Maurice Dejean
Maurice-Ernest-Napoléon Dejean, né le à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine) et mort le dans le XVIIe arrondissement de Paris, est un diplomate et homme politique français.
Ambassadeur de France en Union soviétique | |
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Philippe Baudet (d) | |
Ambassadeur de France au Japon | |
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Daniel LĂ©vi (d) | |
Ambassadeur de France en Tchécoslovaquie | |
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Naissance | |
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DĂ©cĂšs |
(Ă 82 ans) 17e arrondissement de Paris |
Nom dans la langue maternelle |
Maurice-Ernest-Napoléon Dejean |
Nom de naissance |
Maurice Ernest Napoléon Dejean |
Nationalité | |
Activité |
Membre de | |
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Distinctions | |
Archives conservées par |
Archives diplomatiques (288PAAP)[1] |
Durant la Seconde Guerre mondiale, il est commissaire aux Affaires étrangÚres de la France Libre de 1941 à 1942. AprÚs la Libération, il occupe différents postes d'ambassadeur de 1945 jusqu'en 1964.
Biographie
Famille
Maurice Dejean est nĂ© le Ă Clichy dans une famille nombreuse. Le milieu modeste dont il est issu â son pĂšre exerce la profession de boucher â se distingue nettement de ceux de ses collĂšgues diplomates, souvent hĂ©ritiers de familles aristocratiques ou de hauts-fonctionnaires depuis plusieurs gĂ©nĂ©rations[2].
DĂ©buts dans la diplomatie
LicenciĂ© d'Ă©tudes supĂ©rieures des lettres, diplĂŽmĂ© d'Ă©tudes supĂ©rieures de philosophie, Maurice Dejean commence sa carriĂšre diplomatique comme chef du service de presse Ă l'ambassade de France en Allemagne de 1930 Ă 1939. Dans le mĂȘme temps, il travaille Ă©galement pour les services de renseignements français.
De retour Ă Paris aprĂšs la dĂ©claration de guerre de , il est promu chef adjoint de cabinet du ministre des Affaires Ă©trangĂšres dâĂdouard Daladier sous la direction de Robert Coulondre puis de Paul Reynaud sous la direction de Roland de Margerie â poste qu'il occupe jusqu'Ă l'armistice de .
Lors de la bataille de France, Maurice Dejean se place résolument dans le camp des partisans de la poursuite des combats et non de l'armistice tout comme le général de Gaulle, Paul Reynaud ou Roland de Margerie. Ce courant est alors minoritaire[3].
Membre de la France libre
AprĂšs la capitulation et un bref sĂ©jour au Maroc, il parvient Ă rejoindre le gĂ©nĂ©ral de Gaulle Ă Londres au dĂ©but de l'annĂ©e 1941. Celui-ci le charge de la direction des Affaires politiques (DAP). Il organise des opĂ©rations de propagande en direction de la mĂ©tropole et de l'Empire mais son bilan Ă la tĂȘte de la DAP est modeste tant la dualitĂ©, voire la rivalitĂ© avec le BCRA de Passy freine son action.
Ă la faveur d'un changement institutionnel, il est dĂ©signĂ© commissaire national aux Affaires Ă©trangĂšres dans le ComitĂ© national français de la France libre (CNF) du au . Son action est intense : il s'agit d'Ă©tablir la lĂ©gitimitĂ© du CNF auprĂšs des alliĂ©s en menant des nĂ©gociations pour faire reconnaĂźtre la France libre. Une brouille avec de Gaulle et la venue annoncĂ©e de RenĂ© Massigli expliquent sa dĂ©mission puis sa rĂ©trogradation au poste de reprĂ©sentant diplomatique auprĂšs des gouvernements alliĂ©s Ă©tablis Ă Londres. Maurice Dejean prend alors la tĂȘte de la « mission Dejean » (1943-), chargĂ©e de reprĂ©senter la France dans les confĂ©rences interalliĂ©es Ă Londres.
LâĂ©tude du parcours personnel de Maurice Dejean offre de nombreux points dâaccroche dans lâhistoire du mouvement français libre, Ă commencer par sa promotion rapide au poste de directeur politique puis de commissaire aux Affaires Ă©trangĂšres, alors quâil nâĂ©tait Ă Berlin que le chef de presse de lâambassade, rappelant Ă quel point les ralliements de personnalitĂ©s (notamment de diplomates) Ă la France libre sont rares avant .
