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Marie-Adrienne Chameroy

Marie-Adrienne Chameroy, née le à Paris où elle est morte le [1], est une danseuse à l’Opéra de Paris.

Marie-Adrienne Chameroy
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  23 ans)
Paris
Nationalité
Activités

Biographie

Élève de Gardel, Marie-Adrienne Chameroy dĂ©buta Ă  l’OpĂ©ra en fĂ©vrier 1796 dans le rĂ´le de Terpsichore dans le ballet PsychĂ©. Une des plus jolies danseuses de l’OpĂ©ra, son talent lui mĂ©rita de nombreux admirateurs. Elle avait, dit Alphonse Royer, « la mĂŞme vigueur et la mĂŞme adresse que Vestris, et joignait Ă  ces qualitĂ©s une grâce inimitable. Â» En 1797, dans le ballet AnacrĂ©on chez Polycrate, elle exĂ©cuta par l’action de ses pieds, les notes, le trait, les trilles articulĂ©s par la clarinette de l’orchestre.

Affaire des funérailles de Marie-Adrienne Chameroy

La bien venue. Le début de Mlle Chameroy en Paradis

Morte, à l’âge de 23 ans, des suites d’une couche, ses funérailles, qui eurent lieu le [2], six mois environ après le rétablissement du culte en France, tournèrent à l’affaire d’État. Le traditionnel engouement des Parisiens pour les gens et les affaires du théâtre avait attroupé une foule nombreuse, où l’on échangeait des regrets sur cette mort prématurée, des confidences et des commentaires sur l’accouchement malheureux qui avait déterminé cette mort. Le cortège débouchait devant l’église Saint-Roch, lorsque les portes apparurent closes et démunies de tentures blanches. Le bruit se répandit que le curé Marduel refusait de recevoir le corps, non en raison de la vie peu édifiante et de la fin médiocrement chrétienne de la défunte, mais de l’antique interdit jeté par l’Église gallicane sur les comédiens.

Le corps de Mlle Chameroy est reçu à St-Thomas (d'Aquin) en 1802 (ou à l'église des Petits-pères ?). Le clergé des autres paroisses lui avait refusé les honneurs de la sépulture religieuse. De Vinck 8690

Une manifestation s’ébaucha, trop bien réglée peut-être pour être tout à fait spontanée : la foule fit mine de vouloir défoncer les portes, mais Dazincourt, l’acteur du Français, se mit en frais d’éloquence et ramena le calme. Le convoi prit alors le chemin de l’église des Filles-Saint-Thomas dont le curé procéda aux prières d’usage avec son clergé.

Dans la soirĂ©e, une dĂ©putation d’acteurs de l’OpĂ©ra et du théâtre de la RĂ©publique, vint avec indignation se plaindre Ă  Portalis de l’affront fait Ă  leur profession. Le conseiller d’État Joseph-Marie Portalis estima qu’il y avait quelque chose Ă  faire pour prĂ©venir le retour de semblables contestations : « Comme sur pareil objet il faut une règle sĂ»re, surtout dans une ville comme Paris, oĂą il existe un si grand nombre de théâtres, je vais Ă©crire Ă  M. l’archevĂŞque pour m’entendre avec lui sur les principes d’après lesquels il doit diriger la conduite des curĂ©s de son diocèse. L’Église de France Ă©tait la seule qui considĂ©rât comme excommuniĂ©es les personnes consacrĂ©es au théâtre. Cette manière de voir [...] est aujourd’hui inconciliable avec les idĂ©es qui se sont Ă©tablies sur l’état civil des acteurs, depuis les règlements de l’AssemblĂ©e constituante. D’ailleurs, dans les principes d’une saine thĂ©ologie, les curĂ©s doivent prĂ©sumer que le dĂ©funt dont on prĂ©sente le corps Ă  l’église est mort dans des dispositions qui le rendent digne de l’application des secours spirituels. De plus, après la mort les hommes n’ont plus rien Ă  juger ; ils ne peuvent savoir ce qui s’est passĂ© dans les derniers moments dans l’âme du dĂ©funt ; ils ne doivent point affliger les vivants par des mesures indiscrètes, ni se permettre de s’expliquer sur des choses dont le jugement n’appartient qu’à Dieu… Â»

Quand le récit des scènes de Saint-Roch arriva à Saint-Cloud, l’affaire parut importune et fâcheuse à Bonaparte. Il se trouva même des nouvellistes pour attribuer son mécontentement au fait que la Chameroy avait été en dernier lieu maîtresse d’Eugène de Beauharnais, mais il énonçait ses vrais motifs d’humeur en écrivant à Portalis que « le curé de Saint-Roch s’est très mal conduit, religieusement et politiquement. » L’incident Chameroy avait à ses yeux le grave inconvénient de fournir un argument à ceux qui accusaient le Concordat d’avoir encouragé l’intolérance sacerdotale.

