nĂ©cessitĂ© des femmes Ă  prendre part Ă  la lutte des classes. Les femmes au foyer peuvent alors utiliser le boycottage pour appuyer la lutte. Ă€ partir de lĂ , elle conclut Ă  la nĂ©cessitĂ© d'une autonomie dans l'organisation des femmes de la FAUD. Witkop constate Ă©galement que le travail domestique doit ĂŞtre considĂ©rĂ© comme tout aussi prĂ©cieux que le travail salariĂ©[5]. En 1921, dans un article de Der Frauenbund, Witkop fait valoir que la question la plus importante Ă  laquelle fait face le SFB est la « question sexuelle ». Elle appelle Ă  un accès Ă  la contraception, et prĂ©conise une grève de la procrĂ©ation. Un dĂ©bat sur la question au sein du mouvement syndicaliste allemand s'ensuit. Les rĂ©unions sur la question sont très suivies et un nouveau chapitre du SFB s'ouvre[6].

Aux États-Unis

Witkop est active dans les mouvements syndicalistes et fĂ©ministes, mais aussi dans le combat contre le racisme et l'antisĂ©mitisme. Elle est souvent frustrĂ©e par ce qu'elle considère comme un manque de volontĂ© de lutter contre l'antisĂ©mitisme dans le mouvement ouvrier. La montĂ©e du parti national-socialiste des travailleurs allemands en Allemagne Ă  la fin des annĂ©es 1920 la trouble grandement. Après l'incendie du Reichstag en , Witkop et Rocker fuient l'Allemagne pour les États-Unis en passant par la Suisse, la France et le Royaume-Uni. Aux États-Unis, le couple continue de donner des confĂ©rences et d'Ă©crire sur l'anarchisme. Au cours de la Guerre Civile espagnole de 1936 Ă  1939, ils commencent une campagne de sensibilisation pour les AmĂ©ricains sur les Ă©vĂ©nements en Espagne. Ă€ l'automne 1937, ils dĂ©mĂ©nagent Ă  Mohegan - une communautĂ© anarchiste[7] - près du Lac de Mohegan dans le ComtĂ© de Westchester. Après l'Ă©clatement de la Seconde Guerre mondiale, Witkop, comme son mari et d'autres anarchistes tels que Max Nettlau et Diego Abad de Santillán, soutiennent les AlliĂ©s parce qu'elle considère que le nazisme ne peut ĂŞtre vaincu par des moyens pacifiques[1].

Après la Seconde Guerre mondiale, Witkop dĂ©veloppe une sympathie pour le mouvement sioniste mais elle est sceptique face Ă  l'idĂ©e qu'un État-nation puisse rĂ©soudre la « question juive ». Elle favorise l'idĂ©e de la bi-nationalitĂ© dĂ©veloppĂ©e par Martin Buber et Ahad Ha'am. Les habitants de Mohegan, en particulier Witkop, sont actifs dans l'envoi de matĂ©riel de soutien aux anarchistes allemands. Ils envoient plusieurs centaines de paquets en Allemagne[1].

Witkop meurt le après avoir souffert plusieurs mois de difficultés respiratoires[7].

Références

  1. Wolf 2007.
  2. Fishman 1974, pg. 237–238.
  3. (en) « MILLY WITKOP: ANARCHIST, FEMINIST, AND UNION ACTIVIST », sur East End Women's Museum (consulté le )
  4. Vallance 1973, pg. 77–78.
  5. Rübner 1994, pg. 185–189.
  6. Nelles 2000, pg. 3.
  7. Amedeo BERTOLO, Juifs et anarchistes : Histoire d’une rencontre, Eclat (De l'), , 224 p. (ISBN 978-2-84162-322-8, lire en ligne)

Sources

  • William J. Fishman, Jewish Radicals : From Czarist Stetl to London Ghetto, New York, Pantheon Books,
  • Dieter Nelles « Anarchosyndicalism and the Sexual Reform Movement in the Weimar Republic » () (lire en ligne)
    —Socialism and Sexuality (lire en ligne)
  • Hartmut RĂĽbner, Freiheit und Brot : Die Freie Arbeiter-Union Deutschlands (FAUD) : Eine Studie zur Geschichte des Anarchosyndikalismus, Berlin, Libertad Verlag,
  • Margaret Vallance, « Rudolf Rocker – a biographical sketch », Journal of Contemporary History, vol. 8, no 3,‎ , p. 75–95
  • Siegbert Wolf, « Witkop, Milly », Datenbank des deutschsprachigen Anarchismus, (consultĂ© le )

Lectures complémentaires

  • (de) Vera Bianchi, « Feminismus in proletarischer Praxis: Der 'Syndikalistische Frauenbund' (1920 bis 1933) und die 'Mujeres Libres' (1936 bis 1939) », Arbeit – Bewegung – Geschichte, vol. 17, no 1,‎ , p. 27–44
  • (de) Hans-Manfred Bock, Syndikalismus und Linkskommunismus von 1918 bis 1923 : Ein Beitrag zur Sozial- und Ideengeschichte der frĂĽhen Weimarer Republik, Meisenheim am Glan, Verlag Anton Hain,
  • (de) Ginger S. Frost, Living in Sin : Cohabiting as husband and wife in nineteenth-century England, Manchester, Manchester University Press,
  • (de) Mina Graur, An Anarchist Rabbi : The Life and Teachings of Rudolf Rocker, New York, St. Martin's Press,
  • (de) Ulrich Klan, 'Es lebt noch eine Flamme' : Rheinische Anarcho-Syndikalisten/-innen in der Weimarer Republik und im Faschismus, Grafenau-Döffingen, Trotzdem Verlag,
  • (de) Cornelia Regin, « Hausfrau und Revolution. Die Frauenpolitik der Anarcho-Syndikalisten in der Weimarer Republik », Internationale wissenschaftliche Korrespondenz zur Geschichte der deutschen Arbeiterbewegung, vol. 25, no 3,‎ , p. 379–398
  • (de) Angela Vogel, Der deutsche Anarcho-Syndikalismus : Genese und Theorie einer vergessenen Bewegung, Berlin, Karin Kramer Verlag,

Liens externes

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