Action diplomatique
Le combat pour accroĂźtre la lĂ©gitimitĂ© du mouvement est au cĆur du travail de Maurice Dejean tant Ă la tĂȘte de la Direction politique que dans sa conduite des Affaires Ă©trangĂšres. Il sâagit pour les Français libres de se faire reconnaĂźtre par les autres puissances alliĂ©es et d'engager une bataille diplomatique contre Vichy.
La tĂąche de Dejean est rendue difficile par les coups dâĂ©clat du gĂ©nĂ©ral de Gaulle. Deux conceptions de la diplomatie sâaffrontent alors : celle de la nĂ©gociation et celle du poing sur la table. Au terme de cette opposition, Dejean est contraint par de Gaulle de prĂ©senter sa dĂ©mission. Cette brouille quâon explique habituellement exclusivement par lâintransigeance du GĂ©nĂ©ral (ou lâobsession de modĂ©ration chez Dejean), recĂšle en fait de multiples Ă©lĂ©ments : lâintervention du gĂ©nĂ©ral Catroux, lâimbrication de trois crises graves avec les Anglo-Saxons (au Levant, Ă Madagascar et au sujet du dĂ©barquement en Afrique du Nord), lâarrivĂ©e attendue de diplomates plus rĂ©putĂ©s tel Massigli, la faible marge de manĆuvre dont disposent les commissaires, ou encore le poids des luttes intestines.
Quoi quâil en soit, lâapport de Dejean en tant que commissaire aux Affaires Ă©trangĂšres est souvent nĂ©gligĂ© dans lâhistoriographie. Il a pourtant mis sur pied un outil diplomatique fonctionnel et amĂ©liorĂ©, dans la mesure du possible, la position internationale de la France combattante notamment auprĂšs de lâURSS et de la TchĂ©coslovaquie, pays envers lesquels il montre dĂ©jĂ des affinitĂ©s particuliĂšres. AprĂšs une pĂ©riode dâamertume le conduisant Ă une tentation giraudiste vite surmontĂ©e, Dejean est nommĂ© dĂ©lĂ©guĂ© auprĂšs de six pays europĂ©ens Ă Londres oĂč sâĂ©laborent ses premiĂšres rĂ©flexions sur lâaprĂšs-guerre.
Au-delĂ de lâĂ©tude du difficile relĂšvement diplomatique de la France, lâĂ©tude de sa contribution Ă la France libre brasse dâautres aspects notables (parfois constitutifs) du mouvement. Tout d'abord la concurrence, Ă tous les niveaux, entre les Français libres (Dejean/ViĂ©not, Dejean/Passy, Dejean/Cassin, de Gaulle/Muselier, de Gaulle/Giraud) ; la nĂ©cessaire dĂ©mocratisation du mouvement aux yeux de Dejean rĂ©putĂ© Ă gauche ; le dĂ©bat sur les nouvelles Ă©lites issues de la RĂ©sistance ; ses remarques, dĂšs 1941, sur un peuple français rĂ©sistant au moins passivement et soutenant moralement la RĂ©sistance, version avant la lettre du rĂ©sistantialisme de la LibĂ©ration ; lâambiance particuliĂšre de Londres en guerre avec la cĂ©sure essentielle, pour les Français libres, de juin 1943 lorsque le gouvernement sâinstalle Ă Alger, Dejean Ă©tant alors Ă©loignĂ© du pouvoir ; prĂ©cisĂ©ment, la distinction entre la France libre de Londres et son activitĂ© artisanale et la France libre dâAlger, territoire français, qui tend Ă la normalisation de sa situation par la venue dâun grand nombre de personnalitĂ©s, Ă la « fonctionnarisation » ; enfin, l'histoire et le fonctionnement des services de la France libre, le dĂ©veloppement de ses moyens, lâĂ©volution de son organigramme et de ses structures institutionnelles analysĂ©es Ă lâaune des frĂ©quents changements de fonctions de Maurice Dejean[3].
Fonctions diplomatiques à la Libération
GrĂące Ă sa participation Ă la RĂ©sistance, Dejean entame une carriĂšre prestigieuse au service de la diplomatie française dâaprĂšs-guerre. Au moment oĂč les cadres diplomatiques se renouvellent profondĂ©ment, il est Ă©levĂ© au rang dâambassadeur Ă la LibĂ©ration.