On discutait passionnĂ©ment jusque dans les rangs du clergĂ©, oĂą cette affaire ressuscitait les vieilles divisions entre constitutionnels et insermentĂ©s. ExaspĂ©rĂ© d’une agitation qui allait directement Ă  l’encontre de sa politique d’apaisement, le Premier Consul jugea Ă  propos de donner une leçon au clergĂ© et une satisfaction aux philosophes ; le Moniteur du 30 vendĂ©miaire publia une note anonyme qui exposait succinctement les faits, en passant sous silence les dĂ©marches officieuses des comĂ©diens, et qui rĂ©sumait en quelques lignes cinglantes les soi-disant principes thĂ©ologiques dĂ©veloppĂ©s dans la lettre confidentielle de Portalis : « [...] L’archevĂŞque de Paris a ordonnĂ© trois mois de retraite au curĂ© de Saint-Roch, afin qu’il puisse se souvenir que JĂ©sus-Christ commande de prier mĂŞme pour ses ennemis, et que, rappelĂ© Ă  ses devoirs par la mĂ©ditation, il apprenne que toutes ces pratiques superstitieuses, conservĂ©es par quelques rituels, et qui, nĂ©es dans les temps d’ignorance ou crĂ©Ă©es par des cerveaux Ă©chauffĂ©s, dĂ©gradaient la religion par leurs niaiseries, ont Ă©tĂ© proscrites par le Concordat et par la loi du 18 germinal. Â»

L’émotion, l’agitation mĂŞme n’étaient pas moindres dans le clergĂ©. L’affaire ne rehaussait pas le prestige de l’archevĂŞque, dont l’intervention disciplinaire avait Ă©tĂ© Ă©videmment provoquĂ©e, commandĂ©e par le Premier Consul. On alla jusqu’à prĂ©tendre que le curĂ© de Saint-Roch s’était conformĂ© aux instructions Ă©piscopales du nonagĂ©naire et modĂ©rĂ© archevĂŞque Jean Baptiste de Belloy en refusant de recevoir le corps, et qu’à l’apparition de la note du Moniteur, trouvant le prĂ©lat soi-disant balbutiant et dĂ©semparĂ©, il lui aurait dit : « Monseigneur, je vois bien qu’il faut une victime ; je me soumettrai volontiers Ă  en servir. Â»

La situation, qui parut avoir fait craindre un moment, de voir les flambeaux du « fanatisme » le plus noir rallumĂ©s, finit pourtant par s’apaiser, et le rĂ©sultat pratique de l’affaire des funĂ©railles de la Chameroy fut que les vieilles censures ecclĂ©siastiques contre les comĂ©diens tombèrent dĂ©finitivement en dĂ©suĂ©tude. Dans l’hiver qui suivit, on cĂ©lĂ©bra sans difficultĂ© aucune, le , le service funèbre de l’acteur MolĂ© Ă  Saint-Sulpice et, le , celui de la Raucourt Ă  Saint-Thomas-d’Aquin. Un an plus tard, Marduel lui-mĂŞme, au risque de s’attirer de nouveaux brocards, autorisa des actrices Ă  chanter dans son Ă©glise. C’est sans doute aussi le souvenir de l’enterrement de la Chameroy qui fit insĂ©rer dans le dĂ©cret du 23 prairial an XII, sur les funĂ©railles, cette disposition comminatoire, d’une application pourtant singulièrement Ă©pineuse : « Lorsque le ministre d’un culte, sous quelque prĂ©texte que ce soit, se permettra de refuser son ministère pour l’inhumation d’un corps, l’autoritĂ© civile, soit d’office soit sur la rĂ©quisition de la famille, commettra un autre ministre du mĂŞme culte pour remplir ces fonctions. Â» (Art. 19.)

Ce triste épisode a donné lieu à un opuscule de huit pages d’Andrieux (Paris, Pierre, 1802, in-8°), intitulé Querelle de saint Roch et de saint Thomas sur l’ouverture du manoir céleste à Mlle Chameroy. Marie-Joseph Chénier rima une nouvelle sur saint Roch et saint Thomas et la police y mit le holà aux agissements de l’impresario d’un petit théâtre de la rue Saint-Jean-de-Beauvais qui se permettait d’imprimer à la fin de son affiche : Incessamment le Tartuffe, ou le Curé de Saint-Roch.

Notes

  1. Répertoire général de l’Académie de Musique donne le .
  2. Répertoire général de l’Académie de Musique donne le 16 octobre 1802.

Sources

  • Ezvar Du Fayl, AcadĂ©mie nationale de musique 1671-1877. RĂ©pertoire gĂ©nĂ©ral, Paris, Tresse, 1878, p. 161.
  • LĂ©on de Lanzac de Laborie, Paris sous NapolĂ©on, Paris, Plon-Nourrit, 1907, p. 108-15.
  • Ferdinand Hoefer, Nouvelle Biographie gĂ©nĂ©rale, t. 9, Paris, Firmin-Didot, 1854, p. 606.

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