Sa fonction de directeur politique du Quai dâOrsay en 1944 et son passage comme reprĂ©sentant français Ă lâAutoritĂ© internationale de la Ruhr de 1949 Ă 1950 illustrent bien le rĂȘve français dâun contrĂŽle sĂ©vĂšre de lâAllemagne. Mais ils traduisent surtout le retour, parfois dĂ©chirant, Ă un nĂ©cessaire pragmatisme en raison de la faible marge de manĆuvre de la diplomatie française sur une Allemagne devenue Ă la fois thĂ©Ăątre et enjeu de la guerre froide.
Ambassadeur en Tchécoslovaquie au début de la guerre froide
NommĂ© ambassadeur en TchĂ©coslovaquie, Maurice Dejean entend Ă©galement dans un premier temps jeter des ponts entre lâEst et lâOuest et Ă©chapper Ă lâantagonisme amĂ©ricano-soviĂ©tique naissant. Câest le sens du pacte franco-soviĂ©tique de dont il est lâun des artisans et de son projet de traitĂ© franco-tchĂ©coslovaque dont lâĂ©chec montre bien les difficultĂ©s dâimposer une « troisiĂšme voie » entre les deux blocs. Les positions de Dejean, proche des orientations de politique extĂ©rieure du gĂ©nĂ©ral de Gaulle, sa personnalitĂ©, sont durement critiquĂ©es par un groupe de diplomates qui le considĂšrent trop attirĂ© par lâUnion soviĂ©tique. Ces clivages, doublĂ©s de rivalitĂ©s de personnes, prolongent dâailleurs ceux dĂ©jĂ apparus Ă Londres.
La mission en TchĂ©coslovaquie de Maurice Dejean dans lâimmĂ©diat aprĂšs-guerre permet de dresser un Ă©tat des relations franco-tchĂ©coslovaques de 1944 Ă 1949. La perte dâinfluence de la France dans ce pays marquĂ© par lâabandon de Munich puis la dĂ©faite de 1940 doit ĂȘtre nuancĂ©e dans un premier temps du fait de lâimportance des liens dâamitiĂ© historiques entre les deux pays et, surtout, de leur volontĂ© commune de sâimposer comme des traits dâunion entre les deux blocs naissant. La nĂ©gociation finalement avortĂ©e du traitĂ© franco-tchĂ©coslovaque constitue un excellent baromĂštre de lâĂ©tat de la relation bilatĂ©rale mais aussi Ă quel point elle est rĂ©vĂ©latrice de la soviĂ©tisation de la diplomatie tchĂ©coslovaque. Le basculement du pays vers lâEst aprĂšs le coup de Prague marque dâailleurs un tournant brutal dans cette relation bilatĂ©rale.
Avec cet Ă©vĂ©nement, le diplomate entre brutalement dans la logique de guerre froide qui bouleverse ses schĂ©mas stratĂ©giques et balaie ses illusions. Alors que tout son parcours Ă©tait tournĂ© en direction du danger allemand, Dejean prend conscience du pĂ©ril communiste sur le continent. LâURSS de Staline devient une menace Ă ses yeux.
Mission au Japon et en Indochine
La division du monde en deux entitĂ©s rivales est encore plus frappante pour Maurice Dejean lorsquâil prend ses fonctions de reprĂ©sentant de la France en mai 1950 dans un Japon encore occupĂ©. Il vit en Asie la transition dĂ©jĂ entamĂ©e et observĂ©e en Europe entre lâaprĂšs-guerre et la guerre froide. La mission de Dejean au dĂ©but des annĂ©es 1950 dans le Japon dâabord occupĂ© puis ayant retrouvĂ© sa souverainetĂ© montre Ă quel point la relation franco-japonaise est guidĂ©e par des problĂ©matiques de sortie de guerre, notamment avec la question des rĂ©parations, par la prĂ©sence française en Indochine et, enfin par des enjeux culturels, en particulier la signature dâun accord culturel et la rĂ©solution de lâaffaire Matsukata.
Surtout, Ă Tokyo, sa position dâobservateur privilĂ©giĂ© du conflit corĂ©en contribue grandement Ă renouveler sa mĂ©fiance Ă lâĂ©gard du communisme international. Il devient, sur le sujet, une voix Ă©coutĂ©e Ă Paris.
Câest dâailleurs cette rĂ©putation de spĂ©cialiste des questions asiatiques et militaires qui explique sa nomination en Indochine Ă lâĂ©tĂ© 1953, le plongeant ainsi dans un conflit colonial aux implications internationales de plus en plus importantes. Il reste dans la pĂ©ninsule jusquâĂ la chute de Ăiá»n BiĂȘn Phủ. Ces deux conflits armĂ©es aux aspects diffĂ©rents (un conflit pĂ©riphĂ©rique de la guerre froide opposant une coalition internationale reprĂ©sentant le monde libre Ă des forces communistes ; un conflit de dĂ©colonisation dans lequel le chef nationaliste est aussi un chef communiste et qui sâinternationalise progressivement) provoquent une brutale prise de conscience chez lâambassadeurâ dâautant que la guerre dâIndochine affecte directement la puissance française dans le monde.
La menace communiste prend donc un aspect militaire angoissant pour Dejean qui formule tĂŽt une thĂ©orie des dominos en Asie â Ă laquelle il ne manque finalement que le nom. LâEurope nâest pas Ă lâabri : la crainte de voir sâamenuiser les forces europĂ©ennes dans un conflit mondial suscite les plus vives inquiĂ©tudes chez lâambassadeur. Cette pĂ©riode asiatique ancre donc dĂ©finitivement le diplomate dans la guerre froide.
Ambassadeur à Moscou, partisan de l'amitié franco-soviétique
On pourrait croire que cette rupture dĂ©chirante avec ses illusions dâaprĂšs-guerre conduirait le diplomate Ă adopter une attitude mĂ©fiante Ă lâĂ©gard de lâURSS oĂč il est nommĂ© ambassadeur en . Or, Maurice Dejean raisonne toujours avec des analyses hĂ©ritĂ©es de la guerre : aprĂšs la mort de Staline, il voit en lâURSS un rĂ©gime susceptible dâĂ©voluer, de sâassouplir Ă force de dialogue, notamment entre Paris et Moscou.
Ces options correspondent aux annĂ©es Khrouchtchev marquĂ©es par la dĂ©stalinisation et une certaine ouverture. Dejean dĂ©fend sans faillir une amitiĂ© franco-soviĂ©tique pourtant mise Ă mal par le contexte de guerre froide, les questions allemande et algĂ©rienne. Du reste, au cours de ses huit annĂ©es moscovites, lâoptimisme initial du diplomate se teinte progressivement de lassitude et de scepticisme Ă mesure que les crises internationales et bilatĂ©rales se succĂšdent. Mais lâambassadeur ne renoncera jamais Ă son ambition de dialogue avec Moscou : cette volontĂ© toujours renouvelĂ©e explique quâon puisse parler dâune « Ă©cole » ou dâune « ligne » Dejean au Quai dâOrsay, ligne qui se heurte Ă une attitude mĂ©fiante Ă lâĂ©gard de lâURSS, incarnĂ©e notamment par le diplomate Jean Laloy.
Sur le plan de lâĂ©tude des relations bilatĂ©rales, sa longue ambassade de huit ans Ă Moscou permet de complĂ©ter les travaux de Thomas Gomart sur la relation franco-soviĂ©tique de la fin des annĂ©es 1950 au milieu des annĂ©es 1960. Ces relations nâavaient dâailleurs jamais fait lâobjet dâun travail global pour la pĂ©riode 1956-1958, pourtant essentielle car elle comprend notamment la visite de Guy Mollet et Christian Pineau en , la crise de Suez ainsi que les questions algĂ©rienne et allemande, points cruciaux dans la relation bilatĂ©rale.
La mission moscovite de Dejean permet aussi dâanalyser comment la relative ouverture des annĂ©es Khrouchtchev, qui correspondent chronologiquement Ă la prĂ©sence de Dejean Ă Moscou, a pu peser dans les choix diplomatiques de la France et susciter des dĂ©bats internes trĂšs denses. Cette longue mission se situe entre deux dĂ©tentes : une premiĂšre suivant la mort de Staline et dont le coup dâarrĂȘt se situe Ă lâautomne 1956 ; une seconde, la dĂ©tente proprement dite, lorsque la crise de Cuba en 1962 fait prendre conscience aux deux Grands de leur capacitĂ© de destruction mutuelle. Elle est Ă©maillĂ©e de crises intenses : lâaffaire de Suez et la rĂ©pression de la rĂ©volte hongroise en 1956, le retour des tensions sur la question de Berlin de 1958 Ă 1961, la crise des missiles en 1962, la querelle sino-soviĂ©tique difficile Ă dĂ©chiffrer.
La longĂ©vitĂ© de sa mission lui permet de sâinvestir pleinement dans ce poste, qui constitue lâaboutissement dâune carriĂšre, qui sâachĂšve brutalement en 1964 dans les remous dâune affaire peu commune.
DisgrĂące
Il a Ă©tĂ© rappelĂ© Ă Paris, par le prĂ©sident de la RĂ©publique, Ă la suite d'un chantage aux mĆurs organisĂ© par le KGB. Les services secrets soviĂ©tiques avaient utilisĂ© le systĂšme des « hirondelles ». Ces femmes chargĂ©es de piĂ©ger les diplomates et agents occidentaux en poste en URSS selon une mĂ©thode Ă©prouvĂ©e depuis longtemps dans le monde de lâespionnage : il s'agissait de sĂ©duire la cible, puis un prĂ©tendu conjoint arrivait, Ă lâimproviste, et menaçait lâimprudent de provoquer un scandale. Ainsi furent pris au piĂšge l'ambassadeur de France Ă Moscou et son attachĂ© militaire Louis Guibaud : l'attachĂ© se suicida, l'ambassadeur s'attira une remarque du prĂ©sident de Gaulle qui l'avait rappelĂ© : « Alors, Dejean, on couche ? »[4].
Cette opération fut montée, entre 1956 et 1960, par Yuri Krotkov, transfuge du KGB passé à l'Ouest le . Selon Thierry Wolton, le piÚge monté par le KGB l'aurait été parce que « dans un sursaut d'honneur, Son Excellence l'ambassadeur de France ne voulait plus travailler pour le SR soviétique. On l'y a donc contraint. » Cette thÚse est trÚs discutée : le transfuge du KGB a expliqué au CongrÚs américain que Dejean avait bel et bien été pris au piÚge mais n'a pas été un collaborateur du KGB.
Alain Peyrefitte (C'était de Gaulle, p. 690) fournit des informations plus prudentes. Le , de Gaulle lui confie : « Encore une histoire lamentable. Ce pauvre Dejean [Peyrefitte écrit « X... »] a trouvé le moyen de se faire faire aux pattes. Les Soviets l'ont fait tomber dans les griffes d'une bonne femme. Un peu plus, et les collections de nos télégrammes passaient au Kremlin. »[4]
Selon un aide de camp de De Gaulle, dont Peyrefitte rapporte les propos, Dejean, rappelé à Paris, ayant demandé audience pour se justifier, « le Général l'a reçu quelques secondes seulement : « Alors, Dejean, on aime les femmes ? ». Et il l'a congédié sans lui serrer la main. » Cependant, de Gaulle n'a pas rompu les liens : Maurice Dejean continue à conserver des liens d'amitiés avec le président de la République.
Toutefois, cet Ă©pisode a beaucoup contribuĂ© Ă ternir son image de diplomate. Lâambassadeur part Ă la retraite avec une certaine amertume. Pendant la vingtaine dâannĂ©es qui suit, il continue pourtant de dĂ©fendre dans plusieurs cadres lâamitiĂ© franco-soviĂ©tique, suscitant encore les critiques de ses pairs. Ainsi il est membre de la prĂ©sidence de l'Association France-URSS de 1973 Ă sa mort[5].
Vie privée
Il est marié en premiÚres noces de 1935 à 1950 à Marie Jullemier (1914-2005) (qui épousera en 1953 le physicien René Audubert), puis en 1953 à Marie-Claire Giry (1918-1991).
DĂ©corations
Notes et références
- « https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/288paap_cle0f7d47__papiers_maurice_dejean.pdf » (consulté le )
- Sophie Davieau-Pousset, « Maurice Dejean, diplomate atypique », Relations internationales,â , p. 79 Ă 94 (lire en ligne)
- ThĂšse de Sophie Pousset-Davieau, 2013
- Daniel Jouanneau, Dictionnaire amoureux de la diplomatie, Plon, , 592 p. (ISBN 978-2-259-27871-3, lire en ligne), « AlcÎves », p. 8-9
- France-URSS magazine, 1973-1982, comptes-rendus des 13e, 14e, 15e congrĂšs.
Voir aussi
Bibliographie
- Thiébaud Liénart, Maurice Dejean diplomate de la France libre (mémoire de maßtrise en histoire), Paris, université Panthéon-Sorbonne, , 170 p.
- Sophie Pousset-Davieau, Maurice Dejean, un diplomate atypique (thĂšse soutenue sous la direction de Maurice Vaisse), Sciences Po Paris,